Perspectives Octobre 2016, Vol.2, No. 2

Vol. 2, No 2 • Octobre 2016

Bruno Hamel, PrésidentJ’ai le plaisir de vous présenter la nouvelle édition de Perspectives, le bulletin du Comité externe d’examen des griefs militaires destiné aux cadres supérieurs des Forces armées canadiennes (FAC).

Le bulletin Perspectives vise à sensibiliser les décideurs à l’égard des grandes questions et des tendances qui retiennent l’attention du Comité lorsqu’il examine des griefs, dans l’espoir que cela contribuera à améliorer la compréhension de certains sujets. Depuis que ce bulletin a été créé en 2008, le Comité a fait part de plusieurs de ces questions aux décideurs des FAC. Le Comité est satisfait lorsqu’il constate que sa contribution porte des fruits et qu’il aide à un règlement rapide des problèmes dans l’intérêt des militaires et de l’institution dans son ensemble.

À propos du Comité

Le Comité externe d’examen des griefs militaires est un organisme fédéral indépendant du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes (FAC). Le Comité examine les griefs militaires qui lui sont renvoyés par le chef d’état- major de la Défense (CEMD) et rend, en temps opportun et de manière équitable, des conclusions et recommandations au CEMD et au plaignant ou à la plaignante. En remplissant son mandat, le Comité renforce la confiance des militaires dans la procédure de règlement des griefs des FAC et en accroît l’équité et la transparence.

Dans la présente édition, le Comité expose des cas liés à la désignation d’un « plus proche parent » par un militaire pour avoir droit à certains avantages sociaux. Malheureusement, plusieurs militaires se sont vu refuser l’octroi d’avantages sociaux, soit parce qu’ils ont mal compris les politiques applicables ou parce que celles-ci sont interprétées de manière exagérément restrictive. Grâce aux exemples de cas donnés, le Comité espère clarifier ces malendentus.

Dans les pages suivantes, il est aussi question de cas où des militaires sont obligés, pendant qu’ils suivent une formation obligatoire, de payer pour un logement à deux endroits différents (leur résidence principale et un logement à la base où se déroule la formation). Ce problème a déjà été communiqué à l’autorité de dernière instance qui a déjà souscrit à la recommandation du Comité d’avoir recours à une politique existante pour réduire le fardeau financier qui accable les militaires concernés.

Le Comité espère que ce nouveau numéro sera aussi utile et instructif que ceux qui l’ont précédé. Vous trouverez tous les numéros de Perspectives sur notre site Web (www.ceegm-mgerc.gc.ca). Nous souhaitons obtenir vos commentaires que vous pouvez faire parvenir par courriel (najwa.asmar@mgerc-ceegm.gc.ca) ou par téléphone (613-996-8529, numéro sans frais : 1-877-276-4193).

Signature de Bruno Hamel
Bruno Hamel

Président et premier dirigeant

Désignation d’un plus proche parent

Au cours des années passées, le Comité a reçu un certain nombre de griefs portant sur la question de la désignation d’un « plus proche parent » (PPP) par les militaires. Étant donné qu’une désignation d’un PPP qui ne respecte pas les règles en place peut entraîner le refus d’accorder certains avantages sociaux, le Comité souhaite présenter les observations et exemples suivants à la chaîne de commandement.

PRESTATION POUR DÉPLACEMENT DU PLUS PROCHE PARENT

Parmi les avantages sociaux réclamés par les militaires relativement à leur PPP, le plus courant est la prestation pour déplacement du plus proche parent (PDPPP). La politique à ce sujet se trouve à l’article 211.07 des Directives sur la rémunération et les avantages sociaux (DRAS). Voici le texte de cet article :

211.07 – Prestation pour déplacement du plus proche parent

211.07(1) (But) La prestation pour déplacement du plus proche parent a pour but de rembourser les frais de déplacement et de séjour de ses plus proches parents et de leurs accompagnateurs à un militaire malade ou blessé.

211.07(2) (Définitions)
Les défi suivantes s’appliquent à la présente directive :


accompagnateur
signifie une personne qui, à l’égard d’un proche parent, satisfait aux exigences des alinéas (3)(a) ou (b) de l’article 209.02 (Droits – plus proche parent) des [Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes] ORFC.
frais de déplacement et de séjour
s’entend au sens de l’article 209.01 (Définitions et interprétation) des ORFC.
PDPPP
signifie le paiement ou remboursement des frais de déplacement et de séjour des plus proches parents et de leurs accompagnateurs d’un membre malade ou blessé.
plus proche parent
s’entend au sens de l’article 1.02 (Définitions) des ORFC.

