L'honorable Jim Carr, ministre des Ressources naturelles : Discours liminaire pour le sommet de Bloomberg sur l'énergie de l'avenir – Amérique du Nord

Discours

Hôtel Grand Hyatt New York, salle de bal Empire State, New York, New York
4 avril 2016

Merci, Amy (Amy Grace, chef de la recherche nord-américaine, à Bloomberg New Energy Finance) pour votre chaleureuse présentation. C’était beaucoup plus frisquet quand je me suis levé hier matin à New York et que, ma femme et moi, nous sommes sortis nous promener pour profiter du ciel ensoleillé – un ciel complètement dégagé, et un méchant vent du nord qui me donnait l’impression d’être chez moi.

Je me sens chez moi pour plein de raisons. La ville de New York – pour bon nombre d’entre nous qui avons le plaisir de la visiter de temps en temps – est vraiment le centre du monde culturel. Au cours des derniers jours, de voir que les jeunes de 25 ans font la file et comptent dépenser 25 $ ou 30 $ pour voir Degas ou Jackson Pollock, ou entendre un concert de jazz – ça m’a donné l’impression que cette génération était entre bonnes mains.

Quand je viens à New York, je suis aussi attentif aux grandes relations, sur le plan historique, qu’ont entretenues les présidents américains avec les premiers ministres canadiens. Même au cours de ma propre existence, je me souviens de la relation du président Clinton avec Jean Chrétien, sur le parcours de golf et en dehors. C’est incroyable, quand même, comment des amitiés parfois tissées au golf peuvent mener à d’importantes ententes commerciales, à des relations d’affaires, à des politiques nord-américaines et continentales qui sont à l’avantage du reste du monde.

Puis, je pense au premier ministre Brian Mulroney et à la chanson Irish Eyes entonnée avec le président Reagan au sommet des Irlandais à Québec : deux dirigeants irlandais qui chantent une chanson irlandaise, un moment magique suivi quelques semaines plus tard par la ratification d’un accord important sur les pluies acides. Ce que je souhaite simplement vous faire remarquer, c’est que les relations entre dirigeants ont de l’importance.

La relation qui se développe entre le premier ministre Trudeau et le président Obama est réconfortante pour nous au Canada, et je suis sûr que bon nombre d’entre vous, ici aux États-Unis, croient qu’il s’agit de la relation qui compte le plus pour nos deux pays.

Par l’importance de notre commerce, la longueur de notre frontière, ce que nous partageons sur le plan historique et géographique et nos multiples façons de travailler ensemble, nous servons d’exemple pour le reste du monde quant à la manière dont deux nations-États peuvent changer les choses lorsqu’elles collaborent. Je suis enchanté de participer aujourd’hui à l’un des plus importants sommets annuels sur l’énergie. Je souhaite remercier Bloomberg de m’avoir invité à animer la discussion de cet après-midi sur l’expérience nord-américaine.

Ce sommet est également pour moi un moyen approprié de marquer les cinq premiers mois de notre gouvernement et de réfléchir à ce que nous avons accompli en si peu de temps : l’optimisme retrouvé, l’espoir redonné aux Canadiens qui croient que nous pouvons remodeler la destinée du continent en travaillant ensemble à la création d’une économie fondée sur une croissance écologique et à la prospérité et aux emplois qu’elle apporte.

Notre gouvernement est convaincu que l’avenir nous appartient. Je ne dis pas ça pour passer sur les problèmes auxquels nous sommes confrontés en Amérique du Nord. Ces problèmes sont décortiqués à la une des quotidiens – prix volatil du pétrole et du gaz naturel, décroissance des investissements, pertes d’emplois qui s’accumulent. En Alberta seulement, plus de 60 000 emplois ont été perdus l’an passé.

Cette dure réalité a eu un effet néfaste non seulement sur les principaux producteurs d’énergie, mais aussi sur les industries qui les soutiennent, les économies locales qui se développent autour d’eux et sur les recettes qu’en tire le gouvernement. En retour, des femmes et des hommes vaillants et leur famille subissent le plus gros des conséquences. Leur avenir est incertain.

Mais ils ont raison d’espérer.

Une transformation s’opère à l’échelle mondiale et ici même en Amérique du Nord. Vous en avez entendu parler ce matin pendant la discussion sur les réformes énergétiques du Mexique. Ces réformes ont une importance incontestable. Elles jouent un rôle fondamental dans nos efforts communs pour accélérer la transition de l’Amérique du Nord vers un avenir axé sur l’énergie propre et à faibles émissions de carbone, sans oublier l’importance d’acheminer nos produits de sables bitumineux jusqu’aux marchés internationaux de façon durable.

