Déclaration de la victime, détermination de la peine et services correctionnels
« Même ma déclaration de la victime a été caviardée. Tout était noirci. C'était mon dernier espoir d'être entendu. Je l'ai lu comme une prière au Créateur dans l'espoir que je serais au moins entendu par le Créateur. »[1] [Traduction]
L’ENJEU
Les déclarations de la victime (DV) sont souvent caviardées, ce qui limite ou élimine l'authenticité de la voix de la victime. De nombreux survivant.e.s perçoivent ces caviardages comme excessives et excessivement protectrices du délinquant. Les survivantes déclarent également avoir reçu peu d'informations sur leurs droits pendant la détermination de la peine et après la condamnation.
EN CHIFFRES
Dans notre sondage mené auprès de 1 000 survivant.e.s de violences sexuelles :
- Sur les 71 survivant.e.s dont les cas ont abouti à une condamnation :
- On a demandé à 82 % s'ils souhaitaient soumettre une DV
- 73 % ont soumis, lu ou fait lire un DV par quelqu'un d'autre
- 38% se sont vu proposer de l'aide pour préparer une DV
Amélioration au fil du temps :
- Les survivant.e.s dont la peine a été prononcée en 2020 ou après étaient plus de deux fois plus susceptibles d'être interrogés sur une DV (95 %) que ceux d'avant 2007 (45 %)
IDÉES CLÉS
- Le caviardage des déclarations de la victime réduit la légitimité perçue du système de justice pénale (SJP)
- Les survivant.e.s ont besoin d'informations proactives sur leurs droits lors de la détermination de la peine et après la condamnation
- Souvent, les victimes ne réalisent pas que la personne qui leur a fait du mal sera libérée bien avant la fin de sa peine
- L'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels n'a pas le pouvoir d'accéder à l'information nécessaire pour régler les plaintes des victimes
EN SOMME
Les survivant.e.s continuent de se heurter à des obstacles qui les empêchent de participer véritablement à l’étape de la détermination de la peine. Il faut faire preuve de souplesse dans la façon dont les DV sont traitées, et les survivant.e.s doivent recevoir de l'information proactive sur leurs droits, de la détermination de la peine jusqu’à ce que l’accusé soit libéré sans condition.
RECOMMANDATIONS
Déclaration de la victime (DV)
6.1 Prévenir la divulgation hâtive: Le gouvernement fédéral devrait modifier le Code criminel pour prévoir qu'une déclaration de la victime (DV) ne soit pas remise à la Couronne ou à la défense tant qu'il n'y a pas de verdict de culpabilité, de sorte qu'elle ne peut faire l'objet d'une divulgation et d'un contre-interrogatoire avant la détermination de la peine.
Le système correctionnel fédéral et la libération conditionnelle
6.2 Permettre des résumés partiels des déclarations de la victime: Le gouvernement fédéral devrait modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) pour permettre aux victimes de demander que les délinquants sous responsabilité fédérale reçoivent un résumé partiel de leur DV, en limitant les détails sur les préjudices émotionnels ou psychologiques, tout en fournissant tous les détails sur les conditions demandées lorsqu'une déclaration est utilisée par le Service correctionnel du Canada (SCC) ou la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) pour prise de décision. La victime devrait recevoir le résumé et avoir la possibilité de supprimer tout renseignement personnel ou autre qui pourrait avoir un impact sur sa sécurité.
6.3 Enquêter adéquatement sur les plaintes: Le gouvernement fédéral devrait modifier la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC) pour prévoir que l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels (BOFVAC) reçoive, sur demande, tout document, tout enregistrement, tout papier ou tout renseignement pertinent à une plainte déposée par une victime.
Contexte
Qu'est-ce qu'une déclaration de la victime (DV) ?
Une DV est une déclaration d'un survivant qui est rédigée avant le prononcé de la peine et qui peut être présentée au tribunal par la victime, un ami ou la Couronne. Il fait partie de la preuve que le juge doit prendre en considération pour déterminer la peine de l'accusé. La déclaration peut comprendre une description des répercussions émotionnelles, physiques, économiques ou sur la sécurité de la survivant.e. La déclaration peut inclure de photographies du survivant, de poèmes ou de dessins.
Selon le Code criminel, la déclaration ne peut comporter :
- de propos concernant l’infraction ou le délinquant qui ne sont pas pertinents au regard des dommages ou pertes que vous avez subies;
- d’allégations non fondées;
- de commentaires sur des infractions pour lesquelles le délinquant n’a pas été condamné;
- de plaintes au sujet d’un particulier, autre que le délinquant, qui était associé à l’enquête ou à la poursuite de l’infraction;
- sauf avec la permission du tribunal, de points de vue ou de recommandations au sujet de la peine.
Code criminel du Canada, formules 34.2 et 34.4.
Des informations utiles sur les déclarations de la victime ont été publiés par le ministère de la Justice du Canada et de nombreuses administrations.
Voir Déclaration de la victime.
Peu d'affaires de violence sexuelle aboutissent à une condamnation. Lorsque c’est le cas, les survivant.e.s ont la possibilité de soumettre une déclaration de la victime. C'est souvent l'un des seuls moments du processus de justice pénale où un.e survivant.e peut décrire directement l'impact du crime avec sa propre voix.
La possibilité de présenter une DV est particulièrement importante dans les cas résolus par un plaidoyer de culpabilité ou lorsque les survivant.e.s ont eu peu e contacts avec le système de justice pénale. Dans ces situations, la DV peut être leur seule chance de décrire le préjudice dans leurs propres mots et de le faire reconnaître officiellement par le tribunal.
En même temps, la plupart des cas de violence sexuelle ne donnent pas lieu à une peine fédérale.
