Indétectable = Intransmissible (I=I) et le VIH : Balado Canadiens en santé - Épisode 5
Transcription
Anita Michalkiewicz: Bonjour et bienvenue à Canadiens en santé, un endroit où nous vous offrons des conversations nuancées avec des experts de la santé. Notre but est de vous offrir des informations et des ressources pertinentes pour vous et vos proches. Mon nom est Anita Michalkiewicz et je serai votre animatrice.
Aujourd'hui, nous parlons de l'avancée scientifique dans la lutte contre le sida qui est « I égal I »; indétectable égal intransmissible. Nous rencontrons Ken Monteith, le directeur général de la Coalition des organismes communautaires québécois de la lutte contre le sida et Haoua Inoua, gestionnaire de programmes d'éducation et de prévention au sein du comité du sida d'Ottawa.
Mais avant d'aborder le sujet, voici un court rappel.
Le balado Canadiens en santé vous est présenté par Santé Canada et l'Agence de la santé publique du Canada. Notre objectif est de partager avec vous des informations pertinentes sur la santé. Cela dit, nos discussions ne vont pas toujours refléter les positions ou les politiques officielles du gouvernement du Canada. Il ne s'agit pas ici d'un communiqué de presse, mais bien d'une conversation.
Parlons maintenant de « I égal I », indétectable égal intransmissible.
Bonjour, Ken et Haoua. Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui pour parler d'un sujet important. Mais avant qu'on rentre dans le cœur du sujet, j'aimerais ça vous donner l'occasion de vous présenter et de vous présenter à nos auditeurs, de parler un peu de vous, de votre travail.
Haoua Inoua: Oui, mon nom c’est comme vous vous dites. Merci de m'avoir invité et c’est un honneur d'être présente ici. Et je m'appelle Inoua Haoua et je travaille au comité du sida d’Ottawa depuis 2009. J’ai changé, mais comme poste, actuellement je suis le manager de l’éducation, un programme d’éducation et de prévention depuis 2018. Et en grosso modo, c’est ça.
Anita: Merci. Et Ken ?
Ken Monteith: Ken Monteith, je suis directeur général de la COCQ-SIDA, la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida depuis 2008, et je suis une personne vivant avec le VIH, diagnostiqué tardivement en 1997.
Anita: Merci beaucoup d'être avec nous, merci à vous deux. On parle du sujet du terme intransmissible, indétectable égale transmissible, qui est un terme qui peut être assez connu dans certaines communautés vivant avec le VIH, mais qui peut être toujours un peu méconnu pour la population en général. Donc, avant de nous lancer dans le sujet, est-ce qu'on pourrait parler qu’est-ce que ça veut dire exactement le terme « I égal I », donc, indétectable égale intransmissible ?
Haoua: : Oui, indétectable égale intransmissible, ça veut dire que lorsque ton charge virale, il est en dessous de 40 copies. Pour certains… pour certaines, c’est peut-être 200 copies, mais là, actuellement au Canada, on peut aller jusqu’à 20 copies. Donc, ça veut dire que à ce stade, tu ne transmets pas sexuellement. Alors, ça c’est bien, le risque de transmission est complètement zéro. Donc, je vais dire ça. Et le Canada a endossé que « I égal à I », c’est une science qui marche. Donc, une personne vivant avec le VIH qui a un charge virale indétectable ne transmet pas sexuellement.
Ken: Si je peux compléter, la mesure… et donc le suivi régulier de personnes vivant avec le VIH, il y a toujours une mesure de charge virale, et la sensibilité de ces tests a changé à travers les années. Mais pour le constat que indétectable égal intransmissible, les études sur lesquelles c’est basé étaient avec des tests sensibles à 200 copies. Donc, même si maintenant on a suivi ici au Canada, on a un test de sensibilité à 20 copies, si on a 22 copies, c'est pas indétectable pour le test de suivi, mais c'est indétectable pour les fins de transmission, et donc, la non-transmission. C'est important à souligner.
Anita: Quand on dit copies, voulez-vous, s’il vous plait préciser qu'est-ce qu'on veut dire ?
Ken: Oui. Donc, on mesure le nombre de copies du virus dans un millilitre de sang.