211.07(3) (Droit) Un militaire a droit à la PDPPP si toutes les conditions suivantes sont réunies :

  1. un médecin militaire est de l’opinion que,
    1. le militaire a une déficience sérieuse ou invalidante, ou qui peut être mortelle
    2. la présence du plus proche parent du militaire est immédiatement nécessaire à l’emplacement du militaire;
  2. le chef d’état-major de la défense – ou un officier désigné par le chef d’état-major de la défense – détermine qu’il n’y a aucune raison opérationnelle ou de sécurité qui empêche le plus proche parent – et un accompagnateur, selon le cas – d’être à l’emplacement du militaire; et
  3. le plus proche parent – et un accompagnateur, selon le cas – voyage à l’emplacement du militaire.

211.07(4) (Nombre de personnes) La PDPPP est autorisée pour un maximum de quatre personnes, y compris des accompagnateurs.

211.07(5) (Déplacement – Durée) La PDPPP est autorisée pour un maximum de 120 jours en ce qui concerne le nombre total de personnes qui voyagent et ainsi divisé entre les personnes par le militaire, si le militaire est apte, ou par le premier PPP adulte, si le militaire est inapte. Le chef d’état-major de la défense peut autoriser une période additionnelle de déplacement maximale de 180 jours pour une personne si, de l’avis du médecin militaire, la présence du PPP est requise.

([Conseil du Trésor] CT, en vigueur le 7 juin 2012)

L’article 1.02 des ORFC définit le terme « plus proche parent » comme une personne désignée expressément à cet effet dans un formulaire approuvé à cette fin :

« plus proches parents »

s’agissant d’un officier ou militaire du rang, personnes qu’il désigne à ce titre, par ordre de préférence, sur le formulaire approuvé à cette fin par le chef d’état-major de la défense;

L’interprétation courante faite par les FAC des articles précités des DRAS et des ORFC est que la politique est précise quant à la question de savoir qui peut être remboursé pour un déplacement : un militaire peut seulement être remboursé pour les frais de déplacement d’une personne désignée comme son PPP sur le formulaire 2587 du ministère de la Défense nationale (MDN). Malheureusement, de nombreux militaires oublient de mettre à jour régulièrement le formulaire en question ou croient qu’il y a une limite au nombre de personnes qu’ils peuvent désigner comme PPP. Ceci peut les empêcher de toucher la PDPPP.

Par exemple, dans un dossier récent, la plaignante a subi une chirurgie en raison d’un problème de santé qui mettait sa vie en danger. Plus tard, elle a présenté une demande de remboursement pour les frais de déplacement de sa mère dans le cadre de la PDPPP. La demande concernait quatre voyages que sa mère avait effectués pour être auprès de sa fille durant sa convalescence après la chirurgie. La demande a été rejetée car le nom de la mère n’était pas inscrit sur le formulaire 2587. La plaignante a expliqué que sa mère, qui était aussi militaire, changeait souvent d’adresse en raison de ses affectations. Pour cette raison la plaignante avait décidé d’inscrire le nom de son père sur le formulaire parce qu’il avait une adresse stable.

La plaignante a aussi fait valoir qu’elle ne savait pas qu’elle avait le droit d’inscrire plusieurs membres de sa famille comme ses PPP sur le formulaire du MDN. Malheureusement, tel que nous l’avons mentionné précédemment, la politique applicable prévoit expressément qu’un militaire ne peut être remboursé que pour les frais de déplacement d’une personne qui est désignée comme son PPP sur le formulaire 2587 du MDN. Le Comité a recommandé de rejeter le grief mais a noté que la plaignante n’avait pas à s’empêcher d’inscrire le nom de sa mère comme PPP. Étant donné que l’article 1.02 des ORFC définit « plus proches parents » comme des « personnes qu’il (elle) [le ou la militaire concerné (e)] désigne à ce titre, par ordre de préférence », la plaignante aurait pu tout simplement ajouter le nom de sa mère au bas de la liste. Ainsi, cette dernière n’aurait pas été le PPP principal, mais l’inscription de son nom aurait permis à la plaignante de toucher la PDPPP pour les déplacements de sa mère.

