Modèle climatique : modèle du système terrestre de deuxième génération
Centre canadien de la modélisation et de l’analyse climatique
Le modèle canadien du système terrestre de deuxième génération (CanESM2) se compose du modèle océanique-océan couplé physique (MCCam4) couplé à un modèle du carbone terrestre (CTEM) et un modèle du carbone océanique (MCCO).
1. Traitement du CO2
On peut utiliser les composantes terrestres et océaniques du cycle du carbone de la version CanESM2 selon deux plans expérimentaux :
- un mode fondé sur les émissions, où la concentration atmosphérique de CO2 constitue un traceur tridimensionnel évoluant librement dans le modèle;
- un mode axé sur la concentration, où la concentration atmosphérique de CO2 est régie à l’externe.
Dans le mode fondé sur les émissions, les émissions anthropiques de CO2 sont précisées et, puisque les composantes interactives terrestres et océaniques du cycle du carbone simulent les flux atmosphère-terre et atmosphère-océan de CO2, respectivement, le modèle peut simuler l’évolution de la charge atmosphérique de CO2. Dans ce cas, le modèle simule le transport du CO2 dans la structure tridimensionnelle reproduisant l’atmosphère, un cycle annuel et la variabilité interannuelle. Dans le mode fondé sur les concentrations, comme les flux atmosphère-terre et atmosphère-océan de CO2 demeurent déterminés de façon interactive, les résultats du modèle peuvent servir à prévoir les émissions anthropiques de CO2, compatibles avec un cycle atmosphérique de CO2 donné à l’échelle mondiale. Dans le mode axé sur la concentration, une seule valeur scalaire de la concentration atmosphérique de CO2, qui peut être évolutive, est imposée à tous les emplacements géographiques et verticaux du modèle.
2. Composantes du cycle du carbone du CanESM2
Les composantes océaniques et terrestres du cycle du carbone dans le CanESM2 sont essentiellement les mêmes que dans le CanESM1 et sont représentées par le modèle canadien du carbone océanique (MCCO) (Christian et al., 2010, et autres références à cet égard) et le modèle canadien des écosystèmes terrestres (CTEM pour Canadian Terrestrial Ecosystem Model) (Arora et al., 2009; Arora et Boer, 2010), respectivement.
2.1. Le modèle canadien du carbone océanique (MCCO)
Le modèle canadien du carbone océanique (MCCO) englobe un module de chimie inorganique (pompe de solubilité) et un modèle écosystémique (pompe organique et pompe à carbonate) pour simuler les échanges de CO2 entre les océans et l’atmosphère (Zahariev et al., 2008). Le module de chimie inorganique est fondé sur des protocoles de la phase 2 de l’Ocean Carbon Model Intercomparison Project (OCMIP) dont les variables prévisionnelles sont le carbone inorganique dissous (CID) et l’alcalinité totale. La vitesse du piston (ou vélocité du transfert gazeux) est proportionnelle au carré de la vitesse du vent à 10 mètres et on ajuste l’ordonnée à l’origine pour conserver la vitesse moyenne globale du piston (Wanninkhof, 1992). Il n’y a aucun échange gazeux à travers la glace de mer.
Figure 1 : Structure de l’élément écosystémique du modèle canadien du carbone océanique (MCCO) fondé sur le modèle NPZD

Légende de la figure 1
- CO2 uptake
-
Absorption du CO2
- N uptake
-
Absorption du N
- Mortality
-
Mortalité
- Aggregation
-
Agrégation
- Grazing
-
Alimentation
- N2 fixation
-
Fixation du N2
- Zooplankton respiration
-
Respiration du zooplancton
- Remineralization
-
Reminéralisation
- Fecal pellets
-
Boulettes fécales
- Linear and quadratic
-
Linéaire et quadratique
- Mortality of zooplankton
-
Mortalité du zooplancton
- Base of euphotic zone
-
Base de la zone euphotique
- Sinking inorganic C
-
Dépôt de C inorganique
- Sinking organic C
-
Dépôt de C organique
L’élément écosystémique du MCCO (figure 1) est fondé sur le modèle NPZD de Denman et Peña (1999). La seule variable nutriments (N) représente implicitement le nitrate, l’ammonium et l’urée, y compris les apports découlant de la fixation d’azote en surface. La croissance de la population de phytoplancton (P) est limitée par la lumière, la température, l’azote et le fer. Le zooplancton (Z) se nourrit de phytoplancton, et le taux de mortalité est simulé en fonction des termes linéaire et quadratique incluant la prédation par des organismes de niveaux trophiques supérieurs non déterminés. La variable débris (D) englobe implicitement la matière organique dissoute, sédimentaire et en suspension, dont la vitesse de sédimentation est constante. Le terme commun du modèle est l’azote et l’effet biologique sur le carbone inorganique dissous (CID) est calculé en fonction d’un rapport C/N (Redfield) constant. La chlorophylle (Chl) est une variable prévisionnelle distincte fondée sur un rapport Chl/N variable. La croissance de la population de phytoplancton et la vitesse de reminéralisation dépendent de la température. Dans la photosynthèse, la limitation par le fer est appliquée au moyen d’une distribution à la surface océanique d’un facteur de limitation par le fer qui est calculé à partir d’estimations observationnelles mensuelles normalisées des concentrations climatologiques annuelles minimales de nitrate (Zahariev et al., 2008). Ce facteur repose sur l’hypothèse que la concentration de nitrate la plus faible observée pendant le cycle saisonnier est proportionnelle au degré de limitation par le fer. Pour une description plus détaillée de ces aspects et autres du MCCO, veuillez consulter le document de Zahariev et al. (2008).
