Document de recherche 10

Les conflits d'intérêts

[PDF 254kb]


Comité externe d'examen de la
Gendarmerie royale du Canada

Président
L'honorable René J. Marin, OMM, c.r., LLD

Vice-présidente
F. Jennifer Lynch, c.r.

Membres
Joanne McLeod, CM, c.r.
William Millar

Directeur exécutif
Simon Coakeley


Ce document fait partie d'une série de documents de recherche que le Comité a l'intention de publier en vue de recueillir les observations du public, celles-ci devant l'aider à formuler des recommandations conformément à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (1986). Les opinions exprimées dans le présent document ne sont pas nécessairement celles du Comité.

N'hésitez pas à nous faire part de vos observations en les faisant parvenir à:

Simon Coakeley
Directeur exécutif
Comité externe d'examen de la GRC
C.P. 1159, Succursale "B"
Ottawa (Ontario)
K1P 5R2

Télécopieur: (613) 990-8969


Série de documents de recherche

Numéro 10: Les conflits d'intérêts

Directrice, Recherche et Communications:
Lynne Bennett

avec le concours de:
Simon Coakeley
Yvonne Marlin
Suzanne Gervais

Expert-conseil:
Kenneth P. Swan

Avec le concours de:
Ronald G. Pearson

Déjà parus:

Document de recherche 1
Les suspensions - Une analyse comparée
Les suspensions
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 2
La réinstallation - Peut-elle se faire sans difficulté?
La réinstallation
-Compte rendu de la consultation

Document de recherche 3
Renvoi pour raisons médicales - Une optique policière
Renvoi pour raisons médicales
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 4
Le traitement ultérieur des plaintes - L'impact de la procédure des plaintes
sur le système de discipline dans la police
Le traitement ultérieur des plaintes
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 5
Programmes d'aide aux employés - Philosophie, théorie et pratique
Programmes d'aide aux employés
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 6
Renvoi pour raisons disciplinaires - Une optique policière
Renvoi pour raisons disciplinaires
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 7
Conduite en dehors des heures de service
Conduite en dehors des heures de service
- Compte rendu de la consultation

Document de recherche 8
Imposition des sanctions dans la police - Principes généraux

Document de recherche 9
La santé et la sécurité au travail - Une optique patronale


AVANT-PROPOS

Ce document est le dixième d'une série présentée par la Direction de la recherche du Comité externe d'examen de la GRC.

Sans la collaboration et l'aide de plusieurs membres de la communauté policière partout au pays, il n'aurait pu être rédigé. Le Comité remercie toutes les personnes qui ont aidé à la préparation du document, et particulièrement celles qui ont consacré du temps et des ressources à consulter des dossiers, à établir des résumés et à communiquer leur point de vue à l'expert-conseil. Il demande de remercier tout particulièrement le Commissaire-adjoint G.G. Leahy, directeur du Personnel à la GRC, et le sergent A.W. Mercer, sous-officier responsable de la Section des conflits d'intérêts à la Direction générale de la GRC, pour l'aide apportée à cette étude.

Quelques précisions s'imposent au sujet de la méthodologie utilisée. Une étude parallèle sur l'emploi secondaire, à être publiée comme étant le document de recherche 11, réalisée en même temps que celle-ci, comporte l'utilisation de méthodes d'enquête plus poussées. L'expert-conseil a recueilli, à l'aide d'entrevues dont la plupart ont été réalisées par téléphone ou par écrit, des renseignements qui ne figuraient pas dans les dossiers officiels, particulièrement au sujet des lignes de conduite adoptées par les services policiers dans des cas réels de conflits d'intérêts.

Par conséquent, certains des renseignements communiqués à l'expert-conseil étaient confidentiels, le plus souvent parce qu'il s'agissait de renseignements personnels qui n'étaient pas du domaine public. Quand il était possible de citer des dossiers publics, les sources étaient précisées dans les notes figurant à la fin du document. Quand les sources de certains renseignements anecdotiques ne sont pas données, c'est que ces renseignements ont été donnés à l'expert-conseil de vive voix ou par écrit, par un membre d'un service policier. Là où il convenait de le faire, le service policier dont émanait le renseignement en question est identifié, mais dans certains cas l'expert-conseil a jugé qu'il valait mieux l'omettre.

La présente étude pousse plus loin la réflexion amorcée dans certains des documents de recherche déjà publiés par le Comité, et particulièrement dans le sixième, intitulé Renvoi pour raisons disciplinaires - Une optique policière, et le septième, Conduite en dehors des heures de service. Pour assurer l'indépendance et la cohérence interne de l'étude, il a été nécessaire de reprendre certains thèmes déjà abordés dans ces deux études. Cependant, dans la mesure du possible, un effort a été fait pour choisir des exemples différents à l'appui des mêmes arguments, de manière à ce que le lecteur en retire le plus d'information possible.

Enfin, la GRC n'avait pas encore publié son nouveau code sur les conflits d'intérêts au moment de la rédaction de cette étude et toutes références sont celles qui étaient en vigueur au 30 septembre 1991. Le gouvernement de l'Ontario a depuis publié des politiques additionnelles touchant les conflits d'intérêts et le Sous-registraire général adjoint du Canada a publié un document intitulé Conflits d'intérêts - Mesures d'observation et mises en garde qui examine treize différentes situations qui peuvent se présenter en vertu des lignes de conduite fédérales.

Simon Coakeley
Directeur exécutif
Comité externe d'examen de la GRC


TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

ANATOMIE DES CONFLITS D'INTÉRÊTS

2.1 Types de conflits
2.2 Types d'intérêts

POURQUOI DES RÈGLEMENTS SUR LES CONFLITS D'INTÉRÊTS?

LA NORME D'ÉTHIQUE

4.1 Dans le secteur privé
4.2 Dans le secteur public
4.3 Dans la police

LA CONCEPTION DE CODES D'ÉTHIQUE TRAITANT DES CONFLITS D'INTÉRÊTS

5.1 Dans le secteur privé
5.2 Dans le secteur public
5.3 Dans la police

MOYENS UTILISÉS POUR ASSURER LE RESPECT DES RÈGLES

6.1 Interventions disciplinaires
6.2 Interventions non disciplinaires

EXEMPLES DE CONFLITS D'INTÉRÊTS DANS LA POLICE

7.1 Emploi secondaire
7.2 Activités politiques
7.3 Transferts financiers et gratifications
7.4 Utilisation de renseignements confidentiels
7.5 Traitement de faveur
7.6 Associations
7.7 Critiques publiques

CONSIDÉRATIONS RELATIVES À L'APRÈS-EMPLOI

CONCLUSION

NOTES ET RENVOIS

BIBLIOGRAPHIE

Chapitre I

Au moment où ce document de recherche est imprimé, la Gendarmerie Royale du Canada est en voie d'élaborer de nouvelles mesures d'application des règlements sur les conflits d'intérêts. Ces règles, auxquelles seront assujettis les membres de la Gendarmerie, doivent paraître à la fin de 1991 et prendront la forme d'ordres permanents du commissaire, conformément à l'article 69 du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat1 du gouvernement fédéral. Ce n'est là que le plus récent exemple de la "réaction en chaîne"2 à laquelle nous assistons depuis une vingtaine d'années -- dans l'administration publique, dans les entreprises et dans les services-policiers--sur le plan de l'élaboration de politiques officielles de déontologie. Il ne s'agit cependant pas d'une vogue purement passagère. D'aucuns considèrent la promotion de l'éthique comme le défi des années 903, et les employeurs sont sans cesse à l'affût de nouvelles solutions susceptibles d'assurer la réalisation du but énoncé dans le code d'éthique d'une entreprise4.

Ce défi revêt une importance particulière pour les services policiers. Compte tenu du pouvoir discrétionnaire dont jouissent les agents de police, dans des situations où une surveillance directe est presque impossible, il peut y avoir tous les jours des occasions de manquer d'intégrité5. L'évitement des conflits d'intérêts est l'un des plus importants aspects de l'éthique, et la plupart des codes de déontologie visent ce but. On peut citer, à ce propos, l'extrait d'un rapport préparé pour la commission de police de la Colombie-Britannique, à la suite d'une allégation de conflit d'intérêts6:

Cependant, toute personne a de nombreux intérêts, dont beaucoup peuvent donner lieu à des conflits dans certaines situations. La façon dont chacun réagit, dans ces situations, dépend de l'importance qu'il accorde à ses obligations face à son employeur, à sa profession et à l'ensemble de la société7. C'est cette fluidité du rapport entre les intérêts personnels et les fonctions publiques qui rend la notion de conflits d'intérêts difficile à définir avec précision.

Beaucoup de définitions différentes du conflit d'intérêts ont été proposées. Quelle que soit la formulation utilisée, l'intention générale est habituellement très semblable. Voici quelques définitions :

Comme on le verra sans peine, ces définitions ne sont pas assez détaillées ou précises pour pouvoir être appliquées à des cas particuliers.

Chapitre II

On a souvent tenté de classer les conflits d'intérêts dans différentes catégories, afin de déterminer lesquels sont évitables et lesquels sont tolérables. La Commission Parker a réparti les conflits d'intérêts en trois catégories, et sa classification est assez acceptée depuis12. Ainsi, un conflit d'intérêts "réel" est "une situation dans laquelle [...] a connaissance d'un intérêt pécuniaire privé suffisant pour influer sur l'exercice de ses fonctions et responsabilités officielles13. Le conflit d'intérêts "potentiel", quant à lui, fait intervenir la notion de prévisibilité : lorsqu'une personne peut prévoir qu'un intérêt privé risque d'influencer un jour l'exercice de ses fonctions, bien que cela ne se soit pas encore produit, elle se trouve dans un conflit d'intérêts potentiel. Enfin, il y a *apparence de conflit* "lorsqu'il y a de la part d'une personne raisonnablement bien informée, une crainte raisonnable de conflits d'intérêts"14.

Qu'il s'agisse d'un conflit d'intérêts réel, potentiel ou apparent, la situation peut être inacceptable15. Dans le document intitulé Les conflits d'intérêts : Règles applicables aux législateurs fédéraux16, on définit quatre types de conflits d'intérêts, en précisant lesquels sont inacceptables. Le premier, le "conflit inhérent", et donc inévitable, découle des intérêts que le parlementaire a, comme toute autre personne, à titre de membre de la société, par exemple à titre de parent ou de propriétaire. Le deuxième type de conflits d'intérêts tient à la fonction de représentation qu'assument les parlementaires, qui doivent défendre les intérêts de leurs électeurs; il s'agit d'un type spécialisé et inévitable de conflits d'intérêts. Viennent ensuite les "conflits personnels nécessaires", qui correspondent à la troisième catégorie; ces conflits découlent de la nécessité pour les législateurs de pouvoir mener une vie normale et satisfaisante. L'auteur du document range notamment dans cette catégorie les placements personnels, les entreprises familiales et des intérêts professionnels, qui entraînent eux aussi des conflits jugés inévitables. Enfin, il reste une catégorie de conflits d'intérêts évitables, ceux que vise le règlement. Ces conflits tiennent à "des intérêts économiques personnels n'entrant pas dans les catégories susmentionnées et qui ont des répercussiosn notables sur l'indépendance des législateurs"17.

Cependant, cette typologie n'est pas tout à fait satisfaisante, pas plus que les autres classifications ou définitions que l'on trouve dans les codes officiels traitant des conflits d'intérêts. Le problème tient à ce que les conflits d'intérêts prennent une infinité de formes18. Certains ont avancé que le domaine des conflits d'intérêts "pourrait bien s'avérer réfractaire à toute réglementation"19. Voici les propos d'un arbitre à ce sujet20:

Bien qu'il soit difficile de définir le conflit d'intérêts, la plupart des codes de déontologie tentent néanmoins de le faire. L'application de ces définitions à des cas individuels est un problème autrement plus difficile, qui exige une analyse beaucoup plus détaillée des intérêts en jeu.

Les intérêts en question sont les intérêts personnels de l'employé qui risquent de compromettre l'exécution correcte et impartiale de ses fonctions et responsabilités. On peut considérer que l'intérêt personnel de l'employé met celui-ci en conflit d'intérêts lorsqu'il21:

Pour définir la portée d'un intérêt personnel, il faut tout d'abord déterminer si cet intérêt est véritablement personnel ou privé; il s'agit de savoir si l'intérêt diffère des intérêts de la population en général22. Si la personne a un intérêt à titre de contribuable, qu'il partage avec les autres contribuables, cet intérêt ne diffère pas des intérêts de la population en général23. Le rapport Aird, paru en 1986, recommande que l'on exempte des règles officielles relatives aux conflits d'intérêts ceux qui découlent de "la communauté d'intérêts"24.

La question suivante qui se pose est celle de savoir si les règlements devraient s'appliquer uniquement aux intérêts de nature pécuniaire. Par exemple, le Livre vert sur les conflits d'intérêts25 définit ainsi le conflit d'intérêts26:

On justifie habituellement cette définition du conflit d'intérêts restreinte aux intérêts pécuniaires par la difficulté que poserait toute tentative de cerner ou de réglementer d'autres motivations27, notamment d'ordre familial, religieux, politique, institutionnel, ethnique ou sexuel. Pourtant, n'importe laquelle de ces motivations pourrait également placer une personne dans une position incompatible avec ses fonctions et responsabilités. Certains ont donc soutenu que la définition devrait englober toute situation où l'intérêt public et l'intérêt personnel (quel qu'il soit) s'opposent28.

Pour qu'il y ait conflit d'intérêts, est-ce que la personne doit avoir un intérêt personnel direct ou, au contraire, un intérêt indirect est-il suffisant pour justifier un examen de la situation ? Un intérêt direct suppose la possibilité d'un avantage (pécuniaire ou autre) dont bénéficierait directement la personne en conflit d'intérêts. Un intérêt indirect suppose qu'une autre personne, avec laquelle l'individu entretient des relations, profite directement d'un avantage. Par exemple, en vertu de la Loi de 1983 sur les conflits d'intérêts municipaux29 de l'Ontario, tout membre d'un conseil municipal a un intérêt pécuniaire direct dans une affaire si ce membre, directement ou par personne interposée (parent, époux ou enfant):

qui a un intérêt pécuniaire dans l'affaire.

En l'absence d'une définition aussi précise, on peut déterminer l'existence d'un intérêt indirect en se fondant sur le critère de l'éloignement. L'exemple suivant illustre bien cependant les difficultés que pose l'application de ce critère. La Cour d'appel de l'Alberta a statué que la prolongation de la conduite d'eau de la ville jusqu'à la terre du père d'un conseiller municipal ayant voté sur cette prolongation ne profitait pas indûment à ce conseiller30:

Cependant, dans des jugements subséquents, la Cour d'appel de l'Alberta semble avoir tiré des conclusions contraires31. Dans un cas où un conseiller municipal avait travaillé pour un soumissionnaire (travail pour lequel il n'avait pas encore été entièrement payé), la Cour a jugé que les rapports entre le conseiller et le soumissionnaire étaient si récents et si étroits qu'on pouvait raisonnablement craindre que le conseiller ait été porté à voter comme il l'avait fait pour des motifs d'ordre pécuniaires32.

Si l'intérêt personnel est si lointain qu'il ne peut pas raisonnablement influencer le comportement de la personne, on ne doit pas juger qu'il y a conflit d'intérêts. D'aucuns reprochent à certains règlements sur les conflits d'intérêts de ne pas exempter les intérêts négligeables33. Une règle de minimis permettrait de distinguer les intérêts sans conséquence de ceux qui peuvent engendrer un conflit d'intérêts. On peut citer, à titre d'exemple, le cas d'une personne qui possédait des actions de Bell Canada. Comme cette société émet des centaines de millions d'actions, il semble peu probable que le fait de détenir dix actions puisse influencer ou sembler influencer l'exercice des fonctions de l'intéressée, relativement à Bell Canada34.

En revanche, les intérêts dans des sociétés fermées soulèvent d'autres considérations, même s'ils sont détenus par un membre de la famille de l'employé. Dans un rapport de 1986 sur des allégations de conflit d'intérêts impliquant un ministre de l'Ontario, on a examiné différentes définitions du mot "intérêt" dans de telles circonstances. Selon les auteurs du rapport, pour qu'un conflit d'intérêts inacceptable existe, il faut que les conditions suivantes soient réunies35:

  1. Le Ministre ou un membre de sa famille était en relations avec l'entreprise privée ontarienne en cause.
  2. Ces relations ne se limitaient pas à une simple association passive - par exemple le fait de soutenir ou de promouvoir l'entreprise ou son produit - et comportaient des interventions actives, fondées sur une obligation juridique ou semblable.
  3. Par leur nature et leur ampleur, les relations du Ministre avec ladite entreprise contribuaient de façon appréciable aux affaires et aux perspectives de l'entreprise.
  4. Tout marché conclu entre ladite entreprise et le gouvernement de l'Ontario améliorait - ou était susceptible d'améliorer - directement ou indirectement, la situation ou le sort du Ministre.

En somme, il est facile de dégager un large consensus sur le principe général que tout employé appelé à servir l'intérêt public:

D'après d'autres formulations du même principe, on doit: intervenir uniquement à l'égard d'affaires dans lesquelles on n'a pas d'intérêt financier personnel37; éviter les activités qui risquent de laisser croire que l'on se sert de sa position publique pour son profit personnels38; séparer ses intérêts privés de l'intérêt public39; en cas de conflit, toujours privilégier l'intérêt public40. Les difficultés se posent quand on essaie d'appliquer ces principes généraux à des cas précis. Ainsi, pour reprendre une idée énoncée dans le code d'éthique d'une entreprise:

Chapitre III

Le principal but Pour lequel on règlements les conflits d'intérêts est de préserver, tant en réalité qu'en apparence, une norme élevée d'éthique42. On vise cependant aussi un deuxième but, qui n'est pas négligeable: l'efficacité. Tout comme les employeurs du secteur privé et les organisations de services du secteur public, les services policiers ont intérêt à être efficaces et à répondre aux besoins du public. Leur légitimité dépend de l'autonomie de la police, aux yeux du public, face à toute pression partisane ou intéressée43.

Tout manquement au principe de l'impartialité, qu'il soit réel ou apparent, mine la confiance du public. Si, aux yeux de la population, des intérêts privés semblent prendre le pas sur l'intérêt public, il en résulte de l'incertitude et du mécontentement, tandis que la coopération et le respect s'estompent. L'apparence d'un conflit d'intérêts peut d'ailleurs faire autant de tort qu'un conflit réel. Des règles d'éthique strictes sont donc indispensables aussi bien pour la réputation d'intégrité d'un service policier que pour son efficacité, qu'une bonne réputation rehausse.

Les conflits d'intérêts n'ébranlent pas seulement la confiance du public, mais également celle de l'employeur, qui peut alors douter de l'impartialité de son employé. Qui plus est, pour que le moral soit bon, les employés doivent croire en l'honnêteté et l'intégrité de leurs collègues44. Par conséquent, les situations qui engendrent un conflit d'intérêts peuvent compromettre l'efficacité du service, parce qu'elles:

  1. Minent la confiance du public envers le service policier.
  2. Nuisent au rendement de l'employé.
  3. Entravent le fonctionnement normal du service policier.
  4. Perturbent l'harmonie et la discipline du milieu de travail45.

Ainsi, la réglementation des conflits d'intérêts se justifie tant par des principes d'éthique que par la nécessité d'une efficacité maximale.

Chapitre IV

Au cours des dernières décennies, on a commencé à mettre l'accent moins sur la corruption ou la fraude (conflits d'intérêts criminels) que sur des problèmes plus subtils et complexes tenant à la séparation de l'intérêt public et de l'intérêt privé (conflits d'intérêts non criminels)46. Les dispositions du Code criminel relatives aux conflits d'intérêts figurent dans les articles généraux sur la corruption, englobant la corruption de fonctionnaires, la fraude, l'abus de confiance et le fait d'acheter, de vendre ou d'influencer des nominations ou des charges47. Dans ces cas, le fait de privilégier des intérêts privés suppose une intention criminelle et a invariablement un effet direct et catastrophique sur la relation de travail, particulièrement pour les membres d'un service policier. Cependant, le présent document porte essentiellement sur les conflits d'intérêts non criminels, qui sont prohibés pour des raisons d'éthique et d'efficacité et qui entraînent l'imposition de sanctions à des employés.

Milieu non-syndiqué

Dans les entreprises du secteur privé, les employés non syndiqués sont assujettis aux principes de la common law de l'employeur et de l'employé. La norme de conduite que les employés doivent respecter est exprimée dans le jugement Pearce48:

Une des conditions fondamentales de la relation d'emploi est que l'employé n'agisse que dans l'intérêt de son employeur.

À cause de la norme de conduite à laquelle ils sont astreints, les employés ne peuvent compromettre la confiance qu'a l'employeur dans leur capacité de bien remplir leurs fonctions. En common law, il existe un devoir de loyauté implicite dans chaque contrat d'emploi49, en vertu duquel l'employé s'engage à faire preuve de bonne foi et de loyauté envers son employeurs50. Bien qu'on sache peu de choses sur l'origine de cette obligation de loyauté, on s'entend normalement pour dire qu'elle existe51.

