L'ombudsman fédéral publie une étude sur les réponses aux crimes haineux

La version française de la déclaration de l'ombudsman lors de la Conférence de presse du 10 décembre est disponible sous la vidéo.

Bonjour,

Aujourd'hui, à l'occasion de la Journée des droits de la personne, nous prenons le temps de réfléchir aux droits et libertés fondamentaux qui nous appartiennent, et au travail continu nécessaire pour les faire respecter. Alors que nous nous réunissons, je tiens à souligner que nous nous trouvons sur le territoire non cédé du peuple algonquin Anishinaabeg qui prend soin de cette terre depuis des temps immémoriaux. Nous rendons hommage à l'histoire, à la culture et aux contributions profondes des peuples autochtones à cette terre et reconnaissons les injustices qu'ils ont subies, y compris les crimes haineux perpétrés par l'État et les violations systémiques des droits de la personne.

Dans un esprit de réconciliation et du respect des droits, notre rapport souligne le besoin urgent de mettre en œuvre les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation, ainsi que les 230 appels à la justice de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. De plus, nous demandons des mesures pour contrer le déni des dommages causés par le système des pensionnats indiens.

Alors que nous commémorons la Journée des droits de la personne, que cette reconnaissance serve de rappel de notre responsabilité collective de lutter contre la haine, de faire respecter la justice et d'œuvrer pour un avenir où toutes les personnes et toutes les communautés peuvent vivre dans la dignité et en sécurité.

Merci à tous de vous joindre à nous aujourd'hui pour la publication de notre rapport Renforcer de l'accès à la justice pour les victimes de crimes haineux au Canada. Je suis fier d'être aux côtés de Mariam Musse, notre responsable des politiques, qui a dirigé ce projet avec l'appui d'Aisling McCoy.

Et je suis très heureux de partager la scène avec d'autres leaders canadiens qui travaillent d'arrache-pied pour prévenir et réduire la haine sous toutes ses formes : Mohammed Hashim, directeur général de la Fondation canadienne des relations raciales, Amira Elghawaby, représentante spéciale du Canada pour la lutte contre l'islamophobie, et Ami Wise, représentant de l'Envoyée spéciale du Canada pour la préservation de la mémoire de l'Holocauste et la lutte contre l'antisémitisme, qui était avec nous plus tôt.

Le Bureau de l'ombudsman fédéral a pour mandat d'améliorer l'accès aux programmes et aux services fédéraux pour les victimes d'actes criminels, d'aider les décideurs politiques à comprendre les problèmes systémiques qui nuisent aux survivant.e.s et de veiller à ce que les dispositions quasi constitutionnelles de la Charte canadienne des droits des victimes soient respectées.

Pourquoi cela, pourquoi maintenant? Les crimes haineux signalés à la police au Canada sont aux niveaux les plus élevés que nous ayons vus.

Et nous savons que la plupart des personnes qui sont ciblées sont déjà victimes de discrimination et ne le signalent pas à la police en raison de la méfiance, de la peur, la croyance que rien ne changera, et le désir d’éviter d’être davantage stigmatisées, pour elles-mêmes et leur communauté. Lorsque le système judiciaire échoue systématiquement envers les survivant.e.s, il valide la haine et le sentiment d’exclusion. Nous sommes ici aujourd’hui parce que nous croyons que cela peut changer.

Mariam Musse, qui dirige notre équipe des politiques, fournira plus de contexte sur notre étude.

Mariam Musse

Merci d'être venu et merci, monsieur Roebuck, de votre engagement à faire preuve de leadership fédéral pour lutter contre la haine.

Les conclusions du présent rapport sont fondées sur une approche mixte, y compris les réponses à un sondage mené auprès de 187 services de police et d'organismes de services aux victimes représentant un large éventail de collectivités urbaines, rurales et éloignées. Nous avons interrogé des partenaires universitaires et des dirigeants communautaires et examiné les recherches existantes sur les besoins des survivant.e.s, les tendances statistiques et les options législatives.

Le rapport comprend une étude de cas qui donne un aperçu des répercussions des crimes haineux, à long terme et plus vastes, sur les victimes et leurs collectivités. Nous concluons par des recommandations et une liste de ressources que nous avons cernées tout au long de l’étude, y compris une trousse d’outils, des guides de pratique et des applications de signalements en ligne.

Nous avons commencé avant le dépôt du projet de loi sur la Loi sur les préjudices en ligne , de sorte que nous avons pu demander des commentaires sur les mesures proposées dans le projet de loi C-63.