Anita: Donc pour atteindre-… pour atteindre cette charge virale, si on peut dire, qui est indétectable, donc intransmissible, les gens doivent suivre un certain traitement médical contre le VIH. Donc, pouvez-vous nous parler un peu de comment ces thérapies agissent sur l'organisme et comment qu’ils font pour vraiment là diminuer cette charge virale à ce point ?
Ken: Nous avons plusieurs molécules qui sont utilisées en combinaison, qui attaquent différents stades de reproduction du virus du VIH dans le corps. Et donc elles sont toujours utilisées en combinaison parce que ça aide à contrôler en effet la charge virale. C’est des choses qu'on a appris à travers les années. Et avec une… beaucoup plus de choix maintenant sur les traitements, il est possible pour la personne d’avoir un traitement qui peut... que la personne peut tolérer mieux et qui peut s'arranger, s'arrimer à son style de vie. Donc, il n'y a pas d'excuses de ne pas adapter le traitement à la vie de la personne au lieu de l'inverse.
Anita: Donc, le traitement peut varier entre personnes, dépendamment de l'individu.
Ken: Oui.
Anita: C'est pas juste un traitement pour toutes les personnes, le traitement peut varier.
Ken: C'est ça.
Anita: Et quelles sont ces circonstances qui peuvent faire varier le traitement dans différents cas ?
Haoua: Par rapport à si quelqu’un devient résistant aux traitements, et a des effets secondaires intolérables, et si ça marche pas, donc il y a la possibilité de faire un changement. Donc, comme Ken a dit, il n’a… vraiment on a un tas de choix, d’options pour que ça marche. Et lorsque tu es sous traitement pendant six mois, si tout va bien, tu deviens indétectable et il n’y aura plus de transmission par rapport à ça. Évidemment, tu dois continuer à prendre tes traitements pour rester indétectable.
Anita: Mais il y a d'autres facteurs aussi qui aident à avoir... pour une personne à avoir un succès dans son traitement pour le VIH. Est-ce que vous pouvez nous parler de ces facteurs-là qui peuvent aider dans le succès du traitement ?
Ken: Oui. La personne doit vraiment être adhérante aux traitements. Donc, une prise des traitements au moment où c’est prévu, donc avec un très haut taux d'adhérence au traitement. Mais autour de la personne, il y a toute son entourage-là qui pourrait faciliter en effet la prise de traitement en respectant la vie privée de la personne mais en accommodant la prise de traitements. Certains traitements anciens peut-être exigent la prise avec les aliments. Donc, on peut prévoir que si la personne a à prendre quelque chose avec aliments, ou sans aliments, que les gens autour, elles doivent s'adapter un peu. Mais tout ça, c'est soutenir la personne dans sa prise de médicaments.
Haoua: Mais c’est sûr que Ken a mentionné, aussi, il faut y avoir un logement stable, une place stable pour que tu puisses prendre tes médicaments. Et aussi, comme il a dit, lorsque on prend un médicament avec aliments, c’est que c’est un repas. Donc, dans le passé, on a pensé… moi, je prenais une banane. Bon, par contre avec… tout le monde dit après non-non, mais ce n’est pas une banane-là, il te faut un repas. Ok, une assiette avec... d’accord. Et aussi, le sentimental est très important. Il faut que la personne soit vraiment prête pour prendre les traitements, sinon ça marchera pas.
Anita: Parce qu'on le sait maintenant, la science le prouve, c’est vraiment quand on prend le traitement d'une façon régulière, d'une façon adéquate, qu'on peut atteindre la charge virale qui est indétectable, et donc intransmissible.
Ken: Et j'ajouterais que c'est important de dire que on peut maintenir aussi la charge virale indétectable parce que c'est un travail en continu. C'est pas comme on arrive à indétectable et on arrête, c'est pas vrai. Donc, il faut souligner qu'il faut continuer et il faut poursuivre les efforts.
Anita: Donc quel est l'effet sur une personne qui vit avec le VIH de la stigmatisation aujourd'hui ?
