NC-243 - Harcèlement
L’appelant a accordé plusieurs entrevues aux médias et publié sur les médias sociaux une lettre qu’il avait adressée au commissaire de l’époque, dans laquelle il critiquait la direction de la GRC. Il a agi ainsi à la suite d’un procès intenté en vertu du Code canadien du travail, dans lequel la GRC a été reconnue coupable de ne pas avoir veillé à la santé et à la sécurité de ses policiers. L’appelant a aussi cessé de porter la bande jaune sur son pantalon de travail et s’est laissé pousser une barbiche pour sensibiliser la population aux conditions de travail à la GRC. Le présumé harceleur, qui était le chef de district de l’appelant, a pris des mesures à l’égard des gestes de l’appelant. L’appelant estimait que le présumé harceleur l’avait harcelé en prenant certaines mesures après ce qu’il avait fait pour s’exprimer et il a déposé une plainte de harcèlement (la plainte). Dans la plainte, l’appelant soutenait notamment que le présumé harceleur avait porté atteinte à sa liberté d’expression, soit son droit protégé par l’alinéa 2b) de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).
Après enquête, l’intimé a rendu une décision dans laquelle il a conclu que les mesures prises par le présumé harceleur ne répondaient pas à la définition de harcèlement. L’appelant a fait appel de la décision de l’intimé. Il affirme que la décision a été rendue en violation des principes applicables d’équité procédurale et qu’elle est manifestement déraisonnable.
Conclusions du CEE
La décision de l’intimé est manifestement déraisonnable parce que celui-ci ne s’est pas penché sur l’argument de l’appelant fondé sur l’alinéa 2b) de la Charte, un élément clé de la plainte de l’appelant, pour établir s’il y avait eu harcèlement. De plus, comme le droit d’expression de l’appelant était assurément en jeu en l’espèce, le défaut de l’intimé de traiter de la prétendue violation de la Charte dans sa décision constitue une erreur de droit.
Selon la jurisprudence de la Cour suprême du Canada, lorsqu’un droit protégé par la Charte s’applique, le décideur administratif doit clairement reconnaître et analyser ce droit. En l’espèce, l’intimé était tenu d’analyser l’argument de l’appelant fondé sur l’alinéa 2b) de la Charte et d’intégrer cette analyse dans son évaluation visant à établir s’il y avait eu harcèlement.
Recommandation du CEE
Le CEE recommande d’accueillir l’appel et de renvoyer l’affaire à un nouveau décideur en vue d’une nouvelle décision. Le CEE recommande que le nouveau décideur, en rendant la nouvelle décision, tienne compte des préoccupations de l’appelant selon lesquelles le présumé harceleur l’avait harcelé en prenant certaines mesures à son égard après ce qu’il avait fait pour s’exprimer. En outre, la nouvelle décision devra traiter des arguments de l’appelant concernant la prétendue violation par le présumé harceleur de son droit protégé par l’alinéa 2b) de la Charte. Le nouveau décideur devrait aussi obtenir, dans la mesure du possible, une copie des entrevues de l’appelant accordées aux médias, lesquelles ont donné lieu aux mesures prises par le présumé harceleur, pour effectuer l’analyse nécessaire fondée sur la Charte quant à ces entrevues et aux mesures prises en conséquence par le présumé harceleur.