Examen du Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes

7 Février 2018

La date de clôture de présentation de réponses à ce document de discussion est le 18 mai 2018.

Les commentaires écrits doivent être transmis à l’adresse suivante :

Le ministère des Finances Canada diffusera certaines ou l’ensemble des réponses reçues ou pourrait fournir un résumé de celles-ci dans ses documents publics. Nous demandons aux parties qui soumettent des commentaires d’indiquer clairement le nom de la personne ou de l’organisation qu’il conviendra, le cas échéant, de considérer comme source des commentaires en question.

Afin d’assurer le respect de la vie privée et la confidentialité, nous vous demandons, lorsque vous présentez vos observations, de nous indiquer si :

L’information obtenue tout au long de ce processus de consultation est assujettie à la Loi sur l’accès à l’information et la Loi sur la protection des renseignements personnels. Si vous indiquez que vous voulez que votre soumission, ou une partie de celle-ci, demeure confidentielle, le ministère des Finances Canada déploiera tous les efforts raisonnables pour protéger cette information.


Avant-propos

Processus

Présentation
Chapitre 1 – Lacunes législatives et réglementaires
Chapitre 2 – Amélioration de l’échange de l’information superposée à la protection des droits des Canadiens

Chapitre 3 – Renforcement de la capacité de renseignement et de l’exécution de la loi

Blanchisseurs d’argent professionnels et insouciance

Transferts électroniques de fonds (TEF)

Monnaie en vrac

Ordonnances de ciblage géographique

Chapitre 4 – Modernisation du cadre et de sa supervision

Aborder la question de l’atténuation des risques des entreprises de services monétaires

Renforcement de l’inscription des entreprises de services monétaires (ESM).

Amélioration et renforcement des méthodes d’identification

Exemption et abstention administrative

Processus de consultation pour l'élaboration de directives

Dénonciation

Chapitre 5 – Définitions et dispositions administratives

Déclaration électronique des mouvements transfrontaliers des devises et des instruments monétaires

Clarifier le transfert électronique de fonds (TEF) ou la « règle des voyages »

Atténuation du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes proportionnellement aux risques

Évaluation des relations correspondantes

Définir l’entité déclarante

Création d’une annexe de déclarations uniforme

Retrait du processus de rechange à la déclaration des opérations importantes en espèces (article 50)

Liste des principaux acronymes et abréviations

Liens aux documents importants

Les mesures visant à contrer le recyclage des produits de la criminalité et le financement d’activités terroristes sont reconnues depuis longtemps comme de puissants moyens de lutter contre la criminalité et de protéger la sécurité des Canadiens. Un cadre législatif et réglementaire solide est nécessaire pour détecter et prévenir les activités criminelles. Le maintien des pratiques exemplaires internationales actuelles aide le Canada à respecter ses engagements internationaux à participer à la lutte contre le crime transnational. Les efforts du Canada servent également à empêcher que son système financier soit utilisé comme instrument de recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes.

Le gouvernement du Canada s’est engagé à établir un cadre législatif de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, qui prévoit aussi des mécanismes importants de protection des droits et de la vie privée des citoyens. Ce cadre est établi par la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT) et les règlements relatifs à celle-ci. L’examen du cadre législatif de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPC-FAT), réalisé par le ministère des Finances Canada, appuie le prochain examen parlementaire de la LRPCFAT.

En vertu du paragraphe 72(1) de la LRPCFAT, l’exécution et le fonctionnement de la Loi doivent être examinés par un comité du Parlement tous les cinq ans. L’exigence législative d’examiner la Loi tous les cinq ans représente une occasion de tenir le cadre à jour en fonction de l’évolution des marchés ainsi que des risques nouveaux et en évolution. La rétroaction du secteur privé et d’autres intervenants appuie notre analyse de l’efficacité du cadre. Un cadre efficace et essentiel à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité est le financement des activités terroristes au Canada et dans le monde.

L’environnement du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes a évolué depuis le dernier examen effectué en 2013, et ces activités criminelles continuent de poser une menace à la sécurité nationale. Il y a eu des avancements technologiques importants, dont les suivants : les développements liés aux devises virtuelles, qui offrent de nouvelles façons de déplacer de l’argent de façon anonyme; le développement de nouvelles technologies financières, qui change l’interaction des Canadiens avec le système financier; la reconnaissance de l’identité numérique, qui est susceptible de faciliter le processus du devoir de vigilance à l’égard de la clientèle constituant la pierre angulaire du cadre. Ces développements présentent des défis en ce qui a trait au maintien d’un régime à jour et complet, mais ils peuvent également constituer de nouvelles opportunités. À titre d’exemple, les entités déclarantes peuvent utiliser les nouvelles technologies afin de mieux comprendre et atténuer les risques auxquels elles font face et/ou de s’acquitter de leurs obligations dans le cadre du régime (p. ex. la technologie de l’autoréglementation).

