Rapport du comité d'examen de la rémunération des juges militaires 2012

Le 28 septembre 2012

L’ Honorable Peter MacKayMinistre de la Défense nationale Quartier général de la Défense nationale Édifice Mgén George R. Pearkes 101, promenade Colonel By Ottawa (Ontario) Canada K1A 0K2

Cher Ministre MacKay,

En vertu de l'article 165.22 de la Loi sur la défense nationale del'article 204.23 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux forces canadiennes, il me fait plaisir de vous soumettre le quatrième rapport du Comité d'examen de la rémunération des juges militaires.

Sincèrement,

Constance Glube, Présidente


RERMERCIEMENTS

Les membres du Comité d’examen de la rémunération des juges militaires souhaitent exprimer leur sincère gratitude envers tous ceux qui ont contribué à la production du présent rapport. Nous sommes particulièrement reconnaissants envers Me Chantal Châtelain, conseiller juridique des juges militaires, et Me Catherine A. Lawrence, conseiller juridique du gouvernement du Canada, de leur coopération et de leur contribution opportune et très utile. Nous souhaitons également remercier Me Guy Régimbald pour son excellent travail en tant qu’organisateur et administrateur du Comité. Leur coopération et leur aide ont été d’une valeur inestimable pour le Comité.

Enfin, nous aimerions noter que suite à l’avis public du Comité, un individu a demandé le statut d’intervenant. La demande fut refusée par la Comité puisque l’individu n’était pas directement concerné par les questions que le Comité était appelé à trancher. L’individu demandait en outre que ses frais juridiques soient remboursés et le Comité n’avait pas la discrétion de lui accorder cette demande pour frais.

L’ HON. CONSTANCE GLUBE, OC, ONS 28 Septembre, 2012PRÉSIDENTE

L’ HON. MICHEL BASTARACHE, CC

NORMAN W. STERLING, QC


Rapport du Comité d'examen de la rémunération des juges militaires

Introduction et description du mandat

Le Comité a été établi le 6 février 2012. Son mandat, en vertu de l'article 165.22 de la Loi sur la défense nationale (la « LDN ») et del'article 204.23 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux forces canadiennes(les « ORFC »), est de s’enquérir du caractère adéquat de la rémunération des juges militaires.

Le présent rapport est le quatrième depuis l’établissement en 1998 du processus indépendant pour la détermination de la rémunération des juges militaires. La Cour suprême du Canada a réaffirmé l’importance des commissions et comités créés dans la foulée du Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale (Î.-P.-É.), [1997] 3 R.C.S. dans sa décision de 2005 dans l’affaire Bodner c. Alberta, [2005] 2 R.C.S. 286 où, au paragraphe 4, elle a prononcé ce qui suit : « On a qualifié l’indépendance de la magistrature d’« élément vital du caractère constitutionnel des sociétés démocratiques » (Beauregard, p. 70) qui « existe au profit de la personne jugée et non des juges » (Ell, par. 29). « L’indépendance est essentielle en raison du rôle des juges en tant que protecteurs de la Constitution et des valeurs fondamentales qui s’y trouvent, notamment la primauté du droit, la justice fondamentale, l’égalité et la préservation du processus démocratique (Beauregard, p. 70) ».

L’indépendance de la magistrature est une condition essentielle de la fonction de juge.

Il importe de noter que le processus formel pour la détermination de la rémunération des juges est un impératif constitutionnel et qu’il constitue un outil important pour réaliser l’indépendance de la magistrature. Le mandat du Comité n’est pas simplement de fournir des conseils à l’égard de la rémunération; on lui demande de proposer une rémunération adéquate que le gouvernement doit accepter à moins qu’il puisse en justifier le rejet, car le but même du Comité est « de dépolitiser le mécanisme d’examen de la rémunération et d’éviter un affrontement entre les gouvernements et la magistrature ».

Dans l’affaire Bodner, précitée, la Cour suprême a expliqué les limites qui pèsent sur la capacité du gouvernement de réagir aux recommandations du Comité dans les termes suivants :

  1. « Selon le Renvoi, le gouvernement qui décide de ne pas suivre les recommandations de la commission est tenu d’y répondre. Ce sont les incertitudes au sujet de la nature et de l’étendue des réponses des gouvernements qui sont à l’origine du présent litige. Sauf dispositions législatives contraires, la détermination de la rémunération des juges relève des gouvernements. Ce pouvoir n’est toutefois pas absolu.
  2. Il convient d’accorder du poids aux recommandations de la commission. Elles doivent être examinées par la magistrature et le gouvernement. La réponse du gouvernement doit être complète et porter sur les recommandations elles-mêmes et non pas simplement sur les positions exposées devant la commission que celle-ci a, pour l’essentiel, déjà abordées. À cette étape, ce sont les recommandations qui importent.
  3. La réponse doit être adaptée aux recommandations de la commission et être « légitime » (Renvoi, par. 180-183), ce qu’exigent le droit, l’obligation d’agir honorablement et le respect du mécanisme d’examen. Le gouvernement doit répondre aux recommandations de la commission et justifier par des motifs légitimes sa décision de les modifier ou de ne pas les suivre.
  4. Le gouvernement peut rejeter ou modifier les recommandations de la commission, à condition de fournir des motifs légitimes. Les motifs qui respectent la norme de la rationalité sont ceux qui sont complets et qui traitent les recommandations de la commission de façon concrète. Les motifs sont légitimes s’ils sont conciliables avec la common law et la Constitution. Le gouvernement doit aborder de bonne foi les questions en jeu. De simples déclarations rejetant ou désapprouvant les recommandations ne suffisent pas. Au contraire, les motifs doivent révéler que les recommandations ont été prises en compte et ils doivent être fondés sur des faits et un raisonnement solide. Ils doivent indiquer à quels égards et dans quelle mesure le gouvernement s’écarte des recommandations et indiquer les raisons du rejet ou de la modification. Ils doivent démontrer qu’on a procédé à un examen des fonctions judiciaires et qu’on a l’intention de prendre les mesures qui s’imposent. Ils ne doivent pas donner à penser qu’on cherche à manipuler la magistrature. Les motifs doivent refléter l’intérêt du public à ce qu’il y ait recours à une commission, mécanisme qui garantit la dépolitisation de l’examen de la rémunération et permet de préserver l’indépendance de la magistrature.
  5. Les motifs doivent également reposer sur des faits raisonnables. Si l’importance accordée aux facteurs pertinents varie, cette variation doit être justifiée. Il est légitime de procéder à des comparaisons avec les salaires offerts dans le secteur public ou dans le secteur privé, mais il faut expliquer l’emploi d’un facteur de comparaison donné. Si un fait ou circonstance nouveau se produit après la publication du rapport de la commission, le gouvernement peut l’invoquer dans ces motifs pour modifier les recommandations de la commission. Il lui est également loisible d’analyser l’incidence des recommandations et de s’assurer de l’exactitude des renseignements contenus dans le rapport de la commission.
  6. Le gouvernement doit, dans sa réponse, énoncer clairement et complètement les motifs qui l’amènent à s’écarter des recommandations de la commission ainsi que le fondement factuel de ces motifs. S’il est tenu d’expliquer sa décision devant une cour de justice, il ne peut invoquer d’autres motifs que ceux mentionnés dans sa réponse, mais il lui est possible de fournir d’autres renseignements plus détaillés sur le fondement factuel sur lequel il s’est appuyé, comme nous allons l’expliquer plus loin. »

Au paragraphe 84 de leurs soumissions, les juges militaires ont critiqué la réponse du gouvernement aux recommandations du Comité précédent et ont exhorté le présent Comité « à formuler des recommandations claires et amplement motivées » afin de prévenir une réponse incompatible avec les obligations du gouvernement qu’on vient de citer. Au paragraphe 26 de leur Réplique, les juges militaires soutiennent que la situation actuelle serait d’autant plus facile à résoudre si le gouvernement avait pris sérieusement en considération les recommandations formulées au Rapport de 2008, car l’écart entre la rémunération des juges militaires et celle des autres juges de nomination fédérale ne serait pas alors aussi importante.

Il ne nous appartient pas de s’enquérir des difficultés du Comité précédent; nous sommes toutefois déterminés à proposer au gouvernement des recommandations appropriées pour son étude. Nos recommandations sont fondées sur les principes généraux applicables au présent processus ainsi que sur les conditions – telles qu’elles ont été clarifiées par les décisions des tribunaux – dont le Comité doit tenir compte.