- Le Service correctionnel du Canada (SCC) indique qu'en 2022-2023, 11 296 délinquants purgeaient une peine fédérale pour des infractions de l'annexe 1.[2]
- L'annexe 1 comprend toutes les formes d'infractions sexuelles contre les adultes et les enfants, toutes les formes de voies de fait, certaines infractions relatives aux armes et les incendies criminels.
- Le SCC n'a pas été en mesure de nous dire combien de délinquants purgent une peine de ressort fédéral pour des infractions sexuelles.
Cela signifie que de nombreux survivant.e.s n'entrent jamais dans le système correctionnel et de libération conditionnelle, et pour ceux qui le font, il y a peu de clarté sur la façon de rester impliqués ou informés après la détermination de la peine.
Notre enquête
Ce que nous avons entendu
« Pourquoi la victime devrait-elle parler si prudemment pour ne pas blesser les sentiments du délinquant ? Édulcorant leur réponse. »[3] [Traduction]
« Les déclarations de la victime contribuent de façon importante à un processus de détermination de la peine équitable. »[4] [Traduction]
Sur les 1000 survivant.e.s qui ont répondu à notre enquête, 74 ont fourni des informations supplémentaires sur leurs expériences à l'étape de la détermination de la peine (7,4 %). Moins de la moitié des répondants se sont sentis informés et soutenus pendant le processus de détermination de la peine :
- 49 % des survivant.e.s comprenaient ce qui se passerait au moment de la détermination de la peine.
- 48 % des survivant.e.s avaient l'information dont ils avaient besoin pour assister à la réunion.
- 46 % des survivant.e.s savaient qu'ils pouvaient poser des questions sur tout ce qu'ils ne comprenaient pas.
- 27 % des survivant.e.s ont appris de nouveaux renseignements sur l'infraction lors de l'audience de détermination de la peine.
Améliorations au fil du temps : Lorsque nous avons examiné ces expériences lors du dernier contact avec le SJP, il est apparu clairement que l'utilisation d’une DV a augmenté au fil du temps.
- On a demandé à 95 % des survivant.e.s en 2020 ou après s'ils souhaitaient soumettre un DV, comparativement à 45 % des survivant.e.s avant 2007
- En 2020 ou après, 81 % des survivant.e.s ont soumis, lu ou fait lire une DV , comparativement à 55 % avant 2007.
- 46 % des survivant.e.s en 2020 ou après se sont vu offrir de l'aide pour préparer une DV, comparativement à 18 % avant 2007
Prévalence des déclarations de la victime : Des recherches plus anciennes sur les déclarations de la victime ont montré une adoption plus lente de leur utilisation. Une étude réalisée en 2006 a estimé que les SRV étaient présentes dans 8 % des cas en Colombie-Britannique, 11 % dans les cas au Manitoba et 13 % en Alberta.[5]
Examen de la jurisprudence : Compte tenu des taux plus élevés signalés par les survivant.e.s dans le cadre de notre enquête et de l'absence de données nationales fiables, nous avons effectué un simple examen de la jurisprudence afin d'examiner la mention judiciaire des déclarations de la victime dans les décisions de détermination de la peine. À l'aide de la base de données de Westlaw Canada, nous avons examiné les décisions de condamnation (autres que les cours d'appel) pour les infractions sexuelles de 2014 à 2024 afin de dégager des tendances (n = 3475).[6]
- Les décisions de détermination de la peine pour des infractions sexuelles rendues par les cours (autres que les cours d'appel) qui mentionnaient une DV sont passées de 61% en 2014 à 69 % en 2024.
Remarque : Cela comprend les cas où un juge a formulé des commentaires sur l'absence d'une DV. En ne retenant que les cas où le juge note le contenu de la DV, nous avons observé une augmentation, passant de 52,4 % en 2014 à 62,6 % en 2024.
La présentation d'une déclaration de la victime peut être bénéfique pour les survivant.e.s.
Une étude a révélé que les victimes qui ont soumis une déclaration étaient plus satisfaites que les victimes qui ne l'ont pas fait.[7]
Un rapport de 2021 pour le ministère de la Justice du Canada a souligné les multiples avantages du régime de la déclaration de la victime :
- Pour de nombreuses victimes, les objectifs « thérapeutiques » de la DV sont plus prédominants que les objectifs « instrumentaux » (Roberts et Erez, 2004) – c'est-à-dire que le processus lui-même semble être plus important que le résultat final, comme l'ont noté de nombreuses études provenant de diverses administrations :
- Marshall (2014 : 574) : « Il convient de noter que la plupart des victimes ne cherchent pas à obtenir des peines plus sévères, mais plutôt à participer au système de justice. C’est cette participation qui les aide dans le processus de guérison. »
- Rossi (2008:199) : « [L]es études indiquent que les victimes ne “souhaitent pas modifier l’issue de la détermination de la peine” et qu’elles “ne souhaitent pas avoir de pouvoir décisionnel.” Les victimes signalent plutôt qu’elles n’ont bénéficié que de la présentation d’une déclaration de la victime, ce qui leur a donné la chance d’être entendues, d’être traitées avec respect, d’être informées et de participer, d’être prises au sérieux, de recevoir une indemnisation et d’entendre l’aveu de culpabilité du délinquant. »
- Du Mont, Miller et White (2007) : Les victimes ne sont pas motivées à soumettre des DV en vue d’influencer l’issue de la peine; elles souhaitent plutôt transmettre un message au délinquant sur l’incidence de l’infraction, de faire reconnaître leur souffrance et d’amorcer le processus de rétablissement.