2.2. Le modèle canadien des écosystèmes terrestres (CTEM)
L’échange terre-atmosphère de CO2 dans le CanESM2 est simulé à l’aide du modèle canadien des écosystèmes terrestres (CTEM; Arora, 2003; Arora et Boer, 2003, 2005) qui simule trois réservoirs de carbone dans la végétation vivante (feuilles, tiges et racines) et deux réservoirs de carbone dans la matière « morte » (litière et carbone organique du sol) pour neuf types fonctionnels de plantes (TFP) comme l’illustre la figure 2. On couple le CTEM avec le schéma canadien de surface terrestre (CLASS 2.7 pour Canadian Land Surface Scheme) (Verseghy, 1991; Verseghy et al., 1993) pour produire les flux d’énergie, d’eau et de CO2 à la surface terrestre. Le sous-module photosynthèse du CTEM est fondé sur le modèle biochimique de Farquhar et al. (1980) et Collatz et al. (1991, 1992). La version actuelle fait appel à une approche de photosynthèse dans une seule feuille avec couplage de la photosynthèse avec la conductance du couvert forestier fondée sur le déficit en pression de vapeur (Leuning, 1995). On utilise les sous-modules photosynthèse et respiration autotrophe et hétérotrophe du CTEM, décrits dans Arora (2003), pour calculer les productivités primaire et écosystémique nettes. La productivité primaire nette positive (PPN) est allouée aux feuilles, aux tiges et aux racines en fonction de la lumière, de l’eau dans les racines et de l’état phénologique des feuilles. Le sous-module phénologie du CTEM fait appel à une approche fondée sur le gain de carbone dans laquelle les feuilles commencent à apparaître lorsque c’est utile à la plante, sur le plan du carbone, de produire de nouvelles feuilles. La chute des feuilles commence lorsque les conditions environnementales sont défavorables, notamment lorsque les jours raccourcissent, les températures sont à la baisse et la teneur en eau du sol est faible (Arora et Boer, 2005). Dans le modèle de l’atmosphère, la photosynthèse s’accomplit au pas de temps de 20 minutes; le pas de temps de tous les autres sous-modules du CTEM est d’une journée.
Figure 2 : Structure du modèle canadien des écosystèmes terrestres (CTEM) et des neuf types fonctionnels de plantes pour lesquels tous les processus écosystémiques sont simulés

Légende de la figure 2
- Gross primary production
-
Production primaire brute
- Leaf litter production
-
Production de litière de feuilles
- Leaves
-
Feuilles
- Leaf maintenance and growth respiration
-
Respiration d’entretien et de croissance des feuilles
- Stem litter production
-
Production de litière de tiges
- Stem
-
Tige
- Stem allocation
-
Allocation aux tiges
- Root allocation
-
Allocation aux racines
- Stem maintenance and growth respiration
-
Respiration d’entretien et de croissance des tiges
- Soil C respiration
-
Respiration du C du sol
- Litter respiration
-
Respiration de la litière
- Litter pool
-
Réservoir de litière
- Litter humification
-
Humification de la litière
- Soil carbon
-
Carbone du sol
- Root mortality
-
Mortalité des racines
- Roots
-
Racines
- Root maintenance and growth respiration
-
Respiration d’entretien et de croissance des racines
- CTEM 1.0 Plant functional types
-
Types fonctionnels de plante du CTEM 1.0
- 1 Needleleaf evergreen
-
Conifères sempervirents
- 2 Needleleaf deciduous
-
Conifères à aiguilles caduques
- 3 Broadleaf evergreen
-
Sempervirents latifoliés
- 4 Broadleaf cold deciduous
-
Latifoliés à feuilles caduques en saison froide
- 5 Broadleaf dry deciduous
-
Latifoliés à feuilles caduques en saison sèche
- 6 C3 crop
-
Culture de type C3
- 7 C4 crop
-
Culture de type C4
- 8 C3 grass
-
Graminée de type C3
- 9 C4 grass
-
Graminée de type C4
L’allocation aux trois parties des végétaux (feuilles, tiges et racines), ainsi que les pertes dues à la décomposition et à la respiration donnent lieu à une variation de la biomasse dans le temps qui est représentée dans les attributs structuraux de la végétation utilisés dans les calculs des bilans énergétique et hydrique du schéma de surface terrestre (Arora et Boer, 2005). Le CTEM ne comprend pas de cycle de N ou de P et les effets de la limitation des nutriments sur la photosynthèse ne sont pas explicitement simulés.
