Rapport de surveillance externe – Troisième rapport d’étape

Lettre au ministre de la Défense nationale

8 mai 2024

L’honorable Bill Blair, C.P., C.O.M., député.

Ministre de la Défense nationale

Quartier général de la Défense nationale

Édifice Major-général George R. Pearkes

101, promenade du Colonel-By

Ottawa (Ontario) K1A 0K2

Monsieur le Ministre,

Conformément au mandat de mon engagement en tant que surveillante externe, j’ai le plaisir de vous remettre mon troisième rapport d’étape, dans les deux langues officielles. 

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes sentiments distingués.

Jocelyne Therrien

Pièce jointe : Rapport de surveillance externe – Troisième rapport d’étape

Introduction

  1. Conformément à la recommandation no48 de l’examen externe indépendant et complet (EEIC) réalisé par l’ancienne juge Louise Arbour, je suis tenue de fournir une évaluation des progrès réalisés par le ministère de la Défense nationale (MDN) et les Forces armées canadiennes (FAC) en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations de l’EEIC et de présenter au ministre un rapport d’étape semestriel. Voici un troisième rapport d’étape.
  2. En 2021, l’examen du problème de l’inconduite sexuelle au sein du MDN et des FAC a été confié à l’ancienne juge Louise Arbour. En 2022, elle a présenté ses conclusions à la ministre de la Défense nationale. Son mandat consistait à :
    • faire la lumière sur les causes;
    • déterminer les obstacles au signalement;
    • évaluer l’efficacité de la réponse après un signalement; et
    • suggérer des moyens de prévenir et d’éradiquer le harcèlement et l’inconduite sexuelle.
  1. L’EEIC s’est concentré sur un large éventail de questions, y compris, par exemple, le traitement des plaintes par le MDN et les FAC, le système de justice militaire, les moyens administratifs pour traiter l’inconduite, le recrutement, l’utilisation d’une période probatoire, le processus d’évaluation du rendement et de promotion des FAC, la planification de la succession et le rôle des Collèges militaires royaux.
  1. Avant l’EEIC, le MDN et les FAC avaient fait l’objet de plusieurs autres examens qui avaient donné lieu à d’autres recommandations relatives à l’inconduite :
    • Examen externe sur l’inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes, Marie Deschamps, 2015.
    • Comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, Bureau du vérificateur général, 2018.
    • Entente de règlement définitive concernant le recours collectif Heyder-Beattie, 2019.
    • Rapport de l’autorité du troisième examen indépendant de la Loi sur la défense nationale, Morris Fish, 2021.
    • Rapport final du Groupe consultatif de la Ministre sur le racisme systémique et la discrimination, 2022.
  1. Dans mon premier rapport d’étape, j’avais conclu que le MDN et les FAC avaient besoin d’un cadre stratégique, fondé sur des principes, qui indiquerait la manière dont l’organisation envisageait de donner suite aux nombreuses recommandations découlant de ces examens externes, en donnant la priorité à celles qui entraîneraient les changements fondamentaux nécessaires à l’évolution de la culture. À ce moment, j’ai constaté qu’il y avait eu une certaine priorisation, mais qu’elle était établie au sein d’organisations distinctes du MDN et des FAC et que les priorités semblaient être déterminées davantage en fonction de la disponibilité des ressources et les problèmes de capacité que selon une vision institutionnelle globale axée sur un ensemble de principes clairs.
  2. Le MDN et les FAC ont depuis lors élaboré un plan pluriannuel indiquant les dates auxquelles les recommandations seront mises en œuvre. Ce plan sera bientôt rendu public. Bien que certains puissent être déçus par le temps nécessaire pour effectuer certains des changements requis, il fixe au moins des étapes que le sous-ministre, le chef d’état-major de la Défense et le ministre de la Défense nationale ont approuvées, ce qui garantit une responsabilité supérieure. La stratégie d’évolution de la culture (SEC) est étroitement liée à ce plan et définit le rôle que chaque niveau de l’organisation doit jouer pour que la stratégie soit fructueuse. Je remarque que la SEC confirme que la mesure du rendement se concentrera sur les résultats plutôt que sur la réalisation d’activités. Dans le passé, le fait que les FAC présentaient des tableaux d’activités achevées plutôt que de mesurer les résultats a été cité comme l’une des raisons de l’échec apparent des efforts précédents en matière de changement de culture. Si la mesure des résultats n’est pas une tâche aisée, elle est cruciale dans le cadre de la gestion du changement.
  3. Dans mon second rapport d’étape, j’ai réitéré que le niveau d’engagement en faveur du changement de culture était très élevé, mais que certains processus internes constituaient un obstacle majeur à la réalisation de progrès rapides. Le fait que plusieurs années soient nécessaires pour mettre en place des changements de politique nuit à la mise en place des changements structurels et de la façon de penser.
  4. Dans ce rapport, je commente l’état d’avancement de la mise en œuvre de l’EEIC et, dans certains cas, les recommandations connexes des autres rapports énumérés ci-dessus. À ce titre, il peut être interprété comme un bilan des progrès réalisés jusqu’à présent, deux ans après la publication du rapport de l’EEIC.
  5. Mes observations et conclusions sont fondées sur des entretiens et sur l’examen de la documentation, des politiques et des données. Je rencontre régulièrement les personnes responsables de la mise en œuvre pour m’enquérir des changements progressifs réalisés depuis le dernier rapport. Une fois de plus, j’affirme qu’il existe un fort désir d’apporter le changement qui rétablira la confiance dans les FAC en tant que milieu de travail professionnel et inclusif. Il reste toutefois encore beaucoup de travail à accomplir, notamment l’alignement des ensembles de données qui permettront d’améliorer l’analyse de la situation et les rapports de rendement.

