NC-073 - Harcèlement
L'appelant a déposé une plainte de harcèlement (la plainte) contre son ancien officier hiérarchique, le défendeur. La plainte contenait de nombreuses allégations, dont des incidents au cours desquels le défendeur avait fait des commentaires jugés offensants par l'appelant. Dans d'autres allégations, l'appelant affirmait que le défendeur s'était ingéré dans son plan d'adaptation établi selon sa situation familiale et avait manqué de professionnalisme dans la gestion de ses congés liés à ce plan d'adaptation.
L'intimé a rendu une décision dans laquelle il a conclu que la plainte n'était pas fondée. Selon lui, les gestes du défendeur ne constituaient pas du harcèlement. L'intimé a conclu que les fonctions de gestion qu'exerce un gestionnaire quant aux mesures d'adaptation et aux congés ne pouvaient constituer du harcèlement. Il a aussi conclu que plusieurs des incidents s'étaient produits avant que le défendeur connaisse les répercussions négatives qu'ils avaient eues sur l'appelant et qu'ils ne pouvaient donc être pris en considération. En outre, l'intimé a conclu que les autres incidents ne répondaient pas au critère de harcèlement. Enfin, il a conclu qu'un des incidents ne pouvait être considéré comme un incident où l'appelant était visé.
L'appelant a fait appel de la décision de l'intimé.
Conclusions du CEE
Le CEE a conclu que la décision était manifestement déraisonnable pour trois raisons. Premièrement, le CEE a déclaré que le décideur doit rendre des conclusions lorsque des preuves contradictoires lui sont présentées. En l'espèce, la preuve contenait des contradictions liées à plusieurs incidents; or, l'intimé n'a pas résolu ces conflits dans sa décision. Sans ces conclusions, la décision ne pouvait être considérée comme suffisamment motivée. Deuxièmement, l'intimé a bien énoncé la définition de harcèlement et le critère de la personne raisonnable, mais il a souligné que le défendeur ne pouvait connaître les répercussions subies par l'appelant qu'après que le comportement problématique ait été porté à son attention. Ce raisonnement va à l'encontre du critère de la personne raisonnable, qui cherche à établir si le défendeur aurait dû connaître les répercussions de ses gestes. Dans le même ordre d'idées, l'intimé a tenu compte du fait que le défendeur aurait voulu cesser ses agissements s'il avait été conscient du préjudice qu'ils causaient. Ces éléments invoqués, soit l'intention du défendeur et l'exigence voulant qu'il soit conscient des répercussions subies par l'appelant, ont tous deux été jugés comme des éléments à ne pas considérer dans l'application du critère de la personne raisonnable. Troisièmement, le CEE a conclu que l'intimé avait tenu compte de trop peu d'incidents pour établir s'il y avait eu harcèlement à répétition.
Recommandations du CEE
Le CEE a recommandé que la commissaire accueille l'appel et renvoie l'affaire à un nouveau décideur pour qu'il réévalue la preuve contradictoire, applique de nouveau le critère de la personne raisonnable et réexamine si les incidents montrent qu'il y a eu harcèlement à répétition.
Décision de la commissaire de la GRC datée le 29 novembre 2021
La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :
[Traduction]
En septembre 2015, l’appelant a déposé une plainte de harcèlement contre son officier hiérarchique (le défendeur) concernant divers échanges et incidents survenus de 2011 à 2015. Une enquête a été ordonnée et des déclarations ont été obtenues auprès de dix personnes, dont l’appelant et le défendeur. Le 1er septembre 2016, l’intimé a rendu une décision dans laquelle il a conclu qu’il n’y avait pas eu harcèlement.
Le 14 septembre 2016, l’appelant a fait appel en affirmant que la décision de l’intimé était fondée sur une erreur de droit. Le 9 juillet 2021, le Comité externe d’examen de la GRC (CEE) a conclu que [traduction] « l’intimé n’a pas évalué les éléments de preuve contradictoires en profondeur et n’a pas appliqué correctement la définition de harcèlement et le critère de la personne raisonnable ». Le CEE a aussi conclu que [traduction] « l’intimé n’a pas examiné correctement si l’ensemble des incidents montraient qu’il y avait harcèlement à répétition », ce qui rendait sa décision manifestement déraisonnable. Le CEE a recommandé qu’un nouveau décideur rende une nouvelle décision dans laquelle [traduction] « il appliquera correctement le critère de la personne raisonnable aux allégations et examinera si l’ensemble des allégations montrent qu’il y a eu harcèlement à répétition ».
L’arbitre de dernier niveau a conclu que la seule erreur susceptible de révision dans la décision de l’intimé était l’application du critère de la personne raisonnable. Pour cette raison, et en vertu de l’alinéa 47(1)b) des Consignes du commissaire (griefs et appels), l’arbitre a accueilli l’appel en concluant que la décision de l’intimé était manifestement déraisonnable. L’appel a été renvoyé à un nouveau décideur pour qu’il rende une nouvelle décision dans laquelle il appliquera correctement le critère de la personne raisonnable aux allégations et examinera si l’ensemble des allégations montrent qu’il y a eu harcèlement à répétition.
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