La Roer (du 16 au 27 janvier 1945)

À la fin de 1944, les rivières et les ruisseaux sont utilisés comme barrières naturelles sur le front dans le Limbourg, province la plus méridionale des Pays-Bas. Bien que le sud du Limbourg est libéré par les Américains en septembre, certaines parties de la province restent occupées, formant un petit renflement triangulaire sur la ligne de front. Délimitée par les villes de Roermond et Sittard aux Pays-Bas ainsi que par Heinsberg en Allemagne, cette poche de résistance entre la Roer et la Meuse est connue sous le nom de Triangle de la Roer. Dans un nouvel effort des Alliés pour nettoyer la zone, l’opération BLACKCOCK voit une poussée du 12e Corps d’armée britannique pour forcer la 15e Armée allemande hors du Triangle de la Roer et la contraindre à battre en retraite au-delà des rivières Roer et Wurm, déplaçant ainsi la ligne de front plus loin en Allemagne. 1er Régiment de transport de troupes blindé canadien est la seule unité canadienne à participer à cette opération.

L’opération sera menée par trois divisions britanniques : la 7e Division blindée, la 52e Division (Lowland) et la 43e Division (Wessex). Le terrain est principalement défendu par deux divisions d’infanterie du 12e Corps SS allemand. Comme les positions de l’Armée allemande sont plus fortes sur le flanc droit près de la ligne Siegfried (ligne de fortifications allemandes s’étendant sur plus de 630 km), les Britanniques décident de lancer leur attaque sur le flanc gauche avec la 7e Division blindée devant avancer le long de l’axe Susteren-Linne en direction de Roermond, et nettoyer les villages au fur et à mesure de leur progression. La 52e Division attaquera ensuite au centre. Après avoir franchi la ligne de défense près de Hongen, elle dégagera la voie jusqu’à Heinsberg. Enfin, sur la droite, la 43e Division nettoiera la zone au sud-est de Dremmen en passant par la brèche fraichement ouverte dans les lignes de défense allemandes. L’opération nécessite une planification et des préparatifs considérables. Le temps maintenant froid, des tenues hivernales sont distribuées aux troupes et tant les véhicules que les chars sont peints en blanc en guise de camouflage.

Après avoir été retardée par un épais brouillard, l’opération BLACKCOCK débute le 16 janvier à 7 h 30, lorsque la 131e Brigade d’infanterie de la 7e Division blindée commence son avance. Ralentis par le brouillard, la neige et la boue, et devant traverser plusieurs cours d’eaux, les Alliés nettoient progressivement la zone. Le 1er Régiment de transport de troupes blindé canadien transporte les hommes du Devonshire Regiment dans leurs véhicules blindés « Kangaroo ». Après avoir repoussé une forte contre-attaque à Susteren et fait de nombreux prisonniers allemands, la 7e Division blindée finit de nettoyer la ville dans la soirée du 17 janvier. La division continue ensuite vers le village de Sint Joost. Le 20 janvier, l’infanterie et les unités blindées lancent leur première attaque, mais la résistance acharnée de la 176e Division d’infanterie allemande et du 24e Régiment de parachutistes Hübner fait en sorte que trois autres attaques sont nécessaires avant que le village ne soit finalement pris le 21 janvier. Les Allemands se replient vers le village de Montfort, laissant Sint Joost pratiquement détruit. Les Britanniques continuent leur avance vers Montfort, l’agglomération subissant de lourds bombardements depuis le 19 janvier. La 143e Escadre de l’Aviation royale canadienne participe aux raids aériens des 21 et 22 janvier. Lorsque les Britanniques libèrent Montfort le 24 janvier, de même que le village voisin de Linne le lendemain, de nombreux civils néerlandais sont alors morts ou sans toit.

Pendant ce temps, la 52e Division d’infanterie avance vers les positions défensives allemandes du village de Hongen où de violents combats se déroulent. Après l’avoir nettoyé, la 52e Division d’infanterie poursuit son avance vers les villages de Waldfeucht et Bocket, rencontrant une forte opposition à l’approche de Heinsberg. Ralentie par l’intensité des tirs d’artillerie et par la présence de glace et de neige, la division lance un assaut en tenaille sur la ville essentiellement réduite en ruines, et avance vers le centre avec précaution, éliminant plusieurs tireurs d’élite allemands dissimulés au fur et à mesure de sa progression. En dépit d’autres tirs d’artillerie et de quelques contre-attaques, la 52e Division d’infanterie termine le nettoyage de la ville le 24 janvier et maintient ses positions malgré les pertes subies. La 43e Division d’infanterie profite ensuite de cette brèche dans les lignes de défense allemandes pour marcher sur Hongen puis les villages de Waldenrath et Lindern, mais le mauvais temps, les routes parsemées de cratères, les champs détrempés et une forte opposition ralentissent sa progression. Néanmoins, en quelques jours, les Britanniques parviennent à nettoyer complètement le secteur au sud-est de Dremmen et à sécuriser le saillant de Heinsberg.

Le 27 janvier, la 7e Division blindée atteint Sint Odiliënberg, capturant du coup le pont qui permettra aux Alliés de traverser la Roer et d’atteindre Roermond. L’opération BLACKCOCK est en grande partie un succès, les divisions allemandes étant éliminées partout sauf dans la ville de Roermond et le secteur au sud de celle-ci. Les pertes britanniques au combat sont élevées, en particulier pour la 52e Division d’infanterie qui a percé les fortes positions défensives de Hongen. De nombreux soldats sont également évacués après être tombés malades à cause du froid extrême et du mauvais temps. Alors que les Alliés enregistrent plus de 1 150 pertes, on estime que les Allemands en subissent plus de 2 100.

Après la réussite de l’opération BLACKCOCK, la 1re Armée canadienne commence ses préparatifs en vue de l’opération VERITABLE qui sera menée à environ 60 km au nord du Triangle de la Roer. Dans le cadre d’un mouvement de tenailles effectué par les Alliés, les Canadiens commencent au nord le 8 février 1945 la traversée de la forêt de Reichswald et de la plaine du Rhin inondée, tandis qu’au sud, la 9e Armée américaine lance l’opération GRENADE le 23 février, traversant avec succès la rivière Roer juste au sud de Heinsberg. Le 1er mars 1945, Roermond est prise par les Américains. Fin mars 1945 commence l’invasion de l’Allemagne par les Alliés.

Le seul soldat canadien tué au cours de l’opération BLACKCOCK n’avait pas de sépulture connue. Sur la base d’un rapport soumis par un chercheur externe et avec le soutien de la Commonwealth War Graves Commission (en anglais seulement), le Comité d’examen du Programme d’identification des pertes militaires des Forces armées canadiennes a confirmé l’identification d’une tombe précédemment inconnue comme appartenant au soldat suivant :

  • Cavalier Johnston, Henry George, 1er Régiment de transport de troupes blindé , CBC, AAC
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