À mon avis, ces efforts ont commencé en novembre dernier quand j’ai rencontré pour la première fois le secrétaire à l’Énergie des États-Unis, Ernest Moniz, et le secrétaire à l’Énergie du Mexique, Pedro Joaquín Coldwell, lors de pourparlers sur l’énergie à Paris. Nous nous sommes rencontrés de nombreuses fois depuis, dont une fois où nous avons eu une véritable révélation lorsque je les ai invités tous les deux dans ma ville natale de Winnipeg, au Manitoba, dans le froid glacial de février.

En passant, les scientifiques que vous êtes n’ont pas besoin de se faire rappeler que les échelles Fahrenheit et Celsius se croisent à 40 sous zéro. Nous n’en étions pas loin. Je me suis dit que c’était la meilleure façon d’illustrer les besoins en matière de sécurité énergétique ou les dangers d’être laissés à nous-mêmes dans le froid par des forces mondiales qui échappent à notre contrôle. Ma tactique a certainement marché, parce que c’est là, à Winnipeg, que nous avons signé un protocole d’entente nord-américain sur les changements climatiques et la collaboration énergétique.

Il s’agit d’une entente ambitieuse qui attire l’attention de nos trois pays sur les problèmes actuels les plus urgents : intégrer une énergie renouvelable propre au réseau électrique; accélérer l’innovation dans les technologies énergétiques propres; encourager les économies d’énergie grâce à l’efficacité énergétique améliorée; renforcer la compétitivité du captage, de l’utilisation et du stockage du CO2; augmenter notre résilience aux changements climatiques; et nous attaquer au méthane et aux autres émissions des hydrocarbures.

Nous avons rassemblé pour la première fois toutes nos données énergétiques nord-américaines et nos cartes sur une seule plateforme. Il s’agit d’une avancée capitale, parce que cette façon de faire nous permet de voir l’intégration continentale en matière d’énergie sous un nouveau jour. Grâce à ce protocole d’entente et aux groupes de travail qui en découlent, nous avons une vision audacieuse pour notre continent – une vision qui place l’Amérique du Nord parmi les régions les plus dynamiques et les plus influentes au monde; une vision qui renforce notre sécurité énergétique collective; vision qui nous engage à collaborer sur la gérance environnementale.

Si la meilleure façon de prédire l’avenir est de le créer, nous sommes sur la bonne voie. En fait, tout juste deux semaines après avoir signé le protocole d’entente de Winnipeg, MM. Moniz et Joaquín Coldwell et moi-même nous sommes rencontrés de nouveau à Houston pour nous mettre au fait de nos progrès et discuter des prochaines étapes. Deux autres semaines plus tard, notre vision commune était à l’honneur à la Maison-Blanche lorsque le premier ministre Trudeau et le président Obama se tenaient côte à côte dans la roseraie pour annoncer leur déclaration conjointe sur le climat, l’énergie et le leadership dans l’Arctique.

Cette entente engage le Canada et les États-Unis à une coopération sans précédent sur de nombreux dossiers énergétiques également liés à notre protocole d’entente de Winnipeg : couper les émissions de méthane de presque la moitié, intégrer davantage nos réseaux électriques et accélérer l’innovation dans le domaine des énergies propres. Elle crée également des occasions d’entente trilatérale avec le Mexique.

MM. Moniz et Joaquín Coldwell et moi-même allons nous rencontrer à San Francisco en juin pour maintenir l’élan. Chacun de nous sait que le temps est révolu où nous parlions d’exploitation de ressources et d’énergie sans parler de durabilité de l’environnement. Mais qu’est-ce que cela signifie au juste? Comment pouvons-nous relever le défi de garantir que le secteur énergétique demeure une source d’emplois et de débouchés dans un monde qui tient de plus en plus aux pratiques durables?

Le premier ministre Trudeau a donné la réponse du Canada à la conférence GLOBE 2016 sur l’innovation tenue à Vancouver le mois dernier. Laissez-moi le citer :
[Traduction] « Il est faux de penser qu’il faille choisir entre les pipelines et les éoliennes. Nous avons besoin des deux. Nous devons investir de façon intelligente et stratégique dans une croissance écologique et dans de nouvelles infrastructures. Mais nous devons également continuer à créer de la richesse grâce à nos ressources naturelles abondantes pour financer cette décarbonisation de l’économie. »

C’est ainsi que nous y arriverons. C’est ainsi que nous nous assurerons qu’une économie forte et un environnement propre vont de pair. Cette façon de penser se reflète dans notre premier budget, qui a été déposé au Parlement il y a à peine deux semaines. Le budget donne de la substance aux engagements canadiens pris à Winnipeg, à Washington et lors des pourparlers sur les changements climatiques à la 21e Conférence des Parties (COP21) tenue à Paris en novembre dernier.