2.2.1 Émissions dues au changement d’affectation des terres
Les émissions dues au changement d’affectation des terres (CAT) peuvent être désignées comme source externe ou simulées explicitement dans le CTEM en fonction de modifications précisées dans la couverture terrestre. Grâce à la simulation explicite des émissions dues au CAT, on s’assure que l’échange terre-atmosphère de CO2 net simulé concorde avec les modifications précisées dans la couverture terrestre.
Une augmentation de la superficie cultivée implique le remplacement de la végétation naturelle par des cultures (nous utilisons le terme déforestation). La biomasse déboisée est divisée en trois fractions représentant la quantité :
- de bois brûlé ou utilisé comme combustible sans temporisation;
- laissée comme rémanents ou utilisée pour les pâtes et papiers;
- utilisée pour les produits de bois durables. Les fractions affectées à ces trois utilisations dépendent de la densité de la biomasse de la végétation au-dessus du sol et du TFP ligneux ou herbacé (voir le tableau 1 dans Arora et al., 2009). La fraction affectée aux rémanents ou aux pâtes et papiers est transférée au réservoir de litière et la fraction allouée aux produits ligneux est affectée au réservoir de carbone du sol du modèle.
En plus de la fraction des terres cultivées d’une maille de la grille, on utilise un modèle de culture simple. Les cultures augmentent leur biomasse en fonction des conditions de l’environnement, et la récolte commence lorsque la température de l’air reste sous la barre des 8°C pendant cinq jours consécutifs ou lorsque l’indice foliaire de la culture atteint un certain seuil (3,5 m2/m2 pour les cultures C3 et 4,5 m2/m2 pour les cultures C4) signifiant que la culture est mûre (Arora et Boer, 2005). Les cultures sont récoltées sur une période de 15 jours et la biomasse récoltée contribue au réservoir de litière. La récolte garantit que la biomasse de la végétation ne continue pas de croître sur les terres cultivées à mesure que le CO2 augmente et empêche ainsi que les terres cultivées séquestrent du carbone au-dessus du sol comme le font les forêts. Lorsque les terres cultivées sont abandonnées, la couverture fractionnelle des autres TFP est augmentée. Comme résultat, la densité de la végétation est réduite et le carbone est séquestré jusqu’à ce qu’un nouvel équilibre soit atteint, fournissant un puits de carbone associé à la repousse lorsque les terres cultivées abandonnées retournent à l’état de végétation naturelle.
La biomasse perdue lors du CAT, de la croissance et de la récolte des cultures, de la repousse de la végétation sur les terres cultivées abandonnées, et de la décomposition du carbone dans le sol et de la litière des terres cultivées contribue aux émissions de carbone associées au CAT.
Références
Alcamo, J., R. Leemans, et E. Kreileman (1998). Global Change Scenarios of the 21st Century: Results From the IMAGE 2.1 Model, Elsevier, New York.
Arora, V. K. et al. (2009). The effect of terrestrial photosynthesis down-regulation on the 20th century carbon budget simulated with the CCCma Earth System Model, J. Clim., 22, 6066-6088.
Arora, V.K. (2003). Simulating energy and carbon fluxes over winter wheat using coupled land surface and terrestrial ecosystem models, Agricultural and Forest Meteorology, 118, 21-47.
Arora, V.K. et G.J. Boer (2003). A representation of variable root distribution in dynamic vegetation models, Earth Interactions, vol. 7, article 6, 19 p.
Arora, V.K. et G.J. Boer (2005). A parameterization of leaf phenology for the terrestrial ecosystem component of climate models, Global Change Biology, 11, 39-59.