- Roberts et Erez (2004) ; Meredith et Paquette (2001) : Les victimes se sentent validées lorsque leur DV est mentionnée par le juge chargé de la détermination de la peine, car il leur communique que la communauté a reconnu le préjudice qu’elles ont subi.[8]
Obstacles à une participation significative à la détermination de la peine
« Personne ne m'a aidé, personne ne m'a guidé à travers tout ça. J'ai dû essayer de comprendre les choses par moi-même, puis quand l'échéance de la DV n'a pas été respectée, oups, personne ne me l'a rappelé. Tout le monde s'assurait que le criminel obtenait toute l'aide. »[9] [Traduction]
Sur les 1 000 survivant.e.s qui ont répondu à notre sondage, 71 ont fourni des informations supplémentaires sur leurs expériences en matière de détermination de la peine :
- 42 ont assisté à une audience de détermination de la peine, soit environ 7,7 % des survivant.e.s dont les cas ont été signalés à la police (n = 548) :
- On a demandé à 82 % s'ils souhaitaient soumettre un DV
- 73 % ont soumis, lu ou fait lire un DV par quelqu'un d'autre.
- 7 % ont déclaré que l'avocat de la défense s'était opposé au contenu de leur DV
De nombreux survivant.e.s nous ont dit qu'on leur avait offert la possibilité de soumettre une déclaration de la victime, mais qu'ils n'avaient pas reçu d'aide pour le faire.
- Seulement 38 % des survivant.e.s qui ont assisté à une audience de détermination de la peine ont reçu de l'aide pour préparer leur déclaration.
- Certains n'ont été informés qu'à la dernière minute, parfois la veille de l'audience, et se sont sentis mal préparés, dépassés ou incapables de participer.[10]
Les services aux victimes peuvent vous aider à préparer une déclaration de la victime. Cependant, les intervenant.e.s nous ont expliqué que de nombreux bureaux manquent de personnel et sont surchargés et qu'ils n'ont peut-être pas la capacité d'aider les victimes avec leur DV s'il y a un préavis trop court (par exemple, dans le cadre d'un règlement de plaidoyer).[11]
Pourquoi l'identité est importante
Survivant.e.s qui pourraient avoir besoin de plus de soutien
Tout au long de notre enquête, nous avons entendu que le processus de déclaration de la victime ne reflète pas les réalités ou les besoins de tous les survivant.e.s. Les intervenant.e.s ont partagé :
- Les jeunes survivant.e.s reçoivent souvent des fiches d'information génériques sur le DV qui ne reflètent pas leur stade de développement ou qui ne les aident pas à articuler les répercussions à long terme du crime.[12] En 2022-2023, les centres d'appui aux enfants et aux jeunes (CAEJ) du Canada ont aidé 180 jeunes survivant.e.s à préparer une DV, soulignant à la fois la nécessité et l'avantage d'un soutien spécialisé.[13]
- Les survivant.e.s ayant une déficience intellectuelle peuvent avoir besoin de plus d'aide pour rédiger un DV afin de pouvoir inclure les messages qu'ils souhaitent.[14]
- Les survivant.e.s aux prises avec des problèmes de santé mentale et de toxicomanie ne reçoivent pas suffisamment de temps ou de soutien adapté pour remplir une DV.[15] [16]
- Les survivant.e.s en situation d'itinérance peuvent également être plus vulnérables au processus de DV. Nous avons entendu dire que les survivantes peuvent être informées trop tard pour participer et ne pas avoir accès aux appareils, à Internet ou aux organisations locales qui pourraient les aider.[17]
- Les nouveaux arrivants peuvent se heurter à des obstacles liés à la langue, aux normes culturelles et à l'inconfort lié aux déclarations écrites. Les formulaires DV standard en français ou en anglais peuvent ne pas correspondre à leurs styles de communication.[18]
- Il se peut que le format de type essai écrit de la DV et les salles d'audience traditionnelles puissent limiter la capacité des personnes autochtones à exprimer l'impact du crime. Nous avons entendu que lors des approches réparatrices (comme les cercles de guérison), l'impact sur les personnes lésées serait partagé dans un format très différent.[19]
La défense s'oppose-t-elle de plus en plus aux déclarations de la victime?
Dans notre enquête, 1 survivant sur 10 qui a soumis une DV a déclaré que la défense avait soulevé des objections quant au contenu de sa déclaration lors de la détermination de la peine (9,6 %, 5 survivant.e.s sur 52). Ces objections, bien qu'elles ne soient pas répandues dans notre ensemble de données, soulèvent d'importantes préoccupations quant à la façon dont les voix des survivant.e.s sont traitées dans les processus accusatoires.
Une survivante a partagé son expérience :
« La défense a contre-interrogé ma déclaration de victime pour essayer de faire croire que j'étais le problème plutôt que le membre de la famille qui m'a maltraitée. Personne ne l'a arrêté. La défense avait aussi tous mes journaux, car mes parents les ont pris sans mon consentement, et ils ne m'ont pas dit qu'ils les avaient (ou que la Couronne les avait) et qu'ils avaient l'intention de les utiliser à des fins de contre-interrogatoire. Je ne l'ai su qu'après la fin du processus judiciaire et qu'ils les ont remis à quelqu'un d'autre pour qu'il me les donne. Ils les ont utilisés pour contre-interroger ma déclaration de victime. »[20] [Traduction]
Les intervenant.e.s sont divisé.e.s sur la question de savoir si les objections à la défense augmentent. Ayant entendu des préoccupations similaires lors d'entrevues avec les services d'aide aux victimes des tribunaux et en l'absence de données judiciaires officielles pour établir la prévalence, nous avons demandé aux intervenant.e.s leurs perceptions de la fréquence à laquelle les avocats de la défense contestent le contenu de la DV au cours des 5 dernières années. Les réponses ont varié selon le rôle :
- La plupart des intervenant.e.s estimaient que la prévalence des objections de la défense à la DV était demeurée la même au cours des 5 dernières années ou qu'ils avaient l'impression de ne pas en savoir assez pour commenter.
