NC-040 - Harcèlement

L’appelante et le défendeur travaillaient ensemble à la Section du recrutement de la Division « X ». L’environnement de travail des parties était très convivial et les membres se jouaient des tours entre eux tout en parlant ouvertement de sexualité. Le 3 septembre 2015, le défendeur a rencontré l’appelante alors qu’il était superviseur intérimaire pour discuter de certaines lacunes qu’il voyait chez elle. Celle-ci a été blessée par les propos du défendeur et a ensuite refusé de travailler avec lui. Le 3 novembre 2015, la superviseuse de la section a tenu une rencontre entre l’appelante et le défendeur pour régler le conflit. La situation ne s’est pas réglée.

Le 4 novembre 2015, l’appelante a déposé une plainte de harcèlement contre le défendeur qui comprenait six allégations. Les allégations concernaient des faits s’étant déroulés entre mars et novembre 2015. L’intimé a mandaté deux enquêteurs pour effectuer une enquête sur ces allégations. Les enquêteurs ont rencontré plusieurs témoins et interrogé l’appelante à deux reprises. Les parties ont reçu le rapport préliminaire en mai 2016 et l’appelante a pu le commenter. Dans sa décision, l’intimé a déploré l’ambiance de travail qui régnait au sein de la Section du recrutement. Il a indiqué que l’ambiance de travail manquait de professionnalisme. Il a conclu que le défendeur avait bel et bien tenu les propos reprochés dans la plainte, mais il ne pouvait conclure que le défendeur savait ou aurait dû savoir que ses propos offenseraient l’appelante vu les agissements de celle-ci et l’environnement de travail qui régnait au sein de la section.

L’appelante a fait appel de cette décision en soutenant que l’intimé n’avait pas considéré toute la preuve, qu’il avait mal interprété celle-ci et qu’il avait considéré une preuve qui ne lui avait pas été communiquée avant que la décision soit rendue.

Conclusions du CEE

Le CEE a conclu que le défaut de l’intimé de mentionner l’enregistrement sonore fourni par l’appelante ne permettait pas de conclure que la décision était manifestement déraisonnable. En effet, les enquêteurs ont fait valoir qu’après avoir reçu la réponse de l’appelante au rapport préliminaire ainsi que l’enregistrement sonore, ils étaient d’avis que l’appelante n’avait soulevé aucun élément nouveau méritant une enquête complémentaire. L’intimé a également indiqué que les enregistrements sonores faisaient partie des documents qui lui avaient été fournis afin qu’il puisse rendre sa décision. Le CEE a également conclu que l’appelante n’avait soulevé aucune erreur de la part de l’intimé dans l’appréciation de la preuve, mais qu’elle avait réitéré la preuve en concluant que celle-ci démontrait qu’elle avait été harcelée. Le CEE a conclu que les enquêteurs se devaient de questionner l’appelante sur des points qui avaient été soulevés par des témoins et qu’ils n’avaient pas manqué d’impartialité en agissant ainsi. Enfin, le CEE a conclu que la version des faits soulevée par le défendeur lors de son témoignage ne pouvait être considérée comme étant de nouveaux faits.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé de rejeter l'appel.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 10 mars 2020

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

À l'époque, l'appelante et le membre visé par la plainte de harcèlement (le défendeur) étaient affectés à la Section du recrutement à la Division « X » où il y régnait un « environnement de travail très particulier » marqué de propos et blagues parfois sans retenue, « formulés dans un contexte d'humour ». Ce milieu, les employés le trouvaient « agréable, détendu, drôle, convivial… », affirmant que « la plaignante participait aux blagues, taquinait les autres et semblait très à l'aise... ». En août 2015, alors qu'il exerçait les fonctions de superviseur suppléant, le défendeur s'est entretenu avec l'appelante afin de « discuter de certaines lacunes professionnelles » dont elle avait fait preuve, portant ensuite ces lacunes à l'attention de la superviseuse qui a ordonné une enquête en déontologie. Ce geste posé par le défendeur a donné lieu au conflit qui a mené l'appelante à déposer une plainte de harcèlement à son égard. Ainsi, deux enquêteurs du Groupe des Normes professionnelles ont été chargés du dossier, remettant ensuite leur rapport à l'intimé qui, en sa qualité de commandant divisionnaire, a rejeté l'ensemble de la plainte, « … troublé voire offusqué de constater le ton bon-enfant utilisé par les employés pour commenter et illustrer leur environnement de travail et les propos qu'ils échangeaient libéralement entre eux ». Selon l'intimé :

Ainsi, l'intimé a conclu ce qui suit :

L'appelante a par la suite interjeté appel, d'avis que la décision de l'intimé contrevenait aux principes applicables de l'équité procédurale et était entachée d'une erreur de droit. Par ses observations, elle a plutôt soulevé la raisonnabilité de la décision. Le dossier a été renvoyé devant le Comité externe d'examen (CEE) dont le président a « souscrit aux commentaires de l'intimé concernant l'atmosphère de travail régnant au sein de la section de l'appelante…il s'agissait d'un environnement manquant de professionnalisme et certains membres, dont l'appelante, se comportaient d'une façon qui ne reflétait pas les valeurs de la GRC ». D'avis que « l'appelante était complaisante dans cet environnement de travail et participait activement aux blagues de nature sexuelle », le président du CEE a recommandé à l'arbitre de rejeter l'appel. L'arbitre en matière d'appel a entériné la recommandation du CEE, rejetant l'appel au motif que l'appelante n'avait pas démontré que la décision de l'intimé était manifestement déraisonnable.

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2023-02-27