Constatations du troisième rapport

Clarification des définitions et des politiques connexes

  1. Les recommandations no1 à no 4 de l’EEIC portent sur les définitions en lien avec l’inconduite sexuelle et sur la clarté avec laquelle les FAC communiquent à leurs membres ce qui constitue une conduite interdite.
  2. Tout d’abord, il a été proposé d’abolir le terme « inconduite sexuelle », qui ne fait pas suffisamment la distinction entre ce qui constitue un crime et ce qui est une forme de harcèlement et autres activités interdites. Il a donc été recommandé que toutes les politiques pertinentes soient plus précises quant à ce qui constitue une agression sexuelle et un harcèlement sexuel, en faisant référence au Code criminel pour l’agression sexuelle et au Code canadien du travail pour le harcèlement sexuel. En ce qui concerne la définition de l’agression sexuelle, l’EEIC a ajouté que les FAC devraient définir l’agression sexuelle comme « un attouchement de nature sexuelle, intentionnel non consensuel ».
  3. La manière dont les FAC définissent la conduite dans sa politique est fondamentale. L’EEIC a conclu que l’état « actuel » créait une confusion quant à « la manière de naviguer dans le système, en particulier lorsque la conduite peut relever de plusieurs catégories, et empêche la mise en place de voies de recours claires et prévisibles ». La clarté de ce qui est considéré comme un comportement inapproprié représente sans doute la première étape de l’éradication. L’ancien juge Fish, dans son examen du système de justice militaire en 2021, a également souligné la nécessité d’affiner ce qui constitue une infraction militaire en vertu de la Loi sur la défense nationale (LDN), en se référant particulièrement à l’imprécision du paragraphe 129(1) de la LDN tel qu’il existe actuellement. Il a recommandé la création de nouvelles infractions militaires plus précises pour les inconduites sexuelles et les comportements haineux.
  4. Le MDN et les FAC ont entrepris la révision de plusieurs instruments politiques et outils d’orientation en réponse à l’EEIC. Il s’agit notamment des Directives et ordonnances administratives de la Défense (DOAD) 9005-1, qui constituent la politique générale actuelle définissant les comportements inacceptables et la manière dont l’organisation doit répondre aux allégations de comportement sexuel inapproprié. La politique elle-même sera complétée par des instructions détaillées et une mise à jour du Spectre d’inconduite sexuelle. Le Spectre est une référence conviviale qui explique, dans un langage simple, certains des concepts relatifs à ce sujet, comme le fait qu’un déséquilibre de pouvoir est une caractéristique commune qui peut affecter la capacité de la personne concernée à indiquer expressément que le comportement sexuel est importun. Le Spectre fournit une liste complète de ce qui constitue un milieu de travail sûr et inclusif, une conduite inacceptable et, enfin, des actes criminels. L’ensemble des orientations sera diffusé au cours de l’été, y compris un message général des Forces canadiennes (CANFORGEN) sur les définitions révisées.
  5. L’EEIC a également recommandé de modifier les définitions des relations personnelles, reprenant les préoccupations exprimées en 2015 par l’ancienne juge Deschamps, qui avait déclaré que les politiques devaient être précisées en ce qui concerne les relations entre militaires de grades différents lorsque ces relations ne sont pas divulguées. Lors de sa comparution devant le Comité permanent de la condition féminine en 2021, l’ancienne juge Deschamps a déclaré : « En raison de la structure organisationnelle des Forces armées canadiennes, il y a un risque inhérent d’abus de pouvoir. » La DOAD particulière sur les relations personnelles a été revue à la lumière des recommandations des deux anciennes juges. Je crois savoir que ce dernier projet fait l’objet de consultations, mais il est prévu d’obtenir des approbations initiales au sein de deux comités distincts, en mai et en juillet.
  6. En ce qui concerne le harcèlement, l’alignement des politiques sur le Code canadien du travail sera supposément terminé à l’automne. L’EEIC a insisté sur le fait que les FAC devraient être soumises aux mêmes règles en matière de harcèlement (y compris le harcèlement sexuel) que le reste de la fonction publique. En 2015, l’ancienne juge Deschamps a déclaré que la définition du harcèlement sexuel des FAC était plus étroite et plus complexe que celle formulée par la Cour suprême du Canada et qu’elle n’englobait pas tous les comportements inappropriés.
  7. Au cours des prochains mois, le MDN et les FAC prévoient d’aligner les définitions sur une multitude d’énoncés politiques et d’outils d’orientation, reflétant ainsi l’intention des recommandations de l’EEIC. Ces changements seront communiqués de manière élargie aux membres des FAC alors que les travaux se poursuivent pour mettre à jour officiellement les instruments politiques. Je serai en mesure de fournir une mise à jour plus complète dans mon prochain rapport semestriel.