Les employés dont on estime qu'ils ont des obligations de confiance sont astreints à des règles de conduite encore plus strictes52. Le rapport de confiance -- ou rapport fiduciaire -- suppose l'imposition de normes de conduite acceptables à l'une des parties, dans l'intérêt de l'autre, quand la première a la responsabilité de préserver les intérêts de la seconde53. L'obligation de confiance exige que l'employé fasse toujours passer l'intérêt de son employeur avant le sien. En common law, la relation d'emploi est "une relation de confiance qui suppose la loyauté, la bonne foi et l'évitement des conflits entre le travail et l'intérêt personnel"54. Bien qu'en principe, tous les employés soient des fiduciaires55, les obligations des fonctionnaires, des directeurs et des cadres supérieurs sont définies beaucoup plus clairement et peuvent même subsister après la fin de l'emploi56. Pour les autres employés, les obligations sont souvent proportionnelles à l'autorité indépendante qu'ils exercent57.

Milieu syndiqué

L'employeur qui désire réglementer la conduite d'employés syndiqués doit le faire dans le cadre de la convention collective. Les conditions d'une convention collective sont acceptées et par l'employeur et par l'employé, par conséquent, elles l'emportent normalement sur les principes de la common law. Bien que l'employeur puisse imposer unilatéralement des règlements, soit en invoquant une disposition qui établit expressément la prérogative patronale, soit en exerçant ses pouvoirs de gestion inhérents, toute mesure unilatérale doit être conforme à la convention collective et peut être soumise à un arbitre qui l'examinera à la lumière de principes bien établisse58. Des arbitres ont cependant jugé qu'il n'est pas nécessaire d'énoncer expressément l'obligation fondamentale de la loyauté pour pouvoir exiger des employés qu'ils la remplissent59. Par conséquent, l'interdiction des conflits d'intérêts est censée être un des fondements de la relation employeur-employé, même si l'employeur n'a pas de politique écrite à ce chapitre60.

Néanmoins, le recours à un code d'éthique écrit trouve de plus en plus d'adeptes dans le secteur privé, que les employés soient syndiqués ou non. Selon un rapport récent du Conference Board, la proportion des entreprises américaines dotées d'un code d'éthique (ou d'un énoncé de politique analogue) a grimpé de 40 % à 85 %, de 1964 à 198761.

La conduite des employés du secteur public peut être réglementée de façon plus stricte que dans le secteur privé. Les fonctionnaires doivent, eux aussi, faire preuve de loyauté envers leur employeur, le gouvernement62, mais celui-ci a des responsabilités vis-à-vis du grand public. Par conséquent, non seulement l'employeur doit-il avoir l'assurance que le fonctionnaire est en mesure de bien remplir ses obligations publiques, mais, en outre, la population doit être assurée de l'impartialité tant réelle qu'apparente des fonctionnaires63.

La raison d'être de cette exigence est évidente: tous les gens veulent un traitement égal et juste. Le principe de l'impartialité découle aussi bien de la règle de droit que du principe de l'égalité sociale64. Selon la règle de droit, les titulaires de charge publique ne peuvent exercer que les pouvoirs qui leur sont conférés par des lois dûment approuvées par une assemblée législative représentative et appliquées uniformément à tous65. Ce principe s'est vu renforcé au cours des dernières décennies par une plus grande volonté d'égalité sociale et par des revendications dans ce sens émanant de citoyens qui exigent plus que le simple respect de la lettre de la loi.

Les titulaires de charge publique sont des fiduciaires, qui ont avec la population qu'ils servent une relation de confiance. Par conséquent, leur conduite est plus réglementée que celle d'un citoyen ordinaire. Par exemple, pour les employés de l'État, le droit de s'adonner à des activités politiques est souvent limité66. La neutralité politique:

Des gouvernements fédéraux successifs ont reconnu l'importance de préserver la confiance du public à l'égard du gouvernement:

Cependant, les directives qui n'ont pas force de loi, véhicules traditionnels de l'affirmation de ces principes, ne sont pas perçues comme des instruments permettant de réglementer efficacement les conflits d'intérêts; c'est pourquoi les demandes de dispositions législatives se sont multipliées70. Par conséquent, les mesures législatives énonçant les règles de conduite que doivent suivre les titulaires de charges publiques sont donc devenues plus courantes71. En revanche, la conduite des fonctionnaires est encore de nos jours plus souvent réglementée par des lignes directrices, des directives ou des mesures complémentaires visant à assurer le respect des normes72.

Parmi les textes qui réglementent les conflits d'intérêts dans le secteur public figurent les dispositions législatives, les lignes directrices et les directives complémentaires et administratives adoptées au niveau fédéral, provincial et municipal. On en trouve les premiers exemples dans les lois et règlements visant à protéger l'indépendance des législateurs73. On trouve encore aujourd'hui, dans la Loi sur le parlement du Canada74 et dans diverses lois sur les assemblées législatives, des dispositions interdisant les conflits d'intérêts. Cependant, on a privilégié, depuis quelque temps, des lois précises adoptées expressément pour prévenir les conflits d'intérêts.

Le gouvernement fédéral ne s'est pas encore doté d'une loi sur les conflits d'intérêts. Un projet de loi de ce genre, le projet de loi C-46, Loi sur les conflits d'intérêts chez les parlementaires75, a franchi l'étape de la première lecture à la Chambre des communes, mais semble maintenant relégué aux oubliettes. En 1985, rejetant des recommandations persistantes en faveur de documents ayant force de loi sur les conflits d'intérêts, le gouvernement a présenté un code sans caractère législatif, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat76. Un document parallèle à l'intention des fonctionnaires a également vu le jour77.

Dans la plupart des provinces, des lois sur les conflits d'intérêts sont en vigueur depuis un certain temps78. Toutes ces lois réglementent la conduite des "élus". Les obligations des fonctionnaires, elles, sont décrites dans des lois sur la fonction publique ou des lignes directrices comme les Standards of Conduct Guidelines for Public Servants79 de la Colombie-Britannique, adoptées en 1987, ou le Code of Conduct and Ethics for the Public Service of Alberta80.

Les ministères décrètent souvent des mesures d'observation supplémentaires pour tenir compte de circonstances particulières. Par exemple, le Code fédéral interdit aux fonctionnaires de se livrer, en dehors de leurs heures de travail, à des activités qui les mettent en conflits d'intérêts, mais sans préciser lesquelles. Dans les mesures d'observation supplémentaires édictées par Revenu Canada81, on décrit plusieurs activités pour illustrer les situations les plus susceptibles de créer un conflit d'intérêts.

Des lois sur les conflits d'intérêts au niveau municipal, comme celles de la Nouvelle-Écosse82, de l'Ontario83 et du Manitoba84, réglementent également la conduite des "élus" plutôt que celle des fonctionnaires municipaux. Les municipalités ont cependant commencé à élaborer des codes de conduite pour leurs employés afin de prévenir les conflits d'intérêts85. À l'instar des ministères, les municipalités recourent à des directives sur la politique administrative pour édicter une ligne de conduite en ce qui concerne les conflits d'intérêts86.

Il est tout à fait légitime que les services policiers imposent à leurs membres les normes d'éthique les plus strictes, en raison des exigences du travail policier. Compte tenu de la nature délicate, tant sur le plan social que sur le plan politique, du maintien de l'ordre public, les policiers doivent être impartiaux, honnêtes et dignes de confiance87. Cette obligation d'impartialité provient de diverses sources. Si les agents de police ont un devoir de loyauté et de fidélité envers leur employeur officiel88, c'est-à-dire le conseil, la municipalité ou le gouvernement qui les paie, leurs fonctions sont définies par des lois et non par le conseil municipal qui les embauche89.

Un emploi dans la police ne suppose pas un rapport ordinaire d'employeur à employé; le policier est plutôt considéré comme le titulaire d'une charge90. Voici la formulation type de ce principe:

Par conséquent, l'obligation d'impartialité inhérente à la charge d'agent de police découle de la loi même. Le principe de l'indépendance de la police repose sur l'idée que les policiers ne doivent servir que la loi92. lis ne doivent pas accorder de traitement de faveur à quiconque lorsqu'ils exercent leurs fonctions et font respecter la loi. Leur présence est une ressource sociale qui doit être répartie en fonction des besoins et non des intérêts personnels93.

De plus, les policiers considèrent depuis longtemps leur travail comme une profession94. Or, les professionnels sont généralement décrits comme des personnes qui offrent un service au public, qui sont compétentes et qui font preuve d'intégrité dans leur travail95. Il y a donc un élément d'auto-réglementation de leur conduite, fondée soit sur les principes de l'individu, soit sur les attentes de ses pairs.

Bien que l'obligation d'impartialité des personnes chargées de faire respecter la loi soit évidente, on l'a néanmoins qualifiée de "mandat impossible"96. Le manque d'information, de temps et de ressources rend l'impartialité absolue difficile sinon impossible. Si on a jugé nécessaire d'accorder des pouvoirs discrétionnaires aux policiers, c'est parce qu'on a reconnu l'existence d'un fossé entre "les obligations (d'impartialité) idéales qui incombent aux policiers et les décisions réelles (et partiales) qu'ils prennent chaque jour"97. Le contrôle du pouvoir discrétionnaire de la police comporte deux volets. Le premier, plus vaste, a trait aux conséquences distributives pour l'ensemble de la société; il s'agit d'une question d'ordre social qui touche la répartition des ressources. Le deuxième correspond aux règlements sur les conflits d'intérêts qui visent, eux, l'exercice individuel du pouvoir discrétionnaire, afin d'assurer que chaque agent de police applique la loi avec impartialité.

C'est généralement dans le cadre d'une loi, et notamment d'une loi provinciale sur la police98, que la conduite policière est réglementée. Des codes de déontologie font souvent partie des règlements généraux adoptés en vertu de telles lois99, qui autorisent parfois aussi les services policiers à édicter leurs propres règlements sur les conflits d'intérêts100, sous la forme d'ordres permanents ou de manuels de politiques et procédures. Les codes disciplinaires font de toute dérogation à ces politiques ou procédures une infraction. Enfin, il existe aussi, dans certains cas, des règlements d'application, notamment les règlements de la fonction publique ou les statuts municipaux, qui encadrent la conduite des policiers101.

Chapitre V

On peut définir par divers moyens des normes d'éthique élevées: règles non écrites, serments d'entrée en fonction, directives, codes de déontologie, régimes statutaires ou commissions de déontologie. Bien que la formulation expresse de règles étayées de sanctions disciplinaires soit le mécanisme le plus évident que l'on puisse utiliser pour contrôler et orienter le comportement, ce n'est pas le seul moyen. L'encadrement, la socialisation, la formation, la sensibilisation, les récompenses et les inspections ne sont que quelques-uns des autres mécanismes possibles104.

L'importance de la culture et des valeurs dans l'orientation du comportement des employés est de plus en plus connue105. Les agencements de règles, notamment les codes de déontologie, sont généralement des litanies d'interdictions. Ces codes n'incitent pas leurs destinataires à se conduire d'une façon éthique ; on leur a souvent reproché, au contraire, d'encourager les employés à chercher des échappatoires ou à contourner les règles106. Cependant, même lorsqu'elles sont de nature incitative, les règles ne peuvent éliminer la recherche de l'intérêt personnel; elles ne font qu'aider les personnes qui souhaitent se comporter d'une façon intègre107. Par conséquent, même s'il faut continuer à mettre l'accent sur la conduite individuelle, il importe de faire une plus large place aux idéaux qui conditionnent le comportement individuel et qui caractérisent l'organisation. Un programme de formation axé sur la sensibilisation à la déontologie, la participation active des superviseurs de tous les niveaux et un règlement formulé sur un ton positif, sont autant d'ingrédients importants à la création d'un climat susceptible de favoriser le respect des règles d'intégrité les plus strictes.

Néanmoins, des règles écrites fournissent aux employés une norme objective et à la direction un outil d'évaluation du rendement. Aussi pour être efficace, tout programme de déontologie devrait-il comporter à la fois une tentative concertée d'énoncer les valeurs de l'organisation et un code de déontologie bien écrit108. De ces deux moyens, le code de déontologie est actuellement le principal instrument utilisé pour prévenir les conflits d'intérêts.

Toutefois, les problèmes de définition décrits plus haut entravent l'élaboration d'un tel code109. Ce code devrait être aussi précis que possible, de manière à ce que les employés puissent aligner leur conduite en conséquence, mais il est difficile "de prévoir toutes les formes répréhensibles de conduite que peut concevoir l'imagination de l'être humain"110. Comme l'existence d'un conflit d'intérêts dépend des faits et des circonstances de chaque cas, les codes créés pour prévenir les conflits d'intérêts devraient laisser une certaine marge de manoeuvre administrative et être appliqués sur une base fonctionnelle, c'est-à-dire sur la base de la fonction. "Par "fonctionnelle", nous entendons que la portée et la teneur des règles de procédure seraient liées à la catégorie et à la classification des titulaires de charges publiques [...]"111. Cette "fonctionnalité" serait renforcée par une approche plus discursive, et notamment par l'adoption d'un code à plusieurs niveaux dans lequel la déclaration générale serait complétée par des exemples illustrant les cas problèmes112.

Une autre mise en garde s'impose au sujet de la conception de codes visant à prévenir les conflits d'intérêts: il faut à tout prix éviter de laisser entendre que les employés sont indignes de confiance. Certains estimeront qu'un code écrit est superflu, puisqu'ils sont tout à fait conscients de la conduite qu'on attend d'eux113. Pour reprendre les paroles d'un observateur anonyme:

Par conséquent, pour en maximiser l'efficacité, les employeurs doivent prendre soin de concevoir un code qui amènera les employés à se conformer volontairement à des principes d'éthique et éviter les sous entendus accusateurs.

Les codes d'éthique comprennent généralement une partie ou la totalité des éléments suivants: credo, définitions, raisons d'être, règles, lignes directrices, exemples donnés à titre d'illustration115. Le credo doit énoncer la philosophie et les principes fondamentaux de l'organisation: il a pour fonction d'exprimer des attentes et des mises en garde116. Les définitions assurent que tous s'entendent sur le sens des termes importants, alors que la raison d'être précise l'objectif visé par la réglementation sur les conflits d'intérêts. Après une telle introduction, la structure réglementaire sera plus facile à comprendre, et la conformité des employés, pleinement informés, plus facile à obtenir117.

Les résultats seront d'autant meilleurs qu'on aura bien expliqué les notions énoncées dans les règles. Les lignes directrices aident les employés à prendre des décisions dans des cas où il est impossible d'établir une règle globale, et des exemples peuvent illustrer l'application concrète des règles.

Le code de déontologie mis au point par la Banque Royale du Canada est un bon exemple d'un code qui débute par la présentation des objectifs de l'entreprise et des principes de base dont elle s'inspire dans la conduite de ses affaires118.

Une enquête réalisée en 1987 auprès de 2 000 entreprises américaines a révélé que 64 % d'entre elles avaient formulé leur propre credo, dans lequel elles exprimaient leur philosophie. D'après certains, il s'agirait là du plus ancien genre de code d'éthique119.

La plupart des codes d'éthique d'entreprises renferment une définition du conflit d'intérêts. Selon la définition d'Aigoma, il y a conflit d'intérêts:

Les définitions contenues dans les codes d'éthique d'entreprises traduisent une interprétation générale du conflit d'intérêts, qui englobe les conflits de responsabilités et les répercussions des autres activités de l'employé sur son énergie et sur son temps. La raison d'être du code est souvent combinée à la définition. Par exemple, la société Algoma demande à ses employés d'éviter tout intérêt ou toute activité qui porterait préjudice à l'entreprise en privant l'employé du temps ou de l'attention nécessaire à la bonne exécution de son travail121. En revanche, la définition de Bell Canada est centrée sur la nécessité de faire preuve d'impartialité dans l'exercice de ses fonctions; il y a conflit d'intérêts quand:

Dans beaucoup de cas, les codes d'éthique d'entreprises donnent un sens plus large au mot "intérêt" que la plupart des codes en vigueur dans le secteur public; ils le définissent, par exemple, comme "tout intérêt ou rapport direct ou indirect de nature commerciale, financière ou autre"123. Certains codes font mention de tout intérêt qui nuit à l'impartialité de l'employé, sans donner de définition plus précise. Pour certains employeurs, les intérêts comprennent aussi ceux des membres de la famille. C'est le cas d'une entreprise qui:

Bell Canada reconnaît que tous ses employés ont beaucoup de relations et d'intérêts différents, et qu'il "peut se présenter des situations où ces intérêts empiètent les uns sur les autres"125.

Différentes méthodes sont utilisées pour aider les employés à percevoir les conflits d'intérêts. La société Loblaws applique une règle empirique fondée sur l'embarras que la situation risquerait de causer à l'employé, à quelqu'un d'autre ou à l'entreprise, si elle était révélée au public126. La société Pepsico dresse une liste de questions que les employés doivent se poser127. S'ils ne peuvent répondre par la négative à toutes les questions, ils doivent discuter de leur situation avec leur supérieur. D'habitude, les codes donnent de nombreux exemples de conflits d'intérêts, parce que des scénarios réels facilitent généralement l'interprétation de règles et de lignes directrices détaillées.

La typologie mise au point par le Center for Corporate Social Performance and Ethics128 énumère les catégories de conflits d'intérêts qui peuvent exister dans le secteur privé. Les conflits d'intérêts sont regroupés en fonction de l'intérêt de l'employeur auquel ils risquent de nuire:

  1. L'entreprise: Si l'employé a un autre emploi, celui-ci risque d'empiéter sur son temps de travail ou de miner son rendement au travail.
  2. Relations publiques: l'utilisation de fonds ou d'installations appartenant à l'entreprise pour soutenir des partis politiques ou des candidats peut créer un conflit d'intérêts réel ou potentiel.
  3. Relations entre les employés: Si un salarié accepte d'un fournisseur, d'un client ou d'un concurrent un cadeau déplacé destiné à son usage personnel, s'il embauche des membres de sa famille ou s'il procède à des tractations intéressées, cela risque de miner le moral et l'harmonie des rapports entre les employés.
  4. Relations avec les clients: Si l'employé risque d'être influencé par des clients dans l'exercice de ses fonctions et responsabilités, cela peut engendrer des conflits d'intérêts.
  5. Relations avec les fournisseurs: Le fait d'entretenir des relations personnelles avec un fournisseur peut donner lieu à un conflit d'intérêts.
  6. Relations avec des concurrents: Les relations personnelles ou financières qu'entretient l'employé avec un concurrent risquent d'influencer son jugement et donc de le placer en conflit d'intérêts.

De la même façon, les documents correspondants du secteur public commencent souvent par l'exposé de leur raison d'être ou de leurs objectifs, qui sont généralement de prévenir les conflits d'intérêts et de les régler en faveur de l'intérêt public, lorsqu'ils surviennent. La Loi sur la fonction publique129 du Québec comporte un chapitre distinct sur les normes d'éthique et de discipline. Elle souligne l'importance de la loyauté et de l'impartialité:

Une lacune que l'on relève souvent dans les documents du secteur public est l'absence d'une définition précise du conflit d'intérêts. Quand il y en a une, elle est souvent tautologique. Par exemple, le Manuel d'administration de la fonction publique de l'Ontario définit le conflit d'intérêts comme un "conflit entre l'intérêt personnel du fonctionnaire et ses responsabilités de fonctionnaire"130.

En revanche, les documents du secteur public délimitent souvent les conflits d'intérêts privés inacceptables en stipulant des exemptions. Par exemple, la Conflict of Interest Act de la Nouvelle-Écosse exempte

  1. s'applique à l'ensemble de la population,
  2. touche un membre parce qu'il fait partie d'une grande catégorie de personnes,
  3. a trait à la rémunération, aux indemnités et aux avantages sociaux du membre en tant que tel,
  4. est si lointain ou négligeable qu'il ne peut raisonnablement être considéré comme susceptible d'influencer le membre131.

Dans ce cas, on note trois types d'intérêts communs à tous les membres d'une collectivité et un intérêt trop lointain pour influencer le membre. Le projet de loi C-46 proposait, lui aussi, l'exemption fondée sur la communauté des intérêts132. Pour sa part, la Loi sur conflits d'intérêts de l'Ontario prévoit une exemption pour les intérêts de représentation133.

Le caractère lointain ou négligeable de l'intérêt est déterminé par un seuil minimal au-dessus duquel l'intérêt serait considéré comme appréciable. Par exemple, dans la Loi sur les conflits d'intérêts des membres de l'assemblée législative et du conseil exécutif du Manitoba, la valeur de l'intérêt ou de la responsabilité financière doit être supérieure à 500 $ pour entrer en ligne de compte134. Dans cette loi, les responsabilités financières sont expressément définies comme étant une forme distincte d'intérêts135.

La plupart des textes traitent essentiellement des intérêts pécuniaires directs ou indirects du membre, de son conjoint ou des enfants à sa charge136. Les Directives sur les conflits d'intérêts137 de l'Ontario, à l'intention des ministres, ont une portée plus large que la plupart des codes d'éthique du secteur public. Elles incluent tous les intérêts privés - qu'ils soient d'ordre financier ou non, directs, indirects, personnels ou d'une autre personne.

Au Canada, la conduite des policiers est très réglementée, et les conflits d'intérêts sont généralement visés par cette réglementation. Cependant, les règles de conduite qui s'adressent aux policiers permettent rarement de déterminer si une situation crée un conflit d'intérêts ou de trancher certaines questions techniques, par exemple: les intérêts non pécuniaires ou les intérêts des membres de la famille du policier doivent-ils être divulgués? Dans la police, on s'est généralement contenté d'interdire expressément certaines situations qui posent des problèmes particulièrement graves aux services policiers (par exemple, l'emploi secondaire, les activités politiques ou l'abus de confiance), mais sans les qualifier explicitement de conflits d'intérêts. En outre, en raison des normes de conduite rigoureuses auxquelles doivent se conformer les policiers, certains types d'inconduite sont considérés comme assez graves pour justifier une interdiction expresse; c'est pourquoi on ne se contente pas de les inclure dans la notion générale de conflit d'intérêts.