L’environnement de menaces et de risques découlant du recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada change aussi au fur et à mesure que de nouvelles méthodes de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme sont élaborées. Ces risques sont évalués dans la première Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, publiée en 2015, qui fait actuellement l’objet d’une mise à jour. Selon un rapport d’évaluation mutuelle publié en 2016 par le Groupe d’action financière (GAFI), le Canada dispose d’une législation et d’une réglementation solides sur la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, mais il y a plusieurs aspects où des mesures pourraient être prises afin de s’assurer que le cadre répond aux normes techniques et devienne encore plus efficace.

Le présent document vise à appuyer l’étude prochaine par le Parlement de la LRPCFAT et sa considération des enjeux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada. En même temps, le ministère des Finances Canada sollicite les commentaires des différents intervenants en réponse au présent document qui soutiendront l’élaboration de mesures stratégiques et techniques ultérieures susceptibles de conduire à des modifications législatives ou éclairer les approches à long terme du Ministère vis-à-vis le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.

Le ministère des Finances Canada entreprend ces travaux de concert avec les ministères et les organismes fédéraux qui participent au régime canadien de LRPC-FAT[1]. En plus des idées élaborées à l’interne, le Ministère a sollicité les commentaires sur les points à améliorer auprès de différents ministères et organismes ainsi que des membres du comité consultatif sur le recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes[2]. Ces suggestions ont ensuite été présentées de façon concise dans le présent document. Dans le cadre de ce processus, nous écouterons vos points de vue et les communiquerons au ministère ou à l’organisme approprié.

Le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes posent une menace à la sécurité nationale et mondiale et il compromet l’intégrité du système financier. Le recyclage des produits de la criminalité est le processus qu’emploient des criminels pour dissimuler ou masquer l’origine de produits de la criminalité en donnant l’apparence qu’ils viennent de sources légitimes[3]. Le financement des activités terroristes est le procédé de recueillir des fonds auprès des sources légitimes et (ou illégitimes) et de dissimuler et de déguiser leur fin, notamment pour soutenir une activité terroriste au Canada ou à l’étranger, causant des pertes de vie humaine et de la destruction. Bien que les objectifs derrière le recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes puissent ne pas être les mêmes, leurs auteurs exploitent les mêmes vulnérabilités dans les systèmes financiers.

Le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ont des effets sur la criminalité et l’économie, et les deux contribuent à favoriser et perpétuer l’activité criminelle. Le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes nuisent à l’intégrité, à la stabilité du secteur financier et à l’économie en général, en plus de menacer notre qualité de vie. Étant donné qu’ils agissent comme un moyen de dissuasion de la criminalité financière, les régimes efficaces visant à lutter contre ces menaces sont essentiels pour protéger les Canadiens, l’intégrité des marchés et le système financier mondial. Le Fonds monétaire international (FMI) a déclaré que « [l]es mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement terroriste constituent donc non seulement un impératif moral, mais une nécessité économique[…] Dans un monde de plus en plus interconnecté, les répercussions négatives de ces activités ont une envergure mondiale[…] Les blanchisseurs de capitaux et les financiers terroristes exploitent à la fois la complexité inhérente au système financier mondial et les différences entre les législations et dispositifs de LBC/FT de différents pays, et ils sont particulièrement attirés par les pays où les contrôles sont faibles ou inefficaces […] »[4].

La surveillance financière et les efforts d’application sont conduits dans le contexte plus large de la dissuasion et de la répression à l’encontre de la criminalité et du terrorisme, et ils sont maintenus en équilibre avec les droits et les protections accordés aux Canadiens relativement à la vie privée individuelle et le respect de procédures appropriées.

Le Régime impose des exigences rigoureuses sur les intermédiaires financiers du secteur privé, en plus des ressources que des entités du secteur public attribuent directement à la prévention de la criminalité et du terrorisme. Cet examen vise à faire progresser l’efficience et l’efficacité du Régime afin de veiller à ce que les ressources des secteurs privé et public soient en adéquation avec les réalités technologiques, commerciales et propres aux différentes menaces actuelles.

Le Canada a une économie stable et ouverte, un système financier accessible et avancé, ainsi que de solides institutions démocratiques. Les individus qui cherchent à blanchir des produits de la criminalité ou d’amasser, de transférer et d’utiliser des fonds à des fins terroristes, tentent d’exploiter certaines de ces forces à leur avantage. Le Canada adopte une approche complète et coordonnée visant à lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes afin de promouvoir l’intégrité du système financier et la sécurité des Canadiens.