Arora, V.K. et G.J. Boer (2010). Uncertainties in the 20th century carbon budget associated with land use change, Global Change Biology, 16(12), 3327.3348.
Christian, J. R. et al. (2010). The global carbon cycle in the CCCma earth system model CanESM1: preindustrial control simulation, J. Geophy. Res. (Biogeosciences), 115, G03014, doi:10.1029/2008JG000920.
Collatz, G. J., J. T. Ball, C. Grivet, et J. A. Berry (1991). Physiological and environmental regulation of stomatal conductance, photosynthesis, and transpiration: a model that includes a laminar boundary layer. Agricultural and Forest Meteorology, 54, 107-136.
Collatz, G. J., M. Ribas-Carbo, et J. A. Berry (1992) Coupled photosynthesis-stomatal conductance model for leaves of C4 plants. Aust. J. Plant Physiol., 19, 519-538.
Denman, K., et A. Peña (1999). A coupled 1-D biological/physical model of the northeast subarctic Pacific Ocean with iron limitation, Deep-Sea Res. II, 46, 2877-2908.
Farquhar, G.D., S. von Caemmere, et J.A. Berry (1980). A biochemical model of photosynthetic CO2 assimilation in leaves of C3 species. Planta, 149, 78-90.
Houghton, R. A., et J. L. Hackler (2002). Carbon flux to the atmosphere from land-use changes. Dans : Trends. CDIAC, ORNL, Oak Ridge.
Khairoutdinov, M. et Y. Kogan (2000). A new cloud physics parameterization in a large-eddy simulation model of marine stratocumulus, Mon. Wea. Rev., 128, 229-243.
Large W.G., G. Danabasoglu, J.C. McWilliams, P.R. Gent et F.O. Bryan (2001) Equatorial circulation of a global ocean climate model with aniostropic horizontal viscosity, J. Phys. Oceanogr., 31, 518-536.
Large, W.G., J.C. McWilliams, et S.C. Doney (1994). Oceanic vertical mixing: A review and a model with a vertical K-profile boundary layer parameterization, Rev Geophys., 363-403.
Leuning, R. (1995). A critical appraisal of a combined stomatal-photosynthesis model for C3 plants. Plant, Cell and Environment, 18, 339-355.
Li, J. and H. W. Barker (2005). A radiation algorithm with correlated k-distribution. Part I: local thermal equilibrium, Journal of Atmospheric Science, 62, 286-309.
Ma, X., von Salzen, K., et Cole, J. (2010). Constraints on interactions between aerosols and clouds on a global scale from a combination of MODIS-CERES satellite data and climate simulations, Atmos. Chem. Phys., 10, 9851-9861, doi:10.5194/acp-10-9851-2010.
Ramankutty, N., et J. A. Foley (1999). Estimating historical changes in global land cover: Croplands from 1700 to 1992, Global Biogeochem.Cycles, 13, 997‑1027.
Scinocca, J. S., et N. A. McFarlane (2000). The parameterization of drag induced by stratified flow over anisotropic orography, Q. J. R. Meteorol. Soc., 126, 2353-2393.
Scinocca, J. S., N.A. McFarlane, M. Lazare, J. Li, et D. Plummer (2008). The CCCma third-generation AGCM and its extension into the middle atmosphere. Atmos. Chem. Phys., 8, 7055‑7074.
Verseghy, D. (1991). CLASS -- A Canadian land surface scheme for GCMs, I, Soil Model, Int. J. Climatol., 11, 111-133.
Verseghy, D., N.A. McFarlane, et M. Lazare (1993). CLASS -- A Canadian land surface scheme for GCMs, II, Vegetation model and coupled runs, Int. J. Climatol., 13, 347-370.
von Salzen, K., N. A. McFarlane, et M. Lazare (2005). The role of shallow convection in the water and energy cycles of the atmosphere, Clim. Dyn., 25, 671-688.
Wang, A., D. Price, et V. Arora (2006). Estimating changes in global vegetation cover (1850-2100) for use in climate models, Global Biogeochemical Cycles, 20, GB3028, 10.1029/2005GB002514.
Wanninkhof, R. (1992). Relationship between wind speed and gas exchange over the ocean, J. Geophys. Res., 97, 7373‑7382.
Zahariev, K., J.R. Christian, et K.L. Denman (2008). Preindustrial, historical, and fertilization simulations using a global ocean carbon model with new paramétrage of iron limitation, calcification, and N2 fixation. Prog. Oceanogr., 77, 56-82.
Détails de la page
- Date de modification :