Justice militaire : éliminer les champs de compétence concurrents concernant les infractions sexuelles en vertu du Code criminel

  1. En mars de cette année, le gouvernement a déposé un projet de loi qui aurait pour effet de soustraire du champ de compétence des FAC en matière d’enquêtes et de poursuites les infractions sexuelles visées par le Code criminel commises au Canada. Le projet de loi C-66 répond également à plusieurs recommandations formulées par l’ancien juge Fish dans son examen du système de justice militaire, notamment en ce qui concerne le processus de nomination du grand prévôt des Forces canadiennes (GPFC), du directeur des poursuites militaires (DPM) et du directeur du Service d’avocats de la défense (DSAD), afin d’en accroître leur indépendance.
  2. Très récemment, un protocole d’entente a été conclu entre le ministre de la Défense nationale et le solliciteur général et procureur général de l’Ontario afin de jeter les bases d’une coordination entre les participants pour soutenir la mise en œuvre de la recommandation no 5, y compris les discussions relatives aux ressources. Il ouvre également la voie à une communication continue entre les signataires afin d’établir des pratiques et des protocoles au niveau opérationnel pour des détails tels que l’échange de renseignements, la coordination de l’aide aux victimes et la préservation des preuves.
  3. Pour l’Ontario, un groupe de travail a récemment été créé pour commencer à travailler sur un tel protocole entre le bureau du GPFC et celui du solliciteur général. Les membres comprennent des représentants du Bureau du solliciteur général de l’Ontario, du bureau du GPFC, des services provinciaux d’aide aux victimes et du Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle (CSRIS). Ce travail permettra de définir la meilleure façon de coopérer avec tous les services de police de l’Ontario.
  4. Il s’agit d’étapes importantes, car la province de l’Ontario est susceptible de recevoir la plus grande partie des dossiers. Le protocole d’entente et la création du groupe de travail serviront de modèles pour la coordination avec d’autres provinces à l’avenir.

Examens administratifs en lien avec la libération de membres pour cause d’inconduite

  1. La recommandation no6 de l’EEIC propose une évaluation externe de 52 dossiers administratifs dans lesquels le quartier général de la Défense nationale (QGDN) tranchait pour le maintien en poste sans restrictions professionnelles alors que les commandants d’unité recommandaient la libération. Cette évaluation n’a pas encore eu lieu, mais plusieurs mesures ont été prises pour donner suite à la recommandation, comme la rédaction d’un Énoncé de travaux et d’autres dispositions de la procédure de passation de marchés.
  2. Je pense que cet exercice sera utile pour déterminer si l’approche des FAC en matière de détermination des résultats dans les dossiers d’inconduite est conforme à un régime moderne. On m’a dit que l’examen devrait être achevé en 2025. Jusqu’à présent, il s’agit d’une occasion manquée. La jurisprudence relative à l’inconduite en milieu de travail évolue rapidement, ce qui conduit certaines organisations à envisager des paramètres particuliers tels que le congédiement par présomption pour certains actes. Lors d’un récent examen de 250 décisions liées à l’inconduite sexuelle au sein de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), il a été constaté qu’« une réticence inexpliquée subsiste quant à l’imposition d’un congédiement ou même d’une rétrogradation, et on continue d’avoir trop souvent recours à la mutation et à la confiscation du solde. »Footnote 1 . En outre, dans de nombreux cas, « l’intérêt public » n’a pas été pris en compte, malgré les attentes plus élevées en matière de conduite des policiers. Personne ne sait à l’heure actuelle si le système de conduite des FAC souffre des mêmes problèmes, mais l’examen des 52 dossiers serait une bonne première étape.

Plaintes concernant le harcèlement sexuel et la discrimination fondée sur le sexe

  1. L’un des principaux thèmes de l’EEIC était la nécessité de transférer au civil certains éléments du processus de gestion des plaintes. Ainsi, les recommandations no7 et no 9 se concentrent sur le rôle de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP), en tant que destinataire direct des plaintes des membres des FAC concernant le harcèlement sexuel et la discrimination fondée sur le sexe. En 2023-2024, la CCDP a reçu 25 plaintes, qui en sont à différents stades du processus. La perspective externe que la CCDP apporte à son examen des cas de harcèlement et de discrimination devrait, à mon avis, être avantageuse pour les FAC dans la définition des problèmes systémiques potentiels.
  2. Dans le cadre de ce processus, les FAC jouent le rôle de « répondants » et le succès de cet effort dépendra de la capacité des deux parties à engager un dialogue en temps utile sur la meilleure façon de résoudre chaque cas individuel. Récemment, des représentants de la CCDP ont rencontré le personnel des unités de services de gestion des conflits et des plaintes (SGCP) des bases et des escadres afin d’expliquer le rôle de la CCDP et le fonctionnement du processus.

Griefs concernant le harcèlement sexuel et la discrimination fondée sur le sexe

  1. Les FAC reçoivent chaque année environ 1 000 griefs portant sur de nombreux sujets. En ce qui concerne les griefs liés particulièrement au harcèlement sexuel et à la discrimination fondée sur le sexe ou les allégations de représailles pour avoir signalé, l’EEIC a recommandé que le Comité externe d’examen des griefs militaires (CEEGM) soit obligatoirement impliqué. Ces griefs doivent être considérés comme prioritaires et transmis rapidement au CEEGM pour examen. 
  2. Toutefois, la base de données qui contient des renseignements sur les griefs ne comprend pas de catégorie distincte pour le harcèlement sexuel et la discrimination fondée sur le sexe ni pour les représailles. Il devient donc difficile de déterminer le nombre exact de griefs qui ont été déposés à ce sujet. 
  3. Cependant, depuis le mois de février de cette année, les membres des FAC peuvent déposer des griefs au moyen d’un formulaire numérique facilement accessible. Le formulaire comprend une catégorie distincte sur « l’inconduite ». Cette procédure signifie que le Chef – Conduite professionnelle et culture (CCPC) dispose désormais d’un portrait plus complet des types de griefs qui sont soumis et peut s’assurer que les données saisies dans la base de données sont exactes. Les sept cas identifiés de manière centralisée ont été transmis au CEEGM qui en font actuellement l’examen. 
  4. L’objectif de cette recommandation était de veiller à ce que ces griefs soient traités efficacement, par des experts en la matière ne faisant pas partie de la chaîne de commandement, et d’accroître leur visibilité au sein de l’organisation, en particulier parmi les hauts dirigeants. La procédure est en cours d’affinement pour répondre à cet objectif, y compris la désignation du CCPC comme l’autorité initiale pour ces types de griefs. Les modifications des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC) sont en cours. 
  5. L’ancien juge Fish a également commenté la procédure de règlement des griefs des FAC lors de son examen en 2020-2021 et a formulé plusieurs recommandations à l’intention des FAC. Le remaniement général de la procédure de règlement des griefs actuellement en cours répondra à une grande partie des préoccupations soulevées lors de cet examen.

