Sommaire des dossiers de griefs - G-412
G-412
Les plaignantes ont conclu une entente de partage d'emploi en vue de gérer leurs obligations familiales en tant que membres de la GRC mariées et mères de famille. Avant de signer le protocole d'entente qui établissait les modalités de l'emploi partagé, une des plaignantes s'est informée sur la manière dont ses cotisations au régime de retraite seraient calculées. Ce n'est qu'après avoir signé le protocole d'entente que les deux employées ont été avisées que les membres de la GRC occupant un emploi partagé n'étaient pas autorisés majorer leurs contributions jusqu'au niveau équivalant un emploi temps plein. Or cette restriction n'était pas mentionnée dans le protocole d'entente versé au dossier.
Le 31 mai 2000, les plaignantes et d'autres membres occupant des emplois partagés ont fait parvenir une lettre au commissaire demandant que le rachat de service soit permis dans la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada. Elles ont fait valoir que les membres occupant un emploi partagé, qui sont toutes des femmes, étaient pénalisées par rapport leurs collègues qui travaillent temps plein ou qui bénéficient d'une autre forme de congé. Le commissaire a renvoyé le dossier l'intimé qui, dans une lettre datée du 13 juillet 2000, a informé les plaignantes qu'elles ne pouvaient verser de contributions que pour les heures vraiment travaillées parce qu'elles étaient considérées comme des employées temps partiel.
Après avoir repris leur poste temps plein, les plaignantes ont demandé de racheter le service correspondant aux heures qu'elles n'avaient pas travaillées, mais cette demande a été rejetée le 17 octobre 2000. Dans un grief daté du 14 novembre 2000, elles ont déclaré qu'elles avaient été informées de la décision, de l'acte ou de l'omission donnant lieu au grief le 17 octobre 2000. Elles ont demandé la communication de plusieurs documents, dont des recherches effectuées par la GRC sur l'emploi partagé, les procès-verbaux des réunions du Comité consultatif des pensions de retraite (CCPR) ayant porté sur l'emploi partagé, les résultats d'une étude du CCPR relative l'emploi partagé et les recommandations du CCPR ce sujet. Elles ont plaidé également que les heures non travaillées devraient être considérées comme un congé non payé, ce qui leur permettrait de racheter le service correspondant ces heures une fois qu'elles reprennent leur poste temps plein. L'intimé a soutenu quant lui que le fait d'assimiler l'emploi partagé un emploi temps partiel entraîne le calcul au prorata des prestations. Il a aussi précisé que le CCPR se penchait sur la question. Dans leurs arguments supplémentaires, les plaignantes ont mentionné un avis reçu par le CCPR indiquant que la Loi de l'impôt sur le revenu permettait aux employés temps plein de racheter le service correspondant une période de travail temporaire temps partiel, pourvu qu'ils satisfassent certaines conditions, et que cette façon de procéder n'exercerait pas de pressions indues sur la Gendarmerie.
Avant que le comité consultatif sur les griefs (CCG) ne fasse sa recommandation, l'arbitre de niveau 1 a statué que la demande de communication de documents devait être rejetée. Il a conclu plus particulièrement que les documents relatifs aux recherches, les procès-verbaux et les études n'étaient pas pertinents, car ils n'avaient pas trait la Loi sur la pension de retraite de la GRC et ne constituaient pas des politiques appliquées par la Gendarmerie aux plaignantes. Une des plaignantes a présenté des observations supplémentaires soulignant qu'elle avait appris que, selon le CCPR, le changement demandé ne nécessitait pas de modification réglementaire et qu'il suffisait d'étendre la portée des dispositions en vigueur sur le congé non payé. Cette même plaignante a également fourni des statistiques montrant que les membres occupant un emploi partagé répondaient un profil précis : elles étaient toutes des femmes ayant des enfants et elles étaient presque toutes mariées. Elle a soulevé que le fait de traiter l'emploi partagé différemment des autres congés comme le congé non payé, le congé auto-financé sans solde et le congé de maternité était contraire la mission, aux valeurs et l'éthique de la GRC ainsi qu'à la Loi canadienne sur les droits de la personne (L.R., 1985, ch. H-6 ).
