R c. Jordan
« Je ne pense pas qu'il y ait quelque chose de pire pour une victime que de voir l’arrêt des procédures judiciaires. »[1] [Traduction]
L’ENJEU
L'arrêt R c. Jordan[2] par la Cour suprême du Canada en 2016 a eu des répercussions sur la prise de décisions dans l'ensemble du système de justice pénale (SJP). Les délais stricts imposés par la Cour créent des problèmes systémiques pour les survivants et le nombre de cas de violence sexuelle suspendus ou retirés de façon permanente continue d’augmenter.
EN CHIFFRES
- Plus de 268 cas d'agression sexuelle au Canada ont été suspendus en raison de délais déraisonnables depuis la décision R c. Jordan en 2016[3]
- Les procédures judiciaires pour agression sexuelle qui ont dépassé les délais fixés dans l’arrêt Jordan sont passées de 15,1 % (2016-2017) à 30,4 % (2022-2023)[4]
- 1 cas d'agression sexuelle sur 7 a fait l'objet d'un arrêt de procédures ou d'un retrait d’accusations en 2022-23 après avoir dépassé les délais fixés dans l’arrêt Jordan[5]
Dans notre sondage mené auprès de 450 intervenants :
- 54 % des procureurs de la Couronne estiment que le nombre de suspensions d'instance dans les affaires d'agression sexuelle a augmenté au cours des cinq dernières années. Seulement 4 % estiment que ce nombre a diminué
- 1 intervenant sur 3 ont vu des accusations être reportées pour éviter de déclencher le « compte à rebours »[6]
IDÉES CLÉS
- Un plus grand nombre de procédures judiciaires pour infractions sexuelles sont suspendues ou retirées
- L'arrêt R c. Jordan transforme la prise de décision dans l'ensemble du SJP
- Les arrêts des procédures gaspillent les ressources limitées des gouvernements, des groupes communautaires et des survivant.e.s
- Les survivant.e.s ont aussi des droits garantis par la Charte
- Les arrêts de procédures pour agressions sexuelles délégitimisent le SJP
- Les arrêts de procédures aggravant le traumatisme des survivants et laissant certains survivants exposés à un risque accru de violence et aggravent le traumatisme des survivant.e.s d'agression sexuelle
EN SOMME
Maintenir l'approche actuelle à l'égard de l’arrêt R c. Jordan n'est pas viable car ça compromet l’accès à la justice, viole les droits des victimes à la protection et à la participation, et mine la confiance du public dans le système judiciaire au Canada.
RECOMMANDATIONS
Le gouvernement fédéral devrait modifier le Code criminel afin
2.1 d’orienter le pouvoir discrétionnaire des juges dans les requêtes en matière de cause de retard. Les critères suivants doivent être pris en compte par la Cour quand une requête est présentée dans le cadre de l’arrêt Jordan (une requête d’arrêt de procédures pour défaut de poursuite en temps opportun) :
- la nature et gravité des accusations alléguées
- la durée du délai
- la complexité de l'affaire
- la vulnérabilité des victimes
- les actions de la défense
- les actions de la Couronne
- l'intérêt de la société à encourager le signalement des infractions et la participation des victimes et des témoins
- le préjudice aux droits des victimes garantis par la Charte
- les circonstances exceptionnelles
- d’autres facteurs, y compris les conditions locales
2.2 Conséquences du délai de la défense : Prévoir que la Couronne ait la possibilité de démontrer que plusieurs demandes procédurales contestées seront attribuées à la défense s'il a été jugé que les demandes ont été présentées sans préavis suffisant, sont frivoles ou sans fondement, comportent une argumentation superflue ou qu'il y a défaut de préparation.
2.3 Conséquences du délai des procureurs : Lorsque la Cour conclut qu'il y a eu un délai excessif de la part du procureur, à la condamnation, l’accusé pourrait recevoir un crédit de peine pour les jours au-delà des délais prévus dans l’arrêt Jordan, préservant ainsi le pouvoir discrétionnaire du juge d'accorder des suspensions d'accusations dans des cas flagrants ou exceptionnels.
2.4 Veiller à ce que les victimes soient informées des demandes de retard : Lorsqu’une demande fondée sur l'arrêt Jordan est déposée en vertu de l'alinéa 11b) de la Charte, la victime doit en être informée.
2.5 Protéger la sécurité de la victime dans les décisions relatives aux recours : Lorsqu'un tribunal conclut qu'il y a eu délai excessif et ordonne un arrêt de procédures, et lorsque l'accusation est liée à une infraction avec violence, le tribunal doit tenir compte des préoccupations relatives à la sécurité de la victime lorsqu'il met l'accusé en liberté.
Notre enquête
Arrière-plan
Dans l'affaire R c. Jordan,[7] la Cour suprême du Canada (CSC) a créé un cadre d’analyse des délais dans les poursuites relatives à une accusation criminelle. Cela est important parce qu'un délai excessif constitue une violation du droit de l'accusé à son procès en vertu de l'alinéa 11b) de la Charte, soit dans un délai raisonnable. Des jugements ultérieures ont appliqué le cadre d’analyse Jordan à d'autres parties du système de justice, comme le SJP pour les adolescents.
Jordan a établi le cadre actuel pour évaluer si un délai est déraisonnable en fixant des plafonds numériques au-delà desquels le délai est présumé déraisonnable :
- 18 mois pour les causes instruites en cour provinciale.
- 30 mois pour les causes instruites en cour supérieure avec ou sans enquête préliminaire.[8]
Qu'est-ce qu'un arrêt de procédures?
- Il y a « arrêt de procédures » lorsqu'un juge ou un procureur de la Couronne décide qu'il serait mauvais pour le système de justice que l'affaire se poursuive. Cela signifie que la question de la culpabilité ou de l'innocence ne sera jamais déterminée.
- Des arrêts peuvent être accordés lorsque l'État a agi de manière injuste, notamment en ne portant pas l'affaire devant les tribunaux en temps opportun. Un arrêt de procédures met fin à l'affaire.
- Dans d’autres cas, la Couronne ou le juge peut décider d’arrêter les procédures, auquel cas les accusations sont suspendues et l’accusé est libéré. Une fois les procédures arrêtées, le dossier n’est plus actif, mais les accusations ne sont pas retirées. La procédure peut donc être reprise dans certaines conditions. Cette reprise est toutefois impossible passé un an après l’arrêt des procédures.
Définition « d’arrêt des procédures », Justice pas-à-pas, Éducation juridique communautaire Ontario. Consulté le 1er août 2025.
Ces délais prescrits par l'arrêt Jordan s'appliquent à toutes les infractions, quelle que soit la gravité de l'accusation.[9] Les retards causés par la défense ou acceptés par la défense ne sont pas pris en compte dans la limite numérique. Les délais causés par la Couronne ou le tribunal sont pris en compte dans la limite numérique. La défense peut demander à la Cour de suspendre les accusations si la limite est atteinte ou s'il n'y a aucune perspective raisonnable que la poursuite puisse être achevée dans les délais Jordan.[10] La Couronne peut vaincre cette requête en démontrant qu'il y avait des circonstances exceptionnelles ayant mené au délai.[11]
L’arrêt Jordan a été un moment marquant pour le système de justice canadien, car le cadre d'analyse de l'arrêt Jordan a créé des valeurs numériques claires que tous les membres du SJP, quelle que soit leur juridiction, devraient suivre. Il a donné aux procureurs, à la défense, au personnel des tribunaux, à la victime, aux témoins, au public et aux accusés une certitude quant à la durée probable des poursuites. La décision a également donné aux victimes et aux témoins une certaine certitude quant à la période pendant laquelle ils interagiraient avec le SJP.
La plupart des poursuites pour agression sexuelle sont menées par des procureurs provinciaux, dans des salles d'audience provinciales appuyées par des employés provinciaux. Cependant, c'est le gouvernement fédéral qui est responsable de l'élaboration du droit pénal. Le gouvernement fédéral a clairement un rôle à jouer pour résoudre le « problème Jordan ».