Obligation de signaler comme obstacle au signalement

  1. En 2023, le ministre de la Défense nationale a annoncé que les dispositions du règlement relatives à l’obligation de signaler seraient officiellement abrogées. À la date du présent rapport, ces dispositions restent inchangées. S’il est vrai que les intentions de l’abrogation ont déjà été communiquées, le problème est l’incidence de cette phase intermédiaire sur d’autres politiques. Jusqu’à ce que l’abrogation soit officielle, toutes les références à l’obligation de signaler dans les nombreuses politiques et directives des FAC reflètent une approche désormais dépassée de la réponse aux allégations d’inconduite de nature sexuelle.
  2. Il s’avère utile de rappeler quelques éléments de l’histoire de l’obligation de signaler. Elle a été désignée à maintes reprises comme un obstacle au signalement de l’inconduite sexuelle par les personnes affectées. Elle a été jugée problématique par le Bureau du vérificateur général en 2018 et, plus récemment, elle a donné lieu à des recommandations de la part des anciens juges Arbour et Fish. En décembre 2022, la ministre de l’époque a informé le Parlement qu’un groupe de travail élaborerait le cadre politique requis. L’orientation était claire, mais le débat s’est poursuivi. On m’a dit que les modifications nécessaires au règlement étaient en cours pour que l’abrogation entre en vigueur en juillet de cette année.

Droits des victimes et services connexes

  1. Grâce à l’entrée en vigueur du projet de loi C-77 en juin 2022, les droits des victimes liés aux infractions militaires ont été officialisés, ce qui signifie, par exemple, que les victimes ont accès à des agents de liaison de la victime (ALV) qui les aident à s’orienter dans le processus de justice militaire. Je note que l’une des dispositions du projet de loi C-66 récemment déposé prévoit l’accès aux services de liaison de la victime pour les personnes qui agissent au nom des victimes d’infractions militaires.
  2. En outre, le Groupe de la police militaire des FAC gère un programme de services aux victimes qui leur apporte un soutien et les oriente vers les services militaires et les ressources communautaires civiles. Ce travail est réalisé en étroite collaboration avec le CSRIS ainsi qu’avec les programmes civils de services aux victimes dans tout le pays. En ce qui concerne les infractions au Code criminel qui font l’objet d’une enquête ou de poursuites dans le cadre du système de justice civile, le CSRIS peut également désigner un conseiller pour apporter un soutien aux personnes affectées et coordonner les services.

Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle

  1. L’ancienne juge Arbour était d’avis que le mandat du CSRIS devait être adapté pour cristalliser son rôle de fournisseur de ressources et de services à toute personne s’estimant directement affectée. Elle a recommandé que le CSRIS ne soit plus directement impliqué dans l’instruction et le suivi. Au cours des deux années depuis l’EEIC, les services aux victimes ont été étendus géographiquement et à d’autres groupes tels que les anciens membres des FAC, les employés actuels et anciens du MDN et les membres de la famille des personnes affectées. Le dernier rapport annuel du CSRIS indique que plus de 1 400 nouveaux dossiers ont été créés en 2022- 2023Footnote 2 . La demande de services du CSRIS semble augmenter d’une année à l’autre.
  2. Il est intéressant de noter que de nombreuses personnes qui appellent la ligne 24/7 sont des membres de la chaîne de commandement qui cherchent des conseils sur la manière de traiter les allégations d’inconduite. Il s’agit à mon avis d’une bonne tendance. Elle démontre que la chaîne de commandement s’efforce de faire ce qu’il faut en demandant conseil à des professionnels. Les personnes affectées par une inconduite et la chaîne de commandement peuvent recevoir des conseils de la part des conseillers du CSRIS et des membres de l’équipe de liaison militaire (ELM) qui soutient le CSRIS. Ils constituent une source d’information tierce et objective sur le fonctionnement des processus militaires. Je pense qu’ils contribuent à faire tomber certaines des barrières rencontrées par les victimes. L’accès rapide à ces renseignements pour la chaîne de commandement peut contribuer à « éduquer » les personnes responsables de traiter les situations d’inconduite sexuelle dans leurs unités, notamment en ce qui concerne la création involontaire de préjudices secondaires.
  3. Les recommandations de l’EEIC concernant le CSRIS ont toutes été mises en œuvre, y compris le programme d’assistance juridique, une initiative qui avait également été recommandée par l’ancien juge Fish. Actuellement, l’aide consiste à rembourser les frais de justice admissibles des personnes ayant subi une inconduite sexuelle. La prochaine étape de ce programme consistera à recruter un avocat et un parajuriste qui auront comme objectif de fournir des renseignements et des conseils juridiques directement aux clients du CSRIS, ce qui permettra aux personnes affectées d’obtenir plus facilement de l’aide. Ceux-ci seront d’autant plus importants compte tenu de la décision de transférer les affaires relevant du Code criminel vers le système de justice pénale civil.
  4. L’avenir du CSRIS dépend de l’accès à des fonds suffisants pour mettre en œuvre les programmes et services de base tels que les conseils juridiques indépendants et le programme de soutien par les pairs, qui est mis en œuvre conjointement avec Anciens Combattants Canada (ACC). Pour assurer la stabilité, le gouvernement s’est engagé à augmenter le budget de base du CSRIS pour 2025-2026. Jusqu’à présent, le financement du CSRIS a été complété par des ajustements en cours d’année. Il est donc difficile pour l’équipe de gestion du CSRIS de planifier ses activités. Il existe actuellement des déficits qui pourraient affecter certains des programmes de base décrits ci-dessus.