- Les avocats de la défense (n = 11) estimaient que la prévalence était demeurée la même (73 %) ou avait diminué (18 %)
- Les procureurs de la Couronne (n = 97) croyaient également que la prévalence était demeurée la même (62 %) et étaient légèrement plus susceptibles de croire que la prévalence avait diminué (18 %) plutôt qu'elle avait augmenté (15 %)
- Les services d'aide aux victimes offerts par les tribunaux (n = 23) étaient les plus susceptibles de croire que la prévalence avait augmenté (30 %)
Ces résultats suggèrent des perceptions différentes selon les rôles, en particulier entre les fournisseurs de services soutenant les survivantes et les professionnels du droit.
Les caviardages et les décisions procédurales réduisent la légitimité perçue du système de justice pénale
« Ma déclaration a été expurgé. Je n'ai jamais eu l'occasion d'aller dans une salle d'audience et d'expliquer ce qui m'est arrivé. C'était difficile à avaler, comme une claque en pleine face. J'aimerais avoir eu l'occasion de raconter mon histoire. »[21] [Traduction]
La voix des victimes s'estompe
Les survivant.e.s et les intervenant.e.s ont constamment soulevé des préoccupations quant à la façon dont les déclarations des victimes ont été caviardées, souvent sans consentement, consultation ou justification claire :
- De nombreux victimes et professionnels des services aux victimes nous ont dit que l'ampleur de la rédaction était telle que la déclaration n'était plus leur voix[22]
- Certains survivant.e.s n'ont appris qu'après le prononcé de la peine que leur DV avait été nettoyé par la Couronne, à leur insu et sans leur accord[23]
- Ils ont eu l'impression que la Couronne se préoccupait davantage de protéger les sensibilités du délinquant que d'entendre la victime
- Ils ont dû préparer leur déclaration si tôt dans le processus de justice pénale qu'elle leur a semblé « incomplète » au moment de présenter la DV à la Cour
- Ils n'ont pas été en mesure de modifier la déclaration pour tenir compte de leurs éléments de preuve supplémentaires ou nouveaux
- Le fait d'autoriser le caviardage des DV contribue au sentiment du public quant à la futilité et à l'illégitimité du processus de justice pénale
Les caviardages ne sont pas nécessaires
En 2015, le Code criminel a été modifié pour donner aux juges le pouvoir explicite de ne pas tenir compte de toute partie d'une déclaration de victime qu'ils jugent inappropriée. Le paragraphe 722(8) prévoit ce qui suit :
« Lorsqu’il prend en considération la déclaration, le tribunal tient compte de toute partie qu’il estime pertinente pour la détermination ou la décision prévue au paragraphe (1) et fait abstraction de toute autre partie. »[24] [25]
Le caviardage n'est pas nécessaire parce que la Cour peut « prendre en compte les parties de la déclaration que j'estime pertinentes et ne pas tenir compte du reste. »[26]
Bien que le caviardage par la Couronne ou les services aux victimes puisse être un moyen de gérer les demandes de la défense visant à caviarder, limiter ou supprimer les déclarations de la victime, cette dernière est souvent le seul moyen pour le survivant de présenter sa preuve de l'impact de l'infraction de sa propre voix.
En fait, les caviardages peuvent violer les droits de la victime. En vertu de la CCDV, « toute victime a le droit de donner son point de vue en ce qui concerne les décisions des autorités compétentes du système de justice pénale en ce qui touche les droits qui lui sont conférés par la présente loi et à ce qu’il soit pris en considération. » et « toute victime a le droit de présenter une déclaration aux autorités compétentes du système de justice pénale et à ce qu’elle soit prise en considération.»[27]
La jurisprudence plaide en faveur de cette interprétation. Dans l’arrêt R c. C.C.,[28] la Cour a souligné que les juges peuvent exclure des parties inappropriées d'une DV, mais a également souligné que « demander aux victimes de réécrire leurs déclarations serait à la fois insensible et inutile. »[29] D'autres tribunaux ont utilisé le pouvoir conféré par le paragraphe 722(8) pour ne pas tenir compte – sans les expurger – de renseignements qui ne sont pas pertinents ou appropriés.
- « D'autres éléments qui se trouvent dans la déclaration de la victime, comme une recommandation de peine, des critiques à l'égard du délinquant, des affirmations sur les faits entourant les infractions, des déclarations adressées au délinquant et des descriptions d'autres infractions commises par le délinquant, ne sont pas inclus à bon droit dans une déclaration faite en vertu de l'article 722 du Code criminel et doivent être écartés conformément au paragraphe 722(8) du Code criminel. »[30]
- « Plutôt que d'essayer d'expurger judiciairement des parties de certaines déclarations, je trouve qu'il suffit simplement d'identifier certains sujets de préoccupation et de confirmer mon traitement de ceux-ci. »[31]
- La Cour suprême a souligné qu'une déclaration de la victime «constituent habituellement la [traduction] « meilleure preuve » du préjudice subi par la victime. »[32]
- Dans l’arrêt R c. CC,[33] la Cour note qu’« un juge peut choisir de ... exclure les parties incendiaires ou offensantes des déclarations de la victime qui créent une apparence d'iniquité dans les procédures ou qui nuisent à l'intégrité de l'administration de la justice. »
- La Cour souligne expressément que l'approche envisagée par le paragraphe 722(8) «établit un juste équilibre entre le droit du délinquant à un procès équitable et le droit des victimes d'avoir pleinement la possibilité d'exprimer l'impact que ses crimes ont eu sur leur vie. »[34]
Dans notre rapport de 2024 Dignes d’être informées et respectées, nous recommandons : « Permettre une plus grande flexibilité pour que la voix des victimes soit entendue :
- Les lignes directrices relatives aux déclarations de la victime au moment de la détermination de la peine et aux déclarations de la victime utilisées par le SCC et la CLCC devraient être plus souples afin de veiller à ce que la liberté de parole et la liberté d'expression des victimes d'actes criminels ne soient pas inutilement limitées. »
La déclaration de la victime et la CCDV
Dans l'affaire R c. Aklok au Nunavut,[35] la Cour a examiné l'obligation de la CCDV de donner à la victime l'occasion de présenter une déclaration de la victime.