Haoua: Malheureusement, la science a vraiment avancé, beaucoup avancé, mais la stigmatisation est restée comme dans les années 80,90, malheureusement. Donc comme le sujet de sexe, c'est tabou, on en parle pas parce que le VIH est toujours relié vraiment au sexe. Donc, tu es une personne mauvaise, tu es ceci, tu es cela, tu as… c'est la punition de Dieu, donc tout ça. Donc ça fait que vraiment, c'est difficile de s'en débarrasser de stigmatisation. Par contre, moi je pense ce qu’on fait qu'aujourd'hui, ça va arranger… ça contribue à la déstigmatisation du VIH. Parce que le VIH d’aujourd’hui c’est une infection, une maladie comme tout autre, mais qui est… que tu peux « manager » très bien, et que tu peux faire, tu peux avoir une vie normale, plus que normale, parce que le fait que tu es très bien suivi par rapport à ton VIH et par rapport à d'autres problèmes de santé. Les personnes qui vivent avec le VIH, réellement, il y avait des études faites qui démontrent que ils ont une santé meilleure que nous autres.
Ken: J’ajoute quelques autres sources de stigmatisation. Il y a aussi eu dans notre pays la transmission par le partage de matériel d'injection et donc… mais les drogues aussi, c'est quelque chose qu'on n'aime pas parler, de drogues, nos voisins polis. Et il y a… il y a aussi un certain niveau de xénophobie qui figure. Mais aussi je pense que, comme on est… on parle de moins en moins du VIH, je sais qu’on est en train de changer ça aujourd'hui, mais la perception des gens est demeurée dans le passé, et donc les gens ont beaucoup peur du VIH parce que pour eux, le VIH, c'est quelque chose des années 80 où il y avait pas de traitement et les gens mouraient. Et donc, ce n'est plus ça, c'est le temps de vraiment éduquer toute la population que ce n'est plus ça. Mais c'est la source de plusieurs actes en cours de route qui font en sorte que une personne vivant avec le VIH n'ose pas parfois divulguer son statut, ou a peur qui… a peur de se trahir, donc, en s'approchant des services de santé. Il y a des questions d'emploi, d'assurance et de choses comme ça qui… où il y a des stigmatisations donc embriquées que nous devons contrer et c'est une longue lutte pour nous, dans le mouvement de lutte contre le VIH, et pour la santé publique de travailler avec les gens pour être certain que il n'y a pas de discrimination basée sur le statut de VIH, et certainement pas quand il y a aucune raison de le faire.
Haoua: Parce que des gens pensent que le VIH affecte seulement certains groupes. Des hommes qui couchent avec des hommes, des Afro-Canadiens, les gens qui utilisent les substances, les Autochtones, les gens qui sont des gens déjà marginalisés par la communauté parce que il y a une homophobie. Comme Ken a dit, xénophobie, les dogue phobie, tous ces phobies-là. Donc, ça embrouille les gens. Je vois des gens, ils sont restés dans les années, on ne veut rien savoir. C’est ça qui est là, on avance pas. Mais c’est complètement faux. Si aujourd’hui tu prends deux personnes et ils ont les mêmes équités au service, au logement, emploi, à l’éducation, aux réseaux sociaux avec, il y a pas une raison que personne… bien ou les risques de contracter le VIH va grandement diminuer. La santé mentale, tout ça sont des facteurs tu mets… qui met des gens, qui les rend vulnérables au risque de VIH. Les gens n’arrivent pas à mettre un plus un pour voir, si ça, tout ça est mis en place, certainement la… ça va rendre la vie meilleure et diminuer le risque de contracter le VIH.
Anita: À quoi vous attribuez le fait que ça prend tellement de temps à se débarrasser de cette stigmatisation-là qui affecte des vies aujourd'hui ?
Ken: C'est vraiment le manque de conversation sur le sujet. Donc, on n’a pas un idée dans la société en général c'est quoi vivre avec le VIH en 2023. C'est quoi… donc, c’est quoi… vivre avec le VIH aujourd’hui, c’est pas la même chose d'il y a 30, 40 ans, et il faut qu’on évolue nos connaissances et notre compréhension de c'est quoi. Ça va prendre en sorte... c’est un peu un cercle vicieux parce que ça prend probablement plus de personnes vivant avec le VIH qui sont prêtes à en parler, mais en même temps, ils s'exposent à la discrimination. Donc, il faut qu’on travaille de façon plus proactive sur ces questions de discrimination pour éliminer la discrimination et ouvrir la porte. Pour moi, c'est très important à souligner pour les personnes vivant avec le VIH qui nous écoutent, que l'objectif du traitement, c'est pas uniquement… c’est pas uniquement d'éliminer la transmission, mais c'est pour la santé de la personne. Donc, la personne va avoir une meilleure qualité de vie et va se débarrasser de la crainte de transmettre. Je n'ai jamais rencontré une personne vivant avec la VIH qui ne craignait pas transmettre et donc, qu’ils vont prendre toutes les précautions pour éviter de transmettre. Et là, on est libéré par ce constat scientifique que maintenir notre charge virale indétectable va faire l'affaire pour éliminer cette possibilité de transmission.
