NC-077 - Harcèlement

L’appelant est un caporal avec plusieurs années de service à la GRC. Pendant la majorité de sa carrière, il a poursuivi des études à temps partiel, en dehors de ses heures de travail. En septembre 2014, son gestionnaire de l’époque lui a accordé un horaire de travail comprimé pour qu’il puisse terminer ses études. Cet arrangement permettait à l’appelant de faire ses semaines de travail en quatre jours au lieu de cinq. De plus, des heures supplémentaires lui étaient régulièrement approuvées.

En septembre 2016, l’appelant a eu un nouveau gestionnaire (le défendeur). Dès son arrivée, ce dernier a indiqué à l’appelant qu’il devait retourner à un horaire de travail régulier, soit un horaire « 5-2 ». Le défendeur a également enlevé à l’appelant la possibilité de faire des heures supplémentaires.

Le 3 décembre 2016, l’appelant a déposé une plainte de harcèlement contre le défendeur qui comprenait cinq allégations. Les allégations concernaient des faits s’étalant de septembre à novembre 2016. L’intimé a conclu que la plainte aurait dû faire l’objet d’un grief et que le processus de règlement des plaintes de harcèlement n’était donc pas approprié dans les circonstances. Par conséquent, la plainte a été rejetée sans qu’une enquête soit ordonnée.

L’appelant a fait appel de la décision de l’intimé en soutenant notamment que ce dernier avait commis une erreur en omettant de considérer l’ensemble des allégations contenues dans la plainte et en n’ordonnant pas d’enquête.

Conclusions du CEE

Le CEE a conclu que la décision de l’intimé de ne pas ordonner d’enquête était manifestement déraisonnable, car la preuve au dossier était insuffisante pour rendre une décision. Le CEE a aussi déterminé que l’omission de considérer toutes les allégations contenues dans la plainte constituait une erreur affectant le caractère raisonnable de la décision.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé que l’appel soit accueilli et que l’affaire soit renvoyée à un nouveau décideur en vue d’une nouvelle décision.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 22 décembre 2021

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

Alors qu’il était affecté à la Division « X », l’appelant a déposé une plainte de harcèlement mettant en cause son superviseur. L’appelant y allègue que le présumé harceleur l’a traité différemment et injustement en ne lui permettant plus de faire du surtemps et en ne lui permettant plus de travailler des quarts de travail de 10 heures et une rotation de 4 jours en devoir / 3 jours en congé. De plus, le présumé harceleur refuse de l’accommoder dans ses heures de travail pour lui permettre de compléter ses études de doctorat. L’appelant rapporte qu’il est traité différemment de ses collègues et que ceci lui cause du stress et l’empêche de mener à terme ses études.

L’intimé n’a pas ordonné qu’une enquête soit menée et a rejeté la plainte, étant d’avis que le comportement allégué ne tenait pas lieu d’agissements harcelants à l’égard de l’appelant et qu’il s’agissait en fait d’un exercice du droit de gestion. L’intimé indique que l’appelant aurait plutôt dû déposer un grief car ce processus est celui qui est approprié pour son type de plainte.

Estimant que la décision de l’intimé a été rendue en contravention aux principes applicables de l’équité procédurale, qu’elle se fonde sur une erreur de droit et qu’elle est manifestement déraisonnable, l’appelant a porté l’affaire en appel.

Le dossier a été envoyé devant le CEE. Le CEE détermine en premier lieu que les documents soumis pas l’appelant dans son appel sont inadmissibles puisque certains d’entre eux étaient disponibles en première instance au moment du dépôt de la plainte de harcèlement, alors que d’autres ne sont pas pertinents à l’appel. Après avoir examiné les motifs d’appel, le CEE a conclu qu’il était erroné de rejeter la plainte au motif qu’elle aurait plutôt dû faire l’objet d’un grief car certaines de ses composantes dénoncent des comportements pouvant constituer du harcèlement. De plus, le CEE note que la décision de l’intimé fait défaut de tenir compte de deux des allégations mises de l’avant par l’appelant. Le CEE observe aussi que le Bureau de la coordination des plaintes de harcèlement et l’intimé n’ont pas fait un suivi approprié sur la plainte et en ne lui ont pas offert la possibilité d’ajouter des documents à sa plainte. Finalement, le CEE détermine que l’intimé aurait dû ordonner à ce qu’une enquête soit menée, puisque certains éléments allégués par l’appelant se devaient d’être vérifiés. Le CEE recommande donc que l’appel soit accueilli.

Contrairement au CEE, l’arbitre de dernier niveau détermine que les documents soumis par l’appelant en appel sont admissibles. L’arbitre détermine aussi que l’intimé a effectivement omis de considérer deux des allégations soulevées par l’appelant. Il estime qu’il en résulte que l’évaluation de l’intimé des faits en cause à la lumière de la définition de harcèlement est incomplète. Il juge que ce manquement fait en sorte que la décision de l’intimé est manifestement déraisonnable et accueille donc l’appel.

Considérant la retraite du présumé harceleur et de l’appelant, ainsi que le temps qui s’est écoulé depuis le dépôt de la plainte, l’arbitre offre à l’appelant ses excuses au nom de la GRC pour le fait que sa plainte de harcèlement ne fut pas l’objet d’un processus décisionnel adéquat.

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