ERREURS COMMISES LORS DE LA MISE À JOUR DU FORMULAIRE DE DÉSIGNATION DES PPP

En ce qui concerne le formulaire 2578 du MDN, le chef d’état-major de la Défense (CEMD) a fait preuve de souplesse dans l’interprétation de ce qui lui semble acceptable comme étant une mise à jour du formulaire, conformément à la définition contenue dans la politique applicable. En effet, le CEMD a accepté l’intention indiquée dans un document manuscrit d’ajouter des noms à un formulaire de désignation des PPP comme étant une démarche suffisante pour désigner des PPP. Par exemple, dans un dossier récent, le frère du plaignant, qui était lui aussi militaire, avait rempli à la main le formulaire 2587 du MDN afin d’ajouter les noms de son père, de sa mère, du plaignant et d’un autre frère. Le commis-chef (CC) a plus tard admis qu’en raison d’un manque de temps et d’expérience, le formulaire n’avait pas été vérifié et les modifications apportées n’avaient pas été inscrites dans le système prévu à cet égard. De façon tragique, le frère du plaignant est mort peu de temps après et les FAC ont refusé d’accorder la PDPPP à sa famille étant donné que le formulaire n’avait pas été rempli adéquatement. Comme le CC a confirmé qu’elle était responsable de vérifier si le formulaire avait été correctement rempli, une fois déposé, et qu’elle a pu attester que les modifications manuscrites avaient été faites intentionnellement par le frère du plaignant juste avant son décès, le Comité a conclu que la liste manuscrite des noms des PPP devait être acceptée comme telle. Le Comité a estimé que les erreurs commises n’étaient pas suffisantes pour invalider la liste, laquelle représentait la volonté du frère du plaignant avant sa mort. Le CEMD s’est dit du même avis que le Comité et a reconnu que le plaignant et sa famille étaient des PPP du défunt pour les besoins de la PDPPP.

Le Comité a aussi constaté que la politique exigeait que les militaires révisent le formulaire relatif aux PPP tous les douze mois, et que les formulaires non révisés annuellement étaient considérés comme invalides par les FAC. Le Comité a conclu que cela était tout à fait déraisonnable. Un formulaire ne devrait pas être invalidé simplement parce qu’il n’a pas fait l’objet d’une révision dans la dernière année. Une telle situation est semblable à ce qui pourrait arriver en matière de testament. Bien que la politique des FAC oblige les militaires à réviser leur testament une fois par année, la validité du dernier testament ne sera pas remise en question si une telle révision n’a pas eu lieu dans le délai prescrit. La mise à jour du formulaire de désignation des PPP est un simple acte administratif destiné à veiller à ce que le document en question soit le plus à jour possible et ne devrait pas être utilisée comme fondement pour retirer à un militaire son droit à une PDPPP. Le Comité a recommandé (et le CEMD a souscrit à cette recommandation) que toutes les demandes de PDPPP, rejetées sous prétexte que le formulaire en question n’avait pas été révisé dans la dernière année, soient étudiées de nouveau en appliquant les règles appropriées.

CONFUSION AU SUJET DU DROIT À UNE AIDE AU DÉPLACEMENT EN CONGÉ

Enfin, le Comité a reçu un certain nombre de dossiers dans lesquels les militaires croyaient, à tort, que leur droit à l’aide au déplacement en congé (ADC) était lié à la liste des PPP qu’ils avaient inscrits sur le formulaire 2587.

Le droit à l’ADC est prévu dans l’article 209.50 des DRAS dont voici le texte (p. 37-38) :

209.50(1) (But) L’aide au déplacement en congé vise à rembourser certains frais de déplacement encourus par les militaires des Forces canadiennes durant leur congé afin de rencontrer un membre de leur famille.

209.50(2) (Définitions) Les définitions suivantes s’appliquent à la présente directive :

[...]

« membre de la famille » signifie :

  1. une personne à charge;
  2. dans le cas d’un militaire sans personne à charge, l’enfant d’un militaire, incluant un beau-fils, une belle-fille, un enfant en tutelle, un enfant adopté ou un enfant adopté en vertu d’une pratique canadienne d’adoption selon les coutumes autochtones;
  3. dans le cas d’un militaire sans personne à charge ni enfant, le père ou la mère de celui-ci incluant la personne qui a agi, avant son enrôlement et à l’égard de ce dernier, à titre de père ou de mère;
  4. dans le cas d’un militaire n’ayant ni personne à charge, ni enfant, ni parents, le frère, le demi-frère, la sœur ou la demi-sœur du militaire.

