Archivé : L'ouragan Hazel - Évaluation de l’organisation des secours

Voici ce que Fred Turnbull a déclaré dans un rapport sur l'ouragan Hazel émis par le Bureau météorologique : « Je suis sûr que bien des gens se sont demandé depuis la catastrophe de vendredi pourquoi tout cela est arrivé. En cherchant des réponses à cette question, beaucoup aussi ont dû se demander comme moi, en leur âme et conscience, ce qu'ils auraient pu faire pour prévenir une telle catastrophe.

Vue aérienne de l’inondation

« D'un point de vue météorologique, il me semble que tout a été fait en temps opportun. D'aucuns diront que nous n'avons pas insisté suffisamment sur la quantité de précipitations attendue, toutefois, même si nous avions pu prévoir que 5,3 pouces de pluie s'abattraient sur Malton, on peut se demander combien de personnes, le cas échéant, auraient compris que ce chiffre était synonyme de catastrophe. J'étais tout à fait conscient du fait que les précipitations dépasseraient le record absolu de quatre pouces, toutefois, il est certain que je ne connaissais pas suffisamment le bassin hydrographique de la rivière Humber ou que je n'avais pas suffisamment d'imagination pour associer cette quantité de précipitations à une inondation tragique comme celle qui s'est produite. » (Kennedy, 1979; p. 42-43)

M. Marler, le ministre des Transports de l'époque, a salué les météorologues qui, selon lui, ont permis, grâce à leurs prévisions précises et opportunes, d'éviter une catastrophe encore plus grave. « Le bilan humain et matériel a été très lourd, mais il est évident qu'il l'aurait été encore bien davantage sans les avertissements insistants et précis donnés en temps opportun par le bureau de Malton du Service météorologique du ministère. »

John Knox, prévisionniste au Service météorologique au moment du passage de l'ouragan Hazel, a présenté un rapport sur cet ouragan lors d'un symposium en 1992. « Dans quelle mesure le public a-t-il été bien averti? Plus de 24 heures avant la catastrophe, le jeudi soir, bien avant que Hazel n'atteigne les côtes de la Caroline du Sud, le Centre météorologique de l'Ontario avait annoncé que, en raison de la progression vers le Nord de Hazel, des chutes de pluie abondantes s'ajoutant à celles déjà enregistrées, allaient s'abattre sur Toronto le lendemain en fin de soirée. Ces prévisions allaient être confirmées lors du poste de nuit, d'après la carte météo dressée par Norman Grundy, qui allait s'avérer d'une précision extraordinaire. En effet, ce dernier avait prévu que l'oeil de l'ouragan accélérerait sa course vers le Nord et atteindrait l'ouest du lac Ontario ce soir-là, et avait émis un bulletin qui annonçait des vents forts et des précipitations abondantes en soirée. Lorsque j'ai pris la relève de Norman à 8 heures, ce dernier n'a pas eu de difficulté à convaincre notre chef Fred Turnbull et moi-même que nous avions affaire à une tempête extrêmement dangereuse. En fait, il régnait au bureau une atmosphère très pesante. Je trouve d'ailleurs très étrange qu'on puisse se souvenir de détails comme celui-là, des décennies plus tard. Après analyse de la carte émise à 12 heures  30, il ne faisait aucun doute qu'il fallait émettre un avertissement, ce qui fut fait à 10 heures, heure locale. L'avertissement était clair et net et annonçait des vents atteignant 40 milles à l'heure avec des rafales à 70, ainsi que des précipitations modérées à fortes sur l'agglomération de Toronto commençant en après-midi et se poursuivant dans la soirée. Il a été rapidement diffusé par les journaux et les stations de radio et de télévision. Fred Turnbull, après t'avoir consulté, Pat, sur la meilleure façon de procéder, a téléphoné lui-même à tous les organismes qu'il jugeait concernés, notamment à Fred Gardiner, alors président de la communauté urbaine, à Ontario Hydro et à d'autres instances provinciales susceptibles de devoir surveiller et contrôler le niveau d'eau dans les rivières, aux compagnies et organismes concernés par la navigation commerciale sur les Grands Lacs, ainsi qu'aux rédactions des journaux et aux stations de radio et de télévision, pour être sûr que tous recevraient bien le message.