Ce que nous avons entendu
Au Canada, le nombre croissant d’arrêts de procédures pour des cas de violence conjugale et de violence sexuelle en raison du cadre d'analyse de l'arrêt Jordan est inquiétant, et l’impact disproportionné sur la sécurité des femmes l’est tout autant. Il s'agissait d'un thème important durant nos entretiens et nos tables de consultation, dans nos sondages et les soumissions écrites que nous avons reçues, ainsi que dans notre examen de la jurisprudence et notre analyse d’articles de presse.
Les arrêts de procédures liés au cadre d’analyse Jordan ne sont pas répartis uniformément au Canada et certaines régions du pays en voient rarement. Le cadre d'analyse a eu un impact positif pour certaines administrations où la plupart des poursuites criminelles ne sont pas retardées au-delà des délais prescrits.
D'autres administrations continuent d'enregistrer un nombre important d’arrêts de procédures. L'Alberta est la seule province qui divulgue de manière proactive le nombre d’arrêts en vertu des demandes liées à l’arrêt Jordan.[12]
En 2017, un an seulement après l’arrêt R c. Jordan, le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (LCJC) a écrit ce qui suit :
« Les décisions récentes des tribunaux d’ordonner l’arrêt des procédures dans des procès pour meurtre (voir les décisions R c. Picard, 2016 ONSC 7061 et R c. Thanabalasingham, 2017 QCCS 1271) et pour agression sexuelle à l’endroit de personnes mineures (voir la décision R c. Williamson, 2016 CSC 28) heurtent la conscience des gens et minent la réputation du système judiciaire au Canada. »[13]
De nombreux critères du Code criminel et des affaires criminelles comprennent l'expression suivante : « Est-ce que cette action ou décision aura un « effet préjudiciable à la bonne administration de la justice »1
La CCDV indique que la prise en considération des droits des victimes sert la bonne administration de la justice.2
1 Code criminel, alinéas 276(2)d), 278.92(2)b) ; Code criminel, paragraphes 486(1), 486.1(1), 486.5(1) ; Code criminel, alinéa 537(1)h) ; Code criminel, articles 715.1 et 715.2
2 CCDV, préambule.
Un accroissement d’infractions sexuelles font l'objet d'un arrêt de procédures. Les choses ont empiré depuis que le Comité sénatorial LCJC a publié son rapport. De plus en plus d'affaires de violence sexuelle et d'autres cas de crimes violents sont suspendues, et les reportages des médias sur les suspensions dans les affaires de violence flagrante sont de plus en plus fréquents.
Dans un article d'opinion publié en 2024 dans le Globe and Mail, Robyn Urback écrit de deux cas de violence sexuelle de longue durée contre des enfants pour lesquels il y a eu arrêt de procédures. L’article fait écho au sentiment du Comité sénatorial. Urback rapporte que dans chaque cas, « un nombre plutôt arbitraire signifiait que les droits de l'accusé l’emportaient sur la justice pour la victime... Les Canadiens ne peuvent pas et ne veulent pas garder confiance dans un système de justice qui refuse si manifestement la justice aux victimes d'actes criminels. »[14] [Traduction]
Le nombre d’arrêts de procédures augmente
Un rapport d'enquête de la CBC en 2025 a révélé que plus de 268 affaires criminelles de violence sexuelle au Canada ont été suspendues depuis 2016 en raison de l'arrêt R c. Jordan.[15] Les journalistes Ireton et Oulette ont soumis des demandes d'accès à l'information aux 13 provinces et territoires et ont découvert une mosaïque de cadres de reportage sans données fédérales cohérentes sur les demandes présentées par l'arrêt Jordan devant les tribunaux. Les défenseurs qui travaillent avec les survivants de violences sexuelles soupçonnent que les problèmes de suivi cachent l'ampleur du problème.
- Angela Marie MacDougall, directrice générale des Battered Women Support Services (BWSS) de Vancouver, a déclaré que le nombre semblait faible.[16] Depuis 2018, son organisation suit les reportages des médias et étudie l'impact de l’arrêt Jordan sur les survivantes de violence fondée sur le sexe (VFS).[17] Le 18 janvier 2022, BWSS a écrit une lettre ouverte à l'ancien ministre fédéral de la Justice, David Lametti, au sujet des effets néfastes du cadre d'analyse de l'arrêt Jordan à la suite d'un examen de 140 cas d'applications d’arrêt de procédures dans des cas de VFS de 2016 à 2020.[18]
Un article de CBC de 2024 a rapporté que la plupart des affaires criminelles en Ontario (56 % en 2022-2023) se terminent maintenant par un arrêt de procédures, le rejet ou l'absolution des accusations avant le procès.[19] Ils ont constaté que 580 affaires criminelles en Ontario ont fait l'objet d'un arrêt des procédures pour cause de délai déraisonnable en vertu du cadre d'analyse de l'arrêt Jordan de 2016 à la fin de 2023, dont 145 cas d'agression sexuelle. En 2023 seulement, 59 cas d'agression sexuelle ont été suspendus en raison d'un retard.
Notre analyse des données publiques de l’Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC) suggère que ces chiffres sous-estiment l'ampleur du problème pour les raisons suivantes :
- de nombreux cas qui sont suspendus ou retirés après avoir dépassé ou approche la limite de l'arrêt Jordan ne font jamais l'objet d’une audience et n'apparaissent pas dans les bases de données provinciales ou territoriales des arrêts de procédures liés à l'arrêt Jordan.
- l’EITJC compile les données des tribunaux administratifs de toutes les provinces et de tous les territoires du Canada, à l'exception des données des cours supérieures de l'Ontario, du Manitoba et de la Saskatchewan.[20]
D'autres reportages dans les médias de l'Ontario ont souligné une augmentation importante du recours aux arrêts de procédures, ce qui suggère que les données de l'EITJC pourraient sous-estimer l'impact sur les cas d'agression sexuelle.
De 2016-2017 à 2022-2023, le pourcentage de cas d'agression sexuelle dépassant la limite de Jordan au Canada a doublé, passant de 15,1 % à 30,4 %.[21] Il s'agit d'une proportion nettement plus élevée que la moyenne des cas de crimes violents.[22]
(Consultez la version PDF pour voir le graphique à l'appui.)
[23] Étant donné que les causes d'agression sexuelle devant les tribunaux pour adultes étaient déjà les plus susceptibles de dépasser la limite de Jordan , cela signifie que 14,4 % de toutes les causes d'agression sexuelle devant les tribunaux pour adultes ont été suspendues ou retirées, ce qui représente 1 cause d'agression sexuelle sur 7 devant les tribunaux pour adultes au Canada, soit environ 500 causes.[24] En 2022-2023, les infractions d'agression sexuelle dans les tribunaux pour adultes étaient les plus susceptibles d'être suspendues ou retirées après avoir dépassé la limite établie dans l'arrêt Jordan.
(Consultez la version PDF pour voir le graphique à l'appui.)
Pourquoi les arrêts de procédures augmentent-ils ?
Au cours de nos consultations, nous avons entendu parler de plusieurs sources de retards :
- Analyse tardive des trousses médico-légales en cas d'agression sexuelle[25]
- Augmentation du nombre d'élections pour les procès devant jury dans certaines régions[26]
- Le nombre de juges est limité et le besoin continu de nominations à la magistrature[27]
- Manque d'espace et de personnel dans les palais de justice[28]
- Administration inefficace dans la planification des audiences[29]
- Accusés changeant d'avocat[30]
- Changements de juges ou de procureurs de la Couronne[31]
- L'utilisation des motions préalables au procès comme tactique pour causer des délais[32]
- Requêtes contestées portant sur des questions auparavant non contestées, telles que les aides au témoignage[33]
- Demandes présentées avant et pendant la période du procès en vertu des articles 276, 278.92 et 278.1 du Code criminel[34]
- La traite de personnes est exclue de l'application de l'article 276, ce qui nécessite des arguments supplémentaires et du temps d'audience pendant les motions[35]
- Un plus grand volume de documents électroniques, de messages texte et de séquences vidéo[36]
- Ressources limitées dont disposent les procureurs de la Couronne pour plaider les requêtes en vertu de l'alinéa 11b[37]
- Utilisation stratégique des requêtes en cours d’instance pour des dossiers privés[38]
- De longs contre-interrogatoires[39]
- Survivant.e.s nécessitant des soins médicaux pour leurs blessures[40]
Les intervenants ont également reconnu le rôle que la pandémie de COVID-19 a joué dans la création de retards et l'augmentation du risque que les cas graves ne soient pas entendus ou qu'ils entraînent un arrêt de procédures après l'examen des éléments de preuve.[41] D'autre part, un intervenant a déclaré qu'il était déplacé de continuer à mettre la faute sur la COVID-19 et que les bureaux de la Couronne avaient déjà résolu des cas qui faisaient partie de l'arriéré.[42]
D'autres pays sont également aux prises avec la nécessité d’effectuer les poursuites en temps opportun.