Procédure de recrutement plus courte, évaluation et libération anticipée des candidats non convenables

  1. Plusieurs recommandations de l’EEIC visent à rendre la procédure de recrutement plus efficace tout en introduisant une méthode efficace pour la libération anticipée des recrues non convenables.
  2. Plusieurs initiatives du Chef du personnel militaire (CPM) sont en cours pour améliorer la capacité du système des FAC à recruter efficacement. Les normes médicales de l’enrôlement commun sont en cours de révision afin de déterminer si les candidats souffrant de pathologies préexistantes pourraient quand même s’enrôler dans les FAC, à condition que leur état de santé ne les empêche pas de répondre en toute sécurité aux exigences physiques de l’instruction de base et celles du métier ou de la profession pour lequel ils postulent. Une entente d’échange de renseignements a également été signée avec Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) pour permettre un meilleur accès aux renseignements qui aideront à déterminer l’admissibilité des demandeurs qui sont des résidents permanents.
  3. En examinant ses paramètres, le CPM a constaté que les FAC perdaient de nombreux candidats juste avant l’administration du test d’aptitude des Forces canadiennes (TAFC). Par conséquent, à titre expérimental, certaines professions dont les candidats sont titulaires d’un diplôme universitaire ou collégial et pour les candidats qui satisfont déjà aux exigences d’instruction de leur profession en sont exemptés. Selon le Groupe de la Génération du personnel militaire (GGPM), plus de 1 800 personnes sont actuellement traitées de cette manière au 18 avril 2024. Pour elles, le TAFC est appliqué plus tard au cours de l’instruction de base. Les FAC mettent également à jour le test lui-même afin de s’assurer qu’il reste prédictif de l’aptitude à exercer la profession choisie par le candidat.
  4. En ce qui concerne l’établissement d’une période probatoire, comme le recommande l’EEIC, le CPM a mis sur pied un groupe de travail qui étudie les moyens d’y parvenir. Une nouvelle procédure sera mise à l’essai dans les prochains mois, selon laquelle les membres qui ne respectent pas la conduite professionnelle et les attentes éthiques des FAC pendant qu’ils sont dans les écoles et unités d’instruction initiales seront soumis à un comité d’examen de la conduite, qui prendra une décision concernant leur libération. Cette procédure nécessiterait de modifier les politiques et, possiblement, les autorisations de libération des FAC.
  5. La mise à jour de la Politique de défense récemment publiée définit la probation comme un moyen de rendre le recrutement plus efficace. Comme l’a souligné l’ancienne juge Arbour en 2022, la capacité de libérer des membres avec une charge administrative moindre que celle qui existe actuellement entraînerait directement la rationalisation du processus de recrutement. L’instauration d’une période probatoire présente un avantage certain. La mise en œuvre est actuellement prévue pour l’an prochain.

Formation militaire et formation professionnelle

  1. L’automne dernier, j’ai signalé que le MDN et les FAC misaient sur la création d’un système d’éducation qui servirait d’outil de prévention dans ses efforts à plus long terme pour créer un milieu de travail respectueux et inclusif, principalement en raison d’un changement substantiel non seulement dans le contenu, mais aussi dans les méthodes d’enseignement. Mon évaluation s’est basée sur les éléments suivants :
    • accent porté davantage sur la qualité des éducateurs;
    • apprentissage plus pratique et interactif;
    • orientation vers le leadership fondé sur le caractère; et
    • développement d’un cadre de perfectionnement professionnel qui couvre la carrière d’un membre, tant pour les officiers que pour les militaires du rang.
  1. L’Académie canadienne de la Défense (ACD), l’organisation du MDN et des FAC responsable de l’éducation de tous les membres des FAC, a travaillé en étroite collaboration avec la CCPC sur les concepts à inclure dans chacune des périodes de développement. Ces efforts ont mené à une refonte de plusieurs programmes, notamment les programmes de qualification militaire de base de l’École de leadership et de recrues des Forces canadiennes (ELRFC) et le programme de leadership intermédiaire de l’Institut Osside. Des travaux sont en cours pour intégrer le leadership fondé sur le caractère dans d’autres segments du continuum éducatif.
  2. Les FAC continuent à travailler sur les facteurs de dissuasion liés à certains postes d’instructeurs afin d’attirer les meilleurs enseignants possibles. Elles créent également une norme commune à l’ensemble des FAC pour sélectionner les candidats aux postes d’instructeurs. Malgré les défis actuels en ce qui concerne les postes vacants dans les FAC, l’organisation s’est engagée à doter en personnel 100 % des postes de l’ELRFC.
  3. En ce qui concerne la recommandation de l’EEIC selon laquelle les FAC devraient augmenter les possibilités de détachement, en particulier pour les officiers généraux, la ministre de la Défense a noté dans son rapport de décembre 2022 que, bien que les officiers généraux puissent bénéficier de ces détachements, il conviendrait également de prendre en considération les officiers subalternes. Une liste actualisée des détachements, qui pourrait inclure les grades inférieurs aux officiers généraux, a fait l’objet d’une discussion très récemment au sein d’un comité de gouvernance militaire de niveau supérieur. Une fois que la structure de gestion des talents nécessaire aura été créée, les FAC définiront le mandat des détachements prioritaires et iront de l’avant, sous réserve de la capacité et du soutien d’autres ministères gouvernementaux et d’organisations externes.