[54] En 2015, le Parlement a adopté le projet de loi C-32, la Charte canadienne des droits des victimes. L'objet de la loi se trouve dans le préambule de la loi, qui stipule notamment ce qui suit :
Attendu :
que les actes criminels ont des répercussions préjudiciables sur les victimes et la société;
que les victimes d’actes criminels et leurs familles méritent d’être traitées avec courtoisie, compassion et respect, notamment celui de leur dignité;
qu’il importe que les droits des victimes d’actes criminels soient pris en considération dans l’ensemble du système de justice pénale;
que les victimes d’actes criminels ont des droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés;
[55] Entre autres choses, cette loi a établi le droit des victimes d'actes criminels de participer au processus de détermination de la peine en déposant une déclaration de la victime ou en la lisant à haute voix devant le tribunal. ……
[56] Le législateur a également confié aux juges un rôle de surveillance continu afin de veiller à ce que ce droit soit respecté. Le paragraphe 722(2) se poursuit comme suit :
722 (2) Dans les meilleurs délais suivant la déclaration de culpabilité et, en tout état de cause, avant la détermination de la peine, le tribunal est tenu de s’enquérir auprès du poursuivant si des mesures raisonnables ont été prises pour permettre à la victime de rédiger la déclaration visée au paragraphe. 2020 NUCJ 37 (CanLII) | R c. Aklok | CanLII
[57] Toutefois, plus de cinq ans après l’entrée en vigueur de la Charte des droits des victimes, la Couronne continue de demander régulièrement à la Cour de condamner les contrevenants sans que les victimes aient été informées de leur droit d'être entendues.
[58] Comme je l'ai mentionné précédemment, j'ai ajourné l'affaire pour permettre au ministère public de communiquer avec la victime. La Cour exige que les procureurs communiquent avec les victimes, que l'accusé ait plaidé coupable dès le début, qu'il ait un téléphone ou que la police ait fourni les coordonnées de la victime. « La police et le ministère public ont l'obligation légale d'établir un protocole garantissant que les victimes d'actes criminels sont informées rapidement de leurs droits. »[36] [Traduction]
Dans une affaire d'agression sexuelle infligée à une fillette de quatre ans par la mère et son petit ami, la Cour suprême du Canada a déclaré ce qui suit :
« Dans la mesure du possible, les tribunaux doivent tenir compte du préjudice réel qu’une victime en particulier a subi par suite de l’infraction. Ce préjudice résultant de l’infraction est un facteur déterminant en ce qui a trait à la gravité de l’infraction ... Il existe souvent des preuves directes d’un préjudice réel. Plus précisément, les déclarations des victimes, y compris celles faites par les parents et gardiennes et gardiens de l’enfant, constituent habituellement la [traduction] « meilleure preuve » du préjudice subi par la victime …. Les poursuivants devraient s’assurer de présenter un dossier de preuve suffisamment étoffé au tribunal afin que ce dernier puisse adéquatement évaluer [traduction] « le préjudice causé à l’enfant par la conduite du délinquant ainsi que les conséquences dévastatrices qui peuvent découler et qui découlent souvent d’une telle conduite. »[37]
Certaines survivantes ne veulent pas continuer à exposer leur vie privée au délinquant
- « C'est important, mais c’est vraiment pénible de confirmer auprès de la personne qui vous a délibérément blessé qu'il vous a fait du mal. »[38] [Traduction]
- « De nombreux survivant.e.s se demandent s'ils rempliront une déclaration de la victime ou non. Certaines survivantes ont dit qu'elles ne voulaient pas donner à leur trafiquant un pouvoir supplémentaire en lui faisant prendre conscience de la façon dont leur expérience les a blessées. »[39] [Traduction]
- « Il devrait s'agir d'un tribunal à huis clos pour les enfants vulnérables et pour la lecture de la déclaration de la victime. »[40] [Traduction]
De nombreux survivant.e.s ne veulent pas qu'un délinquant sache l'étendue du mal causé. Cette perspective est fondée sur le fait que la violence sexuelle se produit le plus souvent entre des personnes qui se connaissent. C'est un crime de pouvoir, pas un crime passionnel. Le fait de soumettre une déclaration de la victime avec des renseignements sur la façon dont le crime les a touchés et ce qu'ils ressentent est un autre affront à leur vie privée ou alimente une manipulation future.
Il est important de partager l'impact complet avec les décideurs. Certaines victimes ont indiqué qu'elles ne voulaient pas décrire le tort continu à un délinquant motivé par le sadisme ou le racisme, mais qu'elles voulaient quand même qu'un tribunal ou un membre de la Commission des libérations conditionnelles connaisse les effets continus de l'infraction.
- Il n'est pas nécessaire de décrire tous les détails graphiques pour transmettre une agression violente ou sexuelle dans ce qui devient un document public.
- Nous proposons que les délinquants reçoivent un résumé de l'information lors d'une audience de libération conditionnelle. Cela permettrait de répondre à l'obligation d'équité procédurale d'informer les délinquants des renseignements utilisés dans les décisions les concernant, tout en permettant à la survivante de conserver une certaine vie privée. Par exemple, « la victime a décrit les préjudices psychologiques continus causés par l'infraction ».
- La LSCMLC permet déjà de fournir aux délinquants un résumé des renseignements : « Le commissaire peut autoriser, dans la mesure jugée strictement nécessaire toutefois, le refus de communiquer des renseignements au délinquant s’il a des motifs raisonnables de croire que cette communication mettrait en danger la sécurité d’une personne ou du pénitencier ou compromettrait la tenue d’une enquête licite. »[41] Ceci s'inscrit dans le contexte d'une décision prise par le SCC.