Un rapport de 2025 du Commissaire aux victimes pour l'Angleterre et le Pays de Galles mentionne que les retards des tribunaux de la Couronne « nuisent activement aux victimes », avec près de 48 % des procès répertoriés ajournés au moins une fois et certains reportés cinq fois ou plus.[43]
Aperçu comparatif du Royaume-Uni En 2022, l'Angleterre et le Pays de Galles ont modifié leur droit pénal pour autoriser les témoignages préenregistrés dans toutes les affaires de viol adulte et d'agression sexuelle grave afin de faciliter la participation des survivantes.[44] Une étude de 2024 a révélé que les cas de témoignages préenregistrés entraînaient des taux de condamnation plus faibles, une probabilité plus faible de plaidoyers de culpabilité et des délais plus longs pour les procès.[45] Les taux de condamnation ont chuté à 41 % pour les affaires avec preuves préenregistrées, contre 69 % pour les affaires avec preuves en direct. |
Ce changement est attribué au fait que les tribunaux privilégient les procès avec des témoins en direct attendant d'être contre-interrogés. Le manque de salles d'audience et de procureurs est également à l'origine de l'augmentation des délais.
Pratique prometteuse : Protocole d'accès à la justice en temps opportun de la Nouvelle-Zélande
En juin 2024, le juge en chef du tribunal de district de Nouvelle-Zélande a publié un protocole d'accès à la justice en temps opportun. Ce protocole établit une norme publique selon laquelle 90 % des affaires pénales doivent être résolues dans des délais catégoriels, avec un rapport trimestriel sur le rendement.[46] |
Le Protocole comporte trois catégories de cas en fonction de la complexité et de la gravité, avec des délais correspondants. Les délais vont de 6 mois pour les moins complexes à 15 mois pour les plus complexes. Le Protocole reconnaît que, même dans ces délais, certains cas prendront plus de temps. Le Protocole donne également au système jusqu'en 2027 pour atteindre cet objectif.
« La norme est ambitieuse et constitue une prochaine étape importante dans nos efforts pour améliorer la justice en temps opportun. »
Juge en chef du tribunal de district de Nouvelle-Zélande
L'arrêt R c. Jordan transforme la prise de décisions dans l'ensemble du SJP
Il est devenu clair au cours de notre enquête que l’arrêt R c. Jordan influe sur les décisions dans l'ensemble du SJP et que les arrêts de procédures ne sont qu'un élément parmi d'autres. Les efforts visant à éviter les arrêts de procédures ont suscité des innovations et des investissements dans des stratégies visant à améliorer l'efficacité, mais ont également entraîné des conséquences imprévues qui engendrent des retards supplémentaires ou augmentent les risques pour la sécurité publique.
Délai avant l'inculpation. Le dépôt ou l'approbation d'accusations est parfois retardé afin d'éviter de déclencher le « compte à rebours de Jordan ». On nous a dit que, dans certains cas, il y a suffisamment de preuves pour procéder à une arrestation, mais que la police ou la Couronne veulent que tout le dossier soit aligné afin d’uniformiser les poursuites et d'éviter les retards.
Problèmes de sécurité. Un procureur et un haut responsable de la police ont mentionné que cela ne protégeait pas les survivantes, les laissant dans des situations qui peuvent compromettre leur sécurité et augmenter le risque de nouvelles violences ou de féminicides.[47]
Près de 2 intervenants sur 5 de la profession juridique rapportent avoir observé des délais avant l'inculpation, soit :
- 38 % % des policiers
- 45 % % des avocats de la défense
- et 36 % % des procureurs de la Couronne.
(Consultez la version PDF pour voir le graphique à l'appui.)
Inscription d'un plaidoyer. Des intervenants nous ont informés que l'affaire R c. Jordan a fait en sorte qu'un plus grand nombre d'accusés ont retardé la présentation d'un plaidoyer ou l'acceptation d'une négociation de plaidoyer pendant qu'ils attendaient le « compte à rebours de Jordan ». Ils ont dit qu'il y a eu une augmentation du nombre de cas dans lesquels les préparatifs judiciaires avec une victime sont terminés et l'audience est annulée à la dernière minute.[48]
- Impact sur les services. Ils ont indiqué qu'il s'agit d'une dépense importante de ressources limitées pour les services aux victimes et que cela impose aussi un stress supplémentaire sur les victimes.[49]
Une proposition visant à modérer le cadre d’analyse de l’arrêt Jordan
En 2024, le projet de loi C-392 proposait de codifier le cadre d'analyse de l'arrêt Jordan et d'utiliser la clause dérogatoire de la CCDV pour exempter les infractions primaires (comme l'agression sexuelle) du cadre d'analyse de l'arrêt Jordan. Ce projet de loi d'initiative parlementaire n'a pas été débattu à la Chambre des communes.
Requêtes préalables au procès. Nous avons entendu que l’arrêt R c. Jordan a encouragé la défense à recourir à des requêtes admissibles, particulièrement dans les cas de violence sexuelle.
- Retards stratégiques. Des intervenants ont décrit comment les motions préalables au procès multiples sont utilisées pour prolonger les procédures et épuiser les plaignants.[50]
- Utilisation abusive de Jordan. Un procureur de la Couronne a déclaré que les avocats de la défense avaient utilisé l’arrêt Jordan comme une « épée » plutôt que comme le « bouclier » qu'il était censé être pour protéger les droits de l'accusé garantis par la Charte.[51]
- Manipulation des protections disponibles pour les survivant.e.s. Les avocats de la défense sont incités à demander des dossiers de tiers, à présenter des demandes pour présenter des preuves des antécédents sexuels du plaignant, à soulever des objections à l'utilisation d'aides au témoignage, à présenter des demandes pour produire des documents concernant le plaignant et à mener de longs contre-interrogatoires. Il peut y avoir des raisons légitimes pour la défense de prendre ces mesures, de sorte qu'il devient difficile de discerner quand les pratiques peuvent être exploitantes.
Participation des victimes. Nous avons entendu des préoccupations selon lesquelles les efforts visant à éliminer rapidement les arriérés de cas post-COVID ont eu un impact négatif sur la participation et les droits des victimes.
- Contribution limitée. Les résolutions de plaidoyer ont souvent lieu au moment des audiences de mise en liberté sous caution, ce qui donne aux victimes peu ou pas d'occasions de soumettre une déclaration de la victime.
- Ressources limitées. Les services d'aide aux victimes en milieu rural sont particulièrement mis à rude épreuve, car ils ne disposent pas de ressources suffisantes pour soutenir adéquatement les survivant.e.s lorsque les affaires sont traitées d'urgence.
- Les survivant.e.s ayant des besoins complexes peuvent être précipités pour témoigner sans être préparé.e.s. Un travailleur de soutien judiciaire a raconté le cas d'un survivant ayant subi un traumatisme crânien qui avait été amené d'urgence à des procédures judiciaires sans avoir été préalablement contacté par la Couronne.
Accords de plaidoyer. Nous avons entendu qu'il n'y a aucun incitatif pour l'accusé à accepter une négociation de plaidoyer tôt dans le processus en raison de la possibilité que les accusations soient suspendues en vertu de l’arrêt Jordan.
- Les procureurs de la Couronne peuvent accepter des ententes de plaidoyer moins favorables pour éviter les arrêts de procédures.[52]
- Ressources limitées. On nous a dit que les arrêts de procédures au Yukon étaient rares jusqu'à ce que le financement réduise le nombre de procureurs disponibles, ce qui a mené à des négociations de plaidoyer rapides pour éviter les arrêt de procédures.[53]
Abandons. Lorsque le temps presse et qu'une audience est ajournée, la Couronne peut décider que la perspective raisonnable d'une condamnation s'est évaporée et peut suspendre ou retirer les accusations.
