Rapport annuel 2000-2001
Examen opérationnel du Service canadien du renseignement de sécurité
Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité
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B.P. 2430, succursale D
Ottawa (Ontario)
K1P 5W5
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Site Web : http://www.sirc-csars.gc.ca
Les appels à frais virés sont acceptés et le standard téléphonique est ouvert de 8 h 00 à 17 h 30, heure normale de l'Est.
Nota : Aux fins du présent document, la forme masculine désigne, s'il y a lieu, aussi bien les femmes que les hommes.
© Travaux publics et Services gouvernementaux Canada 2001
No de cat. JS71-1/2001
ISBN 0-662-65978-3
Le 30 septembre 2001
L'honorable Lawrence MacAulay, C.P., député
Solliciteur général du Canada
Chambre des communes
Ottawa (Ontario)
K1A 0A6
Monsieur le Ministre,
Conformément à l'article 53 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, nous présentons au Parlement, par votre entremise, le rapport du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité pour l'exercice 2000-2001.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre haute considération.
Déclaration du Comité 2000-2001
Les événements survenus le 11 septembre 2001 aux États-Unis auront dissipé tout doute qui pouvait subsister quant au fait que les menaces les plus graves à la sûreté du Canada et à la sécurité de ses citoyens prennent des formes fort différentes de celles qu'a connues la génération précédente. Il y a environ seize ans, à l'époque du dernier remaniement de l'appareil national du renseignement de sécurité, la politique militaire singulière de la guerre froide était la toute première préoccupation. Aujourd'hui, nous vivons tous dans un monde marqué au coin de diverses forces nouvelles qui changent rapidement.
Personnes, capitaux, information, technologies et idéologies politiques sont plus mobiles que jamais. Pour la plupart, les influences qui en découlent sont réjouissantes ou du moins salutaires, mais d'autres ne le sont résolument pas. Par sa qualité de pays démocratique qui favorise les rapports et les investissements internationaux et qui accueille visiteurs et immigrants, le Canada s'expose à la fois aux meilleures et aux pires de ces influences.
Ce changement profond dans la nature des menaces se reflète dans tous les domaines de la politique publique qui touchent les intérêts nationaux du Canada et la sécurité de ses citoyens :
- Dans les instructions ministérielles données à la collectivité nationale du renseignement de sécurité, la violence à des fins politiques et le terrorisme figurent nettement à titre de menaces les plus sérieuses pour le Canada, les Canadiennes et les Canadiens.
- Au Service canadien du renseignement de sécurité, le déploiement des ressources, tant humaines que financières, traduit la nécessité croissante de faire face à de multiples menaces terroristes.
- Dans ses rapports publics des dernières années, le Service se dit de plus en plus préoccupé par le terrorisme et par un cadre de sécurité internationale qui favorise la conduite d'activités terroristes au Canada et à l'étranger.
- Les changements législatifs proposés et apportés par le gouvernement fédéral (projets de loi C-16, modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, et C-11, la Loi sur l'immigration) témoignent dans les deux cas de craintes que la violence à caractère politique ne soit dirigée ou financée de l'intérieur du Canada.
- Le Rapport du Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services de renseignement (Kelly, 1999), dernière étude du Parlement sur les questions de renseignement de sécurité, traite presque exclusivement de terrorisme et de violence à caractère politique et reste laconique quant aux menaces de l'espionnage.
Bref, en une dizaine d'années à peine, le SCRS, jadis voué surtout à lutter contre l'espionnage en faisant échec aux activités de collecte de renseignements d'un nombre assez limité de gouvernements étrangers, se préoccupe désormais avant tout du terrorisme et des politiques qui sous-tendent ce phénomène.
Les modalités complexes de cette mutation sont patentes. Les « cas
» dont doit traiter le Service l'obligent de plus en plus à porter des jugements nuancés – en raison de la ligne de démarcation souvent floue qui sépare les actions à caractère licite, politique ou illicite, teintées de violence ou de menaces de violence – au sujet des organismes et des personnes qui ont des visées politiques. Comme il appartient au Comité d'examiner et d'évaluer la qualité des jugements du SCRS en cette matière et que les priorités de celui-ci ont changé, les nôtres aussi ont évolué.
Pour le Comité, les questions d'action politique licite ou illicite et d'« association
» à une organisation terroriste prennent une importance plus grande que jamais dans ses fonctions de surveillance et de tribunal chargé d'examiner les plaintes. Sur ces deux plans, son travail s'est transformé radicalement depuis 15 ans, ou même 10, et n'a pas fini d'évoluer. Les menaces terroristes, qui émanent de sources nouvelles et divergentes, confèrent une grande importance à la compréhension des événements lorsqu'ils se produisent un peu partout dans le monde. Au moment où le SCRS réoriente ses efforts, le CSARS continuera de moduler en conséquence l'accent qu'il donne à ses recherches et les ressources qu'il y consacre.
Les fonctions du Comité à titre de tribunal chargé d'instruire les plaintes ont aussi évolué sensiblement. Une proportion croissante de plaintes concerne des questions de filtrage lié à l'immigration et à la sécurité qui portent pour la plupart sur des évaluations du Service à l'égard de personnes nourrissant des visées politiques et qui nécessitent de longues investigations sur les activités, les sources de renseignement et les cultures politiques d'autres pays. Si les projets de loi C-16 et C-11 entrent en vigueur, le CSARS craint de voir ces plaintes se multiplier.
Le Comité ne croit en l'existence d'aucune solution politique ou législative magique qui rende ces jugements moins difficiles à porter ou facilite l'atteinte d'un juste milieu entre la sécurité nationale et la protection des droits civils. En vertu de la politique nationale actuelle, le Service est tenu d'enquêter sur les menaces dont le gouvernement doit être informé, selon son évaluation professionnelle de la gravité de chacune. Quant aux évaluations du CSARS, elles sont aussi fondées sur l'expérience et le savoir professionnels, et non sur des guides d'orientation. Le Comité ne croit pas, non plus, qu'il soit bien utile de définir avec précision les termes « terroriste
», « association
» ou « extrémisme
», surtout dans un contexte mondial où les changements semblent se faire chaque jour plus rapides.
Le CSARS confère toutefois un éclairage particulier aux dilemmes entourant le renseignement de sécurité – ce qui était précisément l'intention du Parlement. Le SCRS représente le droit et la responsabilité du gouvernement de protéger la vie des citoyens et de maintenir l'ordre public. Le CSARS incarne, entre autres, un principe juridique essentiel de la démocratie canadienne, soit que les citoyens ont le droit à la vie privée et des libertés civiles et sont soustraits au pouvoir gouvernemental sans entrave – la « liberté de l'individu
».
La complexité et l'ambiguïté qui ont fini par dominer le travail dans le domaine du renseignement de sécurité signifient qu'une proportion plus grande que jamais des pouvoirs de jugement du Service – et, par conséquent, du Comité – sert à prendre des décisions qui sont vitales pour préserver tant la liberté des Canadiennes et des Canadiens que leur sécurité. Le terrorisme est un outrage à la démocratie; pour y faire échec, il faudra à la fois consolider sensiblement la coopération et la détermination internationales et promouvoir sans relâche les valeurs fondamentales du Canada.