La nouvelle Loi sur les services policiers138 de l'Ontario se distingue des autres lois provinciales sur la police parce qu'elle proscrit explicitement les conflits d'intérêts. L'alinéa 49(1)b) de cette Loi interdit aux agents de police de se livrer à toute activité qui les mettrait en conflit d'intérêts. Cependant, aucune définition plus précise n'est donnée de ce qu'est un conflit d'intérêts.

La Loi sur la Gendarmerie royale du Canada traite, elle aussi, explicitement des conflits d'intérêts. Elle stipule qu'il incombe à chaque membre "d'éviter tout conflit d'intérêts réel, apparent ou possible"139.

Beaucoup de lois ou de règlements sur la police exigent que les membres de services policiers prêtent un serment d'allégeance ou un serment d'office. Ainsi, en Colombie-Britannique, tous les policiers doivent faire le serment suivant:

Le serment professionnel que doivent prêter les membres de la GRC est plus précis:

C'est cette exigence d'impartialité qui fait du serment un outil général de prévention des conflits d'intérêts, puisque tout manquement au serment peut entraîner des sanctions disciplinaires142.

La plupart des dispositions législatives abordent la question de l'inconduite policière dans le cadre d'un code de discipline qui figure généralement dans les règlements adoptés en vertu d'une loi sur la police143. Les divers codes disciplinaires ont tous ceci de commun qu'ils reconnaissent les fautes disciplinaires suivantes:

  1. conduite scandaleuse;
  2. insubordination;
  3. manquement au devoir;
  4. tromperie;
  5. divulgation indue de renseignements;
  6. corruption;
  7. abus de pouvoir.

En règle générale, dans ces règlements, le conflit d'intérêts n'est pas défini comme une forme d'inconduite en soi. On le retrouve donc souvent sous la notion de conduite scandaleuse. Un policier se rend coupable de conduite scandaleuse s'il "agit d'une façon désordonnée, préjudiciable à la discipline ou raisonnablement susceptible de jeter le discrédit sur le corps policier dont il est membre"144. Les conflits d'intérêts se rangent dans cette catégorie parce que, comme on l'a vu plus haut, ils risquent de saper le moral du service de police ou la confiance du public envers celui-ci. Cette raison est donnée expressément dans le Règlement de la GRC. Le membre agit ou se comporte d'une façon scandaleuse qui jette le discrédit sur la Gendarmerie si "ses actes ou son comportement l'empêchent de remplir ses fonctions avec impartialité"145.

Cependant, le conflit d'intérêts pourrait figurer sous beaucoup d'autres rubriques du code disciplinaire. Pour éviter tout conflit d'intérêts, les policiers doivent remplir leurs fonctions d'une façon désintéressée et impartiale. Si un policier n'enquête pas correctement sur Une infraction, il est coupable de manquement au devoir. Mais s'il n'enquête pas à fond parce que la personne impliquée dans l'infraction est celle-là même à qui le policier souhaite vendre une voiture, le policier est alors aussi en conflit d'intérêts. Un policier qui se sert de renseignements confidentiels auxquels il a accès grâce à son travail dans la police pourrait être accusé de divulgation indue d'information. Cependant, s'il se sert de ces renseignements pour son profit personnel ou pour aider un parent, il y aurait aussi un conflit d'intérêts146. De la même façon, les conflits d'intérêts pourraient entraîner un abus de pouvoir, de la tromperie ou de l'insubordination, ou être assimilés à deux ou plusieurs fautes disciplinaires à la fois.

L'inclusion de concepts aussi imprécis dans les codes de discipline n'est plus, pour certains services policiers, le principal mécanisme de contrôle des conflits d'intérêts. Le Québec s'est doté d'un Code de déontologie des policiers du Québec147 qui s'applique aux membres de la Sûreté du Québec et à d'autres corps de police municipaux, dans leurs rapports avec le public. Le code commence par une section générale décrivant son objectif et sa raison d'être. Il vise:

La deuxième section traite des devoirs et des normes de conduite des policiers. Chaque disposition qui y est énoncée commence par une déclaration positive (par exemple: "Le policier doit exercer ses fonctions avec probité."149), suivie d'une liste d'activités prohibées. L'article 9 traite des conflits d'intérêts:

Viennent ensuite les interdictions expresses qui touchent: 1) l'acceptation d'un don, d'une faveur ou de tout autre avantage de nature à compromettre l'impartialité du policier ; 2) l'offre d'un don, d'une faveur, d'un avantage de nature à compromettre l'impartialité de la personne qui le reçoit ; 3) la recommandation des services d'un procureur en particulier à une personne avec laquelle le policier a été en contact dans l'exercice de ses fonctions ; 4) la sollicitation d'argent auprès du public par la vente d'annonces publicitaires ou de billets.

Les règles édictées dans ce code sont détaillées davantage dans le Règlement sur la discipline interne des policiers de la Communauté urbaine de Montréal150. Dans la première partie de ce règlement, le Code de déontologie des policiers du Québec est reproduit. Dans la deuxième partie, la charge de commissaire à la déontologie et les procédures à suivre à la suite de plaintes fondées sur le Code sont décrites.

La troisième partie énonce les fonctions des policiers et, donc, la conduite attendue. Le serment d'allégeance et le serment de discrétion servent de base à l'interdiction d'utiliser des renseignements confidentiels pour en tirer un avantage personnel151.

Les policiers ont également l'obligation de remplir leurs fonctions avec intégrité. Cette obligation fonde l'interdiction d'utiliser les biens de l'employeur à des fins personnelles152, et de négliger d'informer le directeur de situations qui placent ou sont susceptibles de placer l'agent de police en conflit d'intérêts, de compromettre son impartialité ou d'affecter défavorablement son jugement ou sa loyauté153.

Le policier a également le devoir de "faire preuve de dignité et d'éviter tout comportement de nature à lui faire perdre la confiance ou la considération que requièrent ses fonctions ou à compromettre l'efficacité du service"154. Au nombre des activités interdites en vertu de cette obligation générale figurent la fréquentation de criminels, la recommandation d'un avocat en particulier, l'exercice d'un emploi secondaire, la vente ou la publicité de billets et les activités politiques.

Cette obligation de faire preuve d'impartialité, de loyauté et d'intégrité, de manière à conserver la confiance du public, est évidemment étroitement liée à l'obligation d'éviter les conflits d'intérêts. Tout manquement au devoir correspondant à l'une des catégories d'activités précitées pourrait tout aussi bien être qualifié de conflit d'intérêts.

L'article 6 oblige les policiers à obéir sans tarder aux ordres et aux directives de leurs supérieurs. Il assimile à une faute disciplinaire le refus de révéler ses avoirs personnels lorsque le directeur en fait la demande155. Le code exige donc une certaine révélation des intérêts personnels, mais aucun mécanisme de contrôle n'est décrit en détail.

Le Règlement sur la déontologie et la discipline des membres de la Sûreté du Québec156, qui porte sur la discipline interne de ce service policier, prescrivait que les membres devraient remplir leurs fonctions "avec désintéressement et impartialité"157. Le membre était tenu d'éviter:

Le policier n'était pas tenu de révéler des renseignements sur sa vie personnelle à son supérieur que lorsqu'il croyait être dans une situation qui le met ou est susceptible de le mettre en conflit d'intérêts159. Le Code ne donnait aucune consigne au supérieur pour l'aider à régler le problème.

Au Service de police de Winnipeg, les règlements sur les conflits d'intérêts sont édictés par la municipalité. Les Winnipeg Police Department Regulations160 ont été créés par un règlement pris en vertu de la Loi sur la Ville de Winnipeg161. Ces règlements diffèrent peu des autres. La Ville de Winnipeg s'est également dotée, en 1982, d'un Code of Ethics for Employees162 qui s'applique aux agents de police. Les dispositions de ce code interdisent notamment les traitements de faveur, l'emploi secondaire, la divulgation de renseignements confidentiels, l'acceptation de dons et l'utilisation des biens de la Ville à des fins personnelles.

En règle générale, les différentes lois sur la police autorisent ou ordonnent également les commissions de police provinciales et les conseils de police municipaux à édicter des règles s'appliquant précisément à certains services policiers. Par exemple, l'article 28 de la Police Act163 de la Colombie-Britannique stipule ce qui suit:

1) Chaque conseil édicte des règles compatibles avec la présente loi et les règlements en ce qui concerne

  1. les normes, les lignes directrices et les politiques administratives du service de police municipal,
  2. la prévention de la négligence et des abus de la part de ses policiers municipaux, et
  3. le bon exercice de leurs fonctions et attributions par les policiers et le service de police de la municipalité.

Ces règlements peuvent prendre la forme d'ordres permanents, de manuels de politique ou de guides d'administration. Par exemple, le code de conduite énoncé dans le guide d'administration de la police de Calgary exige des policiers qu'ils:

La partie I.4 du Manuel d'administration de la GRC, autorisée par le paragraphe 21(2) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, permet d'analyser plus à fond les situations qui engendrent des conflits d'intérêts et les moyens d'y remédier. D'une façon générale, les membres doivent:

De façon plus précise, les lignes directrices suivantes sur les conflits d'intérêts s'appliquent à tous les membres de la Gendarmerie166:

2) Il ne suffit nullement qu'une personne qui occupe un poste de responsabilité dans la fonction publique observe la loi. Il lui faut non seulement se conformer à la loi, mais avoir également une conduite si irréprochable qu'elle puisse résister à l'enquête la plus minutieuse. Pour que leur intégrité et leur impartialité soient à l'abri de tout doute, les fonctionnaires doivent faire en sorte de ne pas être en reste avec une personne qui pourrait vouloir se faire accorder par eux une compensation ou un avantage particulier ou chercherait par tous les moyens à obtenir d'eux un traitement de faveur. De même, ils ne doivent pas avoir d'intérêts pécuniaires susceptibles d'entrer en conflit de quelque manière que ce soit avec l'exercice de leurs fonctions officielles.

3) Il ne doit y avoir ni sembler y avoir de conflit entre les intérêts privés des fonctionnaires et leurs fonctions officielles. Une fois nommés, les fonctionnaires doivent gérer leurs affaires personnelles de manière à éviter tout conflit d'intérêts.

4) Les fonctionnaires doivent veiller, dans la gestion de leurs affaires personnelles, à ne pas se servir ni sembler se servir à leur avantage de renseignements obtenus dans l'exercice de leurs fonctions officielles et qui, de façon générale, ne sont pas accessibles au public.

5) Les fonctionnaires ne doivent pas se mettre dans une situation où ils pourraient retirer des profits ou des intérêts directs ou indirects de tout contrat gouvernemental sur l'adjudication duquel ils peuvent exercer une influence.

6)On s'attend à ce que tous les fonctionnaires divulguent à leurs supérieurs, d'une manière qui doit être notifiée, tous leurs intérêts financiers, commerciaux et d'affaires dans les cas où ceux-ci pourraient vraisemblablement être censés venir en conflit réel ou éventuel avec leurs fonctions officielles.

7) Les fonctionnaires ne doivent occuper aucun poste ni emploi extérieur dont les exigences pourraient être inconciliables avec leurs fonctions officielles ou mettre en cause leur aptitude à remplir ces fonctions de façon objective.

8) Dans l'exercice de leurs charges officielles, les fonctionnaires ne doivent pas accorder de traitement de faveur à leurs parents ni à leurs amis ni à des organismes dans lesquels leurs parents ou leurs amis ont des intérêts financiers ou autres.

Pour se conformer aux exigences énoncées dans la sixième directive, au sujet de la divulgation de leurs intérêts, les membres doivent révéler à leur commandant divisionnaire leurs intérêts pécuniaires privés qui pourraient venir en conflit, soit réel ou éventuel, avec leurs fonctions officielles. Leur supérieur doit les informer des mesures à prendre pour se conformer à cette disposition167.

Il incombe donc à chaque membre de décider s'il y a lieu de divulguer ces intérêts. Cependant, les intérêts ne sont pas définis assez clairement pour permettre aux membres de décider en connaissance de cause de la nécessité de les divulger, conformément à la directive No 6. Les mesures qui assureraient le respect de la directive No 3 ne sont pas, elles non plus, assez clairement décrites. Les lignes de conduite à suivre dans le cas de situations qui risquent de créer un conflit d'intérêts -- par exemple l'exercice d'un deuxième emploi, l'acceptation de dons ou l'achat de biens excédentaires -- ne figurent pas dans une partie de la section des conflits d'intérêts du manuel, de ce fait privant les membres de pouvoir se renseigner facilement.

Cet état de choses est un exemple typique de la façon dont on tente, à l'heure actuelle, de prévenir les conflits d'intérêts dans la police. Il existe rarement des documents qui énoncent la politique et décrivent, d'une façon ordonnée, la philosophie et les objectifs du code de déontologie, assortis de définitions détaillées et de mesures d'observation. L'accent est plutôt mis sur l'interdiction ou la réglementation d'activités précises, plutôt que sur l'exposition de principes relatifs aux conflits d'intérêts. De la même façon, il existe rarement des mécanismes bien pensés pour assurer le respect des règles, les sanctions disciplinaires restant l'outil le plus souvent utilisé à cette fin.

Chapitre VI

L'évitement des conflits d'intérêts découle de l'exigence générale de loyauté. En common law, toute conduite qui fait perdre à l'employé la confiance de son employeur est qualifiée d'inconduite et constitue un motif valable de renvoi immédiats168. Le droit de congédier est absolu. L'employeur n'a pas à prouver que le conflit d'intérêts dans lequel se trouvait son employé lui a causé un tort ou un préjudice réel169; le fait que le conflit d'intérêts aurait profité tant à l'employeur qu'à l'employé ne change pas non plus quoi que ce soit170. La règle reste la suivante: *Quand une personne a accepté la position d'employé, si elle fait quelque chose d'incompatible avec l'exécution loyale et correcte de ses devoirs envers son employeur, ce dernier a le droit de la congédier+171.

Cependant, en règle générale, on considère les sanctions disciplinaires comme une solution appropriée uniquement lorsque l'employé commet un écart de conduite alors qu'il sait pertinemment quelle conduite on attend de lui. Il est généralement reconnu que les interventions disciplinaires ont pour but de fournir à l'employé l'occasion de corriger les lacunes de son rendement. Les mesures disciplinaires sont le moyen utilisé par l'employeur pour amener ses employés à respecter une série de normes -habituellement consignées par écrit. D'après un document antérieur du CEE, intitulé Renvoi pour raisons disciplinaires -- Une optique policière, le rôle de la discipline est "d'établir des règles de travail et de comportement et de les faire observer en imposant des sanctions à ceux qui les enfreignent"172. Les règles disciplinaires seraient nécessaires pour garantir aux employés un traitement juste et uniforme, et pour assurer le bon fonctionnement de l'organisation.

Pour cette raison, les codes d'éthique de beaucoup d'entreprises et d'administrations publiques exigent des employés qu'ils attestent par écrit qu'ils ont bien lu et compris les règles. En outre, on offre souvent aux salariés une formation pour les inciter à se conformer aux dispositions du code d'éthique et pour les informer des conséquences qu'entraîterait tout manquement aux règles, et notamment des écarts de conduite qui justifieraient le renvoi. La plupart des codes indiquent simplement que l'employé qui enfreint les règles est passible de sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu'au renvoi173.

Bien que de telles mises en garde soient utiles, elles ne sont peut-être pas strictement nécessaires pour justifier les mesures disciplinaires. La relation d'employeur à employé décrite ci-dessus ne s'applique pas aux policiers. Par conséquent, on a jugé dans un cas que le chef de police n'était pas tenu d'informer un agent des conséquences des actes commis par ce dernier pour pouvoir lui imposer les sanctions174. Vue sous cet angle, la discipline n'est guère utile pour susciter un comportement éthique; elle n'est applicable que s'il existe des règles claires et si les sanctions disciplinaires punitives sont privilégiées.

Pour faire respecter les directives sur les conflits d'intérêts, on peut adopter une approche soit négative, soit positive. Dans le premier cas, les mesures sont axées sur la punition et la dissuasion, alors que dans le deuxième, on s'efforce de sensibiliser l'employé afin de l'amener à se conduire de façon responsable. Les techniques du renforcement positif jouent un rôle important dans la création d'un climat qui valorise des normes d'éthique élevées. Il importe de souligner que, même si les règles et procédures disciplinaires peuvent contribuer sensiblement à assurer le respect des règles, elles ne devraient intervenir que lorsque d'autres méthodes, plus subtiles, ont échoué.

Face à l'inconduite de leurs employés, les organisations ont généralement, jusqu'ici, recouru à une progression de mesures: entretien avec l'employé, avertissements sous la forme de réprimandes orales ou écrites, suspension avec ou sans solde et, finalement, congédiement. La rapidité de la progression dépend de la gravité de la faute commise. Cependant, dans les cas de conflit d'intérêts, les interventions des organisations devraient généralement viser la suppression du conflit. Par exemple, la Banque Royale énonce l'objectif suivant:

On retrouve la même philosophie chez Pepsico où, si un conflit d'intérêts existe:

L'approche privilégiée est donc de favoriser la prise de conscience des préoccupations de l'employeur au sujet des conflits d'intérêts et de prendre des mesures qui permettent aux employés d'éviter ou de régler le problème. Les interventions non punitives de la direction peuvent être très variées et sont détaillées plus loin-, il peut s'agir de retourner un don, de cesser une activité, de se défaire d'un intérêt ou de redéfinir les fonctions de l'employé, soit temporairement, soit définitivement.

La réaction des autorités policières dépend parfois de la gravité qu'on attache à l'inconduite alléguée. Par exemple, les règlements de la police de l'Alberta donnent au supérieur l'occasion de conseiller l'agent fautif177. La Loi sur la GRC178 prévoit, elle aussi, des mesures disciplinaires simples comme conseiller le contrevenant ou recommander qu'il suive une formation ou encore qu'il soit muté. S'ils commettent des fautes plus graves et dépendant des dispositions législatives applicables, les agents de police peuvent se voir intimer l'ordre de démissionner ou être congédiés, rétrogradés, suspendus, blâmés ou mis à l'amende179.

D'après la jurisprudence dans ce domaine, lorsque des sanctions disciplinaires s'imposent, il faut étudier chaque affaire individuellement, en tenant compte des circonstances particulières180. Avant d'opter pour une intervention disciplinaire, il faut se poser les questions suivantes:

  1. L'employé en question est-il responsable, en partie, d'un processus par lequel des membres du public se voient accorder ou refuser des permis, des avantages, et ainsi de suite?
  2. Dans quelle mesure l'employé exerce-t-il un pouvoir discrétionnaire à une étape quelconque de ce processus?
  3. Dans quelle mesure l'employé a-t-il affaire au public et est-il perçu par le public comme intervenant dans le processus?
  4. Des lignes de conduite claires sur les conflits d'intérêts ont-elles été édictées? Dans la négative, peut-on, compte tenu de la nature du poste de l'employé, s'attendre à ce que celui-ci tire de lui-même des conclusions raisonnables ou à ce qu'il demande conseil au sujet des conflits d'intérêts?181.

Il conviendrait que les autorités policières tiennent compte de ces facteurs lorsqu'elles sont en présence d'un conflit d'intérêts dans leurs rangs.

Il n'y a peut-être pas lieu de congédier l'employé s'il peut être réformé182. Il faut alors se poser la question suivante: peut-on raisonnablement croire que la conduite de l'employé cause un tort irréparable à la relation employeur-employé183? Cependant, dans des cas extrêmes, des manquements aux règles relatives aux conflits d'intérêts peuvent constituer un refus d'exécuter le contrat d'emploi184.

Dans la plupart des situations d'emploi, des sanctions disciplinaires ne sont imposées que lorsque l'inconduite de l'employé est délibérée, mais les conflits d'intérêts appellent des considérations différentes. Alors qu'en principe, des conséquences judiciaires ne découlent que de faits avérés, l'existence d'un conflit d'intérêts n'est pas le fruit d'une faute intentionnelle185. Ainsi, un conflit d'intérêts réel pourrait justifier l'imposition de sanctions disciplinaires, alors qu'un conflit d'intérêts potentiel ou apparent pourrait entraîner une intervention non disciplinaire. Beaucoup de définitions des conflits d'intérêts font cette distinction: il n'y a manquement que si l'employé sait que sa conduite, dans l'exercice de ses fonctions officielles, pourrait lui procurer un avantage personnel186. La Loi sur les conflits d'intérêts des membres de l'assemblée législative et du Conseil exécutif du Manitoba tolère les manquements commis par inadvertance:

Dans les cas où le conflit d'intérêts ne justifie pas l'imposition de sanctions disciplinaires, diverses mesures de nature non disciplinaire pourraient être prises - comme la mutation, le congé ou le renvoi par mesure administrative - s'il s'avérait impossible d'éliminer le conflit.

En règle générale, la filière disciplinaire est un instrument très médiocre pour faire respecter les codes d'éthique sur les conflits d'intérêts. Le problème tient à ce que le simple fait de se trouver en conflit d'intérêts n'est pas, en soi, moralement répréhensible; il le devient cependant quand le conflit d'intérêts n'est pas résolu d'une façon éthique.

Pourtant, l'importance des apparences est telle que la simple existence d'un conflit d'intérêts justifie qu'on intervienne sans même attendre de voir si l'employé se comportera malhonnêtement. C'est pour cette raison que les codes d'éthique les plus étudiés énoncent certaines obligations et contraintes, mais aussi des moyens permettant de réduire les risques de conflits d'intérêts. Parmi ces moyens, la prévention et la divulgation viennent au premier rang188.