Voici ce que nous avons entendu :

  1. Premièrement, la sous-signalement à la police demeure un obstacle important. Les victimes de crimes haineux font face à d'immenses défis lorsqu'elles se manifestent. La peur des représailles, le racisme systémique et la méfiance à l'égard des forces de l'ordre découragent de nombreuses personnes de porter plainte. Lorsqu’un signalement est fait, la police estime selon notre étude que seulement 35 % des victimes accèdent aux services de soutien dont elles ont besoin. Le décalage entre le signalement et le soutien met en évidence l'absence d'un système cohérent pour guider les victimes de l'incident à la résolution. Le signalement par des tiers par l'intermédiaire d'organismes ou de services aux victimes est une pratique prometteuse pour recueillir des statistiques plus précises, faire rapport à la police et aiguiller les victimes.
  2. Deuxièmement, nous avons besoin de ressources spécialisées pour les survivant.e.s de crimes haineux. Seulement 28 % des policiers interrogés ont déclaré que leur service de police disposait d'une unité dédiée aux crimes haineux. Près de la moitié de ces unités ne comptent qu'un seul agent. On nous a aussi rapporté que les unités de crimes haineux ont un meilleur accès à une formation spécialisée afin de reconnaitre et mener les enquêtes sur les crimes haineux. Ces unités sont aussi mieux équipées pour mener des activités de sensibilisation et d'éducation communautaires significatives.
  3. Troisièmement, nous avons besoin d'une définition claire des crimes haineux dans le Code criminel afin d'améliorer les enquêtes. La police a indiqué avoir de la difficulté à s'y retrouver dans des définitions incohérentes, à faire la distinction entre les discours haineux et la liberté d'expression, et à savoir comment évaluer les motifs des crimes haineux. Les auteurs de crimes haineux en ligne sont souvent protégés par l'anonymat et habilités par des plateformes qui ne disposent pas de mécanismes de responsabilisation.
  4. Quatrièmement, il est urgent d'améliorer la formation dans tous les secteurs. La police a exprimé le souhait de recevoir une formation pratique sur les techniques d'enquête sur les crimes de haine, car la plupart des agents ont une expérience limitée dans ce secteur. La police souhaiterait aussi bénéficier des possibilités d'apprentissage hybrides et d’ateliers inter-agences animés par des unités expérimentées dans le domaine des crimes de haine. Les organismes de services aux victimes veulent également une formation spécialisée, mais ils ont de la difficulté à se débrouiller avec des contraintes de financement et de ressources.
  5. Enfin, les réformes législatives proposées ont suscité des réactions mitigées. L'idée d'une infraction distincte de crime haineux, comme le propose le projet de loi C-63, a été fortement appuyée. 77 % des policiers et 82 % des services aux victimes ont dit que ce serait utile ou très utile, mais qu'il faudrait investir dans la formation pour être efficace. Les répondants étaient moins favorables aux engagements de ne pas troubler l'ordre public et estimaient que l'obligation d'obtenir le consentement du procureur général créerait des obstacles à la tenue rapide de poursuites.

J'invite de nouveau M. Roebuck à parler des recommandations.

Benjamin Roebuck

Le Canada doit protéger sa population contre la violence qui s’attaque à ce que nous sommes. Ce rapport est un appel à l'action. Nous formulons 13 recommandations pour améliorer les réponses aux crimes haineux.

La Charte canadienne des droits des victimes doit être renforcée et doit jouer un rôle central dans le Plan d'action du Canada pour lutter contre la haine. Les victimes d'actes criminels ont besoin de droits exécutoires à l'information, à la participation et à la protection. C'est encore plus critique pour les groupes qui se méfient du système de justice pénale.

Nous avons besoin d'investir dans la prévention et la formation, et il nous faut de meilleurs outils pour faire le suivi des crimes haineux.

Nous devons tenir les grandes multinationales responsables de la haine facilitée par leurs produits en ligne, afin que la vie de nous tous au Canada soit la priorité, et non les profits.

Nous devons éradiquer la haine au Canada en donnant suite aux recommandations de la Commission de vérité et réconciliation et de l'Enquête nationale sur les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQI+ autochtones disparues et assassinées.

Et nous avons besoin d'une définition claire de la haine dans le Code criminel pour protéger les survivants et protéger notre liberté d'expression.

Nous tous au Canada méritons d’être en sécurité et d’avoir accès à la justice, peu importe qui nous aimons, à quoi on ressemble, d’où on vient, la langue que nous parlons ou notre foi. Tout le monde compte et tout le monde a sa place.

Merci.

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