- Retraits stratégiques. Deux intervenants estimaient que la Couronne retirait stratégiquement les accusations par crainte de ne pas respecter les délais prévus dans l'arrêt Jordan.[54] Un ancien procureur de la Couronne nous a fait remarquer que ces retraits – peut-être en raison d'un manque de ressources judiciaires – relèvent de leur responsabilité en tant que procureurs de la Couronne.
Procès devant jury. Nous avons entendu que les accusés choisissent de plus en plus d'être jugés par un jury,[55] surtout dans les cas d'agression sexuelle qui sont également admissibles à une enquête préliminaire. Les avocats de la défense reconnaissent la complexité des procès devant jury pour le respect des délais fixés dans l’arrêt Jordan. Ils reconnaissent également que les juges ont reçu une formation sur les agressions sexuelles.
- Élection stratégique. Les avocats de la défense préfèrent les procès devant jury parce qu'ils prennent plus de temps à administrer et que les jurés sont plus vulnérables aux mythes et aux stéréotypes sur les agressions sexuelles.[56]
- Résultats du procès. Certains avocats croient qu'il est plus difficile d'obtenir des condamnations dans les procès devant jury et que ceux-ci sont plus susceptibles que les procès devant juge seul d'aboutir à des arrêts de procédures.[57]
- Suggestion de réforme. La Charte accorde le droit de choisir un procès devant jury pour les infractions passibles d'une peine maximale de 5 ans d'emprisonnement ou plus, mais la plupart des peines pour les infractions sexuelles ne dépassent pas 5 ans. Par exemple, les peines maximales pour les infractions sexuelles vont de 10 ans à l'emprisonnement à perpétuité. Cependant, la durée médiane d'incarcération pour agression sexuelle (niveaux 1, 2 et 3) de 2015 à 2019 était de moins de 2 ans.
| Infraction sexuelle | Peine maximale | Peine médiane d'emprisonnement (2015-2019)58 |
|---|---|---|
| (niveau 1) Agression sexuelle | 10 ans (si la victime a 16 ans ou plus) 14 ans (si la victime a moins de 16 ans) |
Victime adulte (18+) : 180 jours Jeunes victimes (12 à 17 ans) : 270 jours Enfant victime (0-11 ans) : 365 jours |
(niveau 2) Agression sexuelle armée ou infliction de lésions corporelles
|
14 ans | 407 jours (moins de 18 mois) |
(niveau 3) Agression sexuelle grave
|
Prison à vie | 678 jours (moins de 2 ans) |
- Certains procureurs de la Couronne ont suggéré d'abaisser les peines maximales afin d'éliminer le droit à un procès devant jury et d'améliorer l'efficacité, ou d'élaborer un processus conforme à la Charte pour procéder à des procès devant juge seul où la Couronne et la défense conviennent formellement de ne pas demander une peine de 5 ans ou plus.[59]
Décisions précipitées et très lourdes. Les intervenants se sont dits préoccupés par le fait que les cas d'agression sexuelle grave sont de plus en plus précipités dans le processus judiciaire, ce qui a une incidence sur la qualité et les résultats des cas.[60]
- Ressources limitées. Les juges n'ont pas suffisamment de temps pour examiner les demandes de conférences préparatoires lorsqu'elles doivent être entendues immédiatement avant le procès
- Disponibilité de la salle d'audience. La disponibilité limitée des salles d'audience nuit à la vitesse à laquelle les affaires peuvent être entendues et tranchées. Le besoin pour salles d'audience équipées de télévision en circuit fermé (CCTV) ou d'autres accommodements pour les témoins sont grandissant et celles-ci sont plus rares et donc moins disponibles
- Cas complexes. Les cas deviennent plus longs et plus complexes, avec peu de temps avec les survivant.e.s pour se préparer, mais les ressources pour des avocats expérimentés et un mentorat approprié diminuent
« Les procédures [d'agression sexuelle] sont les poursuites les plus longues. Les dates de présentation des demandes ajoutent beaucoup de temps aux estimations, et ces dates doivent être étalées pour donner au juge suffisamment de temps pour examiner les demandes. Étant donné que les accusations sont graves, l'accusé dispose de beaucoup de temps pour retenir les services d'un avocat, et ce délai n'est pas déduit du plafond de 18 mois. Les procès s'allongent et les contre-interrogatoires sont rarement écourtés. Les procès sont surchargés et les procureurs de la Couronne qui ont peu d'expérience se voient confier ces affaires avec peu de mentorat ou de temps pour comprendre ce domaine du droit, rencontrer la victime et vraiment préparer le cas. Les affaires sont complexes et les ressources continuent de diminuer. »[61] [Traduction]
Un procureur de la Couronne
Les arrêts de procédures entraînent une utilisation inefficace des ressources gouvernementales et communautaires, ainsi que celles des survivants
Lorsque les affaires sont suspendues après des investissements importants en temps, en argent et en énergie émotionnelle, le résultat est une perte totale de valeur pour de nombreuses personnes. Les survivant.e.s sont laissé.e.s sans résolution. Il n'y a pas eu de décision sur les allégations. Les soutiens communautaires sont gaspillés ou réduits. Les systèmes publics absorbent les coûts sans obtenir de résultats. L'arrêt R c. Jordan a rendu ce gaspillage plus fréquent, plus visible et plus coûteux.
Perte de ressources publiques et communautaires
Un seul cas qui est suspendu en vertu du cadre d'analyse de l'arrêt Jordan a une incidence négative sur les investissements du gouvernement et des collectivités, y compris les coûts suivants :
- Enquêtes policières et analyse de trousses médico-légales en cas d'agression sexuelle
- Aide juridictionnelle pour l'accusé
- Avis juridique indépendant demandé par le plaignant
- Représentation juridique du plaignant pour les demandes d'antécédents sexuels et de dossiers privés
- Temps consacré par les procureurs de la Couronne et le personnel à l'examen et à la préparation des cas
- Les juges, le personnel des tribunaux et le temps administratif
- Infrastructure physique des salles d'audience
- Services d'aide aux victimes et aux témoins
- Aides au témoignage (p. ex., maîtres-chiens de thérapie)
- Services des CAEJ et des CAVAC
Ces ressources sont financées par les budgets gouvernementaux, les subventions et les dons aux organismes communautaires. Lorsque des affaires sont suspendues en raison de délais, il s'agit d'un gaspillage important de ressources qui pourraient être mieux investies pour améliorer l'accès à la justice. Le nombre croissant d’arrêts des procédures en vertu de l'arrêt R c. Jordan est une perte d’argent – de sources publiques et privées.[62]
Coûts personnels des survivants
Les survivant.e.s sont financièrement touché.e.s par le processus judiciaire. Il ne s'agit pas de dépenses planifiées ou volontaires, personne ne budgétise pour être victime d'un crime. Les survivant.e.s absorbent les coûts de la participation, souvent dans de moments difficiles et douloureux. Lorsque les accusations sont suspendues, ces dépenses sont gaspillées.
Temps et travail émotionnel :
- Congés du travail, jours de vacances payés ou congés non payés
- D'innombrables heures à faire des recherches sur le système juridique sans avoir accès à des services juridiques
- Plans annulés et autres perturbations personnelles
- Frais de thérapie ou de counseling pour le traumatisme et le stress d'être dans une salle d'audience
- Frais de garde d'enfants ou d'animaux
- Les frais de présence à la salle d'audience, comme le stationnement, les déjeuners, le transport en commun
Dépenses personnelles :
- Transport et hébergement (en particulier dans les collectivités rurales ou éloignées)
- Les frais médicaux qui ne sont pas couverts, y compris les soins dentaires, les soins chiropratiques, la psychothérapie et la physiothérapie
Au cours de l'année écoulée, de nombreux survivants ont souligné le lourd fardeau sur eux et sur leurs enfants.[63]
Impact économique national
En 2014, le ministère de la Justice a estimé que la criminalité au Canada avait coûté aux survivant.e.s 13,99 milliards de dollars en pertes directes et tangibles, y compris les types de dépenses décrites ci-dessus.[64] Ajusté en fonction de l'inflation en 2024, ce montant pourrait atteindre 20,85 milliards de dollars,[65] sans tenir compte de l'augmentation des taux de criminalité, de l'augmentation de la population et de l'indice de gravité de la criminalité de 2014 à 2024.[66]
Directives de la Cour suprême du Canada sur les délais des procès criminels
Jordan s'est appuyé sur plusieurs arrêts fondamentaux de la CSC sur les délais : R c. Morin (1992), R c. Askov (1990) et d'autres. Ces arrêts déploraient le problème des délais dans le SJP et ont créé divers tests qualitatifs pour déterminer si le délai était déraisonnable.