Des gens ont malgré tout critiqué les météorologues à l'occasion des anniversaires de la tragédie, laissant entendre qu'il n'y a pas eu suffisamment d'avertissements. C'est le cas notamment de Betty Kennedy, dans son récit intéressant et par ailleurs très bien documenté sur la tragédie, qui dit au lecteur que l'avertissement était ‘‘timide'' et que certains l'ont décrit comme le ‘‘secret le mieux gardé en ville''. Or, il n'y a rien de plus faux. » (Knox, 1992)

Voici ce qu'a déclaré M. Thomas, le ministre de l'Agriculture de l'époque : « Sans aucun doute, ces pluies et ces inondations nous confirmeront qu'il est urgent de mettre en place des mesures plus importantes de prévention des inondations et d'ériger de petits barrages dans tous les secteurs désignés à risque ». (GM, 18 octobre 1954)

Vue aérienne de l’inondation

Selon le Major-général Frank F. Worthington, coordonnateur de la protection civile du Canada, des vies auraient pu être épargnées et des dégâts auraient pu être évités : « Chacun a fait de son mieux mais je ne peux m'empêcher de penser qu'il s'agit là d'un bilan désastreux et que tout cela n'aurait pas dû arriver.

« Si un quelconque organisme de protection civile bien entraîné et équipé avait existé, on aurait pu le mobiliser facilement et limiter les dégâts. » (GM, 18 octobre 1954)

Dans son évaluation de l'organisation des secours après l'ouragan Hazel, M. Worthington a salué le courage et l'ingéniosité des gens et des organismes; la rapidité et l'efficacité de la Croix Rouge, de l'Armée du Salut et d'autres organismes de secours, ainsi que l'ardeur à la tâche des responsables et employés municipaux. Il a critiqué le manque d'avertissements adéquats et l'absence de moyens mis en oeuvre pour faire respecter les avertissements qui ont été émis, le manque de préparation et le désordre dans la circulation automobile qui a duré plusieurs jours après l'inondation. Il a recommandé que soient immédiatement créées des unités de protection civile adéquatement entraînées et équipées, et que les municipalités recrutent et forment davantage de policiers. « La protection civile a fait l'objet de bien des discussions. Ce qui s'est produit lors de l'inondation se passe de tout commentaire ». (GM, 18 octobre 1954)

Le coût

Il est difficile d'évaluer le coût réel des dégâts causés par l'ouragan Hazel. En effet, tout dépend des coûts que l'on prend en considération et des évaluateurs. L'estimation la plus basse présentée dans le rapport de la commission royale d'enquête, comprenant le coût des dégâts aux effets personnels et aux meubles et le coût des dégâts structurels, était de 25 000 000 $. Si on tient compte, toutefois, des effets à long terme, ce coût atteint près de 100 000 000 $. La commission royale d'enquête a été convoquée quelques semaines seulement après la catastrophe. Son estimation n'est donc que partielle puisqu'elle ne tient pas compte des conséquences économiques à long terme de l'ouragan Hazel.

Le ministère fédéral de la Sécurité publique et de la Protection civile , qui a établi des estimations statistiques de catastrophes pour l'ensemble du Canada , a estimé le coût de l'ouragan Hazel à 1 031 643 000 $ en dollars actuels. Cette estimation tient compte des conséquences économiques à long terme, du coût des biens immobiliers perdus, des coûts de réinstallation et des coûts de remise en état , et donne une idée plus précise des effets réels de la tempête sur le sud de l'Ontario.

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