NC-067 - Renvoi pour raisons médicales

Après un congé de maladie de trois ans, l'appelant a tenté un retour progressif au travail (RPT) de juillet 2012 à juillet 2013, mais il est reparti en congé de maladie en juillet 2013 et n'est pas retourné au travail depuis. La médecin-chef a délivré à l'appelant un profil médical contenant la cote « O6 », ce qui signifiait que l'appelant était inapte à retourner au travail dans un avenir prévisible. L'appelant a contesté cette modification à son profil médical par voie de grief, lequel a été partiellement accueilli par l'arbitre de niveau I. Au printemps 2014, la Gendarmerie a demandé que l'appelant subisse un examen médical indépendant (EMI), ce qu'il a fait, mais sans faire appel à l'un des évaluateurs recommandés par la Gendarmerie. La médecin-chef a contesté la validité de l'EMI en raison de l'évaluateur utilisé et a demandé que l'avocat de l'appelant obtienne plus de renseignements auprès de l'évaluateur, ce qui n'a pas été fait en fin de compte. En octobre 2016, l'avocat de l'appelant a communiqué avec la Gendarmerie pour lui indiquer que l'appelant souhaitait retourner au travail pourvu qu'il fasse l'objet de mesures d'adaptation appropriées. La médecin-chef a alors informé la Gendarmerie qu'elle était préoccupée par le premier EMI et que sa demande de suivi était restée sans réponse; elle jugeait donc toujours peu probable que l'appelant fasse un RPT dans un avenir prévisible. Toutefois, elle s'est dite ouverte à ce qu'un autre EMI soit effectué par un évaluateur ayant une expertise du problème de santé de l'appelant pour réévaluer son aptitude au travail. L'avocat de l'appelant a ensuite déclaré qu'un autre EMI représentait une mesure trop envahissante.

Néanmoins, l'avocat de l'appelant a informé la Gendarmerie que l'appelant souhaitait toujours faire un RPT, et la Gendarmerie a réitéré qu'un RPT était conditionnel à l'obtention de nouveaux renseignements médicaux. Un comité de médecins-chefs a été constitué et a recommandé que l'appelant subisse un deuxième EMI. L'appelant n'a pas répondu à cette demande. Par conséquent, la Gendarmerie a lancé un processus de licenciement. Toutefois, le dirigeant des Relations employeur-employés (DREE) a ordonné que l'appelant subisse un EMI. Un EMI a donc été fixé pour l'appelant; toutefois, ce dernier n'a pas donné son consentement à l'évaluateur, qui a mis fin à l'évaluation.

La Gendarmerie a poursuivi le processus de licenciement. Dans sa réponse à l'avis d'intention de licenciement, l'appelant a notamment fait valoir que l'entente de RPT n'avait pas été respectée par la Gendarmerie, qui, dans un premier temps, ne lui avait pas fourni les outils nécessaires pour travailler et, dans un deuxième temps, ne lui avait pas fourni de projets de la GRC sur lesquels travailler. Ensuite, la Gendarmerie, contre l'avis de son fournisseur de soins, a précipité son retour en milieu opérationnel, ce qui a aggravé son problème de santé. Par la suite, la Gendarmerie n'en a pas fait beaucoup pour prendre des mesures adaptées au problème de santé de l'appelant; par exemple, elle a rejeté l'avis de son médecin selon lequel il devait d'abord tenter de travailler de nouveau à domicile, et elle a ensuite refusé d'accepter les résultats d'un EMI effectué par un praticien qualifié que l'appelant avait choisi et qui avait déclaré que ce dernier pouvait faire un RPT. De plus, la médecin-chef a insisté au bout du compte pour que l'appelant soit évalué par un médecin choisi par la Gendarmerie, et la Gendarmerie a refusé de payer sept heures d'évaluation supplémentaire requises par le clinicien de l'appelant pour donner un avis sur sa capacité à faire un RPT. Enfin, l'appelant a fait valoir que le processus de licenciement prévu à l'alinéa 6a) des Consignes du commissaire (exigences d'emploi) constituait une violation de son droit garanti par l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte) et que cette violation ne pouvait être justifiée au regard de l'article premier de la Charte.

L'intimée a conclu que l'appelant n'avait pas collaboré au processus de prise de mesures d'adaptation, qu'il l'avait fait échouer et qu'il ne pouvait donc faire l'objet de mesures d'adaptation sans qu'il en résulte une contrainte excessive. Elle a ordonné le licenciement de l'appelant.

L'appelant a fait appel de son licenciement. Il soutenait que l'intimée n'avait pas tenu compte de preuves contradictoires et n'avait pas traité de son argument fondé sur la Charte, tout en réitérant que la Gendarmerie n'avait pas pris de mesures d'adaptation à son égard au point de subir une contrainte excessive.

Conclusions du CEE

Le CEE a conclu que l'intimée avait commis une erreur en ne tenant pas compte de preuves contradictoires et de différentes versions des faits sur la participation de l'appelant au processus de prise de mesures d'adaptation. Le CEE a aussi conclu que l'intimée avait commis une erreur en ne traitant pas de l'un des principaux arguments de l'appelant, à savoir que l'alinéa 6a) des Consignes du commissaire (exigences d'emploi) violait son droit garanti par la Charte.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé que l'appel soit accueilli et que l'affaire soit renvoyée en vue d'une nouvelle décision.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 7 juin 2021

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

L'appelant est parti en congé de maladie. En novembre 2011, son fournisseur de soins de santé l'a autorisé à entamer un retour progressif au travail (RPT) chez lui. Le RPT s'est soldé par un échec.

En juillet 2013, la médecin-chef a informé l'appelant qu'il était inapte à retourner au travail. Elle a modifié son profil médical en lui attribuant le facteur « O6 » en permanence. L'appelant a contesté cette décision par voie de grief.

De 2013 à 2014, l'appelant a subi un examen médical indépendant (EMI). L'évaluateur a conclu que l'appelant était apte à travailler et qu'il pouvait entamer un RPT. Toutefois, la médecin-chef était d'avis que les résultats de l'EMI militaient en faveur de l'attribution du facteur « O6 » en permanence au profil médical de l'appelant. Elle a plus tard déclaré qu'elle n'avait pas reçu de réponses à certaines questions et qu'un nouvel EMI était nécessaire.

En juin 2017, un comité de médecins-chefs a conclu qu'un deuxième EMI était nécessaire. L'appelant ne s'est pas soumis à l'EMI. Un processus de licenciement a été lancé en septembre 2017 et a abouti à la décision de l'intimée de licencier l'appelant à compter du 11 septembre 2018.

L'appelant a interjeté appel en faisant notamment valoir que la Gendarmerie n'avait pas établi qu'elle avait pris des mesures d'adaptation à son égard au point de subir une contrainte excessive et que, de toute façon, l'alinéa 6a) des Consignes du commissaire (exigences d'emploi) utilisé pour procéder à son licenciement violait la Charte, et que tous ces éléments avaient mené à une décision inéquitable sur le plan procédural, entachée d'une erreur de droit et manifestement déraisonnable.

L'appel a été renvoyé devant le CEE pour examen en application du sous-alinéa 17d)(i) du Règlement de la Gendarmerie royale du Canada (2014). Le président du CEE a recommandé que l'appel soit accueilli.

L'arbitre a convenu que la décision de l'intimée ne pouvait être maintenue puisque celle-ci n'avait pas tenu compte de différentes versions des faits d'une importance capitale. L'arbitre a donc accueilli l'appel, ordonné la réintégration de l'appelant à compter de la date de son licenciement et ordonné que l'affaire soit soumise à un nouveau décideur.

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2023-02-27