Notre premier budget renforce notre engagement à faire partie des 20 pays qui se sont joints à Mission Innovation, nouveau partenariat ambitieux visant à doubler l’investissement gouvernemental dans la recherche-développement sur l’énergie propre au cours des cinq prochaines années. Nous reconnaissons l’importance d’investir dans les industries des écotechnologies pour les aider à devenir plus innovatrices, plus concurrentielles et plus florissantes.

Notre budget prévoit l’investissement de milliards de dollars : un milliard dans les technologies d’énergie propre; deux milliards dans un fonds pour travailler avec les provinces à la décarbonisation de l’économie; plus de 100 millions dans l’efficacité énergétique; des milliards pour les transports en commun et d’autres infrastructures écologiques, dont des bornes de recharge pour les véhicules électriques et des stations de ravitaillement pour les véhicules à carburant de remplacement.

Ce sont des engagements fermes. Nous invitons les innovateurs et entrepreneurs de ce monde – dont bon nombre se trouvent dans cette salle – à prendre les devants et à être nos partenaires. Et pourtant, comme notre ministre des Finances l’a expliqué, ce n’est que le début de notre marche vers une économie fondée sur une croissance propre, sobre en carbone. Les Canadiens comprennent que nous sommes à la croisée des chemins de notre dépendance aux combustibles fossiles du passé et des énergies renouvelables de l’avenir.

Le défi ne nous effraie pas. Nous le relevons. Nous pouvons le voir dans les sables bitumineux, où les 13 principaux producteurs du Canada se sont réunis pour former la Canada’s Oil Sands Innovation Alliance, qui a donné lieu à plus de 800 innovations et technologies distinctes de réduction des émissions à effet de serre.

Vous pouvez le constater à l’échelle du pays, lorsque des Canadiens font preuve d’ingéniosité pour produire les solutions de l’avenir : en retirant le dioxyde de carbone de l’air pour en faire du carburant pouvant remplacer l’essence; en recyclant les déchets municipaux en combustibles propres et en produits chimiques renouvelables; en construisant des collectivités où chaque maison est chauffée par l’énergie solaire, qui stockée sous terre et utilisée au besoin.

Les Canadiens sont à la hauteur du défi de notre génération. J’ai mentionné dès le début que la meilleure façon de prédire l’avenir était de le créer. Même si le marché décidera ultimement de la rapidité à laquelle l’économie mondiale prendra un tournant écologique, les gouvernements peuvent prendre les devants. Nous pouvons donner les coups de pouce nécessaires en établissant le prix du carbone, en mettant fin aux subventions des combustibles fossiles à moyen terme et en investissant dans les technologies d’énergie propre et en les soutenant.

Mission Innovation est un exemple parfait. Il ne s’agit pas simplement d’une coopération intergouvernementale inédite destinée à promouvoir l’innovation en énergie propre et la recherche-développement. Il s’agit aussi d’exploiter les forces, l’expertise et le génie du secteur privé. Car, nous ne pouvons réussir seuls. Des entrepreneurs célèbres – des personnalités comme Bill Gates, Richard Branson et Mark Zuckerberg – ont donc proposé l’initiative Breakthrough Energy Coalition, qui aidera à mobiliser le secteur privé pour commercialiser les solutions énergétiques de l’avenir.

Le projet est déjà en branle. Des responsables d’importantes entreprises pétrolières et gazières investissent largement dans des énergies renouvelables comme l’énergie solaire, éolienne et géothermique et dans des écotechnologies parce qu’ils constatent que la lutte contre le réchauffement climatique leur ouvre de véritables débouchés. Ce peut être une période exaltante si nous savons en tirer parti, si nous profitons du creux dans le cycle des produits pour trouver le point idéal entre l’exploitation des ressources et la gérance environnementale.

Nous venons tout juste de le faire au Canada avec l’approbation d’un projet de gaz naturel liquéfié près de Squamish, en Colombie-Britannique. Nous avons prouvé à quel point les données probantes, l’attention portée aux répercussions environnementales, la consultation des peuples autochtones et un engagement à mettre les ressources sur le marché de façon durable peuvent mener à la victoire. C’est un bel exemple de travail bien fait.

Malgré la situation économique mondiale incertaine, le Canada continue d’offrir un climat stable pour l’investissement énergétique et le développement durable. Le temps est au changement, cela va de soi. Mais c’est aussi l’occasion pour nous tous de collaborer plus efficacement.

C’est ce que nous faisons au Canada et en Amérique du Nord. Par nos efforts, nous voulons être un exemple non seulement pour nous-mêmes, mais pour le reste du monde. C’est notre choix et notre chance de créer l’avenir que nous souhaitons.

Merci.


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