Sommaire des dossiers de griefs - G-689
G-689
Tard un soir, la requérante a reçu des messages textes d'un téléphone d'un collègue qu'elle ne connaissait pas beaucoup (ci-après le « présumé harceleur »). Les messages textes l'invitaient à un enterrement de vie de garçon auquel assistait le présumé harceleur dans une autre localité, mais l'un d'eux était inapproprié. Peu après, le présumé harceleur a présenté des excuses par écrit à la requérante, tout en précisant que quelqu'un d'autre – peut-être un autre membre de la GRC présent à la fête – avait fait une blague en utilisant son téléphone pour lui envoyer plusieurs messages textes, dont celui qui était inapproprié. Les messages textes échangés par la suite laissaient entendre que les parties s'étaient réconciliées. Toutefois, il ressort aussi du dossier que le présumé harceleur a peut-être admis avoir envoyé le message texte inapproprié. Le dossier indique également que le présumé harceleur a présenté des excuses en personne à la requérante, excuses qu'elle ne trouvait pas sincères, car selon elle, lui et d'autres collègues de sexe masculin l'avaient affublée d'un surnom grossier.
La requérante a déposé une plainte de harcèlement (ci-après la « plainte »). Le présumé harceleur a présenté une réponse écrite accompagnée de tous les messages textes échangés entre les deux parties. Il ressort clairement du dossier qu'un agent des ressources humaines a retenu la plainte et conclu qu'il n'y avait pas lieu d'enquêter plus loin parce que le prétendu harcèlement se limitait à des messages textes. L'agent des ressources humaines a ensuite rédigé une ébauche de décision à compléter par le répondant. Le répondant a conclu que la plainte était [traduction] « non fondée ». Il a fait valoir que le présumé harceleur avait présenté des excuses à la requérante, que celle-ci les avait acceptées, qu'un manque de sincérité ne constituait pas du harcèlement et que l'affaire concernait un incident isolé ayant été réglé par les parties. La requérante a présenté un grief au niveau I, qui a été rejeté sur le fond. Elle a ensuite présenté son grief au niveau II.
Conclusions du CEE
Après avoir statué sur diverses questions préliminaires et accessoires non contestées, le CEE a conclu que le répondant avait tranché la plainte en ne respectant ni les textes officiels du Conseil du Trésor et de la GRC en matière de harcèlement, ni la jurisprudence du CEE et de la commissaire à cet égard. Plus précisément, même si le prétendu harcèlement se limitait aux quelques brefs écrits présentés par les parties, la requérante avait néanmoins le droit, par simple souci d'équité, d'être interrogée et de répondre à la réponse écrite du présumé harceleur à sa plainte. Il est inquiétant de voir qu'aucune enquête n'a été effectuée dans ces circonstances, car force est de constater que ce qui s'est passé était grave, controversé et complexe, et ne se limitait pas aux écrits. Certains éléments de preuve soulevaient des questions sur ce qui s'était réellement passé entre la requérante et le présumé harceleur, mais celles-ci auraient dû être traitées dans le cadre d'une enquête approfondie sur l'affaire plutôt que de servir de justification pour rejeter la plainte à défaut de renseignements plus détaillés.
Recommandation du CEE
Le CEE a recommandé à la commissaire : d'accueillir le grief; de présenter des excuses à la requérante pour le fait que la plainte n'a pas été tranchée conformément aux textes officiels et à la jurisprudence applicables en matière de harcèlement; de reconnaître que le répondant n'avait pas assez d'information pour rendre une décision finale; et d'annuler la décision du répondant selon laquelle la plainte était non fondée. Enfin, puisque la commissaire adhère fermement à la modernisation des processus de règlement des plaintes de harcèlement, le CEE a recommandé qu'elle discute de l'issue de la présente affaire avec les parties prenantes si celle-ci lui semble porteuse de grandes leçons susceptibles de renforcer les processus actuels de la GRC en matière de harcèlement.
Décision de la commissaire de la GRC datée le 26 juin 2020
La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :
[Traduction]
La requérante a contesté la décision du commandant de la Division « X » selon laquelle sa plainte de harcèlement n'était pas fondée sans qu'il y ait eu enquête. L'arbitre de niveau I a rejeté le grief au motif que la requérante n'avait pas été privée de son droit à l'équité procédurale lors du traitement de sa plainte de harcèlement. Il a conclu qu'il n'avait pas été nécessaire d'effectuer une enquête officielle ni de donner à la requérante la possibilité de réfuter la déclaration du présumé harceleur. La requérante a demandé que son grief soit examiné au niveau II. Le CEE a recommandé que le grief soit accueilli au motif que le répondant s'était fondé sur des renseignements incomplets pour rendre sa décision. Le CEE a aussi conclu que la plainte n'avait pas été traitée dans le respect du principe d'équité fondamentale, puisque la requérante n'avait pas été interrogée et n'avait pas eu la possibilité de répondre aux renseignements présentés par le présumé harceleur. La commissaire accepte l'analyse et les conclusions du CEE. Le grief est accueilli.