Le CCG a conclu que le grief était prescrit, parce que les plaignantes avaient reçu l'information en octobre 1999. Au niveau 1, le grief a été rejeté pour non-respect des délais également : les plaignantes savaient ou auraient dû savoir de quoi il retournait la signature du protocole en juillet 1999. Les plaignantes ont alors déposé un grief de niveau II.
Conclusions du CEE
Le Comité externe a conclu que les délais n'avaient pas été respectés mais a statué aussi que c'est seulement en juillet 2000 que les plaignantes ont appris qu'elles subiraient personnellement un préjudice, après avoir reçu la lettre de l'intimé. Il a recommandé toutefois que le délai soit prorogé conformément l'article 47.4 de la Loi sur la GRC. Il a souligné par ailleurs que la Gendarmerie ne s'était jamais penchée sur la plainte de discrimination parce qu'elle avait décidé qu'elle ne pouvait pas permettre aux membres occupant un emploi partagé de racheter le service correspondant aux heures non travaillées. Selon le Comité externe, cette prise de position n'était pas justifiée, étant donné que l'avis reçu par le CCPR indiquait que, moyennant certaines conditions, l'employeur peut permettre aux employés temps plein de cotiser un régime de retraite pendant une période de travail temporaire temps partiel comme s'ils travaillaient temps plein. L'intimé n'avait pas non plus raison de dire qu'il n'y aurait plus aucune limite si cette démarche était permise, car la Loi de l'impôt sur le revenu établit clairement des critères et des limites régissant ces arrangements.
Le Comité externe a souligné que la Gendarmerie, quand elle étudiera la plainte de discrimination des plaignantes, devra garder l'esprit les principes suprêmes énoncés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne et dans la politique de la GRC sur les droits de la personne. Il a aussi précisé que ce dossier soulevait bien des questions qui n'avaient pas été réglées et qui devaient l'être afin que les plaignantes puissent recevoir une réponse.
Recommandation du CEE datée le 30 avril 2007
Le Comité externe a recommandé d'accueillir le grief et d'ordonner un examen complet de la plainte de discrimination des plaignantes.
Décision du commissaire de la GRC datée le 14 août 2010
Le commissaire a rendu sa décision dans cette affaire, telle que résumée par son personnel :
[TRADUCTION]
Le commissaire par intérim a rejeté les conclusions et recommandations du Comité. Il a conclu que la Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada ("LPRGRC") ne permet pas à des membres en partage d'emploi le rachat de droits de pension pour le temps non travaillé. Les plaignantes étaient au courant que la LPRGRC ne reconnaît pas l'expression "partage d'emploi" et que, par conséquent, ce type d'arrangement doit être reconnu à titre de travail à temps-partiel. à ce titre, les membres contribuent à leur régime de pension selon les heures qu'ils ont travaillées.
Le commissaire par intérim a aussi conclu que le temps non travaillé au cours d'un partage d'emploi ne peut pas être considéré comme étant un congé sans solde (CSS) puisque les dispositions de la LPRGRC ne peuvent pas s'appliquer à une structure de partage d'emploi où le temps d'un CSS est intercalé.
L'argument des plaignantes selon lequel il y a eu discrimination en vertu de la législation sur les droits de la personne manquait de spécificité. La règle établissant que les membres contribuent à leurs droits selon le nombre d'heures travaillées est neutre et authentique. Le partage d'emploi n'est pas réservé qu'aux membres qui sont des femmes mariées mais est disponible à tous les employés. Le commissaire par intérim a décidé qu'il lui était impossible d'extrapoler les faits présentés pour appuyer l'argument des plaignantes puisque celui-ci ne rencontrait pas le fardeau nécessaire à établir un cas prima facie de discrimination.
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