La prévention suppose non seulement qu'on s'abstient de toute nouvelle activité qui risque de créer un conflit d'intérêts, mais aussi qu'on abandonne les anciennes:

Évidemment, des règles de désaississement exagérées risquent d'entraîner des pertes ou des préjudices financiers considérables. Les règlements sur les conflits d'intérêts doivent concilier la nécessité de normes strictes d'éthique et la nécessité de pouvoir compter sur un personnel compétent190. Les candidats que l'on cherche à recruter dans l'administration publique ont souvent des intérêts et des avoirs personnels appréciables191. Si on pose des conditions excessives sur le plan du désaississement des actifs, cela dissuadera certains d'entre eux d'accepter une charge publique.

Les fiducies offrent un moyen moins radical d'éviter les conflits d'intérêts. C'est pourquoi on recourt plus souvent à la fiducie en compte bloqué et à la fiducie sans droit de regard. La fiducie en compte bloqué est une formule selon laquelle le fiduciaire a pour instruction de maintenir les avoirs exactement en l'état où ils se trouvaient lors de l'ouverture du compte. Ainsi, bien que la personne qui ouvre un tel compte connaisse toujours précisément le contenu de son fonds en fiducie, on évite tout conflit d'intérêts qui susciterait la tentation d'acheter ou de vendre ces actifs. Évidemment, les conflits d'intérêts liés à la volonté d'accroître ces actifs ne sont pas évités.

En revanche, la fiducie sans droit de regard permet au fiduciaire de disposer de tous les actifs et de décider de tous les investissements au nom du disposant. Ce dernier n'a aucun contrôle sur ses avoirs placés en fiducie et ignore la composition de son portefeuille. Il y a cependant des limites à l'utilisation de la fiducie sans droit de regard, comme l'a fait remarquer clairement la Commission Parker:

La Commission a recommandé d'abolir le recours à des fiducies sans droit de regard.

Bien entendu, le placement d'avoirs en fiducie comporte des coûts. Outre le coût d'opportunité qu'on doit assumer lorsque des avoirs sont gelés dans un compte bloqué en fiducie ou les pertes imputables à la mauvaise administration d'un compte en fiducie sans droit de regard, les frais de placement en fiducie doivent être pris en considération. Certains codes prévoient le remboursement de ces derniers frais193, mais il semble qu'aucun ne prévoit d'indemnisation pour les autres coûts.

La méthode de contrôle prévue dans beaucoup de codes d'éthique récents est la divulgations194. La divulgation de tous les intérêts de l'employé permet à l'employeur de déterminer avec lui les intérêts susceptibles d'engendrer des conflits. Cette mesure procure ainsi à l'employé qui a révélé tous ses avoirs une certaine protection contre les conséquences de simples erreurs de jugement.

Les avoirs et intérêts de l'employé peuvent être divulgués à un fonctionnaire désigné et gardés secrets, ou ils peuvent être recensés dans un rapport accessible au public195. L'une et l'autre formule ont des avantages et des inconvénients évidents et s'appliquent dans des circonstances différentes.

L'exigence d'une telle divulgation soulève d'importantes questions relatives au droit au respect de sa vie privée196. Bien que ce soit particulièrement vrai dans le cas de la divulgation publique, c'est également vrai dans le cas de la divulgation confidentielle. La mesure dans laquelle on empiète sur les droits individuels dépend aussi de la portée des exigences. Par exemple, dans l'affaire Canadian Fram, les employés contestaient l'obligation de révéler les intérêts commerciaux des membres de leur famille, faisant valoir l'argument suivant:

Un troisième type de mesure, qui peut servir soit de solution de rechange, soit de complément à la divulgation est le désistement -- la divulgation d'un intérêt personnel précis au moment où il entre en conflit ou semble entrer en conflit avec les fonctions et les responsabilités publiques198. Le désistement peut être confidentiel ou public, limité ou vaste, tout comme la divulgation. Bien qu'il suppose moins d'intrusion dans la vie de l'employé, il confère à celui-ci une plus lourde responsabilité dans l'identification et le signalement des conflits d'intérêts possibles.

La divulgation, la discussion et la consultation sont les principaux mécanismes de contrôle dans les codes d'éthique d'entreprises privées. Il incombe au salarié de divulguer, souvent par écrit à un responsable désigné, tous les intérêts et toutes les activités qui pourraient raisonnablement être perçus comme étant en conflit avec ses fonctions ou responsabilités publiques. La situation de chaque personne étant différente, chaque cas est évalué séparément.

Parmi les mesures qui servent à assurer le respect des directives sur les conflits d'intérêts dans le secteur public figurent la prévention, la divulgation confidentielle, la déclaration publique, le désistement ou le déssaisissement. La divulgation est la principale méthode utilisée pour éviter les conflits d'intérêts. Elle peut être exigée lors de l'entrée en fonction, périodiquement ou lors d'un changement soit dans les intérêts de l'employé, soit dans les fonctions de son poste. La divulgation spécifique, ou désistement, peut également être exigée lorsque les intérêts personnels sont, pourraient être ou semblent être incompatibles avec les fonctions publiques. La Conflict of Interest Act199 de l'Alberta repose sur l'idée que le désistement est la meilleure façon de prévenir les conflits d'intérêts. Elle exige des titulaires de charges publiques qu'ils divulguent tout intérêt qui pourrait raisonnablement influer sur leurs décisions, au moment de celles-ci200. Comme il est impossible de connaître d'avance les répercussions de tous les intérêts de chacun, le désistement permet de signaler à temps tout risque de conflit d'intérêts.

Les codes d'éthique en vigueur dans le secteur public énumèrent souvent en détail les intérêts exemptés, c'est-à-dire ceux que les employés n'ont pas à divulguer. Ceux-ci sont cependant tenus de divulguer les intérêts non exemptés, dans la mesure où ils sont au courant de leur existence. Si les avoirs de l'employé changent, les renseignements pertinents doivent être communiqués sans tarder au fonctionnaire compétent201.

Dans le secteur public, l'impératif de la divulgation est souvent circonscrit par les lois sur l'accès à l'information et sur la protection des renseignements personnels, qui permettent d'accorder au public l'accès à des renseignements confidentiels ou de lui refuser l'accès à des renseignements qui devraient, en principe, être publics. Lorsque les lois sur la protection des renseignements personnels prédominent, les données divulguées doivent être traitées avec des précautions particulières202.

Le mécanisme final qui permet de faire respecter tout code d'éthique efficace est une procédure d'examen par un bureau ou une commission d'éthique. Un certain pouvoir de contrôle est indispensable pour amener les employés à se plier aux exigences du code, pour fournir des orientations et pour assurer l'application uniforme des règles. Comme les employés et les responsables de l'application du code d'éthique ne s'entendent pas toujours sur l'existence d'un conflit d'intérêts ni sur les mesures à prendre pour y remédier, un mécanisme de règlement des différends est également nécessaire. Ce mécanisme peut prendre diverses formes: il peut s'agir d'un système dans lequel les autorités chargées de l'application du code d'éthique l'emportent toujours ou d'un organisme d'arbitrage indépendant, dont les décisions sont exécutoires.

Le rôle que peut jouer la Commission de déontologie pour ce qui est d'assurer le respect des normes d'éthique varie considérablement. La société IBM enjoint ses employés de considérer les nombreux facteurs qu'ils sont les seuls à connaître et, au besoin, de consulter l'avocat de la compagnie, leur supérieur ou le responsable désigné. Celui-ci, après avoir examiné les circonstances de même que les exigences du code, détermine si l'employé se conforme à ces exigences ou s'il devrait soit se dessaisir d'un avoir, soit modifier ses fonctions203. D'autres entreprises chargent un comité de déontologie de conseiller les employés sur la façon de se conformer aux exigences du code et de faire respecter ces exigences204.

Bien que, en dernier ressort, la responsabilité de percevoir un conflit d'intérêts réel ou potentiel incombe à l'individu dans le secteur public également, on lui offre souvent de l'aide pour lui permettre d'évaluer des lignes de conduite possibles, de se dessaisir de ses intérêts personnels ou de les divulguer. Des fonctionnaires désignés examinent parfois les formules de divulgation d'intérêts pour déterminer s'il y a un conflit d'intérêts et pour informer les employés des mesures à prendre205.

Ces fonctionnaires désignés peuvent être des superviseurs, des juges ou des commissaires à la déontologie. La Loi sur les conflits d'intérêts206 du Nouveau-Brunswick exige la divulgation des renseignements pertinents à un juge désigné. Beaucoup de codes d'éthique autorisent la création du poste de commissaire à la déontologie ou la constitution d'un comité de déontologie; il s'agit là d'une caractéristique généralisée des nouveaux codes207.

Le recours à un organisme de contrôle peut permettre d'exempter certains actifs, après étude de chaque cas. S'il était adopté, le projet de loi C-46 établirait une commission de trois membres chargée de faciliter l'interprétation et l'application de la Loi, et de désigner "les biens, les dettes, les intérêts financiers ou la source de revenu"208 comme étant un intérêt privé autorisé. En outre, cette commission pourrait déterminer les mesures que chaque parlementaire devrait prendre, compte tenu de sa situation particulière, pour se conformer aux exigences de la loi. Si un mandat aussi vaste favorise une certaine souplesse, d'aucuns ont exprimé des réserves et se demandent si les commissaires disposent de lignes de conduite suffisantes pour pouvoir exercer leur pouvoir discrétionnaire209.

De la même façon, la loi adoptée par l'Alberta confère au commissaire à la déontologie le pouvoir d'exempter des activités qui autrement seraient prohibées, à la condition qu'elles soient divulguées et approuvées210. En vertu des lignes directrices de l'Ontario, le premier ministre peut dispenser certains parlementaires de l'obligation de se déssaisir de leurs biens lorsque cela risque de leur causer un préjudice indu"211. La politique adoptée par la ville d'Edmonton permet au chef des services municipaux de modifier les dispositions du code d'éthique ou d'en dispenser quelqu'un lorsque cela semble être dans l'intérêt public212. Ces dispositions favorisent, elles aussi, la souplesse, mais peut-être au prix de la certitude.

L'administrateur désigné peut aider à déterminer la méthode d'observation qui convient en tenant compte:

  1. des responsabilités précises du titulaire;
  2. de la valeur et de la nature des biens en cause; et
  3. des frais réels que comporte le désaisissement des biens et intérêts, par opposition aux risques de conflit d'intérêts que présentent les biens en cause213.

En plus ou au lieu des conseillers à la déontologie, les cadres hiérarchiques peuvent, eux aussi, vérifier si leurs employés se conforment aux règlements sur les conflits d'intérêts. Les superviseurs peuvent surveiller la situation de leurs employés en leur rappelant, lors de l'examen annuel du rendement, leurs obligations, à la lumière de tout changement possible de leur situation personnelle, et en veillant à ce que les formules de déclaration annuelles soient bien remplies par tous les employés. Ceux-ci peuvent être tenus de certifier qu'ils ont bien lu et compris les règlements sur les conflits d'intérêts; on peut faire de cette obligation une condition d'emploi. Le Code d'éthique de la Ville de Burlington (Ontario) confère aux superviseurs l'obligation de veiller à ce que les employés sous leurs ordres connaissent le code et s'y conforment214. Certaines entreprises, comme la société Cominco, vont plus loin et exigent des cadres qu'ils veillent à ce que toutes les décisions prises dans leur service soient conformes aux exigences du Code215. Plus sévère encore, le code de la société Johnson & Johnson's oblige les superviseurs à certifier périodiquement que les employés sous leurs ordres se conforment aux directives216.

Si l'administrateur désigné peut examiner les formules de divulgation d'intérêts et si le superviseur peut suivre les activités des employés, d'autres parties intéressées peuvent également jouer un rôle. Toute personne peut demander conseil au sujet de sa situation, mais certains codes autorisent également une personne qui a des raisons raisonnables et probables de croire qu'une autre personne est en conflit d'intérêts à faire cette démarche217. Les lois et règlements en vigueur en Alberta vont encore plus loin et permettent à n'importe qui de demander au commissaire à la déontologie d'enquêter sur les allégations d'irrégularités218. Ailleurs, les simples citoyens qui souhaitent la réalisation d'une telle enquête sont sans doute renvoyés à leurs représentants élus. Dans la police, les mécanismes mis en place pour recevoir les plaintes du public sont souvent la source d'allégations de conflits d'intérêts.

Chapitre VII

Pour bien des chefs de police, l'emploi secondaire est le type même du conflit d'intérêts. En effet, plusieurs directeurs de services policiers que nous avons consultés dans le cadre de notre étude considéraient l'exercice d'un deuxième emploi comme étant pratiquement la seule source de conflit d'intérêts, et nous avons dû insister pour leur faire voir d'autres aspects du problème.

Comme d'autres l'ont signalé, l'emploi secondaire des policiers est très souvent réglementé, voire interdit en principe, mais, dans la pratique, il existe à peu près partout. Il semble qu'on le tolère souvent ou qu'on ferme les yeux219. Même lorsque les autorités policières veillent activement à faire respecter les restrictions qui s'appliquent à l'emploi secondaire, elles imposent rarement des sanctions disciplinaires formelles aux policiers qui les enfreignent; il existe donc peu de rapports officiels sur des cas précis. Selon la plupart des répondants que nous avons interrogés, leur service policier s'attaquait aux problèmes causés par l'emploi secondaire lorsqu'ils devenaient assez graves pour justifier l'intervention de la direction, en conseillant l'employé en cause. On s'efforçait de régler le problème avant qu'une entrevue disciplinaire proprement dite ne s'impose. Seuls les cas notoires ou persistants semblaient aboutir à l'imposition de sanctions disciplinaires formelles.

Un service de police a mis au point un mécanisme qui lui permet d'identifier et de surveiller (au besoin) les policiers qui occupent un deuxième emploi. Chaque semaine, les membres du service interne d'enquêtes dépouille des publications où sont recensés les nouvelles entreprises, les relevés de déclaration, les jugements et les faillites. Si le nom d'un policier (ou de son conjoint) figure dans ces publications, on peut alors procéder à une enquête pour s'assurer qu'aucun conflit d'intérêts réel ou apparent ne découle de l'activité commerciale en cause. Que nous sachions, il n'existe aucun autre programme de contrôle aussi rigoureux.

Par conséquent, il faut garder à l'esprit que le nombre de policiers qui exercent un emploi secondaire est forcément sous-évalué ici. Il faut dire cependant que le formalisme rigide de la plupart des règlements de polices sur l'emploi secondaire s'accompagne, d'après les faits portés à notre connaissance, de pratiques d'application beaucoup plus interactives et médiatrices que ne laissent croire les règlements proprement dits.

Il peut être avantageux d'autoriser les policiers à exercer un deuxième emploi, parce que cela peut leur permettre de développer de nouvelles compétences utiles, d'établir des contacts avec la population et de gagner un revenu d'appoint. Cependant, cette pratique a toujours suscité des inquiétudes, puisqu'on s'interroge sur les répercussions que risquent d'avoir les intérêts extérieurs sur le devoir du policier de faire respecter la loi avec impartialité (conflit d'intérêts). On peut également se demander si les activités extérieures du policier ne nuisent pas à sa capacité de bien remplir ses fonctions et attributions policières (conflit de responsibités)220.

Un conflit de responsabilités survient lorsque l'employé, parce qu'il exerce un deuxième emploi, est moins attentif, minutieux, dévoué ou efficace dans son emploi principal. Par exemple, la société Loblaws interdit à son personnel d'accepter un autre emploi qui:

Le service de police de Halifax interdit tout emploi secondaire qui risque de diminuer l'aptitude physique et mentale de ses membres à remplir leurs fonctions d'une façon responsable, sûre, efficace et conforme aux exigences professionnelles et de sécurité222. Les adversaires de l'emploi secondaire avancent que:

En revanche, la jurisprudence arbitrale sur l'emploi secondaire et les activités externes d'employés ne va pas dans le même sens:

La plupart des arbitres souscrivent au principe général suivant: les salariés ont le droit de mener leur vie comme ils l'entendent, à moins d'exercer une activité qui nuit directement aux affaires de l'employeur. Dans Henderson Machinery225, par exemple, un employé faisait deux quarts de travail de suite; après avoir terminé son quart de travail pour son employeur principal, il en faisait un deuxième pour un autre employeur. Bien que les répercussions de cette situation sur la sécurité semblent évidentes, l'arbitre n'a pas trouvé de preuve de la détérioration du rendement de l'employé dans ce cas; il a donc conclu que rien ne justifiait l'interdiction du deuxième emploi.

Dans la police, cependant, une autre importante préoccupation tient au risque considérable de conflit d'intérêts que courent les policiers qui exercent un deuxième emploi226. Évidemment, on peut penser que tout emploi secondaire auquel s'adonnent des policiers est susceptible d'engendrer un conflit d'intérêts227. On pourra toujours se demander si un agent de police sera porté à appliquer la loi uniformément, au détriment de son deuxième employeur. Cela soulève la question du seuil de tolérance, qui a incité certains services policiers à interdire tout emploi secondaire. Cependant, la tendance récente des services policiers a été de délaisser les interdictions absolues.

La Sûreté du Québec représente une extrémité du spectre. Elle interdit purement et simplement tout emploi secondaire:

Les emplois parallèles que les agents de la GRC peuvent accepter sont aussi très limités. L'exigence pour le membre de se comporter de manière à servir l'intérêt de la GRC s'accompagne de l'interdiction d'occuper "un poste à l'extérieur de la G.R.C., que ce soit à titre d'employeur, d'employé ou de services exécutés à contrat"229. il n'y a que de rares exceptions à cette interdiction générale, notamment dans le cas d'activités communautaires ou du travail fait pour aider des amis. Il est également interdit aux membres de s'adonner à un commerce ou d'exploiter une entreprise230, sous réserve de quelques exceptions, dont les passe-temps rémunérateurs, les simples placements sans participation active à la gestion, l'exploitation d'une ferme d'agrément ou une autre activité expressément autorisée231.

Toutefois, à l'instar du service de police de Halifax, la plupart des services policiers autorisent l'emploi secondaire, à la condition que le chef de police y consente:

La politique du service de police d'Edmonton fait ressortir que la responsabilité professionnelle première du policier est celle qu'il a envers le service de police. Pour obtenir l'autorisation d'exercer un deuxième emploi, les policiers doivent suivre la filière suivante233:

Les membres du service de police de Winnipeg sont également tenus d'obtenir l'autorisation du chef de police avant de commencer à exercer un deuxième emploi234, mais ce règlement fait actuellement l'objet d'un réexamen. On prévoit que la disposition actuelle relative à l'emploi secondaire sera remaniée et qu'on y inclura un article décrivant les genres d'emplois considérés comme incompatibles avec le poste de policier. Ces activités seront prohibées.

Le Service de police d'Edmonton interdit à l'heure actuelle deux types d'emploi: travailler pour une agence privée de sécurité et conduire un taxi235. De son côté, le Service de police de Calgary défend à ses membres d'exercer plusieurs emplois, dont les suivants236:

  1. Agent de recouvrement;
  2. Dépisteur;
  3. Veilleur, gardien de sécurité, ou autre poste lié à la sécurité;
  4. Chauffeur de taxi ou de limousine, ou propriétaire ou exploitant de service de taxis ou de limousines;
  5. Propriétaire, exploitant ou employé d'un débit de boissons;
  6. Propriétaire, exploitant ou employé d'une maison de jeu;
  7. Expert ou enquêteur en assurances;
  8. Détective privé;
  9. Escorte ou employé d'une agence d'escorte;
  10. Fiuissier;
  11. Chauffeur ou gardien de voiture blindée;
  12. Garde du corps;
  13. Toute fonction nécessitant la port d'une arme.

Ces règlements détaillés ont été contestés, mais sans succès, dans l'affaire Calgary Police Association237. La Cour d'appel de l'Alberta a confirmé le jugement d'un tribunal inférieur qui avait statué que le règlement était intra vires, et qu'il ne violait pas le droit des requérants à la "liberté" (droit garanti par l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés). La Coura conclu qu'un policier n'a pas le droit absolu d'exercer un emploi à temps partiel, sans égard aux raisons qui justifient l'interdiction de certains types d'emploi secondaire.

La Police provinciale de l'Ontario appliquait une politique semblable à celle de la ville de Calgary, en limitant certains genres d'activités, avant l'adoption de la Loi de 1990 sur les services policiers238. En vertu des règlements antérieurs, les policiers étaient tenus de demander l'autorisation d'exercer un emploi secondaire239. Il existait:

Cette présomption n'existe plus dans la nouvelle Loi. Le paragraphe 49(1) interdit plutôt aux agents de s'adonner à toute activité:

  1. qui l'entrave ou lui nuit dans l'exercice de ses fonctions en tant que membre d'un service de police, ou qui le fera vraisemblablement;
  2. qui le place ou le placera vraisemblablement dans une situation de conflit d'intérêts;
  3. qui constituerait autrement un emploi à temps plein pour une autre personne;
  4. qui lui procure un avantage du fait qu'il est membre d'un service de police.

Pour imposer des sanctions disciplinaires en invoquant cette disposition, la direction du service de police doit prouver, d'après les faits en cause, que le membre n'a pas respecté ces restrictions. Autrement dit, les policiers ont le droit d'exercer un deuxième emploi à moins que leur chef puisse prouver que, dans les circonstances, cet emploi les met en conflit d'intérêts.