Le présent processus est sérieux. Son but est de satisfaire aux conditions d’indépendance judiciaire énoncées au Renvoi relatif à la rémunération des juges de la Cour provinciale (Î.-P.-É.), [1997] 3 R.C.S. Il vise essentiellement à empêcher toute négociation entre la magistrature et le gouvernement, ainsi qu’à éviter toute perception que la rémunération des juges est susceptible d’être influencée par la pression politique sous forme de manipulation financière.

Un nouveau Comité n’opère pas dans le vide. Il ne devrait pas faire fi des rapports et recommandations des Comités antérieurs. Ces rapports font partie du contexte qui doit guider le nouveau Comité. Il est cependant clair que si le Comité estime que le Comité antérieur n’a pas réussi à faire établir une rémunération adéquate, il peut procéder de novo. C’est ce que la Cour suprême a affirmé dans l’affaire Bodner où elle enseigne, aux paragraphes 14-15 de sa décision, que « [c]haque commission doit procéder à son évaluation dans son propre contexte. […] La nouvelle commission […] peut légitimement aller plus loin que les conclusions de la commission précédente et, après une analyse minutieuse, formuler ses propres recommandations. ». C’est d’ailleurs la position adoptée par le présent Comité.

Les juges militaires soutiennent que le rapport de 2008 a été écarté par le gouvernement pour des motifs d’ordre économique qui faisaient largement partie des arguments soumis au Comité précédent et rejetés par celui-ci, bien qu’ils reconnaissent que le gouvernement a accordé beaucoup d’importance au fait qu’il était d’avis que la conjoncture économique s’était beaucoup empirée depuis la publication du rapport du Comité précédent. Le gouvernement avait également soutenu que les recommandations du Comité précédent n’étaient pas suffisamment motivées. À notre avis, il ne s’agit pas là du problème principal; celui-ci réside plutôt dans le fait que le gouvernement n’a pas réussi à établir une justification solide pour son choix du facteur de comparaison, ou pour son choix des points de repère. Nous ne pouvons donc pas accepter que la rémunération accordée à la suite du rapport de 2008 fût une rémunération adéquate. Dans le cas qui nous occupe, il n’y a donc pas d’ajustement à faire à une rémunération qui serait autrement adéquate.

Devant le présent Comité, le gouvernement a de nouveau présenté des arguments basés sur les conditions économiques défavorables et sur la nécessité pour les juges militaires de partager le fardeau d’austérité que doit épauler le secteur public afin de faire face à la conjoncture actuelle. Nous traiterons de cette question directement, tout en insistant sur l’importance de l’analyser dans le contexte approprié. Avant d’aborder les principes directeurs et les facteurs à prendre en compte pour déterminer une rémunération adéquate, il importe de préciser que le Comité n’a pas pour mandat de déterminer la rémunération minimale nécessaire pour garantir l’indépendance judiciaire ou pour faire en sorte qu’il y ait un nombre suffisant de candidats pour combler les postes de juge vacants. Comme la Cour d’appel du Québec l’a déclaré en 2000 dans l’affaire Conférence des juges du Québec c. Québec aux paragraphes 48-49, il n’est pas rationnel pour le gouvernement de tout simplement édicter une augmentation annuelle conforme à celle accordée aux fonctionnaires, sans égard au caractère adéquat de la rémunération. Nous insistons de notre côté sur le fait que la décision sur la rémunération doit être dépolitisée; ainsi, nous sommes d’avis que l’application d’un pourcentage d’augmentation obtenu par le gouvernement dans le cadre de négociations avec des syndicats de la fonction publique ne constitue pas un processus qui est compatible avec le mandat du Comité.

Après l’audience en juin, les juges militaires nous ont informés que le gouvernement avait négocié un accord de principe avec ses avocats et que celui-ci suggère que le fardeau que le gouvernement demande au juges militaires d’épauler est beaucoup plus important qu’il ne l’est pour d’autres personnes rémunérées sur les fonds publics. Le seul fait que le gouvernement envisage d’accorder à ces fonctionnaires des augmentations plus grandes que celles qu’il propose pour les juges militaires soulève des doutes sérieux quant aux motifs invoqués par le gouvernement dans ses plaidoiries écrites et orales. Tel que mentionné ci-dessus, nous sommes préoccupés également par l’argument même que la rémunération des juges devrait refléter les politiques du gouvernement dans ses négociations avec la fonction publique. Si la rémunération des juges est censée être le reflet exact du résultat de négociations dans le secteur public, le but du présent processus, tel que défini par la Cour suprême du Canada, serait loin d’être atteint. Le gouvernement a néanmoins plaidé que l’élimination des indemnités de départ et le plafonnement de l’Indice de la rémunération pour l’ensemble des activités économiques sont justifiés par le fait que ces mesures s’appliquent à toutes les personnes rémunérées sur les fonds publics. Le gouvernement semble vouloir dire que tout ce qui est requis c’est la rémunération minimale qui est susceptible de satisfaire à l’exigence de l’indépendance judiciaire et qu’il est autrement libre de mettre en œuvre ses règles et pratiques générales en matière de rémunération. L’avis de la Cour suprême du Canada exprimé dans l’affaire Bodner est tout à fait autre : « La Commission n’a pour objectif ni de déterminer le seuil minimum ni d’établir quelles seraient les conditions maximales. Son rôle consiste plutôt à recommander un niveau de rémunération approprié. » Nous ne croyons pas que la Cour suprême parlait là d’un niveau de rémunération approprié pour la fonction publique dans son ensemble.

Il n’est évidemment pas facile de déterminer ce qui est adéquat ou approprié; les Comités antérieurs ont tenté de donner un contenu aux facteurs qui, selon la loi, doivent être pris en compte. Les quatre principaux facteurs sont : l’état de l’économie au Canada, le rôle de la sécurité financière des juges militaires dans l’indépendance judiciaire, le besoin de s’assurer que les candidats de haut calibre ne soient pas dissuadés de poser leur candidature à la magistrature, et tout autre critère objectif. Quant à cette dernière catégorie, nous avons entendu des soumissions concernant la charge de travail, les obligations en termes de déplacements, la formation spécialisée, le salaire d’autres membres des Forces canadiennes, le salaire de certains fonctionnaires, le salaire des avocats, et – avec plus d’insistance – le fait que les candidats nommés ont choisi de travailler au sein de l’appareil militaire, étant sous-entendu qu’en se faisant ils ont accepté comme adéquat un barème de salaire distinct et beaucoup plus bas.

Les facteurs pour déterminer une rémunération adéquate

L’état de l’économie

La position du gouvernement du Canada est très simple. Au paragraphe 2 de ses soumissions, il énonce qu’il n’y a pas lieu d’accorder aux juges militaires un traitement de faveur, ce qui veut dire qu’en jugeant si leur rémunération est adéquate, on doit tenir compte des mesures d’austérité qui touchent la fonction publique en général. Ainsi, il convient de ne leur accorder qu’un ajustement modeste. En fait, le gouvernement ne propose même pas une augmentation, mais plutôt le plafonnement de l’Indice de la rémunération pour l’ensemble des activités économiques à 1% et l’élimination des indemnités de départ, avec un ajustement de salaire de 0,25% durant la première année.

Nous avons entendu les arguments sur la fragilité de l’économie, lu la documentation à propos des Perspectives de l’économie mondiale et examiné le Plan d’action économique 2012 du Ministre des finances. Nous avons étudié les arguments du gouvernement concernant les augmentations de salaire négociées avec la fonction publique, et venons pourtant d’apprendre l’existence d’un accord de principe avec des modalités toutes autres. Nous comprenons la position du gouvernement, énoncée au paragraphe 38 de ses soumissions, voulant que les juges militaires « assument leur part du fardeau dans cette conjoncture difficile ». Même s’il n’y a que quatre juges militaires et qu’une augmentation de leur rémunération n’aurait qu’une incidence infime sur la trésorerie fédérale, nous comprenons parfaitement que les juges ne sont pas à l’abri de considérations d’ordre financier telles que celles précitées.