Anita: Donc, la charge virale indétectable chez un individu donne une certaine liberté, une certaine paix d'esprit. Pouvez-vous nous parler des impacts sur la vie personnelle, la vie d'un individu qui est séropositif, qui reçoit finalement les résultats qui lui démontrent qu'il est… qu’il ne va pas transmettre le virus à son partenaire ?
Haoua: C'est un gros... certainement j'ai pas les mots, je n'arrive pas à trouver le mot exact pour vraiment qualifier… quantifier cette joie de ne plus transmettre, ou avoir… quand tu dis que tu as, avec cette situation que tu as, et avec la science, une avancée de science, tu vas plus transmettre, c’est un grand… c’est comme-ci on soulève la montagne qui est sur toi et on la dépose quelque part. Et ça, c'est un gros soulagement pour toi-même, qui est vraiment… comme Ken a mentionné, on est très inquiet, plus inquiet pour notre santé que la transmettre à notre partenaire à ce point. Et ça donne aussi le courage de maintenir et adhérer à ton traitement parce que voilà, donc, ça marche. C’est pas quelque chose que on lui dit de faire et à la fin de la journée, ça marche pas. Voilà les résultats, ça marche (inaudible) temps. Vous devez continuer, ça me donne du courage. Et d'en parler avec les autres personnes qui vont… va te faire dépister. Et une fois que t’es dépisté, et si tu es positif, il y a des traitements qui marchent.
Ken: Je pense qu'il faut souligner, par contre, que il y a toujours des personnes pour qui le traitement en particulier n'a pas fonctionné, et je ne veux pas laisser l'impression que ces personnes transmettent le VIH. Il y a d'autres méthodes, on est très conscient des méthodes de prévention, de l'utilisation de condoms, par exemple, entre autres, et donc il faut souligner ça. C'est pas juste les personnes indétectables qu'on ne peut pas alors… dont on ne devrait pas avoir peur, mais il faut être conscient que il peut y avoir des personnes vivant avec le VIH qui ont une charge virale in-… ou détectable, mais qu'il y a d'autres méthodes pour éviter la transmission. Il y a aucune raison, toujours, pour avoir peur de ces personnes. Et parfois c'est une question chimique, donc, de quel traitement fonctionne ou fonctionne pas. Mais parfois c'est une question d'accès aussi, et je pense qu'il faut souligner ça, que c'est très important d'enlever les barrières au traitement dans notre pays.
Anita: Et ça, c'est une question très importante. Pouvons-nous nous attarder un peu sur cette question de barrières ? Parce que aussi, pour revenir un petit peu à votre point, Ken, pour pas non plus qu'on stigmatise les gens qui n'atteignent pas la charge virale qui est indétectable, parce que ça arrive, ça arrive pour maintes facteurs. Mais parlons de ces barrières qui peuvent empêcher quelqu'un de pouvoir accéder ou de suivre et continuer un traitement.
Ken: Oui. La première chose c’est l'organisation de notre système de santé qui est très… donc c’est très provincial, territorial, en premier. Et donc une personne qui déménage d'un endroit à l'autre a des défis de se reconnecter au traitement dans son nouvel… sa nouvelle province. Il y a des enjeux aussi pour les personnes qui sont arrêtées et envoyées en prison, il y a souvent des interruptions de traitement qui… qu’on doit travailler. Mais il y a aussi la question de personnes qui sont ici avec un statut qui ne donne pas l’accès à la couverture sanitaire. Donc on pense aux travailleurs temporaires, aux étudiants étrangers, mais il y a aussi des personnes demandeurs d'asile avant de déposer leur demande, et des personnes qui sont carrément sans statut. Et ça, on doit… on doit s'inspirer de pays où toute personne qui se trouve sur le territoire a un accès aux soins. Donc ça se passe en France, c’est sous attaque en France actuellement. Mais c'est important pour la santé de toute la population que tout le monde sur le territoire soit en santé et qu'il n'ait pas de limites à qui peut être couvert ou à qui peut avoir accès aux soins.
