NC-050 - Harcèlement

Le 16 août 2000 ou vers cette date, l’appelant s’est fait voler son arme à feu par deux femmes. Selon lui, elles avaient volé l’arme à feu dans son véhicule pendant qu’il était dans un restaurant. Selon elles, l’appelant les avait fait monter dans son véhicule et l’une d’elles avait volé l’arme à feu pendant qu’il parlait à l’autre.

L’appelant a signalé le vol et a ensuite été accusé de s’être comporté d’une façon scandaleuse qui jetait le discrédit sur la Gendarmerie, en contravention du code de déontologie de la GRC. Par conséquent, un comité d’arbitrage lui a imposé une peine constituée d’un avertissement et de la confiscation de cinq jours de solde. Des enquêteurs ont rédigé un rapport d’enquête décrivant l’incertitude entourant le vol de l’arme à feu, mais il n’a jamais été présenté au comité d’arbitrage.

Au début, l’incident n’a pas nui à la carrière de l’appelant. Depuis, il a été promu deux fois à des grades de sous-officier et a travaillé de façon exemplaire. En 2004 et en 2009, il a réussi le Programme de perfectionnement des aspirants officiers et a été inscrit chaque fois sur la liste des candidats admissibles à une promotion à l’échelle nationale. Toutefois, sa période d’admissibilité a pris fin chaque fois sans qu’il soit promu officier.

En 2010, une demande d’accès à l’information a révélé qu’un surintendant avait dit au directeur responsable des promotions que tout n’avait pas été nécessairement dit dans l’affaire disciplinaire décrite dans la décision du comité d’arbitrage. L’appelant s’est ensuite mis à dire qu’il était victime de harcèlement au travail en raison de rumeurs qui se répandaient au sujet de l’incident survenu en 2000. Il a donc déposé de nombreux griefs contre des membres de la haute direction.

Le 8 juillet 2013, après avoir reçu des commentaires favorables de la Cour fédérale lors du contrôle judiciaire d’un grief, l’appelant a écrit au commissaire de la GRC de l’époque pour demander à être promu au grade d’inspecteur. Le 13 septembre 2013, le commissaire a rejeté la demande de l’appelant. L’appelant a demandé le contrôle judiciaire de la décision du commissaire et a obtenu gain de cause devant la Cour fédérale. Toutefois, le procureur général a interjeté appel de la décision de la Cour fédérale et le 22 juin 2015, la Cour d’appel fédérale a accueilli l’appel du procureur général, annulant ainsi le jugement de la Cour fédérale.

En octobre 2016, l’appelant n’avait toujours pas été promu. Il a donc déposé une plainte de harcèlement contre la directrice générale du Perfectionnement et du Renouvellement des cadres et des officiers (2015).

Conclusions du CEE

Le CEE a déclaré que l’intimé avait commis une erreur manifeste et dominante en concluant que la plainte de l’appelant n’était pas fondée sans demander de précisions à ce dernier. Vu cette omission, l’intimé ne pouvait déterminer en connaissance de cause s’il y avait lieu d’enquêter sur la plainte. Par conséquent, le CEE a conclu que la décision en appel était manifestement déraisonnable.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé que l'appel soit accueilli.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 10 juin 2020

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

L'appelant a interjeté appel de la décision de l'intimé de juger non fondées les plaintes de harcèlement contre l'ancien commissaire et deux directrices générales du Perfectionnement et du Renouvellement des cadres et des officiers, et ce, au motif que cette décision était entachée d'une erreur de droit, contrevenait aux principes d'équité procédurale et était manifestement déraisonnable. Il soutenait que l'intimé n'avait pas respecté la politique en n'ordonnant pas la tenue d'une enquête et que des renseignements cruciaux avaient donc été écartés.

Le CEE a conclu que la décision n'était pas entachée d'une erreur de droit et ne contrevenait pas aux principes d'équité procédurale, mais qu'elle était manifestement déraisonnable. Il a jugé que l'intimé, en n'ordonnant pas la tenue d'une enquête, n'avait pas respecté la politique et ne disposait pas des renseignements nécessaires pour établir qu'il était [traduction] « inconcevable » que les allégations puissent être considérées comme du harcèlement.

Le CEE a aussi conclu que la décision de l'intimé était manifestement déraisonnable du fait qu'elle se fondait sur les conclusions de l'arrêt de la Cour d'appel fédérale. Dans cet arrêt, la Cour avait conclu que l'ancien commissaire n'avait pas exercé son pouvoir discrétionnaire indûment en refusant de promouvoir l'appelant. Le CEE a jugé que la Cour n'avait pas tranché la question du harcèlement dans son arrêt. Il a recommandé que l'appel soit accueilli, mais a conclu qu'il serait inutile de mener une enquête vu le temps écoulé et d'autres facteurs et a plutôt recommandé que des excuses soient présentées à l'appelant.

L'arbitre de l'appel n'était pas du même avis, jugeant que la décision de l'intimé n'était pas manifestement déraisonnable. Bien qu'il puisse s'avérer nécessaire de mener une enquête sur une plainte de harcèlement, l'arbitre de l'appel a conclu que la politique applicable conférait au décideur le pouvoir discrétionnaire de ne pas mener d'enquête dans les rares cas où il y a suffisamment d'information sur les faits à l'origine de la plainte.

En l'espèce, l'arbitre de l'appel a conclu que la Cour d'appel fédérale, dans son arrêt, avait traité en détail des faits à l'origine de la plainte et jugé que l'ancien commissaire et la haute direction n'avaient pas abusé de leur pouvoir ni fait preuve de harcèlement.

Il n'y avait donc pas lieu de mener d'enquête puisque l'intimé s'était fondé sur l'arrêt de la Cour d'appel fédérale. En outre, le fait de réexaminer la question dans le cadre du présent appel a été jugé inapproprié et contraire au principe de la préclusion découlant d'une question déjà tranchée. En conclusion, l'arbitre de l'appel a jugé que la décision de l'intimé n'était pas manifestement déraisonnable. Par conséquent, la décision de l'intimé a été confirmée et l'appel a été rejeté.

Détails de la page

Date de modification :