Bien que la plupart des règlements soient muets quant aux raisons qui justifient la restriction de l'emploi secondaire, on peut analyser les raisons des interdictions les plus courantes. La tendance à assouplir les dispositions relatives à l'emploi secondaire traduit une tentative de concilier les droits des individus et la nécessité d'une application impartiale de la loi. Néanmoins, on veut encore restreindre les activités:

  1. qui laissent croire que l'agent peut se servir indûment de son pouvoir dans son intérêt personnel plutôt que dans l'intérêt de la collectivité (par exemple, un emploi de huissier ou d'agent de recouvrement);
  2. qui comportent du travail pour des établissements qui profitent de certaines activités interdites par la loi ou qui sont titulaires de permis de vente de certains biens fortement réglementés (par exemple, travailler dans un bar);
  3. qui comportent la propriété ou la gestion d'entreprises susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêts (par exemple, des agences de sécurité ou d'enquêtes en concurrence avec le service policier)241.

Face à certains genres d'emploi, on craint que le policier ait tendance à exercer ses fonctions de gendarme et d'agent de la paix, qu'il soit ou non de service. Tout emploi secondaire qui risque de brouiller le statut du policier et la source de son autorité est donc suspect. Pour ce motif, les emplois qui exigent le port d'une arme ou qui peuvent comporter l'arrestation de personnes sont souvent proscrits. De la même façon, les membres de services policiers qui se livrent à des activités commerciales ou à des emplois à l'égard desquels ils pourraient être appelés à effectuer des inspections ou à faire appliquer des règlements, dans le cadre de leurs fonctions policières, comportent de graves risques de conflit d'intérêts242.

Outre ces préoccupations relatives au pouvoir de la police, à l'illégalité des activités et à la "concurrence", de vives inquiétudes s'expliquent par les sources d'informations privilégiées auxquelles les policiers ont accès. Les policiers ont librement accès à des renseignements qui ne sont généralement pas à la portée d'employeurs privés, mais qui pourraient leur être extrêmement précieux. L'accès aux casiers judiciaires, aux dossiers d'immatriculation des véhicules automobiles, à l'information policière, aux statistiques criminelles et aux rapports d'enquête pourrait simplifier la tâche à bien des personnes qui exercent des professions civiles. Les huissiers, les détectives privés, les avocats, les techniciens judiciaires, les employés d'agences de sécurité ou de cautionnement, de même que les personnes qui exercent beaucoup de professions semblables ayant un rapport avec le travail policier, pourraient profiter considérablement d'une information policière à laquelle ils n'ont pas légalement accès. Pour cette raison, de tels emplois secondaires sont presque invariablement interdits aux policiers, car même si ceux-ci résistaient à la tentation d'utiliser de l'information policière à des fins personnelles, l'apparence de conflit d'intérêts serait presque inévitable.

Cependant, même d'autres entreprises peuvent profiter de l'utilisation indue de tels renseignements. Ainsi, un policier de la Communauté urbaine de Toronto a été accusé de manoeuvre frauduleuse pour avoir utilisé à des fins personnelles des renseignements qu'il avait puisés dans le CIPC. Il avait vérifié le dossier de personnes qu'il avait l'intention d'embaucher dans son entreprise de nettoyage domestique243.

Un autre sujet de préoccupation qui a été exprimé, mais auquel les codes de déontologie actuels ne semblent pas s'attaquer directement, tient au conflit de responsabilités poussé à l'extrême. Tout comme les membres de plusieurs autres professions, les policiers peuvent être mobilisés lors de situations d'urgence ou de catastrophes. C'est pourquoi un deuxième emploi comme celui de conducteur d'ambulance, d'intervenant d'urgence ou encore de réserviste, pourrait imposer à l'agent de police des obligations incompatibles, lors de la même situation d'urgence. Cette possibilité milite peut-être contre l'autorisation de tels emplois secondaires pour des policiers.

Dans la mesure où les codes de déontologie policière assimilent l'emploi secondaire à un conflit d'intérêts, des questions se posent quant à la nature et à l'ampleur des intérêts personnels en cause, questions également abordées dans les codes d'éthique du secteur public et du secteur privé. Selon les Ordres de la police de la P.P.O., un conflit d'intérêts se définit comme un commerce, une entreprise ou une activité lucrative à laquelle un membre s'adonne quand il n'est pas de service244. Les membres de la Sûreté du Québec, quant à eux, "ne peuvent remplir aucun autre emploi ni se livrer, directement ou indirectement à aucun commerce"245. Dans la même veine, les membres du Service de police de Halifax ne peuvent, sans autorisation, se livrer directement ou indirectement à une autre occupation ou vocation246. Le sens qu'il faut donner au mot "indirectement" et ses répercussions sur la portée de l'interdiction ne sont pas clairs; on ne sait pas trop si les intérêts de membres de la famille sont également visés.

Cette question est étroitement liée à celle de l'éloignement. Voici un extrait des Ordres de la police de la P.P.O.247:

Dans une affaire impliquant un policier reconnu coupable de conduite scandaleuse pour avoir exercé le deuxième emploi de vendre des articles de fantaisie et des cadeaux, la Commission de police de l'Ontario a invoqué cette disposition lors de l'appel pour déterminer si l'appelant avait des intérêts interdits dans son petit commerce. Le policier en cause affirmait ne pas avoir d'intérêts importants dans ce commerce. Les lois, règlements et politiques qui visent les services policiers sont trop vagues quant aux limites des intérêts personnels.

Les Ordres permanents de la GRC (partie 1.4) abordent, quant à eux, la question de l'éloignement en ce qui concerne l'interdiction des activités commerciales. On y trouve la précision suivante:

À l'instar des services policiers provinciaux et peut-être de certains corps régionaux, la GRC éprouve un problème de disparité géographique des répercussions de l'emploi secondaire. Des professions qui sont relativement anodines à certains endroits peuvent poser des difficultés considérables ailleurs. À titre d'exemple, le cas d'un agent de la GRC exploitant un service de dépanneuses serait perçu de façon très différente chez ses supérieurs, selon que l'agent était affecté à des fonctions de sécurité à Ottawa ou à la patrouille routière dans une zone rurale de la Saskatchewan. Il s'agit là, bien sûr, d'un exemple un peu extravagant, mais des différences analogues pourraient exister pour plusieurs emplois secondaires, selon l'endroit où on les exerce. De tels problèmes ne se posent généralement pas dans les services de police municipaux.

En revanche, cette disparité géographique donne aux services policiers d'envergure une plus grande marge de manoeuvre et leur permet de régler certains types de conflits d'intérêts par des mutations. En effet, la réaffectation d'un policier à d'autres fonctions, même sans l'envoyer ailleurs, est plus facile dans les grands corps de police que dans les petits services municipaux. Cette dimension est un facteur important à considérer au moment d'évaluer un code de déontologie plus permissif face à l'emploi secondaire.

Dans le secteur privé, les employés sont généralement encouragés à prendre part à des activités politiques, tant qu'il est clair qu'ils ne représentent pas leur entreprise249. Cependant, il existe tant dans le secteur public que dans la police une tradition de neutralité politique qui exige des employés:

  1. qu'ils s'abstiennent de toute activité politique partisane;
  2. qu'ils s'abstiennent d'exprimer publiquement leurs opinions personnelles sur les politiques et les programmes du gouvernement, sur les élus ou leurs adversaires250.

La réglementation des activités politiques251 dans la fonction publique et dans la police se justifie par la nécessité de garantir l'impartialité ou, ce qui est encore plus important, l'apparence de l'impartialité.

Les provinces se sont dotées de politiques différentes en ce qui concerne les activités politiques des fonctionnaires, mais la plupart accordent désormais un congé aux fonctionnaires désireux de se porter candidats lors d'une élection. Toutefois, elles restreignent par ailleurs sensiblement les activités politiques. Le jugement O.P.S.E.U. v. A.G. of Ontario252 a établi que les provinces ont le pouvoir constitutionnel d'exiger des fonctionnaires qu'ils prennent un congé avant de se porter candidats lors d'élections et de restreindre d'autres activités politiques.

Cependant, depuis l'inclusion de la Charte des droits dans la Constitution, ces restrictions ont été fort contestées. En 1986, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a infirmé les dispositions de la Civil Service Act qui obligeaient les fonctionnaires à démissionner avant de se porter candidates à une élection253, ce qui a entraîné des modifications législatives dans cette province. Désormais, les fonctionnaires ont le droit de prendre congé et de reprendre leur travail s'ils sont battus aux élections254. S'ils sont élus, ils ont droit à un congé pouvant durer jusqu'à leur réélection et, à ce moment-là, leur emploi est censé prendre fin255. Certaines provinces n'accordent pas de congé à l'employé lorsqu'il est élu; elles estiment alors que l'employé a démissionné.

Tout comme la Civil Service Act de la Nouvelle-Écosse, la Loi sur la fonction publique de l'Ontario256 établit un système à deux niveaux, dans lequel les activités politiques de certains employés sont plus restreintes. Parmi les quelque 6 000 fonctionnaires dont les activités sont limitées, on compte 4 000 membres de la Police Provinciale de l'Ontario257. À titre d'employé de l'État, un agent de la P.P.O. peut seulement:

  1. voter;
  2. être membre d'un parti politique;
  3. faire un don à un parti politique;
  4. exercer des activités politiques non partisanes;
  5. assister à des assemblées politiques auxquelles prennent part tous les candidats;
  6. commenter publiquement des questions sans rapport direct avec son champ de responsabilité ou avec le programme d'un parti258.

On réexamine actuellement ces restrictions, surtout à cause d'un changement récent du climat politique. Les activités politiques des fonctionnaires et des policiers ont fait l'objet de documents de travail et, comme on le verra plus loin, des changements devraient survenir dans ce domaine dans un proche avenir. Le cas des policiers municipaux de l'Ontario peut donner une idée de ce qui est susceptible de se produire; ils n'ont pas le droit de prendre part à des activités politiques, en vertu de l'article 46 de la Loi de 1990 sur les services policiers259, à moins que le règlement ne le permette. Ce règlement, entré en vigueur le 3 octobre 1991, est décrit en détail plus loin.

Ailleurs, une seule disposition générale vise à préserver l'impartialité du membre. Ainsi, l'article 21 du Code de déontologie et de discipline des membres de la Sûreté du Québec260 enjoint les membres à faire preuve de neutralité politique dans l'exercice de leurs fonctions. Aucune autre disposition ne règlements les activités politiques des membres. Les règlements du service de police de Vancouver sont analogues, en ce qu'une seule disposition porte sur les activités politiques:

Dans certains services policiers, les membres doivent obtenir l'autorisation de se livrer à des activités politiques. Ainsi, d'après le Manuel d'administration262 du service de police de Calgary, les membres du service doivent demander un congé pour pouvoir se porter candidats à une élection provinciale ou fédérale. Si le membre est élu, il doit démissionner. Un membre qui, sans se conformer à cette règle, s'était présenté à la mairie d'une municipalité voisine, a par la suite démissionné de son poste de maire.

Les règlements d'autres services policiers permettent à leurs membres de prendre un congé en pareil cas. Adopté en 1974, le règlement du service de police de Winnipeg exigeait que l'emploi prenne fin lorsque le membre était élu263. Ce règlement a récemment été remplacé par la Loi sur la Ville de Winnipeg264, qui permet aux agents de police, à titre de fonctionnaires municipaux, de prendre un congé lorsqu'ils sont élus à une charge publique.

Le Règlement de la GRC permet des activités politiques discrètes:

Il n'en demeure pas moins, cependant, que les activités politiques des membres, sont strictement limitées comme en témoigne le paragraphe 57(1):

Le membre ne peut:

  1. faire aucun travail pour ou contre une personne qui cherche à se faire élire ou réélire [...];
  2. faire aucun travail pour ou contre un parti politique ;
  3. se porter candidat à une élection [...].

L'expression "travailler pour" est également utilisée dans l'article 33 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique266. Dans Osborne c. la Reine267, la Cour d'appel fédérale a invalide cette disposition, la jugeant trop vague. Cependant, lors de l'appel, le juge Sopinka de la Cour suprême du Canada a déclaré, au moment d'infirmer les restrictions pour d'autres motifs, que la difficulté d'interprétation ne pouvait être assimilée à l'absence de normes intelligibles268.

Ce qui importe, lorsqu'il s'agit de réglementer les activités politiques des agents de police, c'est de concilier deux impératifs: d'un côté, permettre aux membres d'exercer leur droit individuel et démocratique de participer à des activités politiques269, et, de l'autre, protéger le droit du public à un service de police impartial270. Dans la même veine, les restrictions imposées aux droits politiques des fonctionnaires sont censées viser trois objectifs fondamentaux:

  1. protéger le droit de tous les Canadiens à un traitement juste et équitable dans leurs relations avec l'administration publique;
  2. protéger le droit du gouvernement de recevoir des conseils impartiaux;
  3. protéger les fonctionnaires contre toute mesure punitive imposée pour des motifs de politique partisane271.

Ces arguments justifient également la neutralité politique de la police272.

Beaucoup de critiques ont été formulées au sujet de la portée excessive des règlements qui limitent les activités politiques. Dans son rapport paru en 1979, le Comité d'Avignon273 favorisait la pleine participation politique des fonctionnaires, voyant là un des droits du citoyen, participation qui ne serait limitée que dans des cas exceptionnels où:

Le Comité recommandait un système de réglementation à trois niveaux, inspiré du modèle britannique. Ce système, comportant trois catégories de fonctionnaires dont les activités sont limitées à divers degrés, est également préconisé dans le document de travail intitulé The Extension of Political Activity Rights for Ontario Crown Employees275, paru en 1991. Les trois catégories seraient les suivantes:

Les auteurs de ce document de travail reprennent le point de vue exprimé en 1986 par la Commission de réforme du droit de l'Ontario, dans son rapport sur les activités politiques, les commentaires publics et la divulgation de renseignements par les employés de l'État276 en ce qui concerne les "AEA". Il s'agit des employés qui traitent couramment avec des citoyens et prennent à leur égard des décisions relatives à l'adjudication, à l'évaluation ou à l'attribution.

Un AEA se définit de la façon suivante:

Tout employé de la Couronne dont les actes peuvent inspirer à la population des "craintes raisonnables de parti pris" parce que:

- de par ses fonctions, il est souvent en contact avec le public (ou avec des entreprises);

- il prend ou semble, aux yeux des citoyens, prendre des décisions d'adjudication, d'évaluation ou d'attributrion qui les touchent;

- ses activités politiques sont susceptibles d'être connues du public qu'il sert277.

Les policiers pourraient facilement se ranger dans cette catégorie intermédiaire, compte tenu de leur pouvoir discrétionnaire et des normes de conduite rigoureuses qu'ils sont censés respecter. Il est digne de mention, cependant, que la Commission de réforme du droit de l'Ontario a refusé de se pencher sur la question des activités politiques de policiers, même si les lois ontariennes confèrent le statut de fonctionnaires aux agents de la P.P.O. La Commission a exprimé la conclusion suivante:

La question des activités politiques de membres de la police a cependant été abordée récemment dans un Document de travail sur les droits à l'activité politique des policiers de l'Ontario279, émanant du Solliciteur général de l'Ontario. Dans ce cas encore, trois approches possibles étaient proposées: des droits politiques très restreints, des droits politiques étendus mais limités et, enfin, des droits politiques illimités. Il est clair que, pour harmoniser ces droits en respectant la Charte des droits et libertés, seules des limites raisonnables sont permises280.

En réalité, du moins dans le cas des policiers municipaux, on a nettement privilégié les libertés individuelles. Un règlement pris le 3 octobre 1991 en vertu de l'article 46 de la Loi de 1990 sur les services policiers accorde des droits assez étendus, bien que non illimités, aux policiers municipaux, leur permettant de participer à des activités politiques au niveau fédéral, provincial et municipal281. On y énumère des activités politiques très diverses qui sont permises, tout en étant, dans certains cas, assujetties à des contraintes particulières ; il en ressort que très peu d'activités politiques sont interdites aux policiers municipaux.

La participation à des activités politiques publiques n'est permise que lorsque le policier n'est pas de service, ni en uniforme. Par ailleurs, tout policier désireux de briguer les suffrages lors d'élections fédérales ou provinciales, ou encore de se porter candidat à la mairie ou à l'échevinage, doit obtenir un congé sans solde pendant la campagne électorale et démissionner s'il est élu. Dans les six années qui suivent, l'employé a le droit, sous réserve de certaines restrictions, de réintégrer son emploi s'il cesse d'occuper une charge publique. Les chefs de police et leurs adjoints n'ont pas le droit, eux, de se porter candidats.

Les agents de police ont également le droit, sans démissionner ou demander de congé, d'être nommés ou de poser leur candidature à une commission locale, par exemple une commission scolaire, le conseil d'administration d'une bibliothèque publique, un conseil local de santé ou un conseil de planification. Pour des raisons évidentes, ils ne peuvent siéger à une commission des services de police ou prendre pari à des activités politiques la touchant. Ce droit est également accordé à la condition que les activités en question ne nuisent pas au rendement du policier et ne le mettent pas, ou ne risquent pas de le mettre, en conflit d'intérêts.

Le règlement permet à l'agent de police d'exprimer, quand il n'est pas de service ni en uniforme, son point de vue sur toute question qui ne touche pas directement ses responsabilités de policier. L'agent de police ne doit toutefois pas associer son poste de policier à la question, ni présenter ses opinions comme étant celles du service de police.

Toutefois, lorsqu'il en a l'autorisation, l'agent peut exprimer son opinion sur toute question ou assister et participer à une assemblée publique à titre de représentant du service. Cependant, pendant les campagnes électorales, de telles autorisations ne sont pas accordées, afin d'éviter qu'un policier, agissant au nom du service, appuie ou combatte un candidat ou un parti politique, ou encore une position exprimée par un candidat ou un parti politique.

Enfin, deux limites sont expressément imposées à l'activité politique. Il est interdit aux policiers de solliciter ou de recueillir des fonds et de prendre part à des activités politiques qui les mettent ou sont susceptibles de les mettre en conflit d'intérêts. L'imposition de cette obligation primordiale d'éviter tout conflit d'intérêts correspond à la façon dont d'autres organismes publics ont réagi à la libéralisation des droits politiques.

L'extension des droits relatifs aux activités politiques pose essentiellement la même difficulté que l'assouplissement de n'importe quelle règle sur les conflits d'intérêts: en dernier ressort, seul l'individu peut juger des situations où l'exercice de ces droits risque de créer un conflit d'intérêts. On pourrait régler le problème en formulant, en termes généraux, l'obligation résiduelle pour le policier d'exercer ses droits politiques de manière à respecter ses autres obligations.

La Société canadienne d'hypothèques et de logements, par exemple, a institué une telle obligation. Les employés ont le droit d'exercer un grand nombre d'activités politiques, mais pour remplir leur obligation d'impartialité, ils doivent282:

Il est probable que la question de l'activité politique des membres de services policiers fasse l'objet de nombreuses discussions dans un proche avenir, d'autant plus que les initiatives de l'Ontario attireront l'attention dans tout le pays. Il s'agit d'un domaine relativement peu analysé jusqu'ici, mais qui mériterait sans aucun doute un examen approfondi. Les activités politiques de policiers touchent pratiquement tous les sujets abordés dans ces pages, notamment les conflits d'intérêts, l'utilisation possible de renseignements confidentiels et les problèmes soulevés par les associations des policiers.

Qui plus est, des considérations quelque peu différentes entrent en ligne de compte lorsque c'est une association de policiers qui se livre aux activités politiques. Il est déjà arrivé, par le passé, que des associations de policiers prennent parti directement et publiquement lors d'élections municipales. Dans d'autres cas, des membres de telles associations ont contribué, par de l'argent ou de l'aide, à la campagne électorale d'un candidat, pour faire avancer leurs intérêts collectifs. Cependant, ces aspects forts intéressants débordent malheureusement l'objet du présent document.

L'acceptation de gratifications pose un problème lorsqu'on peut raisonnablement penser que le don en cause risque d'influencer le fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions et responsabilités. Lorsqu'on se demande s'il est convenable que des policiers acceptent des gratifications, quelqu'un soulève inévitablement l'exemple bien connu du policier qui reçoit du café et des beignes gratuitement au casse-croûte du quartier. D'un côté, le policier "le plus cynique et le plus aguerri des hommes" sait, mieux que quiconque, que "l'on n'a rien pour rien" dans ce monde283. Par conséquent, tous les dons doivent être refusés. D'un autre côté, certains soutiennent qu'on devrait encourager les policiers à accepter librement des gratifications mineures, puisque celles-ci contribuent à l'établissement de relations sociales harmonieuses entre la police et le public284. Ce dernier point de vue ne semble cependant pas avoir fait beaucoup d'adeptes dans la police.

Dans le secteur privé, trois mots reviennent souvent lorsqu'il s'agit de déterminer si l'acceptation de cadeaux doit être permise: "coutumier", "modeste" ou "habituel". Voici un extrait du code d'éthique auquel doivent se conformer les employés d'Ingersoll Rand:

De son côté, la Société Algoma établit plusieurs critères qui doivent être satisfaits pour qu'un cadeau puisse être accepté. Ainsi, les employés peuvent accepter un don aux conditions suivantes:

Cette idée que l'acceptation d'un cadeau d'une valeur négligeable devrait être permise existe aussi dans le secteur public. Là aussi, des marques d'hospitalité modérées sont perçues comme des pratiques commerciales courantes. Par exemple, le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat permet l'acceptation de cadeaux si ceux-ci "a) sont conformes aux règles de la bienséance; b) ne sont pas de nature à laisser planer des doutes quant à l'objectivité ou à l'impartialité du titulaire; et c) ne compromettent aucunement l'intégrité du gouvernement287.