- Dans l’arrêt Jordan, la CSC a conclu que le cadre d'analyse de l'arrêt Morin était indûment complexe et qu'il menait à des micro-comptages et à des rationalisations sans fin. Le cadre de Jordan, à son tour, a été critiqué comme « laissant tomber tout le monde. »[67]
- Que ce soit dans l’arrêt Jordan, Morin ou Askov, la CSC a constamment souligné l’intérêt de la société à réduire les retards dans le SJP.
« Les victimes ont également un intérêt particulier à ce que les procès criminels se déroulent dans un délai raisonnable, et tous les membres de la communauté ont le droit de veiller à ce que le système de justice fonctionne de manière équitable, efficace et avec une diligence raisonnable. L'échec du système judiciaire à le faire conduit inévitablement à la frustration de la communauté à l'égard du système judiciaire et, finalement, à un sentiment de mépris pour les procédures judiciaires. »[68] [Traduction]
Des décisions ultérieures de la Cour suprême appliquant le cadre d'analyse de l’arrêt Jordan dans des affaires de crimes violents et de jeunes contrevenants ont suivi une logique similaire. Dans l'arrêt R c. J.F., la Cour a réitéré que les procès en temps opportun
- Encouragent une meilleure participation des victimes et des témoins.
- Minimisent l'inquiétude et la frustration.
- Leur permettent de reprendre leur vie plus rapidement.
- Aident à maintenir la confiance du public dans l'administration de la justice[69]
La CSC a observé que les délais prolongés causent également un préjudice aux victimes, aux témoins et au système de justice dans son ensemble. Dans l’affaire R c. Thanabalasingham, où il s'agissait d'un féminicide d'un partenaire intime, la Cour a confirmé l'arrêt des procédures à la suite d'un long délai et a déterminé que le droit garanti par l'alinéa 11b) de la Charte profite autant aux accusés qu'aux victimes et à la société.[70]
Les victimes d'actes criminels ont des droits garantis par la Charte
Les préoccupations des victimes dans les procédures de justice pénale sont parfois écartées parce que les accusés ont des droits précis en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Cette perspective diminue la directive du législateur de reconnaître que les victimes d'actes criminels ont également des droits garantis par la Charte. Prenons ces exemples :
Projet de loi C-46 : Loi modifiant le Code criminel (communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre sexuel)
ATTENDU que le Parlement du Canada reconnaît que la violence a des effets particulièrement néfastes sur les chances d'égalité des femmes et des enfants au sein de la société et sur leurs droits à la sécurité de leur personne, à la vie privée ou au même bénéfice de la loi qui sont garantis par les articles 7, 8, 15 et 28 de la Charte canadienne des droits et libertés
ATTENDU que le Parlement du Canada entend promouvoir et contribuer à assurer la pleine protection des droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés pour tous, y compris ceux qui sont accusés de violence ou d'exploitation sexuelles et ceux qui sont ou pourraient devenir des victimes de violence ou d'exploitation sexuelles
ATTENDU que les droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés le sont pour tous et qu'en cas de conflit, l'équilibre entre eux doit être assuré dans la mesure du possible
Charte canadienne des droits des victimes (CCDV)
Attendu que les victimes d’actes criminels ont des droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés
Attendu que la prise en considération des droits des victimes sert la bonne administration de la justice
La Cour suprême a reconnu à maintes reprises les droits des victimes d'actes criminels garantis par la Charte :
- R c. Seaboyer [1991] 2 RCS 577
- R c. O'Connor, 1995 CanLII 51 (CSC)
- R c. J.Z.S., 2008 BCCA 401, pourvoi rejeté 2010 CSC 1
- R c. Levogiannis, 1993 CanLII 47 (CSC)
- R c. Osolin, [1993] 4 RCS 595
- R c. Wyatt, 1997 CanLII 12488 (BCCA)
- R c. L. (D.O.), 1993 CanLII 46 (CSC)
- R c. N.S., 2012 CSC 72 (CanLII)
- (L.L.) c. B. (A.), 1995 CanLII 52 (CSC)
- R c. Mills, 1999 CanLII 637 (CSC)
- R c. Brown, 2022 CSC 18
« Soyez honnête avec les victimes au sujet de l'état du système de justice pénale. Combien d'affaires sont suspendues en raison de retards ? Et à quelle fréquence les accusations sont-elles abandonnées par la Couronne ? Et combien d'affaires aboutissent réellement à une condamnation ? Si le système de justice pénale n'obtient pas beaucoup plus de financement pour que les affaires ne soient pas systématiquement rejetées, vous ne devriez pas faire subir aux survivants le traumatisme du signalement. » [Traduction]
Enquête d’ESSAS auprès des survivant.e.s ; Réponse #275.
Le droit de l'accusé à une défense pleine et entière dans notre système, bien qu'il soit large, n'est pas absolu. « l'art. 7 de la Charte reconnaît à l'appelant le droit à un procès équitable; il ne lui donne pas le droit de bénéficier des procédures les plus favorables que l'on puisse imaginer. »[71]
Étant donné que l'agression sexuelle constitue une violation des droits de la personne d'une victime, ses droits ne devraient pas être moins pris en considération que le droit de l'accusé à un procès équitable en vertu de l'alinéa 11b). À notre avis, les droits de la victime garantis par la Charte peuvent être mis en jeu :
- lorsque les procédures de signalement des agressions sexuelles interrogent les victimes sur leurs antécédents sexuels (droits à l'égalité)
- lorsque les demandes de dossiers privés touchent davantage les femmes (qui sont plus souvent victimes d'agression sexuelle) que les hommes (droits à l'égalité)
- lorsque les demandes de dossiers privés ont un impact disproportionné sur les personnes 2ELGBTQI+
- lorsque les demandes de documents privés ont une incidence disproportionnée sur les personnes vulnérables et les Autochtones, qui sont plus susceptibles d'avoir des documents institutionnels ;
- lorsque l'accusé utilise le droit criminel pour accéder aux dossiers thérapeutiques d'une survivante (les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives)[72]
- lorsque les effets du régime des dossiers privés augmentent les risques pour la santé d'une survivante (droits à la vie et à la sécurité de la personne)
- lorsque la défense cherche à présenter des éléments de preuve concernant les antécédents sexuels du plaignant ou des dossiers privés concernant le plaignant
Lorsque les intérêts d'une personne en matière de sécurité ou d'égalité sont menacés, elle a le droit d'y participer de manière significative.[73]
Dans l'affaire R c. Jordan, la CSC n'a fait que 11 renvois à des plaignants ou à des victimes d'actes criminels dans une décision de 87 pages. L'analyse met l'accent sur la façon dont des procès en temps opportun peuvent minimiser les perturbations et les souffrances qui empêchent les victimes d'aller de l'avant dans leur vie. Toutefois, l’arrêt R c. Jordan n'analyse pas les droits pertinents des victimes d'actes criminels garantis par la Charte et ne met pas en balance le droit de l'accusé à un procès équitable et les droits des victimes.
L'intégrité physique des survivant.e.s d'agression sexuelle a été violée lors de l'agression. Pourtant, leur voix est souvent réduite au silence et leur corps transformé en objet de preuve.
- Du point de vue de la victime, il est stupéfiant de constater que la violation de l'autonomie physique d'une survivante (droit humain à la sécurité de la personne) est un fait qui doit être prouvé, discuté et étiqueté, tandis que les droits de l'accusé (droit à un procès équitable, entre autres) sont affirmés à maintes reprises par de nombreux professionnels et procédures de justice pénale.