La difficulté que nous éprouvons avec l’argument du gouvernement réside dans le fait que ce genre de raisonnement est sans objet si le point de départ pour l’ajustement n’est pas une rémunération adéquate. Proposer des pourcentages d’ajustement n’a aucun sens en l’absence d’une analyse détaillée pour s’assurer que la rémunération de base est adéquate. Nous sommes d’accord avec l’argument des juges militaires qu’il n’est pas rationnel pour le gouvernement de faire les mêmes représentations devant le présent Comité qu’il a fait devant la Commission Levitt lorsqu’il n’y a aucune preuve que la rémunération actuelle des juges militaires est adéquate, surtout vu la réponse que le gouvernement a donné aux rapports des Comités antérieurs. Dans l’affaire Bodner, la Cour suprême du Canada a dit, au paragraphe 129 de sa décision, qu’un salaire qui n’a pas été recommandé par une Commission indépendante ne saurait être accepté comme un salaire adéquat que l’on peut utiliser comme point de repère.

Nous sommes d’accord avec la Cour d’appel du Québec dans l’affaire Conférence des juges du Québec où elle a statué, au paragraphe 48 de sa décision, qu’accepter comme adéquate la réponse du gouvernement écartant les recommandations de la Commission pour les mêmes raisons que celles qui soutenaient ses représentations devant la celle-ci serait de faire fi du but même de la Commission sur la rémunération. Notre mandat n’est pas de décider d’un pourcentage d’augmentation, mais d’une rémunération adéquate.

Le gouvernement du Canada soutient qu’il n’est pas approprié d’utiliser comme point de repère la rémunération des juges des tribunaux supérieurs à cause du rôle unique des juges militaires; il mentionne aussi d’autres motifs au paragraphe 21 de sa Réplique. Ces motifs sont les suivants : Un seul facteur de comparaison ne devrait pas être utilisé; les salaires des juges des tribunaux supérieurs sont fixés par rapport à un bassin de candidats beaucoup plus vaste et diversifié, et réparti sur un large territoire, qui sont calculés de manière à éviter un effet dissuasif dans les grands centres urbains; il y a un bassin de recrutement distinct pour les nominations à la magistrature militaire; la rémunération des autres fonctionnaires ne peut servir aux fins de comparaison à cause de la nature unique du système de justice militaire. Tout cela peut se résumer en une seule proposition très élémentaire qui est exposée au paragraphe 45 des soumissions du gouvernement : Une personne raisonnable et bien informée ne serait pas encline à considérer que la rémunération actuelle des juges militaires n’est pas suffisante pour garantir l’indépendance judiciaire, étant donné que le salarié moyen au Canada gagne environ 46 000 $ par an. Et au paragraphe 12 de la Réplique du gouvernement, on peut lire qu’une augmentation de 31 % ne serait pas perçue par le grand public comme étant juste. À propos de cet argument, il est peut-être utile de rappeler que dans l’affaire provenant du Nouveau-Brunswick entendu par la Cour suprême du Canada, il s’agissait d’une augmentation allant de 100 000 $ jusqu’à 142 000 $ en l’espace de trois ans; dans le cas provenant de l’Ontario il y avait une augmentation de 28% sur trois ans, et au Québec le rapport de 1998 proposait une augmentation à 180 000 $ par rapport à un salaire de 137 000 $. Dans l’affaire des juges de paix de l’Alberta, la recommandation était de 15 000 $ supérieure au montant proposé par le gouvernement. Tout cela témoigne du fait que lorsqu’un ajustement radical est nécessaire, il est hors de question de soutenir qu’une augmentation annuelle mineure exprimée en termes de pourcentage est suffisant. En fait, la décision dans l’affaire du Québec énonce clairement qu’il n’était pas acceptable pour le gouvernement de plaider tout simplement qu’un ajustement antérieur était suffisant et que la refonte des arguments du gouvernement devant la Commission devait être acceptée comme fondement valide de sa réponse au Rapport.

Avec égards, nous ne pouvons pas accepter la thèse du gouvernement. La raison pour laquelle le Comité existe est la nécessité de procéder à une évaluation indépendante de la rémunération, et de prendre une décision éclairée basée sur une analyse contextuelle. Invoquer les sentiments du grand public est incompatible avec le processus défini par la Cour suprême du Canada. Les autres motifs avancés par le gouvernement ne résistent pas à une analyse poussée. Le prétendu bassin de recrutement vaste et diversifié n’est pas disponible pour la grande majorité des nominations aux tribunaux supérieurs, lesquelles comportent des exigences en matière de résidence provinciale. Le niveau de spécialisation des tribunaux militaires n’est pas de nature différente de celui de la Cour canadienne de l’impôt, ni d’ailleurs de celui des cours criminelles, des tribunaux de la famille, tribunaux de la jeunesse, etc. Le fait qu’une nomination comporte une augmentation de salaire très importante pour un particulier est déjà chose courante dans le cas de nominations de candidats du secteur public, du milieu universitaire, et d’avocats pratiquant dans des petits cabinets en milieu rural. Il n’y a pas d’ajustement salarial pour les juges nommés à Toronto, Vancouver ou Montréal; ils sont payés comme les juges nommés à Bathurst ou à Summerside. Pour ce qui est de l’état de l’économie, nous ne pouvons pas accepter que le devoir commun de partager le fardeau de l’austérité exclut un ajustement de salaire de base pour les ramener à un niveau acceptable. L’équité salariale en est un bon exemple : Si aujourd’hui les membres d’un groupe de femmes sont victimes de discrimination salariale, est-ce qu’on doit leur refuser l’ajustement qui s’impose en raison de l’état général de l’économie ou parce que les fonctionnaires n’ont reçu que des augmentations mineures?

L’argument selon lequel un seul facteur de comparaison ne devrait pas être utilisé est avancé sans égard au contexte. Les juges militaires soutiennent que la nature de leur fonction, telle qu’elle a évolué au cours des dernières années, démontre qu’on doit leur reconnaître le même statut que les autres juges de nomination fédérale, et que les mêmes facteurs et entités pour comparaison devraient donc servir à établir leur rémunération. Ils disent en effet qu’ils considèrent que la rémunération des autres juges de nomination fédérale est adéquate et qu’ils devraient avoir droit à une rémunération identique étant donné qu’ils font partie intégrante du système judiciaire canadien et qu’ils ne devraient donc pas faire l’objet d’un traitement discriminatoire. Si on accepte que les juges militaires sont tout aussi qualifiés que les autres juges de nomination fédérale, il est étonnant de constater que parmi plus d’un millier d’entre eux, seulement quatre touchent une rémunération beaucoup moindre, vu que tous ces juges sont payées sur les mêmes fonds publics. À notre avis, la question au cœur du présent processus est de déterminer si les juges militaires ont les mêmes qualifications et exercent des fonctions analogues à celles des autres juges des tribunaux supérieurs et, dans l’affirmatif, s’ils ne devraient pas par conséquent toucher une rémunération équivalente. Le motif de leur exclusion du système des tribunaux fédéraux à titre de participants à part entière ne nous a pas été expliqué à notre satisfaction.

Le besoin d’attirer des candidats qualifiés et le rôle de la sécurité financière

Ici, l’argument principal du gouvernement est basé sur le fait que le bassin de recrutement pour les postes de la magistrature militaire est limité aux officiers des Forces canadiennes (para 13 de ses soumissions). Selon le gouvernement, ceci fait en sorte qu’il y a deux magistratures fédérales distinctes, ce qui milite en faveur de sa décision de ne pas combler l’écart salarial. Le gouvernement soutient que cette politique ne décourage en rien les membres de la force de réserve de poser leur candidature à un poste de juge militaire, étant donné que plus de 5% des officiers de la force de réserve admissibles à un tel poste ont posé leur candidature lors du dernier concours de sélection, par rapport à seulement 4,5% des avocats admissibles à un poste de juge au sein des autres tribunaux fédéraux. Pour expliquer ce faible taux de participation, le gouvernement postule que les officiers de la force de réserve qui n’habitent pas la région de la capitale nationale ne désirent peut-être pas y déménager, ou qu’ils ne souhaitent pas un poste militaire à temps plein. Pourtant, l’exigence d’habiter la région de la capitale nationale s’applique déjà aux juges de la Cour suprême, de la Cour fédérale d’appel, de la Cour fédérale et de la Cour canadienne de l’impôt, et, pour ce qui est de la perspective d’une vie dans les forces, nous sommes plutôt portés à croire que le choix fait par un candidat de la force de réserve est celui de devenir juge, et non d’entreprendre une carrière militaire à temps plein. Les parties conviennent que le choix de faire carrière dans la magistrature n’est pas fait exclusivement ou même principalement en fonction de la rémunération, et que ce dont il faut s’assurer n’est pas si le salaire offert attirera des candidats, mais que ce salaire n’aura pas un effet dissuasif sur des candidats potentiels. Cette question n’est pas facile à jauger car il y a beaucoup de variables qui auront sur chaque candidat une influence différente. Il s’agit là d’une bonne raison d’accorder une importance particulière aux entités pouvant servir à faire des comparaisons.