Les efforts déployés pour définir quels cadeaux ont une valeur appréciable s'expliquent par le fait que beaucoup de codes n'interdisent que l'acceptation de cadeaux d'une certaine valeur. Ainsi, la Loi concernant les conflits d'intérêts des membres de l'assemblée et du Conseil des ministres288 de l'Ontario interdit l'acceptation de toute gratification, sauf les cadeaux minimes, et exige la divulgation de tout don d'une valeur de plus de deux cents dollars (ou d'une valeur cumulative annuelle totale de deux cents dollars). La Loi sur les conflits d'intérêts au sein de l'assemblée législative et du Conseil exécutif289 du Manitoba exige la divulgation de tous les cadeaux et du nom de leurs donateurs. En revanche, la nouvelle Conflict of Interest Act290 de l'Alberta oblige les parlementaires à obtenir l'autorisation du commissaire à la déontologie avant d'accepter un cadeau. Celui-ci ne donne son autorisation que lorsqu'il:

Dans la plupart des cas, les services policiers optent soit pour cette exigence du consentement préalable, soit pour une interdiction absolue de tous les cadeaux, en exemptant parfois les marques d'hospitalité mineures et habituelles. Sous la rubrique générale d'éviter de se placer dans une situation où il serait en conflit d'intérêts le Code de déontologie des policiers du Québec stipule que:

En plus, le policier ne doit pas offrir un don de nature à compromettre l'impartialité de cette personne dans l'exercice de ses fonctions. Il en va de même pour le service de police de Vancouver. Tout membre qui reçoit un cadeau est tenu de le faire parvenir immédiatement au bureau du chef de police, en y joignant un rapport décrivant toutes les circonstances pertinentes293 Le service de police de Calgary ordonne à ses membres d'obtenir l'autorisation du chef avant d'accepter un cadeau294 et veille à ce qu'ils comprennent bien la portée de cette disposition:

Le Manuel d'administration de la GRC comprend des directives détaillées sur l'acceptation de cadeaux. Ainsi, il est obligatoire296 de retourner les cadeaux provenant "d'une source nationale", en y joignant une lettre de remerciement expliquant la politique de la GRC297. Cependant, la GRC permet, elle aussi, les cadeaux coutumiers, d'une valeur négligeable:

En principe du moins, cette disposition prévoit une exception très mineure à une interdiction relativement stricte.

Certaines lois sur la police assimilent l'acceptation de gratifications à une "manoeuvre frauduleuse". Par exemple, d'après le Police Service Regulations de l'Alberta, commet une manoeuvre frauduleuse tout membre qui:

Évidemment, il n'est pas toujours facile de départager conflit d'intérêts et manoeuvre frauduleuse. Certaines définitions de la manoeuvre frauduleuse s'apparentent beaucoup aux définitions du conflit d'intérêts données plus haut. Par exemple, les Police (Discipline) Regulations de la Colombie-Britannique qualifient de manoeuvre frauduleuse le fait, pour un membre:

De la même façon, dans une affaire survenue en Ontario et déjà mentionnée, un policier qui avait utilisé des renseignements du CIPC pour favoriser la bonne marche de son entreprise personnelle a été accusé, initialement, de manoeuvre frauduleuse, parce qu'il avait profité de son poste pour obtenir un avantage personnel301. Par la suite, on a réduit la gravité de l'accusation pour éliminer la notion de fraude, qui n'était apparemment pas étayée par les faits.

En revanche, nous avons eu connaissance d'une affaire impliquant un membre de la P.P.O. condamné pour avoir accepté une commission, en secret. Le policier en question avait accepté qu'une compagnie de dépanneuses lui donne un téléphone cellulaire et répare sa voiture gratuitement; en retour, il devait acheminer les appels de service à cette compagnie. Dans ce cas-ci, l'élément de corruption ou de fraude était évident. Certains commentateurs donnent à ce mot un sens beaucoup plus large, et n'hésitent pas à parler de fraude dès qu'un policier accepte des repas ou des cafés gratuits, quand les donateurs s'attendent à des faveurs. Quel que soit le terme utilisé, on cherche à garantir l'impartialité de la police.

Toute personne qui utilise des renseignements confidentiels, auxquels le grand public n'a pas accès, pour servir ses intérêts personnels ou privés, est en conflit d'intérêts302. Qu'il utilise ces renseignements à son avantage personnel ou au profit d'un tiers, l'employé n'agit pas d'une façon impartiale.

L'obligation de confidentialité qui découle de la relation de travail exige que l'employé s'abstienne d'utiliser les renseignements confidentiels qu'il a obtenus dans le cadre de son travail à son avantage personnel ou au détriment de son employeur303. Par exemple, dans Laverty c. Cooper Plating304, un conflit d'intérêts potentiel existait parce que la directrice des ventes connaissait entièrement les produits, les coûts, la tarification et les clients de son employeur ainsi que d'autres détails qui pouvaient être utiles à l'entreprise de son conjoint de fait, qui était en concurrence directe avec son employeur.

Le code de déontologie de la société Algoma contient les dispositions suivantes:

Les dispositions relatives aux "renseignements d'initiés" des codes d'éthique en vigueur dans le secteur public visent le même but. La Loi sur les conflits d'intérêts du Manitoba prévoit ce qui suit:

Ainsi, un fonctionnaire de Revenu Canada qui avait utilisé des renseignements obtenus dans l'exercice de ses fonctions officielles pour ses placements personnels a été congédié307.

Partout aussi, le fait pour un policier de divulguer indûment des renseignements confidentiels constitue une faute disciplinaire. L'obligation de garder le secret est souvent énoncée tant dans les serments d'office que dans les codes de discipline. Voici, à titre d'exemple, un extrait du serment d'office que les policiers de l'Alberta doivent prêter:

Les membres de la GRC doivent prêter le serment du secret suivant:

Les divers codes de déontologie policière visent le même but que les codes d'éthique appliqués dans les secteurs privé et public. Le code de discipline de la Sûreté du Québec illustre le mieux cette similitude. Il assimile à une faute disciplinaire

L'orientation du Manuel d'administration de la GRC est plus précise. Le membre ne peut utiliser des renseignements confidentiels pour appuyer ou promouvoir une personne ou une organisation311, pour tirer profit d'une transaction commerciale privée312 ou pour négocier des valeurs313. il ne peut pas non plus donner au public, sans autorisation, des renseignements confidentiels314. Les directives de la GRC sur les conflits d'intérêts traitent aussi des renseignements confidentiels de la façon habituelle:

L'indiscrétion peut également entraîner d'autres genres de conflits d'intérêts. Par exemple, le Police Service Regulation de l'Alberta définit ainsi l'abus de confiance:

De plus, l'utilisation, par des personnes ne faisant plus partie du service de police, de renseignements confidentiels obtenus dans le cadre de leurs fonctions policières suscite également des inquiétudes, comme on le verra plus loin.

Compte tenu de la nature discrétionnaire des fonctions de la police, les autorités policières attachent une importance fondamentale à la question du traitement de faveur. Par exemple, lorsqu'un policier accorde ou semble accorder un traitement privilégié à certaines personnes, il y a un conflit d'intérêts évident. Cependant, même dans les codes d'éthique en vigueur dans le secteur public, rares sont les dispositions qui traitent de ce sujet. Le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat aborde la question du traitement de faveur:

Dans le secteur public, les relations familiales semblent poser un problème majeur. Les exemples ne manquent pas: un fonctionnaire de la CEIC qui a aidé sa femme à présenter une demande de prestations d'assurance-chômage318; un employé d'Approvisionnements et Services qui a faussé un processus d'adjudication pour favoriser des membres de sa famille319; une fonctionnaire de Revenu Canada qui a favorisé son fils en lui donnant des renseignements privilégiés au sujet d'un contrat d'entretien des ordinateurs du ministère320. Le Code of Conduct and Ethics for the Public Service de l'Alberta mentionne expressément les membres de la famille:

Dans le document Personnel Manual - Management Employees322, le gouvernement de l'Alberta décrit plus en détail la façon de procéder pour éviter de tels conflits d'intérêts. S'il ne peut se faire remplacer par un collègue, l'employé doit immédiatement prévenir son supérieur de la situation délicate dans laquelle il se trouve.

Un problème de ce genre s'est posé dans un service de police où deux policiers ont eu, à des moments différents, à enquêter sur des membres de leurs familles. Dans un cas, le policier s'est lui-même récusé. Cependant, dans l'autre, le policier a jugé qu'il pourrait rester impartial et a procédé à l'enquête. Aucune sanction officielle ne semble avoir été prise à son égard ni même envisagée.

Les membres de la famille ne sont pas les seules personnes qui pourraient profiter d'un traitement de faveur; il y a aussi les amis. On enquête en ce moment sur un policier de la Communauté urbaine de Toronto qui aurait fait une "enquête privée", pour rendre service à un ami, en recourant à la surveillance policière323.

Dans la plupart des cas, les services policiers canadiens n'ont pas institué de dispositions interdisant expressément les traitements de faveur. Les membres du service de police de Winnipeg, qui sont assujettis au code d'éthique des employés de la même ville, doivent s'abstenir d'accorder à un citoyen une considération, un traitement ou un avantage spécial qui n'est pas accessible à tous les autres citoyens324 Cependant, la plupart des services policiers devraient, pour intervenir dans des cas semblables, invoquer la disposition générale sur les conflits d'intérêts, c'est-à-dire la directive qui ordonne aux employés d'éviter les situations susceptibles de compromettre leur objectivité325.

Néanmoins, comme on l'a vu plus haut, beaucoup de codes disciplinaires de la police assimilent à un abus de confiance une faute définie de façon assez étroite: le fait de prévenir, directement ou indirectement, une personne contre laquelle un mandat a été émis326. Dans un cas qui remonte à assez longtemps, un policier municipal a été congédié pour abus de confiance, parce qu'il avait informé un citoyen qu'il était surveillé par des détectives327.

Le code de discipline de la Communauté urbaine de Montréal, qui était en vigueur avant l'adoption de l'actuel Code d'éthique et de discipline de la CUM, renfermait une disposition d'une portée aussi étroite328. Le nouveau Code comporte une disposition plus vaste qui, d'après les dirigeants du service, englobe le traitement de faveur:

Les lignes directrices de la GRC sur les conflits d'intérêts abordent directement la question du traitement de faveur. En voici l'article 8:

La mention expresse des organismes, et non seulement des parents et des amis, permet de considérer des associations comme des sources de conflit d'intérêts.

Le contraire du traitement de faveur pose, lui aussi, certains problèmes. Une application discriminatoire de la loi, au détriment de certaines personnes ou de certains groupes, risque peut-être encore davantage de miner la confiance du public envers la police, particulièrement chez les personnes ou groupes touchés, et plus encore si la discrimination se fonde sur des motifs généralement tenus pour inadmissibles comme la race, la couleur de la peau, le sexe ou la religion. Une analyse approfondie de telles questions déborde le cadre de cette étude, mais les événements récents qui ont impliqué le service de police de Winnipeg fourniraient une matière abondante pour une telle analyse331.

La Gendarmerie énonce une ligne de conduite générale relativement aux associations qui risquent de mettre ses membres en conflit d'intérêts. Le Manuel d'administration stipule qu'aucun membre ne peut:

Les agents de police peuvent faire partie de différents groupes ou organismes sociaux, professionnels ou communautaires. À un autre niveau, ils peuvent aussi appartenir à divers groupes ethniques, religieux ou raciaux ou encore être issus d'une culture particulière. Comment ces différentes associations se répercutent-elles sur la façon dont les policiers remplissent leurs fonctions, et quels règlements peut-on adopter pour prévenir de tels conflits ? Le service de police de Calgary exige de ses membres qu'ils:

La question qui transparaît ici est encore une fois celle de l'éloignement de l'intérêt personnel du policier, et chaque cas doit être analysé d'après ses circonstances particulières.

Certains services policiers ont édicté des règles plus explicites pour faire face aux problèmes que posent les associations ou les fréquentations des policiers. En raison de la norme de conduite plus stricte à laquelle les policiers sont astreints, on leur interdit de fréquenter des criminels notoires. Par exemple, d'après le Règlement sur la déontologie et la discipline des membres de la Sûreté du Québec334, constitue une faute disciplinaire, pour le policier,

Le règlement du service de police de la Communauté urbaine de Toronto énonce clairement la raison d'être de cette interdiction335:

Selon un arbitre, de telles fréquentations:

Si de telles dispositions placent souvent l'image de la police au premier rang, elles sont également motivées par la volonté d'éviter les conflits d'intérêts potentiels ou apparents. Dans une affaire où un policier a été reconnu coupable de conduite scandaleuse pour avoir fréquenté un criminel, la question en litige était de savoir s'il était de notoriété publique que l'ami du policier était un criminel. La poursuite devait prouver deux choses: premièrement, que l'individu en question était bien un criminel et, deuxièmement, qu'il avait cette réputation dans la localité. La condamnation a été annulée, faute de preuves de cette nature337. Dans une autre affaire, un policier a été reconnu coupable de conduite scandaleuse pour avoir cohabité avec la femme d'un accusé qui devait répondre devant les tribunaux d'accusations portées par ce policier. La condamnation a été confirmée, parce que toute personne raisonnable aurait conclu que la conduite du policier était susceptible de jeter le discrédit sur son service338.

Il est évident que toute réglementation des fréquentations et des relations d'un agent de police a des répercussions importantes sur la liberté et la vie privée de l'agent. Dans certains cas, quand ces questions prennent une dimension publique, des concessions importantes s'imposent; ce peut être le cas, par exemple, lorsque les exigences vestimentaires ou autres qui identifient clairement une personne à une religion donnée sont incompatibles avec les règlements de services policiers relativement à la tenue vestimentaire. Ces questions, pour fascinantes qu'elles soient, débordent l'objet de notre étude.

Un sujet étroitement lié à celui de la divulgation de renseignements confidentiels, abordé plus haut, est celui des critiques formulées par un policier, en public, à l'endroit de son service. La révélation de renseignements confidentiels, particulièrement d'inconduite, sans autre commentaire, est souvent la critique la plus éloquente. En règle générale, il est interdit aux policiers:

Dans le même esprit, la GRC interdit à ses membres de:

Les affaires disciplinaires découlant de critiques publiques se rangent dans la grande catégorie des manquements au devoir de loyauté341. L'obligation d'être loyal envers son employeur interdit à l'employé de critiquer celui-ci publiquement, car cela porterait atteinte à la réputation de l'employeur. Pour être assimilées à un conflit d'intérêts, les critiques doivent avoir été telles que l'employeur ne puisse plus compter sur l'impartialité du policier ou elles doivent compromettre ou sembler compromettre l'impartialité du policier aux yeux du public.

Dans certains cas, les critiques publiques sont justifiées. Dans Fraser c. la Commission des relations de travail de la Fonction publique, le juge en chef Dickson a déclaré qu'un fonctionnaire pourrait publiquement critiquer le gouvernement:

Dans Clough c. Revenu Canada, un employé de Revenu Canada a critiqué le projet d'accord de libreé change. L'arbitrea jugé que ses activités n'avaient aucun effet sur son aptitude à accomplir d'une manière efficace ses fonctions ni sur la façon dont le public percevait cette aptitude343. Au moins depuis l'entrée en vigueur la Charte des droits et libertés, les interdictions absolues sont considérées comme injustifiées. Il faut trouver le juste équilibre entre, d'une part, la liberté d'expression de l'individu et, d'autre part, le droit du public à un service de police impartial.

Le document de recherche du Comité externe d'examen de la GRC, intitulé Conduite en dehors des heures de service344 cite le cas d'un policier qui s'est vu administrer un avertissement oral officieux pour avoir critiqué, dans une lettre, la Commission qui faisait enquête sur le service auquel il appartenait. Le policier en question a dû écrire à nouveau au journal qui avait publié ses critiques, pour expliquer qu'il avait écrit sa première lettre à titre personnel et non à titre de membre du service de police. Les auteurs du Manuel d'administration de la police de Calgary ont tenté d'éviter le problème en exigeant des membres:

Il est impossible de savoir si une telle précision serait efficace, particulièrement si on sait que la personne qui parle est un policier et si son intervention traduit une connaissance des questions policières.

Une exception possible à toute interdiction des critiques publiques est la dénonciation d'inconduite, ce que les anglophones appellent "whistleblowing". Il peut s'agir de divulgation non autorisée de renseignements confidentiels, de critiques publiques à l'endroit du service de police ou des deux à la fois. Ces derniers temps, cette question a fait couler beaucoup d'encre, surtout aux États-unis mais aussi à l'intérieur de nos frontières346; elle dépasse cependant, elle aussi, le cadre de notre analyse.

Chapitre VIII

Plusieurs codes de conduite relatifs aux conflits d'intérêts, et particulièrement ceux qui visent les législateurs ainsi que leur personnel politique et leurs cadres, traitent également des situations qui risquent de placer les anciens titulaires de charges publiques en conflit d'intérêts. Il peut y avoir des conflits de différents ordres entre les intérêts de leur employeur actuel et ceux d'un employeur éventuel ou futur.

Tout d'abord, on peut craindre que la perspective d'un emploi futur influe sur le rendement de l'employé dans son poste actuel. L'employé peut profiter du pouvoir de son poste pour obtenir un autre emploi, ou encore il peut être plus négligent dans son travail s'il songe à changer d'employeur. Ensuite, lorsqu'il aura commencé son nouveau travail, on pourra craindre qu'il utilise indûment des renseignements confidentiels, des contacts ou de l'influence obtenus grâce à son emploi antérieur. Il y aura toujours l'apparence d'un conflit d'intérêts s'il y a la moindre interaction entre le nouvel emploi et l'ancien, car d'aucuns se demanderont si l'employé ne bénéficie pas d'un accès privilégié ou d'un traitement spécial.

La GRC est le seul service policier canadien à s'attaquer aux problèmes de l'après-emploi347. Pour le faire, elle réitère le principe bien connu suivant:

L'interdiction couramment formulée dans les règlements sur l'après-emploi comporte une forme d'engagement restrictif de la part de l'employé. Dans le secteur privé, cet engagement prend habituellement la forme d'un contrat. Dans le secteur public, il est habituellement prévu par une disposition législative comme l'article 18 de la Loi concernant les conflits d'intérêts des membres de l'assemblée et du Conseil des Ministres349 de l'Ontario.

Le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat350 s'applique également aux officiers commissionnés de la GRC et à ses autres membres qui occupent des fonctions et des responsabilités de nature à susciter des inquiétudes quant à leurs activités après leur emploi. Ces personnes sont tenues d'aviser l'administrateur désigné, le "commissaire à la déontologie" de la Gendarmerie, de toute offre sérieuse d'emploi émanant de l'extérieur et de leur acceptation d'une telle offre. Elles doivent également éviter de se laisser influencer, dans leurs fonctions, par des perspectives et des offres d'emploi émanant de l'extérieur.

Il est interdit à toute personne visée par ces règlements d'intervenir, au nom de son nouvel employeur, après avoir cessé d'occuper sa charge publique, dans toute transaction ou affaire dans laquelle elle a représenté le gouvernement auparavant, lorsque la transaction en question donnerait lieu à un avantage particulier ou de nature strictement commerciale ou privée. Il y a également un "délai d'attente" d'un an, pouvant être abrégé dans certains cas, pendant lequel les anciens fonctionnaires ne peuvent accepter un emploi ou une nomination au conseil d'administration d'une entité avec laquelle ils ont eu des rapports officiels importants, ni intervenir pour le compte d'une autre personne ou entité auprès d'un ministère avec lequel ils ont eu des rapports officiels importants, ni donner des conseils, à des fins commerciales, au sujet des programmes ou des politiques du ministère pour lequel ils travaillaient ou avec lequel ils entretenaient d'importants rapports directs au cours de la dernière année de leur emploi.

Évidemment, les raisons qui motivent de telles restrictions ne s'appliquent pas pour la plupart des policiers. D'ailleurs, le bien-fondé de telles contraintes imposées aux emplois subséquents et la ligne de conduite à suivre en pareil cas sont loin de faire l'unanimité. Il est difficile, du reste, de faire respecter ces dispositions, à moins de pouvoir inclure une clause restrictive dans le contrat d'emploi ou encore de faire du non-respect de ces règles une infraction prévue par la loi, puisque le pouvoir de l'employeur sur l'employé prend fin avec l'emploi351.

Chapitre IX

À l'instar de tout autre projet de recherche intéressant, la présente étude a produit beaucoup plus d'information qu'il n'était possible d'en résumer dans ces pages. Nous avons cependant tenté de signaler, tout au long du document, certains aspects dignes d'intérêt qui débordent notre propos mais dont certains pourraient très bien faire l'objet d'autres études.

Relativement aux questions centrales que nous étions chargés d'analyser, les conflits d'intérêts et l'emploi secondaire, nous avons tenté de mettre en lumière une évolution vers l'assouplissement des règles qui s'appliquent depuis toujours dans la police. Cette évolution reflète une tendance qui se manifeste tant dans le secteur privé que dans l'administration publique et qui s'explique peut-être aussi, du moins en partie, par la faveur croissante dont jouit la philosophie de la police communautaire. Les policiers étant de plus en plus présents dans la collectivité, l'emploi secondaire se justifie davantage, puisqu'il s'agit d'une façon de participer à l'économie communautaire. Pour la même raison, les occasions de participer à des activités politiques, de nouer des relations et d'adhérer à des associations augmenteront également et, avec elles, les risques de conflits d'intérêts.