- Les survivant.e.s décrivent souvent le processus de justice pénale comme « les déshumanisant pour en faire des pièces à conviction, analysant leur culpabilité pour les violences commises contre eux ».[74][Traduction]
Le cadre d'analyse de l'arrêt Jordan, combiné à des requêtes complexes en matière de preuve, oblige systématiquement les survivant.e.s à choisir entre l'accès à leurs droits à la vie et à la sécurité de la personne ou l'abandon de l'affaire.
« Ces procès (pour agression sexuelle) sont souvent beaucoup plus compliqués que la moyenne, ce qui signifie qu'ils peuvent prendre plus de temps à passer par le système et sont donc plus susceptibles d'être suspendus. Lorsqu'un plaignant doit choisir entre exercer son droit légal d'avoir recours à l'assistance d'un avocat et contester l'admissibilité des documents conformément au régime établi dans le Code et risquer que les accusations soient suspendues en raison du délai concomitant, ou renoncer à ces droits à la vie privée pour s'assurer que l'affaire aboutit à un verdict, la justice est entravée. »[75] [Traduction]
De nombreux survivant.e.s sont en colère parce que le signalement les expose aux méfaits du SJP sans les avertir de la possibilité qu'une affaire grave soit rejetée après avoir été interrogés, avoir vu leurs dossiers assignés à comparaître, témoigner dans un forum public et avoir été contre-interrogés sur des aspects intimes de leur vie.
- Une survivante a été expressément informé par la Couronne qu'il n'y aurait jamais d'arrêt des procédures dans la poursuite pour voies de fait en raison de la nature aggravée violente de l'infraction et de la force de la preuve, mais l'affaire a été suspendue l'année suivante à la suite d’une requête en vertu de l'alinéa 11b).[76]
« On m'a dit qu'il valait mieux passer à autre chose. Ce n'est pas correct. »[77] [Traduction]
Nous exhortons le gouvernement fédéral, en réponse à l'arrêt Jordan, à veiller à ce que les droits des victimes garantis par la Charte soient pris en compte. Cela comprend toute analyse effectuée en vertu de l'article 1.
- Les éléments de preuve qui nous ont été fournis indiquent qu'il n'y a pas de proportionnalité entre les objectifs du cadre d'analyse établi dans l’arrêt Jordan et son effet sur les survivant.e.s d'actes criminels.
- Nous croyons également qu'un arrêt de procédures qui découle du cadre d'analyse établi dans l'arrêt Jordan ne constitue pas une atteinte minimale aux droits des survivant.e.s garantis par la Charte. À l'heure actuelle, les survivants ne sont pas du tout pris en compte dans le cadre de l'arrêt Jordan.
- La CSC a souligné que « la suspension a été reconnue comme la réparation la plus extrême disponible en cas de violation de la Charte, et qu'elle doit être réservée à des cas exceptionnels ».[78] L'ordonnance systématique de sursis pour les infractions de violence sexuelle les plus graves n'est ni proportionnelle ni minimale.
Étude de cas : Une mère emprisonnée, les accusations contre l'agresseur sont suspendues[79]
La survivante et sa sœur ont été agressées sexuellement par son beau-père pendant de nombreuses années lorsqu'elles étaient enfants. Une fois les policiers intervenus, le beau-père a été accusé de contacts sexuels, et sa mère a été accusée de contacts sexuels par complicité puisqu'elle était au courant de l'agression.[80]
Sa mère a plaidé coupable aux accusations et a purgé 3 ans et demi de prison. Son beau-père a plaidé non coupable et, bien qu'il ait admis avoir commis une agression sexuelle devant le tribunal, ses accusations ont été suspendues en raison de retards qui ont prolongé l'affaire de près de sept ans.
En accordant l'arrêt des procédures, le juge du procès a souligné que le beau-père avait été à l'origine de certains des retards parce qu'il était « bavard à un degré jamais vu par la Cour » et qu'il avait fait peu d'efforts pour que l'affaire soit terminée.
La survivante a intenté une poursuite contre le procureur général et le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) du Québec pour 450 000 $ pour le préjudice psychologique subi en raison de l’arrêt des procédures.[81] Le juge Prémont a statué que les procureurs avaient commis des erreurs, mais qu'ils bénéficiaient tout de même de l'immunité. Elle a rappelé à la victime que les procureurs représentent la société, et non la victime, et que le rôle d'une victime se limite à être témoin dans un procès pénal. Le juge a estimé que si les procureurs n'avaient pas l'immunité, le DPCP devrait payer 25 000 $ en dommages-intérêts.
Les dépens ont été imposée à la survivante.[82]
Plaider le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne
EXEMPLE 1 : Quatorze survivantes de violence sexuelle et de violence entre partenaires intimes ont intenté une poursuite contre le gouvernement du Canada, alléguant que l'arrêt R c. Jordan viole leurs droits à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne garantis par l'article 7 de la Charte canadienne des droits des victimes et que la Charte canadienne des droits des victimes ne prévoit pas de recours efficaces.[83] Au moment de la rédaction du présent rapport, cette affaire n'a pas encore été jugée.
Le cas de chaque survivant comprend des preuves que les menaces contre sa vie, celle de ses enfants ou d'autres problèmes de sécurité ont été exacerbées lorsque les accusations criminelles ont été suspendues en vertu de l'alinéa 11b) :
- Les survivantes affirment que l'impunité d'un arrêt de procédures a enhardi leurs agresseurs et que l'incapacité du système judiciaire à les protéger continue de les mettre en danger.
- La poursuite fournit des exemples précis de harcèlement, de violence et d'enlèvement d'enfants après l'arrêt des accusations.
- Certains des plaignants sont toujours en danger et l'enfant d'une mère est toujours porté disparu.
EXEMPLE 2 : Le BOFVAC a reçu plusieurs plaintes officielles de survivant.e.s dont les cas ont été suspendus. Nous avons également noté des menaces constantes pour la sécurité liée aux crimes violents graves dont l'auteur serait généralement incarcéré. Dans un cas, nous avons dû signaler un enfant ayant besoin de protection.
EXEMPLE 3 : Dans deux affaires au Québec,[84] les avocats de la victime ont fait valoir que les intérêts des survivant.e.s d'actes criminels garantis par la Charte avaient été violés dans la décision de la Couronne de suspendre les accusations ou dans l'absence de diligence dans la gestion de l'instance. Les deux affaires ont échoué.
L'arrêt des procédures pour les accusations d'agression sexuelle délégitime le SJP
Nous avons entendu à maintes reprises que les arrêt de procédures accordés en vertu de l'arrêt R c. Jordan minent la confiance du public dans le système de justice. Le Comité sénatorial permanent de la LCJC a déclaré que la suspension dans l'affaire R c. Thanabalasingham – et des décisions similaires concernant des homicides et des agressions sexuelles contre des enfants – « heurtent la conscience des gens et minent la réputation du système judiciaire au Canada. »[85]
- Les intervenants nous ont souligné que le fait de mettre fin aux poursuites pour agression sexuelle pour des raisons non liées à l'agression, surtout après le témoignage d'une survivante, mine la légitimité du processus judiciaire et signale que les délais procéduraux ont priorité sur la justice substantielle.[86]
- Les survivant.e.s qui endurent des mois ou des années de retards, qui subissent un contre-interrogatoire et qui naviguent dans des procédures traumatisantes sont souvent dévastés d'apprendre que les accusations ont été suspendues en raison des retards. Un travailleur des services aux victimes a décrit un cas d'agression sexuelle où une jeune survivante qui avait déjà témoigné a été informée d'un arrêt de procédures quelques semaines avant la date d'un nouveau procès. L'intervenante nous a dit que les « sanglots et la colère étaient intenses » lorsque la décision de rester a été partagée.[87]
Nous avons entendu dire que le cadre d'analyse de l’arrêt Jordan est considéré comme arbitraire et draconien, particulièrement dans les cas d'agression sexuelle et d'homicide.[88] Un intervenant a fait remarquer ce qui suit :
« Ces survivants sont à nouveau traumatisés pendant le procès et ont finalement l'impression que c'était sans raison parce qu'un jugement sur la question ne peut même pas être rendu. Il est odieux que des cas puissent être « rejetées » en raison de retards qui ne peuvent tout simplement pas être résolus en raison du volume considérable de dossiers et de la difficulté à coordonner les calendriers et le temps disponible pour les tribunaux. »[89] [Traduction]
Le message aux survivants est clair : les retards procéduraux peuvent l'emporter sur leur accès à la justice, peu importe le préjudice qu'ils ont subi ou la force des preuves. Pour beaucoup, cela confirme la perception plus large selon laquelle l'agression sexuelle est décriminalisée au Canada, non pas par la loi, mais par l'attrition et les délais.