Haoua : Oui, juste je vais ajouter dans les catégories dont Ken a mentionné, les personnes qui travaillent et leur… qui sont obligées d'acheter ou de débourser pour leur traitement. Mais ils… certaines personnes qui doivent choisir est-ce que je veux acheter des traitements ou je veux payer mes loyers, ou je vais mettre du manger sur la table. Donc on devrait pas avoir ça. Lorsque les gens commencent à choisir quel que je dois faire, donc… et jusqu'à présent on en a ces genres de personnes, que leur traitement n’est pas couvert. Parce qu’elles tombent dans un catégorie où tu travailles, mais tu n'es pas, tu n’es pas, c’est… Le traitement de VIH c’est un traitement qui sauve la vie. C'est pas un traitement que… comme banal là. Non sans ça tu peux pas vivre. Donc ça, comme Ken a dit, c’est un traitement qui doit être couvert, qui doit être… l’accès doit être facile à tout le monde. Lorsque j’ai une couverture de santé, bon, je vais l’utiliser. Si j'en ai pas, aussi. Et quelque part, ça doit ouvert. Et si on arrive à ça, c'est formidable.
Anita: Donc l'importance pour l'individu d'avoir accès, comme qu’on a vu, de différentes façons, qui peut avoir des barrières, même des barrières économiques, financières. Mais on voit que il y a aussi un incitatif ici, si on peut passer au travers de ces barrières-là ou si quelqu'un y a accès au traitement, c'est un grand incitatif de continuer, de commencer… premièrement, de savoir son statut, de commencer le traitement et de le continuer. Pouvez-vous nous parler de ça, que cette découverte scientifique peut encourager les gens à savoir leur statut et à maintenir un traitement ?
Ken: Mais je pense que c'est très important, et évidemment, on ne peut pas embarquer sur un traitement sans savoir que… sans connaître son statut. Et il y a certainement des gens dans ce pays, je pense que le dernier constat était qu'il y avait 10 % de personnes, avec une distribution inégale selon la population, mais 10 % de personnes vivant avec le VIH qui ne connaissent pas leur statut au Canada. Et pour différentes raisons, parfois c'est la peur, et donc parce que ces personnes aussi peuvent avoir une vision du VIH des années 80, mais je pense qu'il faut partager le message que il y a des traitements, il y a des traitements plus faciles à prendre que les premiers traitements d'il y a 20 ans, 20, 25 ans, et que ça peut garantir la santé, et en effet, une durée de vie et une qualité de vie très, très bonne pour la personne qui se poursuit. Donc j'encourage tout le monde. Moi j'étais… j'ai cité l'exemple au début, j'ai été diagnostiqué tardivement et c'est probablement parce que je ne me sentais pas prêt à savoir. Donc il y a… je suis là pour témoigner que ma vie aurait été beaucoup plus facile si j'étais diagnostiqué plus tôt. Donc j'encourage les gens qui pensent qu’ils ont eu une exposition au VIH de connaître leur statut. Il y a des façons maintenant, il y a un programme du gouvernement fédéral en ce moment de distributions d’autotests. Si jamais vous craignez que… alors vous n’avez pas confiance dans les gens autour, vous pouvez le faire tout seul pour découvrir votre statut. Mais oui, un test à la maison. Et si… alors, si ça revient positif, il faut le faire confirmer. Mais c'est la première étape d'accès aux soins et d'accès au traitement qui va rendre la personne assez vite indétectable et va améliorer sa qualité de vie, mais éviter aussi la destruction de son système immunitaire.
Haoua : Moi, je vais juste ajouter ça aussi. Lorsque tu immigres au Canada pour six mois et plus, le test de VIH est obligatoire. Il y a… un certains tests qui est obligatoire pour la personne. Mais lorsque tu es au Canada, c'est pas obligatoire le test de VIH. Donc il faut que les fournisseurs de services de santé soient vraiment… offrir au monde. Il n'y a pas de catégorie de monde, offrir à tout le monde, de les encourager à se faire dépister. C'est très important. Parce que certains, pensent que, tel groupe, tel groupe sont à risque du (inaudible), mais certains, non. Le VIH ne choisit pas. On est des humains, on a du sang, ça choisit pas.