La méthode employée jusqu'ici pour éviter de tels problèmes, soit une série d'interdictions rigides dont le respect est assuré par le système disciplinaire, a le mérite de coûter relativement peu cher. Les règles énoncent une norme de conduite obligatoire, et tout manquement à ces règles, signalé aux autorités policières soit par d'autres policiers, soit par le service d'enquêtes des affaires internes, soit par le public ou d'autres sources, peut entraîner une intervention relativement simple: l'imposition de sanctions disciplinaires au coupable.

Si les coûts d'application de ce système sont très faibles, les coûts sociaux et personnels, eux, peuvent être très lourds. Nous avons tâché de souligner, tout au long de ces pages, les répercussions des contraintes imposées sur les intérêts de l'individu, notamment sa liberté, sa participation à la vie communautaire, sa vie privée et ses relations familiales. Il importe de bien peser ces coûts en regard de l'avantage bureaucratique que comporte la simple application d'une litanie d'interdictions.

En revanche, au fur et à mesure que les services policiers optent pour un code d'éthique plus complexe et pour les mécanismes de contrôle interactifs et mieux adaptés à la réalité que nous avons décrits plus haut, les sommes à débourser pour faire respecter ce code augmentent sensiblement. Par exemple, la divulgation des intérêts suppose l'existence d'un secrétariat, de procédures uniformes et d'un système sûr de tenue de dossiers confidentiels conçu pour restreindre strictement l'accès aux renseignements personnels de nature délicate. La nomination d'un commissaire ou d'une commission de déontologie exige d'autres ressources, et notamment le temps nécessaire pour étudier chaque cas individuellement. Il faut ajouter à cela les coûts d'administration de la structure disciplinaire, qui ne diminuent pas considérablement et qui peuvent même augmenter, puisqu'il faudra toujours veiller à ce que les normes d'éthique soient respectées. Or, si ces normes sont individualisées, il sera peut-être encore plus difficile d'en assurer l'observance.

Concevoir ces nouveaux mécanismes, les rendre fonctionnels et contenir leurs coûts sont des défis importants qui se posent aux autorités policières, tout comme d'ailleurs aux dirigeants d'organisations du secteur privé et du secteur public. Le but qu'il faut viser, cependant, est une communauté policière où l'éthique fait partie de la culture, où elle est recherchée délibérément et bien comprise tant par les agents de police que par leurs chefs.


  1. Canada, Conseil du Trésor, Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat, (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1985).
  2. Cette réaction en chaîne a été décrite d'abord par K. Kernaghan, en 1975, à la page 2 de son ouvrage Ethical Conduct of Government Employees (Toronto, Institut d'administration publique, 1975). Plus récemment, G. Thomson, dans "Personal morality in a professional context", (1991) 34 (1) Administration publique du Canada, 21, a signalé l'intérêt croissant des organisations du secteur privé et du secteur public pour l'éthique : éthique personnelle, codes de déontologie et sensibilisation des employés à l'éthique.
  3. S.J. Bonczek, "Ethics : Challenge of the 1990's" (juillet 1990) 72 Public Management 17.
  4. Ethidex Code Data Base (Toronto, Centre for Corporate Social Performance & Ethics, 1990) Cominco, section 7.2.

    Voir aussi les tests de déontologie compris dans le Basic Constable Course - Police Ethics (Toronto, ministère du solliciteur général, 1989), à la page 5. Il s'agit d'une série de tests auto-administrés contenant des questions qui permettent aux policiers d'analyser leur conduite. Par exemple : est-ce que je serais le moindrement mal à l'aise si cette affaire paraissait dans un quotidien important, présentée comme un sujet digne d'attention? Des personnes d'une grande intégrité, que j'ai haut en estime, agiraient-elles de la même façon que moi?

    Beaucoup d'extraits de codes d'éthiques d'entreprises cités ici ont été puisés directement dans la base de données Ethidex Code Data Base et correspondent à la version des codes qui y a été versée. Cette base de données analyse les codes selon le modèle de la gestion par les dépositaires d'enjeux, et les sections sont renumérotées en fonction de cette structure. Les numéros de sections renvoient donc à la base de données et non aux codes proprement dits. Lorsque la citation renvoie au code lui-même, les données pertinentes sont incluses, dans la mesure du possible.

    Une analyse du modèle de gestion par les dépositaires d'enjeux, modèle utilisé dans la base de données Ethidex, figure dans la communication Analysing and Evaluating Codes: The Stakeholder Management Model, présenté par M. Clarkson et M. Deck lors de la conférence intitulée "How to Institute Successful Ethics Programs in Organizations" tenue à la Wright State University du 8 au 10 mai 1991.

  5. "Police Ethics (janvier 1991) 58 The Police Chief 27.
  6. Conflict of Interest (Victoria, B.C. Police Commission, 1988), p. 6.
  7. Kernaghan, supra, note 2, p. 13.
  8. Règles générales de la compagnie - Conflits d'intérêts (Streetsville, Ontario, Du Pont Canada Inc. 1982) 60-1.
  9. Projet de loi C-46, Loi sur les conflits d'intérêts chez les parlementaires, 2e session, 34e législature, 1989, par. 2(2).
  10. Règlement sur la déontologie et la discipline des membres de la Sûreté du Québec, L.R.O. (1987), ch. P-13, art. 17. À noter que le Code de déontologie des policiers du Québec, décret 920-90, (1990), 122 Gazette officielle du Québec II 2532, remplace les dispositions concernant la déontologie policière de toutes les forces policières du Québec, art. 13; les autres dispositions sont encore en vigueur.
  11. S. Williams, Conflict of Interest (Londres, Gower Publishing, 1985), p. 6.
  12. Commission d'enquête sur les faits reliés à des allégations de conflits d'intérêts concernant l'honorable Sinclair M. Stevens, l'honorable W.D. Parker, commissaire (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1987).
  13. Ibid., p. 31.
  14. Ibid., p. 34.
  15. J. P. Kingsley, "Conflict of Interest: A Modern Antidote" (1986) 29(4) Administration publique du Canada 585, P. 591.
  16. Parlement, Les conflits d'intérêts : règles applicables aux législateurs fédéraux (Ottawa, Ministère des Approvisionnements et Services, 1989), p. 2.
  17. Ibid.
  18. Kingsley, supra, note 15.
  19. L'éthique dans le secteur public, l'honorable Michael Starr et l'honorable Mitchell Sharp (Ottawa, Approvisionnements et Services, 1984); citation tirée d'une étude réalisée en 1969 par J. Williams pour le Conseil privé, p. 81.
  20. Re Van Der Linden and the Crown in Right of Ontario (1981), 28 L.A.C. (2d) 352, p. 356 (Swinton).
  21. Johnstone et le Conseil du Trésor (Revenu Canada) (27 janvier 1987) No du dossier de la C.R.T.F.P.: 166-2-16279.
  22. Re L'Abbe and Corp. of Blind River (1904), 7 O.L.R. 230, à la p. 233 (C.A.).
  23. Elliott v. Cily of St.Catharines (1908), 18 O.L.R. 57, à la p. 61 (C.A.).
  24. Ontario, Report on Ministerial Compliance with the Conflict of Interest Guidelines and Recommendations with Respect to those Guidelines, Aird Report (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1986), p. 9. Voir également, Comité permanent de l'Assemblée législative, Report on the Report on Ministerial Compliance with the Conflict of Interest Guidelines and Recommendations with Respect to those Guidelines (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1986), p. 2.
  25. Conseil privé, livre vert intitulé : Les membres du Parlement et les conflits d'intérêts, l'honorable Allan MacEachen (Ottawa, Ministère des Approvisionnements et Services, 1973).
  26. Ibid., p. 1.
  27. Williams, supra, note 11.
  28. Starr & Sharp, supra, note 19, p. 22.
  29. L.O. (1983), ch. 8, art. 2. Des modifications considérables de cette loi ont récemment été recommandées. Voir Ontario, Révision des conflits d'intérêts municipaux, (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1991).
  30. Re Evans and Holt (1982), 141 D.L.R. (3d) 178 (C.A. Alberta), p. 186.
  31. Voir Re Russell and Toney (1982), 137 D.L.R. (3d) 202 (C.A. Alberta) et Re McCaghren and Lindsay (1983), 144 D.L.R. (3d) 503 (C.A. Alberta).
  32. Re McCaghren, Ibid., p. 510.
  33. Starr & Sharp, supra, note 19, p. 26.
  34. Ibid., p. 25.
  35. Ontario, Comité permanent des comptes publics, Report on the Alleciation of Conflict of Interest Concerninq Elinor Caplan, MPP (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1986) p. 56.
  36. Supra, note 21, p. 11. Propos cités de E.B. Jolliffe dans McKendry et le Conseil du Trésor (31 mai 1973 No de dossier : 166-2-674, jugement non publié, p. 139).
  37. Supra, note 16, p. 1.
  38. R.N. Roberts, White House Ethics (N.Y., Greenwood Press, 1988) p. 4.
  39. Williams, supra, note 11, p. 17.
  40. Starr & Sharp, supra, note 19, p. 25.
  41. Supra, note 4, IBM, section 3.2.
  42. Willams, supra, note 11, p. 17.
  43. W.K. Muir, fils, "Police and Politics" (automne-hiver 1983) 2 Criminal Justice Ethics 3, p. 4.
  44. Inquiry Re Alleged Improper Relationships between Personnel of the Ontario Provincial Police Force and Persons of Known Criminal Activity, Le juge Campbell Grant (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1970), p. 99.
  45. D.G. Smith, "Beyond Public Concern : New Free Speech Standards for Public Employees" (1990) 57 University of Chicago L.R. 249, p. 252.
  46. R.G. Vaughn, Conflict of Interest Reciulation in the Federal Executive Branch (Lexington (Mass.), Heath & Company, 1979).
  47. Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46, modifié, articles 119 à 125 inclusivement.
  48. Pearce v. Foster (1885), 17 O.B. 536, à la p. 539.
  49. Re Wosk's and Teamster Union, Local 351 (1983), 13 L.A.C. 64, à la p. 70.
  50. Re Poli-Twine and Canadian Automobile Worker's Union, Local 1839 (1988), 35 L.A.C. (3d) 123. (Willes).
  51. C.J. Snow and E.M. Abramson, "By the Light of Dual Employment: Standards for Employer Regulation of Moonlighting" (1980) 55 Indiana L.J. 581, à la p. 584.
  52. Canadian Aero Service c. O'Malley (1973) 40 D.L.R. (3d) 371 (C.S.C.), p. 381.
  53. S.M. Grant, "Sex, Lies and Legal Ethics" (1991) The Law Society Gazette 103, à la p. 118.
  54. Supra, note 50.
  55. E.A. Aust, Le contrat d'emploi (Cowansville, Éditiôns Yvon Blais, 1988), p. 114.
  56. W.J. Christie v. Greer, (1981), 121 D.L.R. (3d) 472, p. 477 (C.A. Man.).
  57. Supra, note 55.
  58. Re Lumber & Sawmili Workers' Union and KVP Co. (1965), 16 L.A.C. 73, à la p. 85 (Robinson).
  59. Re Woodward Stores and United Food & Commercial Workers Union (1987), 28 L.A.C. (3d) 59 (Fraser), p. 66; Re Consumers Gas and International Chemical Workers Union (1972), 1 L.A.C. (2d) 304 (Brown); Re United Brewery Workers and Pepsi-Cola (1967), 18 L.A.C. 105 (Hanrahan), p. 106.
  60. Supra, note 49, p. 73.
  61. Creating a Workable Company Code of Ethics (Washington, Ethics Resource Center, 1990), p. 1-2. Bien qu'il n'existe pas de statistiques pour le Canada, la plus grande activité sur ce plan dans le secteur privé est manifeste.
  62. Re Fraser and Public Service Staff Relations Board (1985), 23 D.L.R. (3d) 122, à la p. 133 (C.S.C.).
  63. Ibid.
  64. I. Greene, "Conflict of Interest and the Canadian Constitution: An Analysis of Conflict of Interest Rules for Canadian Cabinet Ministers" (1990) 23 Revue canadienne de sciences politiques 234.
  65. Ibid., p. 237.
  66. Voir, par exemple, la Loi sur la fonction publique de l'Ontario, L.R.O. (1980), ch. 418, articles 11 à 16.
  67. K. Kernaghan et J.W. Langford, The Responsible Public Servant (Halifax, Institut d'administration publique du Canada, 1990), p. 56.
  68. Voir, par exemple, la lettre du premier ministre Trudeau qui accompagnait ses directives de 1980 à l'intention des ministres fédéraux, citée dans Report Concerning Elinor Caplan, supra, note 35, p. 431.
  69. Voir la lettre du premier ministre Mulroney qui accompagnait ses directives de 1985 à l'intention des ministres fédéraux, citée dans Caplan, supra, note 35, p. 433.
  70. Aird Report, supra, note 24, p. 2.
  71. Pour une vue d'ensemble des mesures législatives sur les conflits d'intérêts, voir Bur. sous-reg. gén. adj., Les confits d'intérêts au Canada (Ottawa, Approvisionnements et Services, 1990).
  72. Pour une vue d'ensemble des divers codes de conduite en vigueur dans le secteur public relativement aux conflits d'intérêts, voir ibid.
  73. Par exemple, en vertu d'une loi de 1843 (Acte pour mieux assurer l'indépendance de l'assemblée législative de cette province), les fonctionnaires n'avaient pas le droit de voter ni d'être élus députés. Cullen, "The Challenge of Defining Conflict of Interest: Looking Back to See the Future" (1988-1989) 19 (3) Optimum 86, p. 87.
  74. L.R.C. (1985), ch. P-1, art. 14-16.
  75. Supra, note 9.
  76. Supra, note 1.
  77. Canada, Conseil du Trésor, Code régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat s'appliquant à la fonction publique, (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1985).
  78. Voir, par exemple, le projet de loi 66, Member's Conflict of Interest Act, 4e session, 34e législature de la C.-B., 1990; projet de loi 40, Conflict of lnterests Act, 3e session, 22e législature, Alberta, 1991; Loi sur les conflits d'intérêts au sein de lassemblée législative et du Conseil exécutif, L.R.M. (1987), ch. L112; Loi concernant les conflits d'intérêts des membres, L.O. (1988), ch. 17; An Act Respecting Conflict of lnterest for Members of the House of Assembly and Members of the Executive Council, R.S.N.S. (1989), ch. 86.
  79. Colombie-britannique, (Victoria: Ministry of Finance and Corporate Relations, 1983).
  80. Alberta, (Edmonton: Public Service Commissionner's Office, 1987).
  81. TPA 268 rev. 11, 89.
  82. Municipal Conflict of Interest Act, R.S.N.S. 1989, ch. 299.
  83. Loi de 1983 sur les conflits d'intérêts municipaux, L.O. (1983), ch. 8.
  84. Loi sur les conflits d'intérêts au sein des conseils municipaux, L.R.M. (1983), ch. 44.
  85. Voir, par exemple, Code of Conduct (Burlington (Ont.), City of Burlington, 1988); Code of Ethics for Employees (Winnipeg, Ville de Winnipeg, 1982).
  86. Voir, par exemple, le document City Policy, A1203, de la ville d'Edmonton, 1989.
  87. M. Punch, Conduct Unbecoming (New York, Tavistock Publications, 1985), p. 3.
  88. R. Williams, "Legal Aspects of Discipline by Administrators" (Chicago, Traffic Institute, Northwestern University, 1977), p. 6, cité dans Comité externe d'examen de la GRC, Conduite en dehors des heures de service, Document de recherche 7 (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1991), p. 60.
  89. Re St Catharines Police Association and Board of Police Commissioners of the City of St. Catharines (1970), 15 D.L.R. (3d) 532 (Ont. H.C.).
  90. Nicholson v. Haidimand-Norfolk Regional Board of Commissioners of Police (1978), 88 D.L.R. (3d) 671 à la p. 678, 23 N.R. 410, à la p. 417 (C.S.C.).
  91. A.G. (N.S.W.) v. Perpetual Trustee Co. (1955), A.C. 457, aux p. 489-490.
  92. T. Jefferson, The Case Against Paramilitary Policing (Philadelphie, Open University Press, 1990), p. 46.
  93. H. Cohen, "Exploiting Police Authority" (1986) Criminal Justice Ethics, 23, à la p. 29.
  94. T. Deakin, Police Professionalism (Springfield (Illinois), Charles C. Thomas, 1988).
  95. Kingsley, supra, note 15.
  96. Jefferson, supra, note 92.
  97. Ibid.
  98. Par exemple, Police Act de l'Alberta, S.A. 1988, ch. P-12.01.
  99. Par exemple, Reg. de l'Alberta 356/90.
  100. Voir, parexemple, la Loi de 1990 sur les services policiers de l'Ontario, S.O. (1990), ch. 10, par. 31(6) et (7), qui autorise la commission de police à établir des lignes directrices pour assurer la saine gestion du service de police.
  101. Voir, par exemple, le par. 18(1) de la Loi de 1990 sur les services policiers, ibid., qui stipule que les policiers de la P.P.O. sont nommés en vertu de la Loi sur la fonction publique, L.R.O. (1980), ch. 418.
  102. Bien que cette partie porte essentiellement sur les codes qui réglementent l'emploi, il convient de signaler qu'il existe par ailleurs un très grand nombre de codes de déontologie délimitant les responsabilités professionnelles. Parmi les nombreuses professions à s'être dotées d'un code de déontologie détaillé figurent la comptabilité, la publicité, l'architecture, le génie, la médecine et le droit. On trouvera un répertoire de codes de conduite américains dans R. Gorlin, Code of Professional Responsibility, 2e éd. (Washington, Bureau of National Affairs, 1990).
  103. John Madison, cité dans Roberts, supra, note 38, p. 201.
  104. G.W. Cordner, "Written Rules and Regulations" (juillet 1989), Law Enforcement Bulletin, 17, à la p. 19.
  105. Ibid.
  106. Supra, note 5, p. 32.
  107. E.J. Delattre, Character and Cops: Ethics in Policing (Washington, American Enterprise Institue for Public Policy Research, 1989), p. 33.
  108. Bonczek, supra, note 3, p. 17.
  109. Roberts, supra, note 38, p. 4.
  110. Starr et Sharp, supra, note 19, p. 32.
  111. Ibid., p. 188.
  112. C. Harris, "Structuring a Workable Business Code of Ethics" (1978) 30 University of Florida L.R. 310, p. 318.
  113. Kernaghan, supra, note 2, p. 5.
  114. Cité dans Williams, supra, note 11, p. 18.
  115. Supra, note 61.
  116. Ibid., p. IV-16.
  117. Supra, note 5, p. 32.
  118. Code de déontologie : Principes de conduite pour la Banque et son personnel (Montréal, Banque Royale du Canada, 1984), p. 2.
  119. Supra, note 61, p. IV-2.
  120. Supra, note 4, section 5.2.
  121. Ibid., section 1.4.5.
  122. Ibid., section 3.2.
  123. Ibid., Johnson and Johnson, section 3.2.
  124. Ibid., Ingersoll Rand, section 3.2.2.
  125. Le code éthique (Montréal, Bell Canada, 1986), p. 13.
  126. Supra, note 4, sous Loblaws, section 1.6.
  127. Supra, note 4, sous Pepsico, section 1.6.
  128. Faculty of Management, University of Toronto, 1990.
  129. L.Q. (1983), ch. 55.
  130. 1984, 6-25-1.
  131. Supra, note 78, al. 2 c).
  132. Supra, note 9, al. 3 c).
  133. Supra, note 78, art. 5.
  134. Supra, note 78, par. 3(6).
  135. Ibid, par. 3(4).
  136. Par exemple, la Loi de 1988 sur les conflits d'intérêts de l'Ontario, supra, note 78, al. 12(2) a).
  137. Cabinet du premier ministre, Ontario Conflict of Interests Guidelines (Toronto, Imprimeur de la Reine, 1990)
  138. Supra, note 100.
  139. L.R.C. (1985), ch. R-10, telle que modifiée, L.R.C. (1985), ch. 8 (2e suppl.) art. 37(d).
  140. B.C. Reg. 113/76.
  141. Loi sur la GRC, supra, note 139, annexe 1.
  142. Il y a habituellement dans le règlement une disposition stipulant que tout manquement à une des dispositions de la loi ou du règlement peut entraîner des sanctions disciplinaires. Par exemple, N.S. Reg. 101/88, s.-al. 5(1)a)(iv).

    L'article 50 du Règlement sur la GRC, DORS 88/361, stipule, dans le Code de déontologie, que le membre *ne peut sciemment transgresser, de quelque manière que ce soit, les serments qu'il a prêtés+. Les articles 41 et 43 de la Loi sur la GRC, supra, note 139 énoncent les mesures disciplinaires simples et graves dont sont passibles les membres qui contreviennent au Code de déontologie.