Les juges militaires remettent en question l’utilité des statistiques fédérales. Ils constatent qu’en 2008 et 2010 seulement 22% des candidats provenaient de la force de réserve, alors que les avocats dans la force de réserve représentaient 36% des avocats militaires au sein du Bureau du JAG. Ils notent également que les statistiques du gouvernement ne tiennent pas compte des officiers qui répondent aux critères d’admissibilité mais qui ne sont pas avocats militaires parce qu’ils ne pratiquent pas le droit au sein de la force régulière ou de la force de réserve (Réplique, para 39). Nous sommes portés à donner peu de poids aux pourcentages du gouvernement car ils sont douteux et non appuyés par une analyse scientifique.

Nous estimons que les officiers dans la force régulière qui voudraient devenir juges n’ont pas de véritable choix; techniquement, ils sont admissibles aux postes de juge des cours supérieures ou provinciales, mais le processus de nomination ne leur serait pas favorable, car ils n’auraient aucune expérience ni aucuns contacts dans la région pour laquelle la nomination est organisée. Quant aux membres de la force de réserve, les juges militaires notent que quelques-uns d’entre eux ont été nommés aux cours provinciales en Colombie-Britannique, au Québec et au Nouveau-Brunswick, ainsi qu’au sein de deux tribunaux supérieurs en Colombie-Britannique et en Ontario. Ils notent également que les candidats nommés à d’autres tribunaux supérieurs qui étaient également aptes à devenir juges militaires l’étaient selon le même processus qui s’applique aux nominations à la magistrature militaire, mais ils sont payées 31% de plus qu’un juge militaire et ce, sur les mêmes fonds publics. Les juges militaires remettent en question l’argument du gouvernement voulant qu’un bassin de recrutement plus restreint justifie une rémunération moindre, même si les qualifications et fonctions du poste sont analogues à celles de tous les autres juges de nomination fédérale. À leur sens, la seule justification pour cet argument serait l’utilisation des autres membres des Forces canadiennes comme seul comparateur. Ils rejettent l’utilisation de ce comparateur, car elle dévalorise la fonction des juges militaires, ainsi que les personnes qu’ils sont appelés à juger, faisant d’eux des exclus par rapport au système judiciaire canadien. À cet égard les juges militaires notent que les médecins et dentistes au sein des Forces canadiennes ne touchent pas un salaire plus bas, bien qu’ils aient choisi eux aussi une carrière militaire (voir leurs soumissions au para 127) ils notent aussi que le salaire du Chef d’état-major de la Défense est de 327 000 $, et que le traitement du JAG est indexé à celui des juges de la Cour fédérale. Nous convenons avec les juges militaires que le raisonnement du gouvernement ne résiste pas à l’analyse.

À notre avis, le gouvernement n’a pas fourni une explication rationnelle au soutien de ses recommandations. Il n’a pas expliqué de manière convaincante quelle entité servant à faire une comparaison raisonnable devrait être utilisé. Essentiellement, le gouvernement soutient que les juges militaires font partie de l’appareil militaire et devraient donc être payés sur la même base que les autres officiers dans le milieu fermé où ils exercent leurs fonctions. Étant donné le bassin de recrutement très restreint pour le poste de juge militaire, il n’y a pas lieu de faire preuve de largesse et d’offrir plus que le strict minimum de rémunération requis. Nous ne souscrivons pas à cette position car nous estimons que l’office de juge en est un d’exception. C’est d’ailleurs en raison de ce caractère exceptionnel que le mandat du Comité est dicté par la Constitution. Il faut se rendre à cette évidence.

Nous notons à cet égard que l’ancien juge Patrick J. Lesage recommande, à la page 4 se son rapport récent sur l’amélioration des politiques et pratiques au sein du système de justice et de règlement de griefs des Forces canadiennes (Rapport de l'autorité procédant au deuxième examen indépendant, à l’honorable Peter G. MacKay, Ministre de la Défense nationale, décembre 2011), que toute référence à la hiérarchie et à la chaîne de commande soit supprimée en ce qui concerne les juges militaires. Cette recommandation est cohérente avec l’avis de juges des tribunaux supérieurs qui, au cours des dernières années, ont reconnu que depuis la décision de la Cour martiale d’appel dans l’affaire R. c. Lauson [1998] CMAC 415, le rôle des juges militaires a été transformé au point qu’il peut maintenant être assimilé à celui des juges des cours supérieures. Dans l’affaire Leblanc c. Sa Majesté la Reine, la Cour s’est prononcée dans le même sens. À la page 45 du jugement, le juge Létourneau déclare que « la fonction de juge militaire […] n'est plus pour le juge, comme c'était le cas au temps des arrêts Généreux et Lauzon, précités, une simple étape de transition dans sa carrière militaire, un tremplin vers une autre promotion, une nouvelle plume à son chapeau ou à son képi. Elle se veut et est maintenant une carrière pour des juristes soucieux de mettre leurs connaissances au soutien et au profit des besoins de la justice pénale militaire. »

Chaque tribunal a besoin du même degré d’indépendance judiciaire, comme l’a affirmé la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259. Partant, les exigences pour sauvegarder cette indépendance doivent être similaires d’un tribunal à l’autre. À notre avis, faire dépendre la rémunération des juges militaires sur celle des autres officiers des Forces canadiennes exclusivement est incompatible avec les exigences de l’indépendance judiciaire. Nous sommes également persuadés que la rémunération des juges des cours supérieures n’a pas été arrêtée au montant minimal requis afin de s’assurer qu’il y ait un nombre suffisant de candidats qualifiés lors des concours de sélection. Il est difficile de comprendre pourquoi le gouvernement procèderait autrement dans le cas des juges militaires.

Autres critères

Le critère essentiel relève de la nature et des fonctions de l’office de juge militaire. Nous nous basons à cet égard sur l’avis de la Cour suprême exprimé au paragraphe 143 de sa décision dans le Renvoi de 1997 où elle s’exprime ainsi : « D’autre part, il n’en demeure pas moins que, même s’ils sont en bout de ligne payés sur les fonds publics, les juges ne sont pas des fonctionnaires de l’État. Les fonctionnaires font partie du pouvoir exécutif; les juges, par définition, sont indépendants de l’exécutif. Les trois caractéristiques centrales de l’indépendance de la magistrature -- inamovibilité, sécurité financière et indépendance administrative -- reflètent cette distinction fondamentale, car elles accordent aux membres de la magistrature des protections auxquelles les fonctionnaires n’ont pas droit en vertu de la Constitution. ».

La LDN a été modifiée en 1998 et encore en 2008, afin de redéfinir à certains égards le rôle des juges militaires. Le rapport du Juge en chef militaire, ainsi que celui du Juge-avocat général, donnent un survol de leurs fonctions actuelles. Alors que la cour martiale est un tribunal tout à fait distinct, ses juges doivent satisfaire aux mêmes exigences que leurs homologues des cours supérieures, dont celle d’avoir été inscrit au barreau d’une province pendant au moins dix ans. Le Bureau du Commissaire à la magistrature fédérale administre le processus de nomination des juges militaires, tout comme il le fait pour les juges des cours supérieures. Le processus de sélection est par ailleurs aussi rigoureux que celui pour tout autre poste de la magistrature fédérale : un comité de sélection est établi dont les cinq membres proviennent de la magistrature civile et militaire, du barreau et de la collectivité militaire.

La nomination se fait par arrêté ministériel et le mandat de la personne nommée expire quand celle-ci atteint l’âge de 60 ans. Les juges militaires président les cours martiales, soient la cour martiale générale et la cour martiale permanente. Ces deux cours ont compétence sur toute personne accusée d’une infraction prévue au Code de discipline militaire; le comité de la cour martiale générale s’apparente au jury en matière criminelle. Les juges tranchent des questions de droit et de faits, et fixent la sentence. Les jugements de la cour martiale peuvent être portés en appel devant la Cour d’appel de la Cour martiale (CACM). La CACM est composée d’au moins quatre juges de la Cour fédérale ou de la Cour fédérale d’appel ainsi que de tout autre juge d’une cour supérieure de juridiction criminelle, ce qui inclut tout juge de toute autre cour d’appel au Canada.