Collèges militaires royaux

  1. L’EEIC a formulé plusieurs recommandations au MDN et aux FAC sur les collèges militaires, y compris la nécessité d’un examen externe des « coûts, bénéfices, avantages et inconvénients » de l’approche actuelle par rapport à d’autres modèles d’enseignement universitaire. La Commission d’examen des collèges militaires canadiens (CECMC) a été créée. Ses sept membres possèdent une expertise dans divers domaines, notamment l’éducation, le travail social, la gestion et le leadership universitaires, les ressources humaines, ainsi qu’une expérience de la haute fonction publique et des FAC. Le processus comprendra un examen de la structure de commandement relative à la responsabilité et à l’autorité vis-à-vis l’escadre d’élèves-officiers. À ce jour, la Commission a rencontré de nombreux responsables du MDN et des FAC ainsi que certains des auteurs de rapports antérieurs sur les collèges, y compris l’ancienne juge Arbour. La Commission a visité chaque collège à deux reprises depuis le début de son examen en janvier de cette année et a rencontré la haute direction des collèges ainsi que leurs enseignants et leur personnel. Le rapport final de la Commission devrait être présenté au début de l’année 2025.
  2. Il a également été recommandé que le sondage de départ actuellement mené par les FAC soit élargi pour inclure les expériences des élèves-officiers en matière d’inconduite sexuelle et de discrimination. Le MDN et les FAC ont choisi d’aller au-delà de la recommandation en étendant le sondage aux élèves-officiers de chaque année de leur programme. Le groupe de recherche du MDN et des FAC a élaboré un sondage à cette fin, qui a été administré en 2023 à l’ensemble des élèves-officiers du Collège militaire royal du Canada à Kingston (CMR) et du Collège militaire royal de Saint-Jean (CMR Saint-Jean). Les résultats ont été analysés et ont fait l’objet d’une discussion avec les élèves-officiers et le personnel des deux établissements lors d’assemblées générales. Ils ont également été présentés à la CECMC. Ils serviront également de référence pour suivre l’évolution de la situation au fil des ans. Le deuxième sondage est en cours.
  3. Entretemps, l’ACD travaille sur des changements qui pourraient affecter les fondements structurels d’une culture sexualisée. Par exemple, en référence à la recherche qui indique l’incidence positive d’une plus grande proportion de femmes sur le lieu de travail, l’ACD cherche des moyens d’augmenter la proportion de femmes qui fréquentent les collèges. Elle a également commandé récemment un examen externe du test d’aptitudes physiques, y compris le contexte dans lequel il est administré, afin de déterminer les obstacles potentiels à un accès équitable.