Anita: On recherche ou… pas qu'on recherche, mais on voit une diminution des nombres de cas de VIH au Canada et à travers le monde à cause des traitements qui fonctionnent bien, que les gens… auxquels les gens adhèrent s'ils ont un accès adéquat. Pouvez-vous nous parler de cette… de cette évolution du VIH qui diminue progressivement au Canada et à travers le monde ?
Ken: Mais c'est l'objectif. Donc c’est notre objectif, et de plus en plus qu'on peut garantir les trai-… l'accès au traitement, le plus qu'on peut promouvoir que les gens connaissent leur statut et embarquent sur un traitement qui va faire du bien pour eux. Ça va aussi diminuer la transmission dans notre société. Donc il faut trouver ces 10 % de personnes qui ne connaissent pas leur statut, et il faut trouver ensuite les gens qui ne sont pas connectés aux soins et adresser ces barrières à la connexion aux soins, et trouver le bon traitement adapté à la personne pour atteindre l’indétectabilité et le maintenir. Donc, ce sont nos défis. Mais on voit qu’on a un certain progrès vers ça, mais moi, je suis d'avis qu'il faut augmenter nos efforts, il faut vraiment multiplier nos efforts pour arriver. Et on peut arriver à la fin, l'ONUSIDA prévoit donc une fin de transmission en 2030, c’est si on arrive aux objectifs et qu’on couvre tout le monde.
Haoua : Moi, ce que Ken a dit c'est absolument vrai. Par rapport pour qu'on puisse arriver à cet objectif qu'on s’est, le dire et la pratique c’est autre chose. Et on célèbre le progrès, c'est fantastique. On doit célébrer le progrès de « I égal I ». Les traitements… aujourd’hui on a l’injectable, un traitement de VIH, ce sont des progrès. Mais il faut pas oublier les gens qui sont en arrière, les groupes qui sont en arrière, les autochtones, les femmes noires, les gens qui utilisent des substances non… des hommes qui sont marginalisés, ou qui ont… les gens en prison, des jeunes qui n’ont vraiment aucune idée de ce qui se passe parce que ils sont pas vraiment… il n'y a pas beaucoup d'éducation, pas à l'école. Il y a tout un polémique derrière l'éducation du sexe à l'école.
Anita: Vous faites vraiment le travail avec les gens qui sont affectés par le VIH, le sida. Vous êtes dans les communautés et vous travaillez parmi ces gens-là. Quels sont vos grands succès ? Quelles sont vos grandes réussites ? Qu'est-ce qui vous… qu'est-ce qui vous pousse dans votre travail ? C'est un travail tellement important pour continuer justement à soutenir les gens vivant avec le VIH.
Ken: Moi, je pense que, à chaque fois que je vois quelqu'un vivant avec le VIH qui s'est approprié de l’information, qui comprend qu'est-ce qu'il faut faire, qui comprend les impacts sur sa santé, c'est une réussite. Quand on voit des gens qui citent « I égal I » dans leurs paroles sur le VIH, qui… et parfois, c'est des gens qui n'ont pas le VIH, mais qui ont appris. C'est important pour moi et c’est une réussite. Moi, je… si je peux faire un « plug », nous avons un site qui explique assez clairement et qui a des liens vers les études, qui s'appelle zerotransmission.org. Donc on a recueilli les informations sur « I égal I ». C'est assez facile à se souvenir, à zerotransmission.org. Mais j'encourage les gens qui ne connaissent pas d’explorer et nous revenir avec des questions. Je pense que c'est pour ça les organismes communautaires de lutte contre le VIH, du sida à travers le pays, on est là pour répondre à ces questions, et on est là pour offrir un soutien aux personnes vivant avec le VIH pour poursuivre ce qu'ils doivent faire pour leur santé, y compris leur santé mentale et l'élimination de la peur de transmettre.