Quant à la compétence exercée par les juges militaires, les lois et les règlements qui s’appliquent au système de justice militaire se trouvent principalement dans la LDN et dans les ORFC; la LDN établit par ailleurs le Code de discipline militaire. La compétence s’étend à toute autre matière criminelle ou pénale relevant de toute autre loi fédérale, et même aux infractions commises à l’extérieur du Canada. Les juges militaires ont également compétence pour juger des civils, tels les époux et les enfants à charge qui accompagnent les militaires, ainsi que les enseignants de ces derniers en poste à l’extérieur du Canada. Dans certains cas, ils ont compétence pour appliquer le droit étranger. Enfin, les juges militaires exercent toutes les fonctions judiciaires nécessaires à la conduite des procès, ce qui leur donne le pouvoir de punir pour outrage au tribunal. Il n’y a pas lieu d’entrer dans plus de détail. Il suffit de constater, comme l’a fait le tribunal dans l’affaire R. c. Caporal H.P. NGuyen,2005 CM 57, que la nature des fonctions et le rôle accru des juges militaires « ne [font] pas seulement partie du contexte moderne des tribunaux militaires et de leur historique. Ils témoignent de la volonté du législateur de rapprocher davantage le système de justice militaire des valeurs et des critères juridiques canadiens actuels tout en essayant de préserver les caractéristiques du système qui semblaient nécessaires pour répondre aux besoins uniques militaires. ».

Nous n’entreprendrons pas ici une description du système de justice militaire. Il est amplement décrit dans les rapports des Comités antérieurs et dans d’autres documents qui ont été soumis au présent Comité. Qu’il suffise de dire que le système de justice militaire fait partie intégrante et à part entière du système de justice du Canada, n’étant nullement un système de justice inférieur. Les juges militaires sont tout aussi qualifiés que les autres juges de nomination fédérale. Il suffit de lire les décisions dans les affaires Caporal-chef W.B. Dunphy c. Sa Majesté la Reine et Caporal Parsons c. Sa Majesté la Reine, 2007 CMAC 1, CMAC-491 et CMAC-492, pour se rendre compte que les juges militaires sont pleinement reconnus comme étant les pairs des juges les tribunaux civils.

Dans leurs présentations, les juges militaires exposent en détail la nature de leur travail : voir les pages 50-59. Aux paragraphe 61, les juges militaires citent la décision du juge Létourneau dans l’affaire LeBlanc où il décrit les pouvoirs des juges militaires et conclut, au paragraphe 37, en disant ceci : « Je suis d’accord avec le juge militaire en chef que les nombreuses modifications à la Loi ont, d’une part, opéré un rapprochement considérable entre les juges civils et les juges militaires en matière criminelle, et, d’autre part, ont accru pour le militaire mis en accusation l’équité du système de justice militaire […] ». En réalité, le gouvernement ne désavoue pas cet énoncé. Sa position n’est pas à l’effet que les juges militaires n’ont pas les mêmes fonctions et pouvoirs que les autres juges de nomination fédérale, mais qu’ils fonctionnent dans un système de justice parallèle et distinct ayant des caractéristiques qui lui son propres et, par conséquent, l’application d’un ensemble de facteurs différent est justifiée pour fixer leur rémunération. Nous ne sommes pas d’accord parce qu’à notre avis le facteur principal devant être appliqué est la qualification du juge comme juge et non pas comme membre de l’appareil militaire. Au paragraphe 72 de leurs soumissions, les juges militaires exposent en détail les similarités entre les fonctions des juges des cours supérieures et celles des juges militaires.

Si les juges militaires sont traités sur un pied d’inégalité par rapport aux autres membres du système judiciaire canadien, ils seront perçus comme étant inférieurs à ceux-ci, probablement moins qualifiés et, partant, moins méritants de respect et de confiance. Il n’y a aucune justification pour traiter la cour martiale de façon différente de celle dont on traite les autres cours spécialisées. Autrement dit, il n’y a aucune véritable différence de nature entre le niveau de spécialisation requis d’un juge militaire et celui requis d’un juge de la Cour canadienne de l’impôt. Par ailleurs nous croyons qu’il s’agit surtout ici d’une question d’équité fondamentale.

Nous ne voyons aucune raison justifiant la pérennisation d’un statut inférieur pour les juges militaires et n’acceptons pas que le facteur de comparaison prôné par le gouvernement est justifié par des motifs rationnels. Les juges militaires sont de nomination fédérale, ont sensiblement les mêmes qualifications que leurs homologues des autres tribunaux fédéraux, et sont soumis à un comité d’enquête disciplinaire qui est en tous points similaire à celui constitué au sein du Conseil canadien de la magistrature. Pourquoi donc leurs verser une rémunération différente? À nos yeux il n’est que juste que tous les juges dont les attributs sont sensiblement les mêmes reçoivent la même rémunération, car les mêmes facteurs devraient servir pour la détermination de leur rémunération et ce, sans exception. Le gouvernement est cependant d’avis que les attributs des juges militaires ne sont pas les mêmes par rapport aux autres juges de nomination fédérale, puisque les premiers font partie de l’appareil militaire. Nous sommes par contre d’avis que leurs attributs sont sensiblement les mêmes, parce qu’au-dessus de toute autre considération, ils sont membres de la magistrature fédérale. L’argument du gouvernement fondé sur leur situation distincte est inacceptable. Après tout, il y a d’autres tribunaux fédéraux tout aussi distincts et aucune explication n’a été fournie pour justifier le versement d’une rémunération moindre aux membres de ces autres tribunaux fédéraux spécialisés même si les juges qui y siègent viennent d’un bassin de candidats particuliers.

Recommandations

Nous sommes d’avis que la rémunération des juges militaires devrait faire l’objet d’une augmentation annuelle progressive pendant les quatre années de notre mandat, de telle sorte qu’à la fin de cette période, elle sera équivalente à celle des autres juges de nomination fédérale.

Nous sommes également d’avis que le mandat de la prochaine commission quadriennale devrait couvrir la détermination de la rémunération de tous les juges de nomination fédérale, y compris les juges militaires.

Nous sommes d’avis que le gouvernement a compétence pour réviser les dispositifs de retraite des juges militaires et pour éliminer les indemnités de départ actuellement prévues, mais nous préconisons qu’elles soient maintenues pour les quatre juges militaires présentement en poste. Il y a pourtant au dossier des indices que les allocations de retraite des juges militaires sont inférieures à celles des autres juges de nomination fédérale (le témoignage en ce sens de M. Sauvé, un expert retenu par les juges militaires, n’a pas été contesté). Ces allocations sont de nature distincte et rien au dossier n’indique comment la situation pourrait être corrigée. Pour le moment donc nous recommandons que le gouvernement revienne sur son calcul de l’indemnisation à accorder pour la perte des indemnités de départ et en ajuste le montant pour maintenir le statut quo.

Finalement, nous sommes d’avis qu’il n’y a aucune justification économique pour le plafonnement de l’Indice de la rémunération pour l’ensemble des activités économiques et qu’une telle mesure occasionnerait une réduction réelle de la rémunération des juges militaires en fonction, en termes de leur pouvoir d’achat. À nos yeux, aucune réduction dans la rémunération de la magistrature ne devrait être effectuée en l’absence d’une véritable crise financière face à laquelle la réduction est partie intégrante d’une série de maintes mesures nécessaires pour sauvegarder la situation financière du gouvernement. Les éléments de preuve relativement à la conjoncture économique actuellement au dossier du Comité ne justifient pas une telle mesure.

Les juges militaires nous ont demandé de recommander au gouvernement qu’il leur rembourse les frais qu’ils ont encourus pour assurer leur participation au présent processus. Nous comprenons que le gouvernement a toujours remboursé aux juges militaires un montant raisonnable à ce titre et estimons que nous ne sommes pas en mesure de proposer une formule précise pour déterminer le montant qui serait raisonnable dans les circonstances.

Conclusion

Les membres du présent Comité se sont efforcés de donner une opinion mûrement réfléchie sur les questions soulevées devant eux, et ils tiennent à remercier les procureurs des deux parties pour leur précieuse collaboration tout au long du présent processus. Nous croyons que ce processus est important et nous nous attendons à ce que le gouvernement considère le présent rapport avec toute l’attention voulue à ses obligations découlant des décisions précitées de la Cour suprême du Canada.

