Première expédition entièrement canadienne dans l’Antarctique
Profil d’Alexandra (Sandy) Steffen et Geoff Stupple
Première expédition entièrement canadienne dans l’Antarctique

Sandy Steffen et Geoff Stupple, deux scientifiques spécialistes de la pollution dans l’atmosphère, ont participé à la première expédition scientifique et marine en Antarctique dirigée par le Canada. Cette mission sans précédent s’est déroulée en février et mars 2025 à bord du navire canadien de Sa Majesté (NCSM) Margaret Brooke, avec à bord quinze scientifiques canadiens. Leur objectif était de documenter les effets des changements climatiques, le recul des glaciers, la répartition des espèces, les courants océaniques, la pollution par le mercure, les polluants organiques persistants et les microplastiques.
« Cette expérience a été fascinante à bien des égards! » exprime Sandy. « Nos tâches étaient nombreuses : la plupart étaient reliées à notre expertise sur le mercure, mais nous voulions aussi récolter des échantillons utiles aux projets scientifiques sur les contaminants de nos collègues. »
Nous menons notre programme de recherche sur le mercure dans l’air depuis 30 ans. Nous avons le plus long enregistrement de mercure dans l'atmosphère au monde.
Sandy dirige le programme sur l’étude du mercure dans l’atmosphère depuis 22 ans et Geoff célèbre son 10e anniversaire avec l’équipe, une expérience commune hors pair. Ils passent la majorité de leur année à réaliser des études similaires en Arctique. Leur récente mission près des îles Shetland du Sud permettra de mieux comprendre les défis environnementaux de l’Antarctique et leur lien avec l’Arctique canadien. Les changements dans les régions polaires s’opèrent plus rapidement qu’ailleurs sur le globe, il est donc nécessaire d’étudier les conditions en Arctique et en Antarctique afin de trouver des solutions.

Comprendre la santé de la planète
Durant deux semaines, Sandy et Geoff ont prélevé des échantillons d’air, d’eau, de neige, de sédiments et de zooplancton pour détecter la présence de différents polluants. « Une partie de nos travaux consistait à tenter de comprendre l’impact de la fonte du glacier sur la distribution de contaminants », précise Sandy. « Nos collègues ont également prélevé des sédiments pour nous aider à localiser ces substances dans l’écosystème. Nous avons recueilli du zooplancton océanique pour déterminer la présence de mercure et de microplastiques. »
La majorité des échantillons ont été ramenés au Canada, mais pour leur étude atmosphérique, des instruments recueillaient en temps réel le mercure dans l’air à bord du navire. « Nous avons constaté que les concentrations de mercure dans cette région du sud sont inférieures d’environ 30 % à celles que nous avons trouvées dans le Nord », raconte Geoff. « La raison principale de cette différence est que l’activité industrielle est plus intense dans l’atmosphère du Nord comparativement à celle du Sud. »

Les deux scientifiques ont prélevé des échantillons d’eau à proximité des divers glaciers sur leur trajet. Les glaciers sont d’excellents réservoirs : l’équipe a donc pu prélever les polluants provenant de l’atmosphère qui ont pénétré dans ces glaciers et qui y sont restés figés dans le temps. La fonte des glaciers libère ainsi ces contaminants. « Nous essayons de voir dans l’eau de fonte si les contaminants apparaissent et se rendent éventuellement dans l’océan par ce moyen », souligne Sandy.
Les nouvelles données recueillies seront cruciales pour comprendre la dynamique des contaminants dans l’atmosphère et les courants marins. Sandy ajoute que : « Les microplastiques ne sont pas encore très bien compris dans le monde, et nous ne connaissons pas encore toutes leurs répercussions. Dans l’Antarctique, nous cherchions à déterminer leur présence dans l’environnement, car ils ne sont pas censés s’y trouver. Nous étudions comment ils arrivent dans l’environnement et quels types de microplastiques s’y trouvent. »
Une expérience sans précédent
Sandy et Geoff ont vécu des péripéties surprenantes, car ce n’est pas tous les jours qu’ils ont la chance de voyager à bord d’un tel navire conçu pour les opérations dans les régions polaires et les climats extrêmes. « Je ne m’attendais pas à ce qu’il y ait autant de vent, s’exclame Sandy. Il tournait en un clin d’œil et nous passions de 10 à 40 nœuds en l’espace d’une demi-heure! »
Cette situation augmentait le niveau de défi pour Geoff, responsable de recueillir les échantillons sur la côte à bord d’un zodiac, et ce, même dans une météo tumultueuse. Heureusement, le tout s’est déroulé sans heurt et ils n’en garderont que d’heureux souvenirs.
Geoff s’occupait de la majorité des échantillons sur la côte, car il était chargé de diriger l’échantillonnage de la neige. Je m’occupais de l’échantillonnage de l’eau effectué à bord de petits bateaux.
Des projets d’avenir prometteurs
De retour au pays, Sandy et Geoff en ont beaucoup sur la planche. Ils collaboreront avec d’autres scientifiques d’ECCC pour comprendre le cycle des contaminants dans cet environnement. Des collègues du Ministère vont analyser leurs échantillons d'eau, de neige et de zooplancton afin de voir jusqu'où les polluants se déplacent dans les régions les plus reculées.
Leur mission en Antarctique a aussi pavé la voie pour des travaux futurs et de nouvelles collaborations régionales avec d’autres équipes de recherche. « Nous avons visité des stations d'autres pays en Antarctique », ajoutent-ils. « Une partie du travail que nous avions planifié était l’installation d’échantillonneurs pour la mesure de mercure et des composés organiques persistants dans l’air sur une année. Nous avons rencontré des scientifiques dans leurs centres de recherche et nous avons collaboré pour l’installation de ces échantillonneurs. »
La majorité de leur travail futur se déroulera en Arctique. En juin, Geoff se rendra en mission à Alert, au Nunavut, à la station du Canada la plus au nord, afin de poursuivre ses recherches pour comprendre comment les mouvements des contaminants évoluent avec les changements climatiques. Geoff conclut : « Nous sommes des chercheurs de l'Arctique qui souhaitons tirer des enseignements des chercheurs de l'Antarctique, et ainsi comprendre ce qui différencie ces deux régions opposées. »