Haoua : Moi, je me rappelle très bien le jour où madame Petitpas… Madame Petitpas a signé l’endossement de « I égal I » au Parlement, en 2018. C'est le travail qui a été fait. C'est... à travers le Canada, particulièrement à Ottawa, avec le comité du sida d’Ottawa. On a fait des forums avec la communauté et à l'Université Saint-Paul, au Centre des arts national. Tout le monde dans la communauté a parlé, médias, (inaudible) étaient venus, les gens du… d’un peu partout du Canada étaient venus. On en a vraiment… et lorsqu’elle avait signé ce morceau, le bout de papier au Parlement, c'était vraiment un moment historique. Parce que c'était le premier pays à endosser, le gouvernement a endossé que « I égal I » et ça marche. C'est pas… c'est pas petit, là, c'est grandiose. Non, bien c'est là que ça nous a donné encore plus de zèle au monde, à parler avec nos pairs, parler avec tout le monde. Vous voyez, ça marche, il ne faut pas avoir peur. Allez vous faire dépister. Et ça nous donne la joie de voir les gens. Oh, OK, ça marche, donc je vais me mettre. Et on va essayer de déstigmatiser le… et aussi amener des ressources là où les gens ne peuvent pas l’avoir. Non, il ne faut pas, comme Ken a dit tantôt, les problèmes d'accès au services de la santé, c'est pas donné à tout le monde. Donc ça, c’est la vérité. Donc on ne doit pas baisser les mains voilà ça marche et c’est tout, on reste. Non. C'est une lutte continuelle pour tout le monde qui vit avec le VIH, ou tout le monde qui ne sait pas son statut sérologique ait le courage et ait à sa disposition pour inciter à dépister. C’est très, très important.
Anita: Notre conversation tire à sa fin. J'aimerais voir, est-ce qu'il y a un message que vous aimeriez véhiculer aux gens qui nous écoutent, qui nous regardent, par rapport soit à votre travail ou aux avancées qu'on a vues dans la science ? Quel serait le message que vous aimeriez que les gens retiennent aujourd'hui après notre conversation ?
Ken: Pour moi, je pense le message de base, c'est informez-vous, et vraiment chercher l'information de c'est quoi vivre avec le VIH maintenant. C'est pas la même chose que dans le passé, on n'a pas de raison d'avoir peur des personnes vivant avec le VIH. On n’a pas de raison de stigmatiser des personnes vivant avec le VIH. Et on peut se calmer en comprenant c'est quoi le VIH, c’est quoi cette indétectable égal intransmissible. Comprendre ces choses, ça aide beaucoup et ça aide les gens à être un peu plus sensibles, quand il y a des instances de stigmatisation, de pouvoir aussi défendre leurs voisins, leurs amis séropositifs. Je pense que ça prend toute une société pour répondre et repousser la stigmatisation, et ça commence par les connaissances.
Haoua : Pour moi, la responsabilité aussi incombe beaucoup aux fournisseurs de services de santé, donc d’encourager, de ne pas juger. Fais ci donc, fait pas ça, ne fait pas ça, ne fait pas ça. C'est comme si toute ta vie, ne fait pas ça, ne fait pas ça. Non, aujourd’hui on veut bien supporter le monde à adhérer à leur traitement. Il y a… fait beaucoup de plaidoyer pour que les gens qui n’arrivent pas à avoir l’accès au traitement, être indétectable, puissent l’être. Aujourd'hui, il y a pas raison, comme on n’a pas raison que ça se fait pas. Moi, en tant que personne qui a des informations, j'ai la responsabilité de partager cette responsabilité, et les gens… laisser les gens à décider de leur propre vie. Pour moi, partager cette information, c'est important.
Ken: Je souligne aussi l'importance, Haoua a mentionné l'importance de la reconnaissance d’une ministre de la Santé au Canada de « I égal I », c'est très important. Donc ça, ça va rejoindre plus de monde que nous pouvons rejoindre comme organisme communautaire. C'est important d'avoir cette reconnaissance officielle de Santé publique que c'est un fait. Je pense que on ne peut pas sous-estimer l'impact de ça sur l'ensemble de la population.
Anita: Merci. Ken, Haoua, merci pour votre temps. Merci également pour le travail que vous faites, c'est très important, et merci de nous aider à continuer d'entamer ces conversations importantes.
Haoua : Merci pour cette opportunité. Merci beaucoup.
Ken: Merci.
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