Les victimes ont besoin d'information proactive sur leurs droits après que le délinquant a été condamné à une peine de ressort fédéral
Nous avons demandé aux répondants dont les cas avaient mené à la condamnation du délinquant à une peine d'emprisonnement dans un établissement fédéral s'ils avaient leurs préférences en matière d'information
Ce que nous avons entendu des survivant.e.s :
- La plupart voulaient des informations mais ne savaient pas comment y accéder, car ils doivent accepter de recevoir des mises à jour. Parmi les survivant.e.s dont le cas a mené à une peine de ressort fédéral (n = 26),
- 91 % ont dit qu'ils voulaient en savoir le plus possible sur les services correctionnels et la libération conditionnelle (n = 23)
- 64 % étaient inscrits pour recevoir de l'information auprès du SCC ou de la CLCC (n = 22)
- 36 % n'ont pas été en contact avec le SCC ou la CLCC depuis que le délinquant a été condamné (n = 22)
- Les survivant.e.s ont été pris au dépourvu par les audiences de libération conditionnelle. Certains survivant.e.s n'ont pas été informés des audiences de libération conditionnelle ou de leur droit de soumettre une déclaration de victime en vue d'une libération conditionnelle.[42] D'autres ont découvert trop tard qu'ils avaient raté l'occasion de participer.[43]
Des lacunes dans l'enregistrement entraînent des informations de sécurité manquées
Si les survivant.e.s ne sont pas enregistrés, ils manquent des mises à jour essentielles, telles que les dates des audiences de libération conditionnelle, les dates et les conditions de libération des délinquants ou les restrictions géographiques. Si les survivant.e.s ont reçu de l'information et participé à la poursuite jusqu'au prononcé de la peine, beaucoup de gens supposent qu'ils recevraient de l'information sur les services correctionnels et la libération conditionnelle. Le système n'informe pas les survivant.e.s à moins qu'ils ne demandent à être informés.
Les survivant.e.s portent le fardeau de naviguer dans un système complexe
Une fois qu'un délinquant est dans un établissement fédéral, il incombe entièrement aux survivant.e.s de :
- Comprendre le fonctionnement du SCC et de la CLCC
- Connaître leurs droits afin de pouvoir défendre leurs intérêts et ceux de leurs proches.
- Quelles informations demander, à qui s'adresser et quoi faire dans les délais appropriés (et rigides).
Il incombe aux victimes et aux survivant.e.s – ceux qui ont subi un préjudice – de naviguer dans un système compliqué dans lequel ils sont traités après coup.
- Un survivant a raconté que la Commission des libérations conditionnelles ne l'avait pas mis à jour pendant 6 mois en raison d'une erreur informatique. Ils ont dit que leur sécurité était en jeu pendant tout ce temps.[44]
Lacunes en matière de soutien et de responsabilisation
Le BOFVAC entend régulièrement des victimes qui ne savaient pas qu'elles devaient s'inscrire auprès du SCC ou de la CLCC pour rester informées, ou qui ne comprenaient pas bien leur droit de soumettre des déclarations de victimes à la Commission des libérations conditionnelles.[45] Pour beaucoup, en particulier ceux qui avaient déjà soumis une DV au moment de la condamnation, il peut être difficile de répéter leur histoire ou de préparer un autre récit détaillé, sans soutien juridique ou thérapeutique.
Les récentes modifications législatives sont prometteuses. Le projet de loi S-12 exigeait que l'on demande aux victimes et aux survivant.e.s s'ils voulaient recevoir de l'information sur les services correctionnels.[46] Le BOFVAC continuera de surveiller la mise en œuvre de ces dispositions.
Aidez-nous à aider les survivant.e.s. Lorsque les survivant.e.s soulèvent des préoccupations ou déposent des plaintes auprès du BOFVAC, nous n’avons pas le pouvoir législatif d'exiger des éléments de preuve utilisés pour prendre une décision qui les touche directement. En conséquence, les victimes sont souvent obligées de soumettre à nouveau leurs informations et d'expliquer à nouveau leur situation, sans savoir quels documents l'agence a utilisés ni quelles conclusions ont été tirées.
- Il s'agit d'un fardeau administratif et émotionnel pour la victime.
- En revanche, le Bureau de l'enquêteur correctionnel (BEC) a le pouvoir d'exiger des renseignements pertinents à ses enquêtes – un pouvoir que le BOFVAC n'a pas actuellement.[47]
Les processus doivent refléter les réalités des survivant.e.s marginalisés. Pour les survivant.e.s autochtones et racialisés, les processus existants doivent refléter des compréhensions culturellement ancrées de la guérison, du préjudice ou de la justice. Les survivant.e.s peuvent ne pas faire confiance aux établissements qui gèrent la mise en liberté des délinquants et peuvent se sentir exclus ou marginalisés lorsqu'ils tentent de participer.
Les survivant.e.s sont forcés de faire un choix impossible : l'intimité ou la sécurité
« Le fait d'avoir assisté à l'audience de semi-liberté de mon ex l'an dernier et à l'audience de libération conditionnelle totale cette année a été une validation à bien des égards, mais c'était aussi néfaste. Comme vous le savez probablement, lors d'une audience de libération conditionnelle, les victimes sont limitées à leurs déclarations préparées et sont autrement condamnées au silence, même lorsque des contre-vérités sont dites et qu'elles sont dénigrées par le délinquant ou son représentant. »[48] [Traduction]
Dans les cas de violence sexuelle, où le contrôle coercitif et la violence psychologique sont courants, les délinquants peuvent exploiter les systèmes fédéraux de libération conditionnelle et de libération conditionnelle pour garder le contrôle. Nous avons entendu :
- Les victimes ont entendu des délinquants mentir lors des audiences de libération conditionnelle, où les victimes n'ont pas la possibilité de réfuter des déclarations inexactes, ce qui leur donne le sentiment de ne pas être entendues et d’être victimisées à nouveau.[49]
- « L’audience de libération conditionnelle a eu lieu dans un centre de guérison et le délinquant a dû traverser et faire face à « sa communauté » et « sa maison » avec tout « ceux qui l’appui » présent. Le rapport de libération conditionnelle indiquait qu'il présentait un faible risque et qu'il ne représentait « qu’un » risque pour sa partenaire intime (la survivante). »[50]
- La Commission des libérations conditionnelles a félicité le délinquant d'avoir accepté un accord de plaidoyer et de « m'avoir essentiellement épargné un procès.»[51]
- Lorsque des audiences de libération conditionnelle ont lieu dans des prisons à sécurité minimale et des centres de guérison, les survivant.e.s peuvent avoir l'impression que ces audiences ne sont pas « sécuritaires ». Les survivantes ont l'impression d'être dans l'espace de vie du délinquant.[52]
Qu'est-ce qu'une déclaration de la victime ?