Responsabilité croissante et confiance du public
Le nombre de victimes dont les expériences de crimes violents ont été rejetées par les tribunaux est en augmentation. Cela augmente la possibilité à plus long terme d'un recours collectif, en particulier lorsque les survivant.e.s ont participé au processus judiciaire et ont engagé des coûts, ont été hospitalisés pour des raisons de santé mentale ou ont perdu leur emploi, leur logement, leurs économies ou leurs études.[90]
Il y a de plus en plus d'organisations à l'échelle communautaire et internationale pour contester l'arrêt R c. Jordan. Il est inévitable que le discrédit croissant s'étende à l'échelle internationale, sapant les engagements du Canada à l'égard de l'égalité des sexes et de la primauté du droit. Dans l'arrêt R c. Jordan, la CSC a fait observer ce qui suit :
« Les retards prolongés minent la confiance du public dans le système. Et la confiance du public est essentielle à la survie du système lui-même, car « un système de justice pénale juste et équilibré ne peut tout simplement pas exister sans le soutien de la communauté. »[91]
Au niveau communautaire, la soumission de Vancouver Rape Relief à la CEDAW 2024 qualifie les arrêt de procédures liés à la Jordan de « violation de l'obligation du Canada d'assurer l'accès à la justice pour les femmes » et demande au comité de l'ONU de faire pression sur le Canada pour qu'il accorde la priorité aux procès pour agression sexuelle.[92]
La confiance du public s'érode rapidement à mesure que les cas sont présentés à maintes reprises dans les médias et partagés par des militants.[93]
L'affaire R c. Jordan viole la bonne foi et la confiance que les survivant.e.s placent dans le SJP pour les protéger et protéger les autres. Il expose les survivant.e.s à des risques importants pour leur santé mentale, leurs ressources et leurs relations en raison de leur participation au SJP, puis sape le processus une fois que les survivant.e.s ont déjà payé les coûts de leur participation.
À RETENIR
Les survivant.e.s méritent également que justice soit rendue en temps opportun.
Une justice retardée est souvent une justice refusée.
[1]Entretien de l’ESSAS auprès d'un survivant #39
[2] R c. Jordan (2016) CSC 27 (CanLII).
[3] Ireton, J., & Ouellet, V. (February 3, 2025). Hundreds of stayed sexual assault cases send chilling message to victims, advocates warn. CBC News. (Disponible en anglais seulement).
[4] Statistique Canada. (2024). Tableau 35-10-0173-01 Résultats des indicateurs clés et variation absolue pour les données annuelles, les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et les tribunaux de la jeunesse. Pour des filtres spécifiques sur les agressions sexuelles, voir Filtres spécifiques aux agressions sexuelles
[5] Statistique Canada. (2024). Tableau 35-10-0173-01 Résultats des indicateurs clés et variation absolue pour les données annuelles, les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et les tribunaux de la jeunesse. Pour des filtres spécifiques sur les agressions sexuelles, consultez Filtres spécifiques aux agressions sexuelles. Les statistiques portent sur les procédures criminelles intentées contre les accusés qui ont été interrompues par le tribunal après avoir dépassé les limites de l'arrêt Jordan, y compris les sursis à la suite d'une demande établie dans le cadre de l’arrêt Jordan ou sans demande, les accusations retirées, rejetées ou absoutes à l'enquête préliminaire, ou les mesures alternatives et extrajudiciaires, y compris la justice réparatrice.
[6] Résultats du sondage ESSAS auprès des intervenants, question 16 : 36,16 % des intervenants croient que le nombre d’arrêts de procédures dans les cas d'agression sexuelle a augmenté au cours des 5 dernières années.
[7] R c. Jordan, 2016 CSC 27 (CanLII)
[8] R c. Jordan, 2016 CSC 27 (CanLII), [2016] 1 RCS 631, au paragraphe 49.
[9] La complexité d'un cas peut être utilisée pour démontrer que des circonstances exceptionnelles entraînent un délai. La complexité fait référence à des questions juridiques complexes, à une enquête policière approfondie, à des préparatifs complexes, à plusieurs coaccusés, etc. Il incombe à la Couronne de démontrer qu'elle a pris des mesures raisonnables pour éviter et régler les problèmes liés à la complexité.
[10] Il ne s'agit pas d'une liste exhaustive des raisons pour lesquelles une défense peut demander un sursis en vertu de l'alinéa 11b).
[11] Il ne s'agit pas d'une liste exhaustive des raisons pour lesquelles une Couronne peut rejeter une motion en vertu de l'article 11b.
[12] Everson, K. (2024, June 1). Long delays and collapsed cases are eroding faith in the justice system, lawyers warn. CBC (Disponible en anglais seulement).
[13] Runciman, B., L'Honorable et Baker, G., L'Honorable. (2017) Justice différée, c'est refuser la justice : un besoin urgent de s'attaquer aux longs délais dans le système judiciaire au Canada (Rapport final)). Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. [Nous soulignons]
[14] Urback, R (2024, November 14). Opinion: What kind of functional country lets alleged criminals, by the hundreds, walk free? Canada, apparently. The Globe and Mail. (Disponible en anglais seulement).
[15] Ireton, J., & Ouellet, V. (2025, February 3). Hundreds of stayed sexual assault cases send chilling message to victims, advocates warn. CBC news. (Disponible en anglais seulement).
[16] Ireton, J., & Ouellet, V. (2025, February 3). Hundreds of stayed sexual assault cases send chilling message to victims, advocates warn. CBC news. (Disponible en anglais seulement).
[17] Battered Women’s Support Services. (2022, March 3). BWSS expresses concerns about Jordan framework to Federal Govt. Battered Women’s Support Services (Disponible en anglais seulement).
[18] MacDougall, A. M. (2022, 18 janvier). Open letter to the Honourable David Lametti. RE: R v. Jordan framework and implications for GBV. Battered Women’s Support Services. (Disponible en anglais seulement).
[19] Brockbank, N., & MacMillan, S. (2024, November 12). Most criminal cases in Ontario now ending before charges are tested at trial. CBC News. (Disponible en anglais seulement). L'article souligne qu'il peut y avoir de nombreuses raisons pour les arrêts de procédures, y compris les programmes de déjudiciarisation.
[20] Statistique Canada. (2024). Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC) : renseignements détaillés 2024-2025.
[21] Statistique Canada. (2024). Tableau 35-10-0173-01 Résultats des indicateurs clés et variation absolue pour les données annuelles, les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et les tribunaux de la jeunesse. Pour des filtres spécifiques sur les agressions sexuelles, voir Filtres spécifiques aux agressions sexuelles
[22] Statistique Canada. (2024). Tableau 35-10-0173-01 Résultats des indicateurs clés et variation absolue pour les données annuelles, les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et les tribunaux de la jeunesse. Pour des filtres spécifiques sur les agressions sexuelles, voir Filtres spécifiques aux agressions sexuelles
[23] Statistique Canada. (2024). Tableau 35-10-0173-01 Résultats des indicateurs clés et variation absolue pour les données annuelles, les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes et les tribunaux de la jeunesse. Pour des filtres spécifiques sur les agressions sexuelles, voir Filtres spécifiques aux agressions sexuelles
[24] Les statistiques portent sur les procédures criminelles intentées contre les accusés qui ont été interrompues par le tribunal après avoir dépassé les limites de l'arrêt Jordan, y compris les sursis à la suite d'une demande établie dans le cadre de l’arrêt Jordan ou sans demande, les accusations retirées, rejetées ou absoutes à l'enquête préliminaire, ou les mesures alternatives et extrajudiciaires, y compris la justice réparatrice.