Constance Glube, Présidente Michel Bastarache, Commissaire

Opinion dissidente :

En tant que membre du Comité d'examen de la rémunération des juges militaires, après avoir lu les motifs de mes collègues, je ne peux pas souscrire aux conclusions et recommandations de la majorité du Comité. Pour les motifs ci-après exposés, je ne suis pas d’avis que le salaire et les avantages d’ordre financier des juges militaires devraient être équivalents à ceux des juges des Cours supérieures. À mon avis, la rémunération actuelle des juges militaires est adéquate pour attirer des avocats de haut calibre à postuler aux postes à la magistrature et pour préserver l’indépendance judiciaire.

Mandat du Comité

Je conviens avec mes collègues que le mandat du Comité est de proposer une rémunération adéquate pour les juges militaires, afin de préserver l’indépendance de la magistrature militaire.

Je suis notamment d’accord avec mes collègues lorsqu’ils déclarent, à la page 6, que le Comité n’opère pas dans le vide et qu’il ne devrait pas faire fi des rapports des Comités antérieurs. Je ne suis cependant pas d’accord avec l’avis de mes collègues, exprimé à la page 6, que la rémunération accordée suite au rapport du Comité de 2008 n’était pas adéquate.

Je ne conviens pas non plus avec mes collègues que le gouvernement ne peut pas prendre en compte les augmentations qu’il a offertes à ses employés syndiqués. À cet égard, le raisonnement de mes collègues comporte une contradiction de fond. D’abord, ils déclarent, à la page 7, qu’il est incompatible avec le mandat du Comité de se baser sur des pourcentages d’augmentation obtenus par le gouvernement lors de négociations avec les syndicats de la fonction publique, puis au paragraphe immédiatement après ils déclarent ce qui suit : « Le seul fait que le gouvernement envisage d’accorder à ses fonctionnaires des augmentations plus grandes que celles qu’il propose pour les juges militaires soulèvent de doutes sérieux quant aux motifs invoqués par le gouvernement dans ses plaidoiries écrites et orales ».

Avec égards, je suis plutôt d’avis qu’en déterminant si la rémunération de tout juge est adéquate, le gouvernement est en droit de faire une comparaison avec les augmentations accordées aux employés de la fonction publique (ainsi que les augmentations de salaire reçues par le public en général) et qu’une telle façon de procéder n’est pas incompatible avec le mandat du présent Comité.

Bien que la politique du gouvernement concernant une augmentation de la rémunération des juges militaires ne puisse être le reflet exact de sa politique relative aux négociations avec la fonction publique, on ne peut pas, comme mes collègues le mentionnent, analyser dans le vide la rémunération des juges dans le but de vérifier si elle est adéquate pour préserver l’indépendance de la magistrature. À mon avis, si tous les Comités antérieurs ont déterminé que l’indépendance judiciaire existait au moment pertinent, et qu’il n’y ait aucune preuve d’une augmentation importante des salaires dans la fonction publique (ou parmis le public en général), on ne peut pas soutenir qu’une augmentation importante est maintenant nécessaire et qu’à défaut, l’indépendance judiciaire sera compromise. En effet, aucune des parties n’a fait un tel argument dans le cas présent.

À mon avis, la rémunération actuelle des juges militaires, ainsi que l’écart actuel entre leur rémunération et celle du public canadien en général, devrait être maintenue. Cependant, les juges militaires n’ont pas droit à une rémunération accrue lorsque la conjoncture économique ne la justifie pas. Comme la Cour suprême du Canada l’a souligné dans le Renvoi de 1997, aux paragraphes 158-159, des augmentations disproportionnées sont également susceptibles de saper l’indépendance de la magistrature.

Facteurs à prendre en considération dans la détermination d’une rémunération adéquate

État de l’économie et rôle de la sécurité financière

Je ne suis pas non plus d’accord avec l’analyse faite par mes collègues de l’état de l’économie au Canada.

Dans un premier temps, je suis en désaccord avec la proposition de mes collègues, exprimée aux pages 8-9, que le point de départ de l’analyse est le caractère inadéquat de la rémunération actuelle des juges militaires. Alors que les pourcentages d’augmentation continueront nécessairement d’accroître l’écart de salaire entre les juges militaires et les juges des Cours supérieures (parce que la différence réelle entre leurs salaires continuera d’augmenter), le mandat du Comité n’est pas de corriger une divergence quelconque, mais de proposer une rémunération adéquate afin de préserver l’indépendance judiciaire.

Mes collègues rejettent toute preuve de difficultés économiques au motif que le point de départ actuel n’est pas adéquat. À mon avis pourtant, pour déterminer si les recommandations du Comité sont justifiées, le gouvernement est en droit de prendre comme point de départ le salaire actuel de 220 009,00 $, et de tenir compte de l’état de l’économie ainsi que des augmentations accordées à ses employés.

J’ai lu par ailleurs la documentation sur les Perspectives de l’économie mondiale ainsi que les autres documents sur l’état de l’économie canadienne et de l’économie mondiale, et j’accepte les soumissions du gouvernement à l’effet que même si la performance de l’économie canadienne s’est améliorée et que le Canada est actuellement mieux situé que d’autres pays à cet égard, les projections de croissance sont modestes et incertaines à cause de la situation économique mondiale.

Besoin d’attirer des candidats qualifiés

Je suis également en désaccord avec l’avis de mes collègues que les raisons avancées par le gouvernement pour ne pas augmenter le salaire des juges militaires ne résistent pas à une analyse sérieuse. Mes collègues notent, par exemple, à la page 10 que « [l]e niveau de spécialisation des tribunaux militaires n’est pas de nature différente de celui de la Cour canadienne de l’impôt, ni d’ailleurs de celui des cours criminelles, des tribunaux de la famille, tribunaux de la jeunesse, etc. ». Ce que mes collègues oublient de mentionner, cependant, est que tout membre en règle du barreau d’une province qui satisfait aux exigences du poste peut s’y porter candidat et être nommé juge sur chacun de ces tribunaux spécialisés. Il n’est pas nécessaire, par exemple, d’être un avocat-fiscaliste, ou même un avocat dont la pratique ne comporte qu’un volet fiscal, pour être nommé à la Cour canadienne de l’impôt (voir à la page 15 les commentaires de mes collègues au sujet de cette cour).

Pour les tribunaux militaires, cependant, les critères sont différents. Être membre en règle d’un barreau n’est pas suffisant. Le bassin de recrutement des juges militaires est beaucoup plus restreint, car tout candidat doit aussi être officier des Forces canadiennes. En outre, la preuve démontre que les avocats militaires qui sont des candidats potentiels pour la magistrature militaire gagnent nettement moins que les juges militaires, et qu’un pourcentage plus élevé de ces candidats potentiels postule à ces postes que ne le font les candidats potentiels pour d’autres cours de nomination fédérale. À mon avis, donc, la rémunération et les autres avantages d’ordre financier n’ont aucun effet dissuasif sur les candidats potentiels à la magistrature militaire.

En outre, je ne partage pas l’avis de mes collègues, exprimé è la page 11, que « les officiers dans la force régulière qui voudraient devenir juge n’ont pas de véritable choix; techniquement, ils sont admissibles aux postes de juge des cours supérieures ou provinciales, mais le processus de nomination ne leur serait pas favorable, car ils n’auraient aucune expérience ni aucun contact dans la région pour laquelle la nomination est organisée ». En fait, la preuve ne justifie pas cet énoncé. À l’audition, il a été mentionné qu’au moins quatre avocats militaires ont été nommés aux tribunaux civils, soient un à la Cour supérieure de l’Ontario, un à la Cour suprême de la Colombie-Britannique, et deux autres à des cours provinciales ailleurs au pays (transcription, pages 174-175).

Enfin, alors qu’il se peut que quelques membres de la force de réserve qui sont aptes à devenir juge militaire gagnent une rémunération plus importante en pratique privée que celle des avocats militaires dans les Forces canadiennes, on peut en dire autant à propos de certains avocats en pratique privée qui postulent aux postes sur des Cours supérieures. En ce sens, je conviens avec mes collègues que ce qu’il faut considérer « n’est pas si le salaire offert attirera des candidats, mais que ce salaire n’ait pas un effet dissuasif sur des candidats potentiels » (page 11). Le salaire et les avantages d’ordre financier ne sont pas les seuls facteurs qui attirent les candidats de haut calibre aux postes judiciaires, et dans le cas précis des juges militaires, il n’y a aucune preuve que la rémunération offerte exerce un effet dissuasif sur des candidats potentiels.