Il s'agit d'une déclaration rédigée par un survivant et présentée à la CLCC ou au SCC lorsqu'ils prennent des décisions au sujet d'un délinquant. La déclaration
- décrit les répercussions du crime commis par le délinquant
- signale tout problème de sécurité
Le contenu et les limites d'une déclaration de victime se trouvent dans les documents de politique de la CLCC et du SCC.
Sécurité publique Canada a publié des éclaircissements utiles sur les déclarations de la victime.
Voir l'infographie : Préparation d'une déclaration de la victime - Canada.ca
Demander des conditions ne devrait pas être un choix douloureux entre la sécurité et la confidentialité
« Nous avons fait part à votre Bureau de nos préoccupations concernant les délinquants qui sont mis en liberté conditionnelle ou qui sont transférés dans un établissement situé dans la même collectivité que leurs victimes et qui sont en liberté avec ou sans escorte. Bien que nous reconnaissions que les délinquants finissent par être libérés dans la collectivité, du point de vue de la sécurité des victimes, il faut accorder plus de soin et d'attention à leurs préoccupations en matière de sécurité. »[53] [Traduction]
Pour demander des conditions de protection (par exemple, des restrictions géographiques), les survivant.e.s doivent souvent fournir des détails personnels sur les effets continus de l'infraction. Ces renseignements sont divulgués au délinquant. Le fait de savoir que ces renseignements seront communiqués au délinquant crée un choix impossible entre la sécurité personnelle et la vie privée.
Certaines victimes ont indiqué qu'elles ne voulaient pas décrire le tort continu à un délinquant motivé par le sadisme ou le racisme, mais qu'elles voulaient quand même qu'un tribunal ou un membre de la Commission des libérations conditionnelles connaisse les effets continus de l'infraction.
- Nous proposons que les délinquants reçoivent un résumé de l'information lors d'une audience de libération conditionnelle. Cela permettrait de répondre à l'obligation d'équité procédurale d'informer les délinquants des renseignements utilisés dans les décisions les concernant, tout en permettant à la survivante de conserver une certaine vie privée. Par exemple, « la victime a décrit les préjudices psychologiques continus causés par l'infraction ».
- Il n'est pas nécessaire de décrire tous les détails graphiques pour exprimer les préjudices causés par une agression violente ou sexuelle dans ce qui peut devenir une partie d'un document public d'un tribunal ou d'une commission des libérations conditionnelles.
Les survivant.e.s sont souvent surpris d'apprendre que les conditions de la détention pré sentencielle ne s'appliquent pas pendant l'incarcération du délinquant – à moins qu'un tribunal n'ait veillé à ce que l'ordonnance reste en vigueur.
- Les survivant.e.s peuvent demander des conditions spécifiques et expliquer la raison de leur demande aux autorités correctionnelles et aux autorités de libération conditionnelle. Les commissaires peuvent également imposer indépendamment des conditions spéciales, que la victime les ait demandées ou non.
- L'information doit également être fournie au délinquant. Des survivant.e.s nous ont dit qu'ils estiment qu'ils doivent choisir entre partager des renseignements personnels avec des étrangers ou avec le délinquant et assurer leur sécurité et celle de leur famille.
Les survivant.e.s ne réalisent pas que, dans le système correctionnel actuel, un délinquant sera libéré bien avant la fin de sa peine
« Le délinquant a reçu un verdict de culpabilité et une peine importante – deux ans et demi de prison. Je pensais qu'il ne serait pas admissible à la libération conditionnelle avant tier de sa peine, mais en fait, il n'est pas disponible pour une libération conditionnelle complète avant le tier de sa peine. Il a obtenu une semi-liberté encore plus tôt. »[54] [Traduction]
« Il y a tellement d'exemples que... de délinquants à travers le Canada qui sont condamnés et passent le strict minimum de temps en prison juste pour sortir et récidiver immédiatement. Je sais que, dans ma région, il y a un pédophile qui a été détenu pendant des années. Lorsque j'ai appris l'existence de cette personne, elle venait d'être libérée et, quelques jours plus tard, elle était de retour en détention car elle avait déjà récidivé. Lorsqu'il a finalement été reconnu coupable, il a été condamné à une peine de 10 ans. Cependant, il est éligible à une PSSE [Permission de sortir sans escorte] dès cette année. Il est admissible à une libération conditionnelle dès 2026 et sa date de libération d'office est 2029. Ça veut dire qu'il ne sera enfermé que pour un maximum de 6 ans après avoir passé 30+ [années] à abuser des pauvres enfants. Détruisant leur enfance. Leur arrachant leur innocence. »[55] [Traduction]
Les survivant.e.s sont souvent surpris d'apprendre que la durée de la peine annoncée par le tribunal n'est pas proportionnelle au temps réel que le délinquant passera en détention.
- Les survivant.e.s ont décrit se sentir trahis par le système.