Évaluations du rendement, promotions et planification de la relève

  1. Plusieurs des recommandations de l’EEIC visent à garantir que les futurs dirigeants des FAC soient sélectionnés sur la base de renseignements complets, en mettant davantage l’accent sur le caractère de la personne. Tout en reconnaissant que les FAC ont pris des mesures positives pour améliorer la sélection de ses dirigeants, l’EEIC a formulé les recommandations suivantes :
    • que les outils d’évaluation actuellement utilisés pour les promotions d’officiers généraux fassent l’objet d’un examen externe, que l’utilisation de ces outils soit étendue à d’autres grades et qu’une assistance externe soit fournie au ministre pour l’approbation des promotions des officiers généraux;
    • que la divulgation officielle et systémique d’inconduites passées ou présentes par les superviseurs et les membres soit comprise dans le processus d’évaluation du rendement;
    • que les comités de planification de la relève examinent systématiquement les inconduites par le biais d’une liste d’examen des incidents; et
    • qu’une fiche d’inconduite soit établie pour les candidats à une promotion aux grades de lieutenant-colonel, de capitaine de frégate ou à un grade supérieur et d’adjudant-chef ou premier maître de première classe.
  1. Bon nombre de ces mesures sont à différents stades de leur préparation en vue du lancement d’une nouvelle politique, de nouveaux formulaires et d’orientations pour les membres. Par exemple, un nouveau formulaire a été créé pour documenter la vérification de la diligence raisonnable effectuée par les superviseurs pour les membres dont une promotion est envisagée. Le formulaire comprend également une auto-attestation par le membre de la présence ou de l’absence de mesures administratives ou disciplinaires ou d’une condamnation pour infraction civile. Un autre nouveau formulaire comprendra l’attestation par le commandant que le dossier personnel de l’unité et les fiches de conduite ont été examinés. Ces deux formulaires devraient être officiellement accessibles cet été. Le manuel des comités de sélection sera mis à jour en conséquence, à temps pour le prochain comité de sélection national qui se tiendra à l’automne.
  2. L’évaluation externe des outils d’évaluation utilisés pour les promotions d’officiers généraux n’a pas progressé, car les FAC prévoient d’utiliser un ensemble d’outils différent à partir de 2025. J’ai cru comprendre que le CPM avait l’intention de faire appel à une ressource externe pour l’examen de ce qui sera la nouvelle série d’outils d’évaluation l’an prochain.
  3. En ce qui concerne la planification de la relève, un projet de politique comprenant des instructions relatives à l’établissement et à la tenue de listes d’examens des incidents devrait être promulgué à la fin de l’année. Il comprend des orientations sur la manière d’atténuer les préjugés susceptibles d’avoir une « incidence négative sur différents groupes ». En ce qui concerne la composition des comités, l’EEIC avait recommandé la participation d’un membre externe au MDN et aux FAC pour certains grades. Jusqu’à présent, l’approche a consisté à inclure un membre des FAC provenant d’un environnement différent ou de niveau 1 qui ne fait pas partie de la chaîne de commandement d’un autre membre du comité ou de l’autorité approbatrice, ainsi qu’un civil de l’équipe de la Défense. Le CANFORGEN publié l’année dernière sur la planification de la relève précise également que les officiers qui organisent les comités de la relève « doivent prévoir une représentation significative des groupes désignés, tels que les femmes, les peuples autochtones, les personnes en situation de handicap, les minorités visibles et les membres des communautés LGBTQ2 Plus ».
  4. L’ancienne juge Arbour a également recommandé que les FAC établissent des cibles progressives pour la promotion des femmes « en vue d’augmenter la proportion de leur représentation dans les grades d’officiers généraux au-dessus de leur niveau de représentation dans l’ensemble de la main-d’œuvre des FAC. Le MDN et les FAC travaillent actuellement à l’établissement d’objectifs de représentation au sein de chaque groupe professionnel militaire. Parallèlement, ils mettent au point un processus permettant aux membres de se déclarer volontairement membres d’un groupe désigné, car les FAC souhaitent reproduire les cibles progressives pour tous les groupes désignés.
  5. Comme je l’ai souligné dans mon précédent rapport, le chef d’état-major de la Défense (CEMD) a également entrepris un exercice proactif avec ses hauts dirigeants pour gérer les talents des femmes, avec la volonté d’étendre cet exercice à d’autres groupes en quête d’équité qui ont le potentiel d’accéder aux postes les plus élevés dans les FAC. L’objectif est de créer les conditions adéquates sur un horizon de dix ans en matière d’expérience professionnelle et de possibilités de perfectionnement professionnel pour permettre leur progression. Les FAC ont récemment pris des mesures pour éliminer l’un des obstacles auxquels se heurtent les femmes. Ils ont créé des postes supplémentaires de capitaine (marine) ou colonel dans des professions particulières de soutien et de spécialistes présentant des désavantages structurels en matière de promotion, afin d’offrir davantage de possibilités d’accéder aux grades d’officiers généraux dans des professions où les femmes sont plus nombreuses. 

Libérations pour raisons médicales

  1. Le rapport de l’EEIC recommandait aux FAC de réviser leur politique d’universalité du service sous l’angle de l’analyse comparative entre les sexes Plus (ACS Plus). L’ancienne juge Arbour a fait référence à des données sur la surreprésentation des femmes dans les catégories de libération pour raisons médicales, ajoutant que les victimes d’inconduite peuvent être indûment affectées. Comme je l’ai indiqué dans mon rapport précédent, des contributions dans des domaines clés relatifs aux suppositions en matière d’ACS Plus ont été demandées à divers experts ministériels, ainsi qu’à un expert externe. La recommandation a été examinée du point de vue des femmes et des victimes d’inconduite sexuelle, quel que soit leur sexe. Le projet de politique passe maintenant par le processus de politiques générales. J’ai été informée que l’analyse ACS Plus sera prise en compte à tous les stades de la mise en œuvre.

Contribution et surveillance

  1. Plusieurs recommandations de l’EEIC portaient sur les renseignements que le ministre devrait recevoir sur les enquêtes relatives au harcèlement sexuel, à l’inconduite sexuelle et à la culture de leadership au sein de l’équipe de la Défense. Il a été décidé que le CCPC était la source la plus appropriée pour ces renseignements et, en décembre 2023, le ministre a reçu un rapport détaillant les résultats agrégés des sondages et d’autres renseignements glanés dans le système de suivi des inconduites sexuelles. Au début de l’année, la sous-ministre adjointe, Services d’examen (SMA[Svcs Ex]) a présenté un rapport sur les statistiques et les activités relatives aux enquêtes menées dans le cadre de la DOAD 7026-1, conformément aux exigences de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (LPFDAR). Ces deux rapports constituent une nouvelle pratique et seront fournis chaque année au ministre.
  2. L’EEIC a également recommandé que la cheffe des opérations du CSRIS soit en mesure d’ordonner de manière indépendante à la SMA(Svcs Ex) de mener une enquête administrative sur des questions relevant du mandat du CSRIS. Il existe désormais un accord de niveau de service entre ces deux organisations en ce qui concerne les critères de renvoi et le mécanisme à utiliser.
  3. En ce qui concerne les personnes nommées par le gouverneur en conseil (GEC), l’EEIC a recommandé la suppression de tout obstacle qui empêcherait le Bureau du Conseil privé (BCP) d’avoir accès aux dossiers personnels des candidats. J’ai examiné le formulaire de consentement que le MDN et les FAC ont inclus et que les candidats doivent signer afin d’autoriser l’accès à leur dossier personnel et une vérification policière. De plus, on leur demande de fournir de manière proactive des renseignements concernant toute mesure administrative ou disciplinaire dont ils ont fait l’objet, ainsi que toute condamnation criminelle civile. Cette procédure a été mise en place pour la récente nomination du juge-avocat général (JAG) et le sera également pour la prochaine nomination du chef d’état-major de la Défense (CEMD).
  4. En ce qui concerne la facilitation de la recherche par des groupes externes, un CANFORGEN interne sera communiqué d’ici peu pour informer les membres des FAC que leur pleine participation à la recherche est soutenue, tandis que la révision des documents de politiques officiels est en cours.
  5. En réponse à l’EEIC, une base de données en-ligne en matière de conduite et de culture a été lancée à l’automne 2023. Elle comprend plus de 150 documents internes de recherches et de politiques qui sont désormais accessibles au public. Cette base de données sera finalement intégrée dans une base de données plus large sur la conduite et la culture qui sera rendu public dans les prochains mois. On me dit que cette base de données en ligne fournira des « visualisations de données interactives sur les questions liées à la conduite et à la culture » dans l’ensemble de l’organisation.
  6. Enfin, l’EEIC a recommandé au ministre d’informer le Parlement des recommandations que le MDN et les FAC n’avaient pas l’intention de mettre en œuvre. Un rapport a été présenté au Parlement en décembre 2022 par la ministre de l’époque, détaillant la marche à suivre pour chacune des recommandations de l’EEICFootnote 3