Autres facteurs

Je conviens avec mes collègues que le rôle du juge militaire a été redéfini et que la compétence et la fonction de la cour martiale sont très similaires à celles des Cours supérieures. Les tribunaux militaires ne constituent nullement un système de justice inférieur et les juges militaires sont tout aussi qualifiés que leurs homologues des autres tribunaux de nomination fédérale. Ceci étant dit, le système des tribunaux militaires comporte des distinctions bien particulières.

Tel que noté ci-dessus, le bassin de recrutement est beaucoup plus restreint qu’il ne l’est pour les autres cours de nomination fédérale. En outre, et peut-être plus important encore, tant la preuve au dossier que les plaidoiries orales indiquent que la charge de travail des juges militaires est moindre que celle des autres juges de nomination fédérale. Les quatre juges militaires ont présidé annuellement, en moyenne, 64 cours martiales au cours des quatre dernières années. Les renseignements fournis après l’audition par les juges militaires démontrent qu’en 2010-2011, par exemple, les quatre juges ont siégé 172,5 jours en total sur le banc, alors que 152 jours furent consacrés aux services temporaires (ce qui veut dire que 152 jours furent consacrés à l’exécution de fonctions judiciaires à l’extérieur du Bureau du JAG sis dans la région de la capitale nationale, et ce chiffre comprend les journées de déplacement). En 2011-2012, les juges ont siégé 213,5 jours sur le banc, et 343 jours furent consacrés aux services temporaires. Pour l’année en cours, la preuve démontre qu’au 28 juin 2012, les juges ont siégé 57,5 jours sur le banc, et 80 jours furent consacrés aux services temporaires. Ces chiffres représentent le nombre total de jours consacrés aux fonctions judiciaires par les quatre juges ensemble.

À mon avis, bien que ces chiffres ne comprennent pas le temps consacré à la préparation avant les auditions et à la rédaction des motifs, la charge de travail d’une Cour martiale n’a rien de comparable avec celui d’une Cour supérieure. Mes collègues notent à la page 10 que la rémunération des juges des Cours supérieures n’est pas sujette à un ajustement en fonction de leur lieu de résidence, que ceci soit à Toronto, Vancouver, Montréal, Bathurst ou Summerside. Lors des plaidoiries orales, on a débattu la question de savoir si la charge de travail était un facteur à prendre en considération, et des commentaires ont été émis à l’effet que même si la charge de travail d’un juge d’une Cour supérieur en milieu rural est différente de celle de ses collègues en milieu urbain, tous ces juges reçoivent le même salaire.

À mon avis, le fait que tous les juges des Cours supérieures ont une rémunération identique sans égard à la charge de travail ni au coût de la vie (dans les grandes agglomérations urbaines) n’est pas pertinent. Le Comité n’a pas le pouvoir de faire des recommandations sur de telles questions, même si on pourrait soutenir qu’il est injuste qu’un juge siégeant en milieu rural touche le même salaire que ses pairs en milieu urbain, étant donné que la charge de travail de ces derniers est plus importante et leur pouvoir d’achat beaucoup moindre.

Dans l’affaire Provincial Court Judges » Association of British Columbia c. British Columbia (Attorney General), 2012 BCSC 1022, au paragraphe 48, la commission chargée de déterminer si la rémunération des juges de la Colombie-Britannique était adéquate a fait l’observation suivante : « [TRADUCTION] La compétence de la Cour provinciale s’élargit, le nombre des dossiers dont elle est saisie augmente, et ces derniers sont de plus en plus complexes et variés. Malgré les efforts pour réaliser des économies, la charge de travail des juges de la Cour provinciale ne cesse d’augmenter […] ». À mon avis, la charge de travail est un facteur qui peut être pris en compte en déterminant si la rémunération des juges militaires est adéquate.

Dans le cas des juges militaires, sur la base notamment des rapports des Comités antérieurs, je suis satisfait que la rémunération actuelle des juges militaires soit adéquate. Étant donné les circonstances économiques actuelles, et que la rémunération actuelle des juges militaires suffit pour attirer des candidats de haut calibre aux postes au sein de la magistrature militaire, la rémunération actuelle suffit pour préserver l’indépendance judiciaire.

Recommandations

Je suis d’avis que la rémunération actuelle des juges militaires est adéquate.

Comme mes collègues, je crois qu’il n’y a aucune justification d’ordre économique pour plafonner l’Indice de la rémunération pour l’ensemble des activités économiques. La rémunération des juges militaires devrait être augmentée en fonction de l’inflation.

Je partage également l’avis de mes collègues que le gouvernement a compétence pour réviser les dispositifs de retraite des juges militaires et pour éliminer les indemnités de départ actuellement prévues. Et tout comme eux, je suis d’avis que les dispositifs de retraite des quatre juges militaires présentement en poste devraient être maintenus.

Norman Sterling, Commissaire

Annexe A – Communiqué de presse Annexe B – Notes biographiques des Commissaires Annexe C – Règles de procédures telles qu’adoptées en consultation avec les partiesAnnexe D – Liste des participants à l’audience

Annexe A – Communiqué de presse

COMITÉ D’EXAMEN DE LA RÉMUNÉRATION DES JUGES MILITAIRES

Demande du CERJM – 2012

Conformément à la directive l’ORFC204.24, le CERJM s’est réuni en mai 2012 afin de commencer le processus d’examen des salaires versés aux juges militaires.

Pour l’instant, le Comité est composé de la présidente du Comité, l’honorable juge Constance R. Glube, O.C., O.N.S. (nommée par les juges militaires), ainsi que de l’honorable juge Michel Bastarache, C.C., et de l’honorable Norm Sterling, C.R. (nommé par le MDN).

Dans le cadre du processus d’examen du caractère adéquat de la rémunération des juges militaires, le CERJM tiendra des audiences publiques à Ottawa, au cours de l’été 2012. Toutes les parties intéressées peuvent soumettre par écrit leurs observations concernant des questions qui relèvent de son mandat, et ce, dans l’une ou l’autre des langues officielles.

Annexe B – Notes biographiques des Commissaires

L’honorable Constance R. Glube, O.C., O.N.S. : L’honorable Constance R. Glube fut le 21ième juge en chef de la Nouvelle-Écosse et la première femme à être nommée juge en chef au Canada.

Madame Glube détient un baccalauréat ès arts décerné par l’Université McGill en 1952 et un baccalauréat en droit décerné par la faculté de droit de l’Université Dalhousie en 1955. Elle a été appelée au Barreau en 1956. Madame Glube détient des doctorats honorifiques en droit de l’Université Dalhousie et de l’Université St. Mary’s. Elle détient également un doctorat honorifique en lettres humaines de l’Université Mount Saint Vincent.

En 1977, Mme Glube a été nommée juge puînée de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse (ancienne section de première instance) et membre d’office de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, devenant ainsi la première femme à siéger à la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse. En 1982, elle a été nommée juge en chef de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse, devenant ainsi la première femme à être nommée juge en chef au Canada. En 1988, elle a été nommée juge en chef de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse. En étant nommée sur le banc de la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse en 1977, elle devenait la première femme à être nommée à un tribunal de nomination fédérale en Nouvelle-Écosse et la 15ième femme à être ainsi nommée au Canada.

Madame Glube s’est retirée de la magistrature en décembre 2004.

L’honorable Michel Bastarache, B.A., LL.L., LL.B., D.E.S. : L’honorable Michel Bastarache détient un baccalauréat ès arts de l’Université de Moncton, des baccalauréats en droit de l’Université de Montréal (LL.L.) et de l’Université d’Ottawa (LL.B.), ainsi qu’un diplôme d’études supérieures en droit public décerné par l’Université de Nice. Il a été appelé au Barreau du Nouveau-Brunswick en 1980, au Barreau de l’Alberta en 1985, au Barreau de l’Ontario en 1986, et au Barreau du Québec en 2008. Monsieur Bastarache a aussi reçu des doctorats honorifiques de l’Université de Moncton, de l’Université Dalhousie, de l’Université d’Ottawa, de l’Université Mount Allison, de l’Université du Manitoba, de l’Université Sainte-Anne, de l’Université du Nouveau-Brunswick et de l’Université de Montréal.

Monsieur Bastarache a été nommé à la Cour d’appel du Nouveau-Brunswick le 1er mars 1995, et à la Cour suprême du Canada le 30 septembre 1997.

Monsieur Bastarache s’est retiré de la magistrature le 30 juin 2008 et agit actuellement comme avocat-conseil chez Heenan Blaikie S.E.N.C.R.L.