[25] Sondage d’ESSAS auprès des survivants, Réponse #175 ; Table de consultation d’ESSAS #14 : Services aux victimes
[26] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #306
[27] Table de consultation d’ESSAS #30 : Conseils juridiques et juridiques indépendants ; Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #346
[28] Table de consultation d’ESSAS #30 : Conseils juridiques et juridiques indépendants ; Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #346
[29] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #61
[30] Entretien de l’ESSAS auprès d'un survivant #38 ; Table de consultation d’ESSAS #07 : Procureur de la Couronne & la traite des personnes
[31] Table de consultation d’ESSAS #07 : Procureur de la Couronne & la traite des personnes
[32] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #62
[33] Table de consultation d’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne ; Sondage d’ESSAS auprès d’un survivant, Réponse #293
[34] Sondage d’ESSAS auprès des survivants, Réponse #611 ; Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #23, #50, #61, #131
[35] Table de consultation d’ESSAS #07 : Procureur de la Couronne & la traite des personnes; Table de consultation d’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne ; Entretien de l’ESSAS auprès d’un intervenant #161
[36] Entretien de l’ESSAS auprès d’un intervenant #17
[37] Table de consultation d’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne
[38] Sondage d’ESSAS auprès des survivants, Réponse #611 ; Sondage d’ESSAS auprès d’un intervenant, Réponse #49, #60
[39] Sondage d’ESSAS auprès des survivants, Réponse #590, #611
[40] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #245
[41] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #21
[42] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #346
[43] Murray, S., Welland, S. et Storry, M. (2025). Justice delayed: The impact of the Crown Court backlog on victims, victim services and the criminal justice system. Commissaire aux victimes. (Disponible en anglais seulement).
[44] Statute Law Database. (1999, August 6). Youth Justice and criminal evidence act 1999. Legislation.gov.uk. (Disponible en anglais seulement).
[45] Dugan, E., & Goodier, M. (2024, December 6). Rape trials collapse as victims abandon cases amid long court delays. The Guardian. (Disponible en anglais seulement).
[46] https://www.districtcourts.govt.nz/reports-publications-and-statistics/new/timely-access-to-justice-protocol-releasedDistrict Court of New Zealand. (2024, June). Timely Access to Justice, Judicial Protocol Ref #01. (Disponible en anglais seulement).
[47] Table de consultation d’ESSAS #14 ; Entretien de l’ESSAS auprès d’un intervenant #437
[48] Table de consultation d’ESSAS #04 : Centres indépendants d'aide aux victimes d'agression sexuelle, #27 : Centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle
[49] Table de consultation d’ESSAS #04 : Centres indépendants d'aide aux victimes d'agression sexuelle, #14 : Services aux victimes, #30 : Services juridiques et AJI
[50] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #62
[51] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #450
[52] Table de consultation d’ESSAS #4 : Centres indépendants d'aide aux victimes d'agression sexuelle, #28 : ONG et organismes de défense des droits des femmes
[53] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #368, #397
[54] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #346
[55] Entretien de l’ESSAS auprès d’un intervenant #131
[56] Table de consultation d’ESSAS #16 : Couronnes ; Groupe de discussion d’ESSAS #02
[57] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants #21, #65, #306
[58] Statistique Canada. (2024). Tableau 3 : Décisions et issues des causes de juridiction criminelle pour adultes liées à des agressions sexuelles déclarées par la police, selon certaines caractéristiques, Canada, 2010-2014 et 2015-2019.
[59] Table de consultation d’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne
[60] Table de consultation d’ESSAS #16 : Consultation de la Couronne; Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #21, #65
[61] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #451
[62] Le ministère de la Justice du Canada et FEGC préparent des études mises à jour sur les coûts du système de justice pénale qui pourraient être utilisées pour estimer le fardeau fiscal des cas d'agression sexuelle qui font l'objet d'enquêtes, de poursuites et de tribunaux et qui sont ensuite suspendues, selon l'arrêt Jordan. Ces coûts pourraient être comparés avec les arrêts de procédures pour d’autre cas afin de déterminer le coût de l’arrêt Jordan pour le SJP.
[63] Plaintes déposées par des survivant.e.s d'agression sexuelle auprès du Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, 2024-2025.
[64] Li, T. (2023). Coûts de la criminalité au Canada, 2014. Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice du Canada.
[65] 14,4 milliards de dollars ÷ 35 millions (population de 2014) = 411 $/personne x 40 millions (population de 2024) = 16,4 milliards de dollars x inflation (28,04 %, calculatrice d'inflation de la Banque du Canada) = 21 milliards de dollars.
[66] Statistique Canada. (2024). Statistiques sur les crimes déclarés par la police au Canada, 2023.
[67] Kane, L. (2017, July 6). 'Failing everyone': 204 cases tossed over delays since Supreme Court's Jordan decision. CBC. (Disponible en anglais seulement).
[68] R c. Askov, (1990) CanLII 45 (CSC), sommaire
[69] R c. J.F. 2022 CSC 17 aux paragraphes 22 et 72.
[70] R c. Thanabalashingham, 2020 CSC 18, au paragraphe 9
[71] R c. Lyons, 1987 CanLII 25 (CSC), au paragraphe 88 ; R c. Fox, 2024 SKCA 26 (CanLII)
[72] R c. Mills, [1999] 3 RCS 668
[73] Nouveau-Brunswick (ministre de la Santé et des Services communautaires) c. G. (J.), 1999 CanLII 653 (CSC), au para 2
[74] Sondage d’ESSAS auprès des survivants, Réponse #805, #243, #523, #805
[75] Sa Majesté le Roi du chef du Canada c. Vrbanic et Josipovic. (2025, 26 mai). Mémoire de l’appelant (CSC, dossier no. 41741). (Mémoire disponible en anglais seulement).
[76] Entretien de l’ESSAS auprès d'un survivant #141
[77] Entretien de l’ESSAS auprès d'un survivant #141
[78] R c. Regan, 2002 CSC 12 (CanLII).
[79] Bergeron, Y. (12 décembre 2023 ). Arrêt Jordan pour « l’ange Daniel » : une victime n’a droit à aucune indemnité. CBC Radio-Canada.
[80] Bergeron, Y. (12 avril 2017). Arrêt Jordan : un présumé agresseur libéré à Québec. CBC Radio-Canada.
[81] Biron, P-B. (12 décembre 2023 ). Procès avorté de «l'Ange Daniel» par l’arrêt Jordan: la plaignante déboutée contre l’État. Le journal de Québec.
[82] J.V. c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCS 3637 (CanLII); J.V. c. Procureure générale du Québec, 2020 QCCS 2534 (CanLII).
[83] Papineau, C. (11 avril 2025). “Graveyard of preventable deaths”: IPV Survivors Sue Canadian Government. CTV News. (Disponible en anglais seulement).
[84] J.V. c. Procureure générale du Québec, 2019 QCCS 3637 (CanLII); J.V. c. Procureure générale du Québec, 2020 QCCS 2534 (CanLII).
[85] Runciman, B., L'Honorable et Baker, G., L'Honorable. (juin 2017). Retarder la justice, c'est refuser la justice : un besoin urgent de s'attaquer aux longs délais judiciaires au Canada (Rapport final). Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
[86] Entretien de l’ESSAS auprès d’un intervenant #194
[87] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #346
[88] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #410
[89] Sondage d’ESSAS auprès des intervenants, Réponse #282
[90] Ireton, J., & Ouellet, V. (2025, February 3). Hundreds of stayed sexual assault cases send chilling message to victims, advocates warn. CBC news. (Disponible en anglais seulement).
[91] R c. Jordan, 2016 CSC 27, au paragraphe 26, citant R c. Askov, 1990 CanLII 45 (CSC), à la p 1221.
[92] Vancouver Rape Relief and Women’s Shelter. (2024, September). Report to the Committee on the Elimination of Discrimination against Women on the occasion of the Committee’s periodic review of Canada [Submission to the UN Committee on the Elimination of Discrimination against Women, 89th session]. (Disponible en anglais seulement).
[93] Le graphique montre un exemple de suivi médiatique de l'affaire R c. Jordan par Vancouver Rape Relief & Women's Shelter. Impact of Supreme Court of Canada's “Jordan Decision” on Sexual Assault Cases: Media Roundup - Vancouver Rape Relief & Women's Shelter. (Disponible en anglais seulement).