Conclusion

  1. Deux ans se sont écoulés depuis le rapport de l’EEIC. Il s’agit de ma troisième mise à jour sur l’état d’avancement depuis ma nomination à l’automne 2022. Je crois que l’engagement de faire des FAC un meilleur endroit est toujours très présent. Cependant, une lourde charge bureaucratique pèse sur l’organisation. Elle présente une incidence majeure sur le calendrier.
  2. Par exemple, le processus d’établissement ou de modification des politiques et des documents d’orientation est un processus complexe, à plusieurs niveaux, qui comporte de nombreux points de contrôle. J’ai observé que de nombreuses personnes sont appelées à formuler des commentaires tout au long de la phase de développement, ce qui conduit parfois à de nombreuses versions qui continuent de circuler. Bien que je sois d’accord pour dire qu’une discussion avec des spécialistes et d’autres intervenants peut être nécessaire, je pense qu’à un moment donné, ces consultations deviennent contre-productives et entraînent des retards importants. Je constate également une tendance à créer des groupes de travail pour mettre au point les détails des nouvelles orientations politiques. Ces groupes sont valables si la discussion porte sur la meilleure façon d’activer une politique, mais pas s’ils rouvrent le débat sur les mérites de la politique.
  3. J’en ai parlé dans mon second rapport. Il s’agit d’une utilisation inefficace des ressources. Mais c’est encore davantage. Le message voulu peut devenir flou en raison de l’excès de détails résultant des consultations. Pire encore, le message général peut faire l’objet d’un compromis afin d’apaiser tous les points de vue. Je me mets à la place d’un commandant d’unité lorsque je lis les DOAD et autres documents de politique générale. Ce sont ces personnes qui sont le plus souvent confrontées à des comportements inappropriés. Ils ont besoin d’une orientation plus incisive.
  4. Cette situation m’amène à un autre point, à savoir la manière dont la responsabilité est mise en œuvre dans ces politiques. La formulation du paragraphe « Conséquences d’une non-conformité » dans les Directives et ordonnances d’instruction indique que les chefs militaires doivent prendre des mesures et que ces mesures dépendront « du niveau de risque évalué en fonction des incidences et de la probabilité d’un résultat défavorable découlant du cas de non-conformité et des autres circonstances entourant ce cas ». Je ne vois pas comment ce type de formulation peut conduire à une responsabilité exécutoire. Cela dit, la partie des politiques qui précise les rôles, les responsabilités et les pouvoirs de chacun est en fait instructive.
  5. Sur une note positive, des progrès ont été réalisés en ce qui concerne l’opérationnalisation du changement de culture. Depuis 2021, le MDN et les FAC ont créé une fondation pour soutenir l’évolution souhaitée, en commençant par la création du poste de CPCC. Alors que le plan de mise en œuvre complet fixe les étapes, la stratégie d’évolution de la culture (SEC) est le mécanisme par lequel un lieu de travail plus professionnel et plus inclusif sera institutionnalisé, au-delà des limites d’Ottawa.
  6. Des efforts sont en cours pour aider chaque commandement et chaque organisation de niveau 1 à créer sa propre voie vers le changement de culture. Bien que plusieurs entre eux aient déjà élaboré leurs propres stratégies, la SEC devrait garantir une approche structurée et plus cohérente.
  7. Il est également encourageant de voir les nombreuses initiatives qui ont créé des tribunes d’échange de pratiques exemplaires et l’apprentissage à partir de cas réels, de capsules basées sur des scénarios et de pollinisation croisée entre les différentes sections au sein du MDN et des FAC. Dans le passé, les discussions sur les cas de comportements inappropriés étaient pour la plupart limitées à l’unité. Aujourd’hui, ils font partie d’une conversation plus large.
  8. Cependant, il reste encore beaucoup à faire, notamment en veillant à ce que les politiques, les procédures et les mécanismes de responsabilité soient alignés de manière à ce que la réaction de l’organisation devant une inconduite sexuelle, lorsqu’elle se produit, soit cohérente du début à la fin.

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