Sommaire des dossiers de griefs - G-320
G-320
Une connaissance du requérant est entrée dans le bar où ce dernier donnait un coup de main à sa femme, propriétaire de l'établissement. Dans les toilettes des hommes du bar, le requérant a vu l'individu en question s'adonner à une activité douteuse qui impliquait une grande quantité d'argent comptant. L'individu a déclaré au requérant qu'il se servait de l'argent pour acheter de la drogue. Il a quitté le bar quelques minutes plus tard. Au bout d'une quinzaine de minutes, plusieurs membres de la GRC qui enquêtaient sur un vol à main armée survenu tout près de là se sont rendus au bar et ont dit au requérant qu'ils avaient de bonnes raisons de croire que le suspect dans le vol était venu au bar. Les membres de la GRC ont décrit le suspect, qui ressemblait à l'individu que le requérant avait croisé aux toilettes. Cependant, le requérant a déclaré aux membres de la GRC qu'il n'avait vu personne qui ressemblait au suspect. Une vingtaine de minutes plus tard, alors que les membres de la GRC avaient quitté le bar, le requérant est allé les retrouver et leur a dit que l'individu pourrait être le suspect qu'ils recherchaient. L'individu a été arrêté plus tard dans la soirée, puis il a été condamné pour vol qualifié. À la suite de cet incident, le requérant a fait l'objet d'une enquête en vertu du Code de déontologie et a été suspendu de ses fonctions. L'intimé a accepté la recommandation voulant que le requérant cesse de recevoir sa solde et ses indemnités au motif que les preuves avaient établi qu'il avait menti délibérément à ses collègues en leur disant qu'il ne reconnaissait pas le suspect qu'ils lui décrivaient. L'intimé a fait savoir qu'il était inconcevable que le requérant, qui comptait plus de 20 ans d'expérience comme membre de la GRC, ne s'était pas rendu compte immédiatement que les activités douteuses qu'il avait vues dans les toilettes révélaient que l'individu en question était le suspect dans le vol à main armée. Un comité d'arbitrage de la GRC qui s'est penché sur les allégations d'inconduite contre le requérant a conclu que celles-ci n'avaient pas été prouvées. Le comité d'arbitrage a reconnu que la conduite du requérant avait été « décevante », mais a attribué celle-ci au manque de sommeil et à la consommation d'alcool. Par conséquent, le versement de la solde et des indemnités du requérant a repris, mais seulement à partir de la date de la décision prise par le comité d'arbitrage.
Conclusions du Comité
La GRC n'est pas habilitée par la loi à faire cesser la solde et les indemnités des membres suspendus de leurs fonctions parce que les règlements pertinents adoptés par le Conseil du Trésor (CT) n'énoncent pas les critères dont il faut tenir compte au moment de prendre une décision à cet égard. En permettant au CT de « prendre des règlements régissant la cessation de la solde et des indemnités des membres suspendus de leurs fonctions », la Loi suppose que le CT ne se contentera pas de définir quels officiers de la GRC peuvent exercer le pouvoir de faire cesser la solde et les indemnités des membres concernés. Comme c'est tout ce que les règlements prévoient, le Conseil du Trésor a violé la règle delegatus non potest delegare.
Comme le comité d'arbitrage a conclu que les allégations d'inconduite contre le requérant n'avaient pas été prouvées, la Gendarmerie a été tenue de mettre un terme de manière rétroactive à sa suspension, ce qui a également signifié qu'il a pu toucher sa solde et ses indemnités pour toute la période visée par la suspension initiale, conformément au Règlement de la Gendarmerie royale du Canada.
Sur le fond de la décision, l'évaluation des preuves effectuée par l'intimé a été très imparfaite. Ces preuves ne permettaient pas d'établir de manière convaincante que le requérant avait délibérément caché de l'information au sujet du suspect dans le vol à main armée. Il était injuste que l'intimé présume que, compte tenu de sa longue expérience au sein de la GRC, le requérant se rende compte immédiatement que les activités douteuses dont il avait été témoin dans les toilettes étaient liées au vol à main armée. En l'absence de preuves évidentes d'une intention de fournir des renseignements trompeurs, la décision de faire cesser le versement de la solde et des indemnités du requérant ne peut être justifiée.
Recommandation du Comité datée le 25 mars 2004
Le grief devrait être accueilli.
Décision du commissaire datée le 11 juillet 2004
Le commissaire s'est dit d'accord avec la recommandation du Comité externe et a accueilli le grief. Pour ce qui est du Règlement sur la cessation de la solde et des allocations des membres de la GRC, il a déclaré qu'il n'était pas habilité par la loi à se prononcer sur sa validité. Par conséquent, pour les besoins de son analyse du bien-fondé du grief, il a présumé que le Règlement était valide. Le commissaire a déclaré que, compte tenu de la décision du comité d'arbitrage selon lequel les allégations contre le membre n'avaient pas été prouvées et de sa réintégration subséquente, le requérant avait le droit de recevoir sa solde et ses allocations à partir de la date de l'ordonnance de faire cesser celles-ci jusqu'à la date d'entrée en vigueur de sa réintégration au sein de la GRC.
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