- On nous a dit que cela contribue à un sentiment d'injustice, car les délinquants passent rapidement d'un niveau de sécurité à l'autre et demandent des permissions de sortir et, éventuellement, une libération conditionnelle.
- Le BOFVAC entend régulièrement parler de mythes et d'inexactitudes, parfois fondés sur des sources de divertissement, au sujet des systèmes correctionnels et de libération conditionnelle, et du système de justice pénale en général.
- Le SCC a publié des renseignements utiles sur la mise en liberté des délinquants.
À RETENIR
Pour les survivant.e.s, la justice signifie que leur voix soit respectée
et non caviardée.
Le respect de la dignité commence par l'écoute.
[1] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #439
[2] Service correctionnel du Canada. (2025, juillet). Aperçu statistique du système correctionnel et de la mise en liberté sous condition 2023 (Tableau C20c : Population totale de délinquants purgeant une peine pour une infraction avec violence, 2022-23). Gouvernement du Canada.
[3] Entretien de l’ESSAS auprès d'un.e intervenant.e #056
[4] R c. Gabriel, 1999 CanLII 15050 (ONSC)
[5] M. Lindsay. (2015). Les déclarations de la victime selon une étude sur le traitement judiciaire des affaires criminelles menée auprès de plusieurs tribunaux.
[6] Examen de la jurisprudence de la détermination de la peine pour des infractions sexuelles, 2014-2024. Analyse de Westlaw, 31 juillet 2025.
[7] Young, A., Dhanjal, K. (2021) Les droits des victimes au Canada au 21e siècle. Ministère de la Justice du Canada.
[8] Young, A., Dhanjal, K. (2021) Les droits des victimes au Canada au 21e siècle. Ministère de la Justice du Canada.
[9] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #394
[10] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse #176
[11] Sondage de l’ESSAS auprès des intervenant.e.s, réponse #98
[12] Soumission écrite au BOFVAC #13 : Centre canadien de protection de l'enfance inc.
[13] Strumpf, B. (2024). Résultats de l’Enquête nationale sur les opérations des centres d’appui aux enfants (CAE) et des centres d’appui aux enfants et aux jeunes (CAEJ) réalisée en 2022-2023. Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice du Canada, p. 19.
[14] Table de consultation de l’ESSAS #07 : Traite des personnes - Procureurs de la Couronne, police et services aux victimes. Pour une discussion sur les besoins en matière de justice des survivant.e.s ayant une déficience intellectuelle, voir Spaan, N. A., et Kaal, H. L. (2018). Victims with mild intellectual disabilities in the criminal justice system. Journal of Social Work, 19(1), 60-82.
[15] Table de consultation de l’ESSAS #07 : Traite des personnes ; Table de consultation de l’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne ; Table de consultation de l’ESSAS #17 : Application de la loi ; Table de consultation de l’ESSAS #14 : Services aux victimes
[16] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse #176
[17] Table de consultation de l’ESSAS #07 : Traite des personnes; Table de consultation de l’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne; Table de consultation de l’ESSAS #17 : Application de la loi; Table de consultation de l’ESSAS #14 : Services aux victimes
[18] Table de consultation de l’ESSAS #06 : Nouveaux arrivants
[19] Annexe D : Soumission écrite au BOFVAC #31 : Association des femmes autochtones de l'Ontario
[20] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse #867
[21] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #38
[22] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse #132
[23] Sondage de l’ESSAS auprès des intervenant.e.s, réponse #122
[24] Code criminel, LRC 1985, c C-46, art 722(8).
[25] R. c. Chaulk, 2021 NLPC 1319A00729 2021 CanLII 81813 (NL PC) | R. c. Chaulk | CanLII ; R. c. I.F.L., 2022 ONCJ 310 (CanLII), 2022 ONCJ 310 (CanLII) | R. c. I.F.L. | CanLII
[26] R c K.P., 2022 SKQB 66 (CanLII) au paragraphe 40.
[27] Charte canadienne des droits des victimes, LC 2015, c 13, arts 14 et 15.
[28] R c. C.C. (2018) ONCJ 542
[29] R c. C.C. (2018) ONCJ 542, au paragraphe 27
[30] R c. Solorzano Sanclemente 2019 ONSC 695, au paragraphe 18 ; R c. KP 2022 SKQB 66 ; R c Plumes blanches 2020 ABPC 177
[31] R c Adamko 2019 SKPC 27, au para 34
[32] R c. Friesen , 2020 CSC 9, au paragraphe 85
[33] R c. C.C. (2018) ONCJ 542.
[34] R c. C.C. (2018) ONCJ 542, au paragraphe 24.
[35] R c. Aklok, 2020 NUCJ 37 (CanLII)
[36] R c. Aklok, 2020 NUCJ 37 (CanLII). Nous soulingons. Notes de bas de page omise.
[37] R c. Friesen, 2020 CSC 9, au paragraphe 85
[38] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #537
[39] Soumission écrite au BOFVAC #46
[40] Table de consultation de l’ESSAS #05 : Enfants et jeunes
[41] Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LRC 1992, c 20, art 27(3).
[42] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #382
[43] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #519
[44] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse #129
[45] Sondage de l’ESSAS auprès des survivant.e.s, réponse # 382
[46] Parlement du Canada. (2024). Projet de loi S-12, S-12 (44-1). LEGISinfo.
[47] Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LRC 1992, c 20, art 172.
[48] Soumission écrite au BOFVAC #02
[49] Soumission écrite au BOFVAC #02
[50] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #048
[51] Soumission écrite au BOFVAC #02
[52] Sondage de l’ESSAS auprès des intervenant.e.s, réponse #304
[53] Soumission écrite au BOFVAC #13
[54] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #048
[55] Entretien de l’ESSAS auprès d’un.e survivant.e #684. Dans cette citation, SR signifie date de libération du bureau.