  143. L'Alberta en est un exemple typique; l'alinéa 61 (1)f) de cette loi permet au lieutenant-gouverneur en conseil d'édicter des règlements relativement à la discipline et au rendement des agents de police, Police Act, supra, note 98, s. 61 (1)f).
  144. N.S. Reg. 101/88, al. 5(1)a)i).
  145. Règlement de la GRC, supra, note 142, al. 39(2)a).
  146. Les rapports entre les conflits d'intérêts et la corruption sont abordés plus loin.
  147. Supra, note 10.
  148. Ibid., art. 3.
  149. Ibid., art. 8.
  150. Règlement municipal 106/90.
  151. Ibid., al. 5a).
  152. Ibid., art. 9.
  153. Ibid., s.-al. 8 i).
  154. Ibid., art. 9.
  155. Ibid., al. 6f).
  156. Supra, note 10.
  157. Ibid., art. 16.
  158. Ibid., art. 17.
  159. Ibid., art. 18.
  160. Ville de Winnipeg, Schedule A, By-Law No. 1, Winnipeg Police Regulations (1974).
  161. Loi sur la Ville de Winnipeg, L.M. 1989-90, ch. 9.
  162. Supra, note 85.
  163. S.B.C. 1988, ch. 53.
  164. 90-6-19, section 4.54 (1)e).
  165. Manuel d'administration de la GRC, Partie 1.4. Rev. 1991, section D.1.c.
  166. Ibid., à l'annexe 1.4.5. Ces lignes directrices s'inspirent de celles qui figurent dans le Code fédéral, supra, note 1. Elles seront remplacées sous peu par des Ordres permanents du commissaire qui sont actuellement en vole d'élaboration.
  167. Ibid., section I.1.b.2.
  168. Re Food Group and Retail, Wholesale & Department Store Union, Local 1065 (1987), 30 L.A.C. (3d) 250, p. 254 (Stanley); Canadian Imperial Bank of Commerce v. Boisvert (1986), 13 C.C.E.L. 263, p. 265 (C.A.F.); Pearce v. Foster, supra, note 48, p. 539.
  169. BCIC, Ibid,; Re Wosk's, supra, note 49.
  170. Helbig v. Oxford (1965), 9 O.A.C. 145, p. 151; Edwards v. Lawson Paper Converters (1984), 5 C.C.E.L. 99, p. 105 (C.S. Ont.).
  171. Pearce, supra, note 48.
  172. Comité externe d'examen de la GRC, Document de recherche 6 (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1990), p. 3.
  173. Par exemple, l'employé qui enfreint une des dispositions du Code de déontologie de la Ville de Burlington (supra, note 85, art. 9) est passible de congédiement (dans les cas graves).
  174. Ross and Niagara (1979), O.P.R. 434, à la p. 438.
  175. Circulaire JO-61-15 (février 1988) Banque Royale, p. 1.
  176. Supra, note 4, section 1.6.
  177. Supra, note 99, par. 6(1).
  178. Supra, note 139, art. 41.
  179. Voir, par exemple, le par. 61 (1) de la Loi de 1990 sur les services policiers de l'Ontario, supra, note 100.
  180. Re McKendry and Treasury Board (31 mai 1973) (C.R.T.F.P.) no. du dossier : 166-2-674, jugement non publié cité dans Re Regional Municipatity of Hamilton-Wentworth and Canadian Union of Public Employees (1978), 18 L.A.C. (2d) 46, p. 54 (Kennedy).
  181. Ibid., p. 55.
  182. Re Tourigny et le Conseil du Trésor (31 juillet 1987) No. de dossier de la C.R.T.F.P. : 166-2-16434; Re Wsk's, supra, note 49, p. 73.
  183. Re Woodward, supra, note 59, p. 63; Re Wainwright School Division and CUPE (1984), 15 L.A.C. (3d) 349 (Laux).
  184. Durand v. Quaker Oats Co. (1988) 20 C.C.E.L. 223, p. 234 (B.C.S.C.).
  185. Threader and Spinks v. Canada (Treasury Board) (1986), 68 N.R. 143, p. 151 (C.A.F.); Re Van Der Linden and the Crown in Right of Ontario (Ministry of lndustry and Tourism) (1981), 28 L.A.C. (2d) 352 (Swinton).
  186. Voir, par exemple, les lois sur les conflits d'intérêts de l'Ontario et de l'Alberta, supra, note 78.
  187. Supra, note 78, art. 23.
  188. Supra, note 25, p. 2.
  189. Starr & Sharp, supra, note 19, pp. 61-62.
  190. Ibid., p. 19.
  191. Supra, note 16, p. 3.
  192. Supra, note 12, p. 378.
  193. Supra, note 1, art. 46(4).
  194. Supra, note 24, p. 5.
  195. Starr & Sharp, supra, note 19, p. 70.
  196. J.G. Smith, "The Nature of Conflict of Interest" (1980) Pitblado Lectures 157.
  197. Re Canadian Fram and United Automobile Workers (1973), 3 L.A.C. (2d) 94 (Hinnegan).
  198. Manitoba, Report on Conflict of Interest of Municipal Councillors (Winnipeg, Commission de réforme du droit, 1981), p. 34.
  199. Supra, note 78.
  200. Ibid., par. 2(2).
  201. Ibid. La loi alloue trente jours pour communiquer les nouveaux renseignements.
  202. La Société canadienne d'hypothèques et de logement, Conflits d'intérêts : Normes de déontologie (Ottawa, Centre des affaires publiques, SCHL, 1989, p. 12) est un exemple typique en ce qu'elle prévoit que les dossiers sur les conflits d'intérêts et les dossiers sur le personnel doivent être tenus séparément. Ces dossiers sont conservés pendant sept ans après le règlement ou la disparition du conflit d'intérêts. Après ce délai, ils sont détruits.
  203. Supra, note 4, section 3.2
  204. Ibid., Horne & Pitfield and Loblaws, section 1.4.5.
  205. Emploi et Immigration Canadal/Code de conduite (Hull, CEIC, 1980), p. 14.
  206. L.N.-B. (1978), ch. C-16.1.
  207. L'existence du bureau fédéral du sous-registraire général adjoint illustre bien cette tendance. En 1974, on a créé ce bureau pour traiter les documents présentés par les personnes visées par les directives ministérielles sur les conflits d'intérêts. Le sous-registraire général adjoint est actuellement chargé d'administrer et d'appliquer le Code féderal, et de préparer des documents d'information sur les conflits d'intérêts. On a recommandé l'adoption d'une approche analogue pour faire respecter les lignes de conduite relatives aux conflits d'intérêts municipaux, en Ontario. Voir Révision des conflits d'intérêts municipaux, supra, note 29, pp. 59-71.
  208. Supra, note 9, par. 10(4).
  209. Propos de l'honorable Mitchell Sharp, cités par Mary Janigan dans "Avoiding Future Conflicts" (7 mars 1988) 101 (11) Maclean's 12, p. 14.
  210. Projet de loi 40, supra, note 78, par. 20(2).
  211. Supra, note 137, al. 15b).
  212. Supra, note 86, section 3.02 (b).
  213. Supra, note 1, art. 17.
  214. Supra, note 85, art. 9.
  215. Ibid., Cominco, art. 7.2
  216. Ibid., Johnson & Johnson, art. 1.6.
  217. Loi concernant les conflits d'intérêts de lassemblée et du Conseil des Ministres de l'Ontario, supra, note 78, par. 15(1).
  218. Projet de loi 40, supra, note 78, par. 22(1).
  219. Cette constatation confirme celle du document de recherche du Comité externe d'examen de la GRC sur la conduite des policiers en dehors des heures de service. Beaucoup d'actes commis en dehors des heures de travail qui peuvent entraîner l'imposition de sanctions disciplinaires peuvent également être considérés comme des conflits d'intérêts. Le document examine, par exemple, les aspects suivants : l'emploi secondaire, les activités politiques, la divulgation de renseignements confidentiels, les critiques publiques, l'abus de pouvoir et l'utilisation indue d'équipement de la police. Voir : Comité externe d'examen de la GRC, Conduite en dehors de heures de service, Document de recherche 7 (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, Canada, 1991).
  220. L'expression "conflit de responsabilités" (en anglais, conflict of commitment) est apparue pour la première fois dans Policies Relating to Research and Other Professional Activities Within and Outside the University (Cambridge, Harvard University, 1987).
  221. Supra, note 4, section 1.4.5.
  222. Halifax Police Department, Administration Manual 90-03-19, Chap. A-9, section 15-2.
  223. Nose and O.P.P. (mars 1990), O.P.R. 867, à la p. 868.
  224. Brown et Beatty, Canadian Labour Arbitration, 3d ed. (Toronto, Canada Law Book Inc., 1991) 7:3010, p. 350.
  225. (1988), 2 L.A.C. (4th) 48 (Davis).
  226. L'emploi secondaire englobe à la fois le service supplémentaire et les autres emplois qu'occupent les policiers lorsqu'ils ne sont pas de service. La politique type de l'International Association of Chiefs of Police sur l'emploi secondaire (Arlington (Virgine), IACP/BJA National Law Enforcement Policy Center, 1990) définit ainsi les deux termes

    Service supplémentaire :

    Tout emploi qui est conditionné par l'utilisation réelle ou possible de pouvoirs policiers par l'employé du service de police.

    Autre emploi exercé par le policier quand il n'est pas de service

    Tout emploi qui ne nécessite pas l'utilisation réelle ni éventuelle de pouvoirs policiers par l'employé, en dehors de ses heures de service.

    La Police Act de la Nouvelle-Écosse (R.S.N.S. 1989, ch. 348) est la seule loi sur la police qui fasse la distinction entre le service supplémentaire et les emplois occupés par les policiers lorsqu'ils ne sont pas de service. Chaque conseil municipal est tenu d'édicter une politique écrite relative aux deux cas (par. 21 (1) et (2)).

    Partout au Canada, les employeurs qui veulent engager des policiers pour qu'ils exercent ces fonctions spéciales (service supplémentaire) présentent habituellement une demande écrite au service de police. Si la demande est approuvée, les policiers sont engagés à leur taux horaire courant. Plusieurs systèmes assurent la répartition équitable du travail à tous les policiers intéressés.

    En ce qui concerne les conflits d'intérêts, il ressort de nos échanges avec les intervenants des services policiers que le service supplémentaire ne pose aucun problème parce que, même s'ils travaillent pour un employeur privé, les policiers remplissent leurs fonctions habituelles. Cependant, les policiers de la Communauté urbaine de Montréal ne sont assignés à de telles tâches que lorsqu'il faut assurer la sécurité publique ou répondre aux besoins courants du service de police. Ce service policier évite d'établir des liens étroits avec des entreprises privées. On nous a laissé entendre que son apparence d'impartialité pourrait être compromise s'il se mettait au service d'un employeur privé.

  227. Snow, supra, note 51, p. 606.
  228. Supra, note 10, art. 22.

    Le service de police de Vancouver interdit lui aussi l'emploi secondaire et exige que les policiers lui consacrent tout leur temps. Vancouver Police Department Regulations & Procedures Manual, art. 13 "Terms of Service".

  229. Supra, note 165, section c.6.g.
  230. Ibid., section c.6.h.3.
  231. Ibid., section c.6.h.3. et c-6-i.
  232. Supra, note 222.
  233. Edmonton Police Service Policy & Procedure Manual 1991, partie 11, chap. G, section 6.

    Ce règlement de la police d'Edmonton traite des emplois supplémentaires (extra employment). C'est le terme que le service utilise pour décrire les emplois secondaires que les policiers exercent en dehors de leurs heures de service; ne pas confondre avec le service supplémentaire. Voir la note 226, supra, qui explique la différence entre le service supplémentaire et l'emploi exercé en dehors des heures de travail.

  234. Supra, note 160, al. 124(17)(b).
  235. Supra, note 233.
  236. Supra, note 164, section 4.63(1).
  237. Calgary Police Association et al. v. Calgary Police Commission and Chief of Police City of Calgary, [1988] 2 W.W.R. 741 (C.A.).
  238. Supra, note 100.
  239. Police Act Regulations, R.R.O. (1980), ch. 791, art. 61.

    Pour donner suite à l'obligation énoncée dans le règlement, la P.P.O. a créé le Comité permanent sur l'emploi secondaire, chargé d'examiner toutes les demandes de policiers souhaitant exercer un deuxième emploi. Le directeur des Normes professionnelles étudie d'abord la demande ou fait enquête sur l'emploi en question, puis il la transmet au Comité permanent qui l'examine à son tour, puis adresse ses recommandations au commissaire, à qui revient la décision finale d'accorder ou non l'autorisation. À l'origine, on a établi cette procédure pour aider les policiers désireux d'obtenir la permission du chef, en vertu de l'ancienne Loi sur la police, avant de commencer à exercer un deuxième emploi. Bien que le paragraphe 49(1) abolisse cette obligation, la P.P.O. a conservé la procédure et recommande aux policiers de continuer à la suivre.

  240. Nose, supra, note 223.
  241. A. Reiss, "Private Employment of Public Police" (décembre 1988), National Instituts of Justice, p. 6.
  242. Le fait qu'un policier exploite une taverne a toujours suscité beaucoup de réserves. Dans Ville de Trois-Rivières et Association des policiers et pompiers de la Ville de Trois-Rivières (Droit du travail express No 86T-532 (T.A.)), l'arbitre a conclu ce qui suit :

    Il est évident qu'un policier ne doit jamais être identifié à un bar ; il en va de la crédibilité du service de police. Propos cités dans Sûreté du Québec et Association des Policiers Provinciaux du Québec, (1991) T.A. 1025-G, p. 15.

  243. Welch and Metro Toronto Police (décembre 1986), O.P.R. 738. Une accusation d'insubordination a été substituée à l'accusation initiale de manoeuvre frauduleuse, qui avait donné lieu à une condamnation. On a jugé que le déshonneur associé à la fraude était exagéré dans les circonstances. Personne n'a vu dans cette situation un conflit d'intérêts.
  244. O.P.P. Police Orders, partie I, art. 251.1.
  245. Supra, note 10, art. 22.
  246. Supra, note 222.
  247. Supra, 244, art. 250.1
  248. Supra, note 165, section c.6.h.2.
  249. Supra, note 4, I.B.M., section 1.4.5.
  250. Kernaghan, supra, note 2, p. 16 ; Ontario, Document de travail sur les droits à l'activité politique des policiers de l'Ontario (Toronto, Ministère du Solliciteur général, 1991).
  251. Il y a toute une gamme d'activités politiques possibles : voter, adhérer à un parti politique, militer pour un candidat ou un parti, solliciter des fonds pour un candidat, commenter publiquement des affaires politiques ou encore se porter candidat lors d'élections.
  252. (1987), 41 D.L.R. (4th) 1 (S.C.C.).
  253. Re Fraser and the A.G. of Nova Scotia (1986), 30 D.L.R. (4th) 340 (N.S.S.C.).
  254. Nova Scotia Civil Service Act, R.S.N.S. (1989), par. 40(5).
  255. Ibid., par. 40 (7).
  256. Supra, note 66.
  257. Ontario, The Extension of Political Activity Rights for Ontario Crown Employees (Document de travail) (Toronto, The Management Board of Cabinet, 1991).
  258. Ibid., p. 5.
  259. Supra, note 100.
  260. Supra, note 10.
  261. Vancouver Police Department Regulations and Procedures Manual, art. 13, "Terms of Service".
  262. Supra, note 164, art. 4.6, "Conditions of Employment".
  263. Supra, note 160, par. 124(16).
  264. Supra, note 161.
  265. Règlement de la GRC, supra, note 142, par. 57(2).
  266. L.R.C. (1985), ch. P-33.
  267. (1988), 52 D.L.R. (4th) 241 (C.A.F.).
  268. Osborne v. Treasury Board, (1991), 82 D.L.R. (4th) (C.S.C.C.) 321 à la p. 340.
  269. Supra, note 257, p. 2.
  270. Document de travail, supra, note 250.
  271. E. Gallant, "Political Rights for Public Servants : A Federal Perspective" (1986) 29 (4) Administration publique du Canada.
  272. Par exemple, William Ker Muir, (supra, note 43, p. 4.) avance des arguments pour et contre la restriction des activités politiques des policiers. Voir aussi d'autres arguments présentés dans le document de travail préparé par le Solliciteur général de l'Ontario sur les droits à l'activité politique des policiers de l'Ontario, supra, note 150.
  273. Rapport du Comité spécial sur la gestion du personnel et le principe du mérite, Comité d'Avignon (Ottawa, Ministre des Approvisionnements et Services, 1979).
  274. Ibid., p. 195.
  275. Supra, note 257.
  276. (Toronto, Ministère du Procureur général, 1986).
  277. Supra, note 257, p. 9.
  278. Supra, note 276, p. 282.
  279. Document de recherche, supra, note 250.
  280. Voir Osborne, supra, note 268. Dans ce jugement, la Cour suprême du Canada a déclaré que l'alinéa 32(1)(a) (maintenant devenu l'alinéa 33(1)(a) de la Loi sur l'emploi la fonction publique) était sans effet parce que les restrictions imposées à la liberté d'expression étaient excessives, compte tenu de l'objectif visé : une fonction publique impartiale et loyale (p. 12242).
  281. Supra, note 100. Le règlement ne porte pas de numéro précis.
  282. Supra, note 202, p. 9.
  283. A. Bouza, Police Administration (Toronto, Pergamon Press, 1978), p. 221.
  284. R. Kania, "Should we tell the police to say yes to gratuities", (été 1988) 7 Criminai Justice Ethics 37.
  285. Supra, note 4, section 3.2.1.
  286. Supra, note 4, section 3.2.1.
  287. Supra, note 1, par. 34(1).
  288. Supra, note 78, art. 6.
  289. Supra, note 78, al. 12h).
  290. Supra, note 78, al. 7(2)b).
  291. Ibid., par. 7(3).
  292. Supra, note 10, art. 9.
  293. Supra, note 261, art. 56.
  294. Supra, note 164, art. 4.56.
  295. Ibid.
  296. Supra, note 165, c. 1.h.I.
  297. Ibid., c.1.h.
  298. Ibid., c.1.h.7.
  299. Supra, note 99, s.-al. 5(2)c)(ii).
  300. B.C. Reg. 330/75, art. 6.
  301. Supra, note 243.
  302. Kernaghan, supra, note 2, p. 41.
  303. Aust, supra, note 55, p. 113.
  304. (1987), 17 C.C.E.L. 44 (Cour. Dist. Ont.), le juge en chef suppléant Davidson.
  305. Supra, note 4, section 2.3-3.
  306. Supra, note 78, art. 16.
  307. Re Wilkes et le Conseil du Trésor (2 mars 1987) No. du dossier de la C.R.T.F.P.: 166-2-16-170.
  308. Supra, note 98, annexe 3.
  309. Supra, note 139, annexe.
  310. Supra, note 10, art. 16.
  311. Supra, note 165, c.5.e.
  312. Ibid., c.5.f.
  313. Ibid., c.5.g.
  314. Ibid., c.8.a.
  315. Ibid., Annexe 1.4.5., section 4.
  316. Supra, note 99, par. 5(2).
  317. Supra, note 1, art. 36(1).
  318. Perry et le Conseil du Trésor (CEIC) (20 juin 1988) No. de dossier de la C.R.T.F.P. 166-2-17340.
  319. Weber et le Conseil du Trésor (Approvisionnements et Services) (8 septembre 1986) No. du dossier de la C.R.T.F.P.: 166-2-15616.
  320. Supra, note 21.
  321. Supra, note 79, art. 8.1.
  322. "Administrative Instructions in Support of the Code of Conduct and Ethics" PMS-18-2, section 8.1.
  323. K. Donovan, "Officer probed over "private" surveillance" The Toronto Star (20 juillet 1991) A3.
  324. Supra, note 85, art. 2.
  325. Calgary Police Services Administration Manual, supra, note 164, section 4.54(1)e).
  326. Ontario Police Regulations, Ont. Reg. 791/80, art. le) (ii), de l'Annexe A.
  327. Lovegrove and Waterloo Police Force (novembre 1974), O.P.R. 182.
  328. A.C. 1711-78, Gazette du Québec 1978.11.3343, al. 7d).
  329. Supra, note 150, art. 9.
  330. Supra, note 165, Annexe 1-4-5.
  331. Voir, par exemple : Manitoba, Report of the Aboriginal Justice Inquiry of Manitoba (Winnipeg, Imprimeur de la Reine, 1991); Report of the Commission of Inguiry into the Harvey I. Pollock, Q.C. Case, Hon. E.N. Hughes, c.r., commissaire, Winnipeg, 12 septembre 1991.
  332. Supra, note 165, c.1.j.
  333. Supra, note 164, section 4.54(1)(i).
  334. Supra, note 10, al. 8f).
  335. Reg. 4.2.0., art. 4.2.1.
  336. Ville de Granby et la Fraternité des Policiers de Granby (1981), 3 L.A.C. (3d) 443 (Frumkin), p. 445.
  337. Pattison and O.P.P. (août 1984), O.P.R. 608.
  338. Johnson and Barrie Police Force (fév. 1985), O.P.R. 643.
  339. Supra, note 144, s.-al. le)(iii).
  340. Supra, note 165, c.1.i.
  341. Re Canada Post and CUPW (Varma) (1984), 19 L.A.C. (3d) 356 (Swan), p. 357.
  342. Supra, note 62, p. 133.
  343. Clough et le Conseil du Trésor (20 nov. 1988) No. du dossier de la C.R.T.F.P.: 161-2-511, p. 24.
  344. Supra, note 219, p. 59-60.
  345. Supra, note 164, art. 4.54(1)m).
  346. Commission de réforme du droit de l'Ontario, Report on Political Activity, Public Comment and Disclosure by Crown Employees, supra, note 276, pp. 63-70, 230-243 et 322-352 ; K.P. Swan, "Whistleblowing and National Security", dans National Security : Surveillance and Accountability a Democratic Society, Textes colligés par P. Hanks et J.D. McCamus (Cowansville, Blais, 1989).
  347. Supra, note 165, Annexe 1-4-6.
  348. Ibid., Section A, 1.
  349. Supra, note 78.
  350. Supra, note 1, Partie III.
  351. On trouvera une analyse récente de ces questions dans "What's Wrong with the Revolving Door?", de S. Keiman. Il s'agit d'une communication inédite présentée dans le cadre de deux ateliers (Law and Economics Workshop et Public Policy Workshop) qui ont eu lieu à la Faculté de droit de l'Université de Toronto le 4 octobre 1991.

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