Dans un dossier examiné par le Comité, le plaignant, qui était célibataire et n’avait pas d’enfant à l’époque, avait envoyé à son commandant une note de service intitulée « Demande de modification du plus proche parent pour les besoins de l’aide au déplacement en congé ». Dans la note de service, le plaignant avait expliqué que sa mère avait vendu sa maison et acheté un véhicule récréatif dans l’intention de voyager aux États-Unis durant une période indéterminée. Sa mère n’ayant plus d’adresse fixe, mais juste une boîte postale, le plaignant a estimé que cela risquait de lui causer des difficultés lorsqu’il voudrait avoir recours à l’ADC. Il a donc demandé d’inscrire sa sœur comme son PPP pour les besoins de l’ADC. Lorsque le plaignant est allé rendre visite à sa sœur, sa demande d’ADC a été refusée parce que sa mère était toujours vivante.

Malheureusement, selon le paragraphe 209.50(2) des DRAS, le plaignant n’était pas admissible à l’ADC et ne pouvait pas substituer sa sœur à un parent vivant. La visite chez sa sœur ne pouvait pas faire l’objet d’une ADC. En effet, le paragraphe 209.50(2) des DRAS définit clairement ce que signifie « membre de la famille » et le membre de la famille en question ne correspond pas nécessairement à un des PPP énumérés dans le formulaire 2587. Il est donc important que les militaires comprennent qu’un « membre de la famille » pour les besoins de l’ADC est défini dans les DRAS et n’a pas de lien avec les PPP inscrits dans le formulaire 2587.

Affectation sans droit de déménagementFootnote 1 lors d’une formation obligatoire

Le Comité continue de recevoir des griefs dans lesquels les militaires contestent le fait d’avoir été obligés de payer pour un logement dans deux endroits différents pendant qu’ils suivaient une formation obligatoire. Dans ces dossiers, les militaires (surtout des recrues) obtiennent une affectation sans droit de déménagement dans le cadre d’une formation professionnelle obligatoire; ils n’ont donc pas le droit de déménager leurs articles de ménage et effets personnels (AM et EP). Un grand nombre d’entre eux doivent demeurer à la base durant leur formation et payer pour un logement pour célibataires (LC) alors qu’ils conservent une résidence principale ailleurs. Dans la plupart des cas, ces militaires n’ont pas droit à des frais d’absence du foyer (FAF), car ils ne satisfont pas aux conditions de l’article 208.997 des Directives sur la rémunération et les avantages sociaux (DRAS). Cela leur cause des difficultés financières.

Le Comité a noté qu’il existait une politique qui pourrait (et devrait) être utilisée, dans certains dossiers, afin d’alléger ce fardeau financier. En effet, la directive sur les logements du ministère de la Défense nationale (MDN) (dont la dernière modification remonte au 31 juillet 2008) prévoit ce qui suit :

Les présentes directives apportent des précisions quant à la [Directive et ordonnance administrative de la Défense] DOAD 5024-0 Logement du MDN et s’appliquent à tous les logements résidentiels, d’instruction et provisoire du MDN [...].

[…]

13.2 […]

Les quartiers du MDN pourront être offerts sans frais à un occupant :

  • qui suit des cours […] en appui aux FC si le N1 l’autorise;
  • […]
  • qui est un militaire ou un employé civil devant occuper temporairement les quartiers du MDN pour des raisons de service sous réserve de l’approbation du commandant de la base ou de l’escadre, de l’unité ou de l’élément;
  • [...].

De plus, l’article 208.52 (Remise des frais lorsque le logement pour célibataires, les vivres, le logement familial ou le stationnement résidentiel couvert sont fournis) des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC) prévoit que :

Dans des circonstances exceptionnelles, les frais prévus aux articles 208.50 (Déductions lorsque le logement pour célibataires et le stationnement résidentiel couvert sont fournis) […] peuvent faire l’objet d’une remise entière ou partielle, conformément aux ordres émanant du chef d’état-major de la défense.

Le Comité a examiné en profondeur des dossiers similaires et est d’avis qu’en aucun cas un militaire ne devrait être dans l’obligation de payer pour deux logements si les FAC lui ordonnent de participer à une formation professionnelle obligatoire à un autre endroit sans lui donner le droit d’y déménager ses AM et EP. À l’instar du Comité, l’autorité de dernière instance (ADI) a convenu qu’il y avait une lacune dans la politique applicable et a demandé en 2015 au directeur général – Rémunération et avantages sociaux de se pencher sur cette question avec les autorités responsables.

Pendant ce temps, le Comité continue de recevoir des griefs à ce sujet et recommande à l’ADI de faire en sorte que les FAC procèdent à une remise des frais relatifs au logement pour célibataires, conformément à l’article 208.52 des ORFC et à la directive sur les logements du MDN. Le Comité reste confiant que l’ADI continuera d’agir dans le sens de ses recommandations.

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