Norman W. Sterling, B. Ing., LL.B, C.R. : Norman Sterling a fréquenté l’Université Carleton et l’Université d’Ottawa. Il a travaillé à titre d’ingénieur professionnel et d’avocat avant de siéger comme député à l’Assemblée législative de l’Ontario de 1977 jusqu’à 2011.

Entre 1978 et 1985, pendant une période importante pour la réforme du droit en Ontario, M. Sterling a servi comme secrétaire parlementaire du Procureur général.

Entre 1981 et 1985, M. Sterling était membre du cabinet du premier ministre William Davis en tant que Ministre sans portefeuille, Secrétaire à la justice et Secrétaire au développement des ressources. À ces titres, il était responsable des Affaires autochtones, du Plan d’aménagement de l’escarpement du Niagara et des lois sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée.

Entre 1985 et 1995, alors qu’il était dans l’opposition, M. Sterling jouait les rôles de Leader parlementaire adjoint et de Président de groupe parlementaire du Parti progressiste-conservateur de l'Ontario. Il a également présidé plusieurs Comités législatifs pendant cette période.

Entre 1995 et 2003, M. Sterling était membre des cabinets du premier ministre Mike Harris et du premier ministre Ernie Eves. Il était chargé de sept portefeuilles distincts, dont Ministre de la Consommation et du Commerce, Ministre de l'Environnement, Ministre de l'Énergie, Ministre des Affaires intergouvernementales, Ministre des Services correctionnels, Ministre des Transports, ainsi que Procureur général et Ministre délégué aux Affaires autochtones. Entre 1996 et 1999, il jouait par ailleurs le rôle de Leader parlementaire du gouvernement.

Entre 2003 et 2011, alors qu’il était de nouveau dans l’opposition, M. Sterling présidait le Comité permanent des comptes publics de l’Assemblée législative de l’Ontario, avant de prendre sa retraite en 2011.

Annexe C – Règles de procédures telles qu’adoptées en consultation avec les parties

Règles de procédure du Comité d'examen de la rémunération des juges militaires de 2012

MANDAT
  1. Le Comité d'examen de la rémunération des juges militaires a été établi en vertu de l’article 165.22 de la Loi sur la défense nationale, L.R.C, 1985, c. N-5 et de l’article 204.23 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, C.P. 2000-1419 du 13 septembre 2000. Le Comité est chargé « d'examiner la question de savoir si la rémunération des juges militaires est satisfaisante ». À l'instar des trois comités précédents (établis en 2000, en 2004 et en 2008), le présent Comité est chargé en vertu de l’article 204.23 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes de faire son examen en tenant compte des facteurs suivants :
    1. l'état de l'économie au Canada, y compris le coût de la vie ainsi que la situation économique et financière globale du gouvernement fédéral;
    2. le rôle de la sécurité financière des juges militaires dans la préservation de l'indépendance judiciaire;
    3. le besoin de recruter les meilleurs officiers pour la magistrature militaire; et
    4. tout autre facteur objectif qu’il considère pertinent.
DÉFINITIONS
  1. Aux fins des présentes règles, les termes ci-dessous auront la signification suivante :
ADOPTION DES RÈGLES DE PROCÉDURE
  1. Après consultation avec les parties, le Comité adopte les règles de procédure applicables.
  2. Le Comité peut, à son seul gré, modifier toute règle de procédure ou tout délai prévu dans les présentes règles.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
  1. Les parties peuvent déposer auprès du Comité un mémoire d’un maximum de trente (30) pages.
  2. Au plus tard le 28 mai 2012 à 17h00, chacune des parties devra signifier à l’autre partie une (1) copie de son mémoire et de ses documents et remettre quatre (4) copies de ceux-ci au Comité. Avec le consentement des parties et du Comité, la signification peut se faire par courriel; les documents sont alors envoyés le lendemain par la poste.
  3. Un intervenant peut déposer auprès du Comité un mémoire d’un maximum de vingt (20) pages.
  4. Au plus tard le 28 mai 2012 à 17h00, l’intervenant devra signifier une (1) copie de ses documents aux parties et en remettre quatre (4) copies au Comité.
  5. Les parties peuvent déposer auprès du Comité une réplique aux documents de l’autre partie (et de tout intervenant); la réplique est d’un maximum de dix (10) pages.
  6. Au plus tard le 4 juin 2012 à 17h00, chacune des parties devra signifier une (1) copie de sa réplique à l’autre partie et en remettre quatre (4) copies au Comité. Avec le consentement des parties et du Comité, la signification peut se faire par courriel; la réplique sera alors envoyée le lendemain par la poste.
AUDIENCE
  1. La date et l’heure prévues pour l’audience sont le 14 juin 2012 à 09h00. L’audition sera close à 17h00 au plus tard.
  2. L’audience aura lieu à la salle de la cour martiale sise au Centre Asticou, 241 Boul. Cité des Jeunes, Gatineau (Québec) K1A 0M7.
  3. Pendant la séance matinale du Comité, les juges militaires disposeront de trois (3) heures pour faire leurs présentations orales. Le Comité prendra une pause de quinze (15) minutes au cours de la séance.
  4. À 12h00, le Comité suspendra l’audience jusqu’à 13h30 pour le déjeuner.
  5. Pendant la séance de l’après-midi, le gouvernement du Canada disposera de trois (3) heures pour faire ses présentations orales. Le Comité prendra une pause de quinze (15) minutes au cours de la séance.
  6. Les juges militaires disposeront de trente (30) minutes pour répondre aux présentations du gouvernement.
  7. Dans son mémoire, un intervenant peut demander au Comité la permission de faire des présentations orales. Si, après avoir étudié le mémoire, le Comité est d’avis que l’intervenant est directement concerné par les questions que le Comité est appelé à trancher et que des présentations orales de l’intervenant sont susceptibles de l’aider dans ses délibérations, le Comité peut accéder à la demande. Le cas échéant, l’intervenant disposera de quinze (15) minutes pour faire ses présentations, et ce, avant que les juges militaires aient fait connaître leur réponse.
  8. S’il est permis à un intervenant de faire des présentations orales, le gouvernement du Canada aura le droit d’y répondre; il disposera de dix (10) minutes pour le faire.
  9. S’il est permis à un intervenant de faire des présentations orales, les juges militaires auront eux aussi le droit d’y répondre; ils disposeront de dix (10) minutes pour le faire, et ce, après que le gouvernement du Canada ait fait connaître sa réponse mais avant que les juges militaires aient fait connaître leur réponse de trente (30) minutes aux présentations du gouvernement du Canada.
  10. Le Comité peut, à son seul gré, allouer aux parties un délai supplémentaire pour répondre aux présentations d’un intervenant.
  11. Les parties et les intervenants peuvent faire une présentation sur support électronique, tel que « PowerPoint ».
  12. Un sténographe sera présent lors de l’audition.
TRADUCTION ET INTERPRÉTATION SIMULTANÉE
  1. Le Comité peut exiger que les documents déposés par les parties et les intervenants soient traduits.
  2. Des services d’interprétation simultanée seront offerts lors de l’audition.
PUBLIC ET MÉDIAS
  1. L’audience sera ouverte au public.
  2. La date et l’heure de l’audience seront communiquées aux médias.
  3. Il est défendu de prendre des photos à l’intérieur de la salle d’audience.
  4. Aucun reportage médiatique et aucune conférence de presse ne peuvent avoir lieu à l’intérieur de la salle d’audience ou dans un rayon de dix (10) mètres de son entrée
RAPPORT
  1. Le Comité soumet son rapport au Ministre de la Défense Nationale le ou avant le 15 juillet 2012 et ce, dans les deux langues officielles.
  2. Le Comité peut, à son seul gré, prolonger ce délai jusqu’à une date qui ne peut dépasser neuf (9) mois après le début des travaux du Comité.

Annexe D – Liste des participants à l’audience

Audience le 14 juin 2012 :

Catherine A. Lawrence Craig Collins-Williams Ministère de la justice Section litige civil 12e étage, Édifice de l’Est, 234 rue Wellington, Ottawa, ON, K1A 0H8

Counsel for the Government of Canada

Chantal Châtelain Vincent de l'Etoile Langlois Kronström Desjardins, s.e.n.c.r.l. 1002, rue Sherbrooke Ouest, 28e étage Montréal, Qc, H3A 3L6

Counsel for the Military Judges

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