Le Régime canadien est composé de lois et de règlements, de ministères et d’organismes fédéraux, y compris des organismes de réglementation et de supervision, des organismes d’application de la loi et des entités déclarantes. Le cadre juridique canadien de LRPC-FAT est composé de la LRPCFAT et des règlements relatifs à celle-ci, qui s’avèrent une composante essentielle du Régime canadien de LRPC-FAT d’un point de vue plus large. Le Régime fait intervenir 13 ministères et organismes fédéraux détenant des pouvoirs en vertu de la LRPCFAT et d’autres lois, dont huit reçoivent un financement réservé totalisant environ 70 millions de dollars annuellement[5]. En plus des organisations fédérales, les organismes d’application de la loi provinciaux et municipaux et les organismes de réglementation provinciaux (y compris ceux qui jouent un rôle de surveillance dans le secteur financier) se livrent à la lutte contre ces activités illégales. Dans le secteur privé, on compte près de 31 000 institutions financières et entreprises et professions non financières désignées (EPNFD) canadiennes[6] qui ont des obligations de déclaration en vertu de la LRPCFAT, appelées entités déclarantes. Celles-ci jouent un rôle indispensable aux premières lignes dans le cadre des efforts destinés à prévenir et à déceler le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

Le Régime canadien de LRPC-FAT s’appuie sur trois piliers indépendants : (i) la politique et la coordination; (ii) la prévention et la détection; (iii) l’enquête et l’interruption.

(i) Politique et coordination

Le cadre stratégique et législatif du Régime, ainsi que sa coordination nationale et internationale, est dirigé par le ministère des Finances Canada. Le Ministère prodigue des conseils stratégiques au ministre sur les mesures législatives et réglementaires proposées, il conseille le ministre sur les nouveaux développements liés à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et il prodigue des conseils liés aux activités du Régime et les enjeux de financement ainsi que des conseils sur le rôle de surveillance et la responsabilité du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE). En outre, le Ministère dirige la délégation canadienne auprès du Groupe d'action financière (GAFI) et d'autres forums régionaux et internationaux sur le LRPC-FAT.

La Loi LRPCFAT, la mesure législative qui établit le cadre canadien de LRPC-FAT, soutient d’autres textes législatifs importants, dont le Code criminel. En vertu de la LRPCFAT, les entités déclarantes sont tenues d’identifier leurs clients, de tenir des registres et d’administrer un programme interne de conformité en matière de RPCFAT. La LRPCFAT crée des exigences obligatoires de déclaration des opérations financières douteuses, des opérations en espèces importantes, des mouvements transfrontaliers d’espèces considérables et des autres opérations visées par règlement. Elle crée aussi, pour les entités déclarantes, l’obligation d’identifier les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes et de mettre des mesures en place pour atténuer ces risques, y compris la surveillance continue des opérations et des mesures améliorées quant au devoir de vigilance relatif à la clientèle.

(ii) Prévention et détection

Le deuxième pilier met en place des mesures vigoureuses destinées à empêcher que des personnes placent des produits de la criminalité ou des fonds liés au terrorisme dans le système financier, tout en disposant de mesures solides correspondantes pour déceler le placement et le mouvement de tels fonds. Au cœur de cette approche de prévention et de détection, on trouve les entités déclarantes (plus précisément les institutions financières, et les entreprises et professions non financières désignées) qui sont les gardiennes du système financier, mettant en œuvre les diverses mesures prévues dans la LRPCFAT, et les organismes de réglementation (principalement le CANAFE et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF)), qui les supervisent. La transparence des personnes morales et des fiducies contribue à prévenir et à déceler le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, y compris l’obligation, imposée aux institutions financières, d’identifier les bénéficiaires effectifs[7] des personnes morales et des fiducies avec qui elles font affaire. Les lois et les registres provinciaux et fédéraux visant les personnes morales et la réglementation des valeurs mobilières contribuent aussi à prévenir et à déceler le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes au Canada.

L’information diffusée en vertu de la LRPCFAT peut servir de source du renseignement pour appuyer les partenaires nationaux et internationaux au cours d’enquêtes et de poursuites concernant des infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. L’information peut aussi prendre la forme de rapports de tendances et de typologies servant à renseigner la population, y compris les entités déclarantes, sur les enjeux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.

(iii) Interruption

Le dernier pilier porte sur l’interruption des activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Les partenaires du Régime, tels que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et la Gendarmerie royale du Canada (GRC), appuyés par les activités de collecte et d’analyse du CANAFE, entreprennent des enquêtes se rapportant au recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, à d’autres actes criminels axés sur la recherche de profits et aux menaces à la sécurité du Canada conformément aux mandats individuels. L’Agence du revenu du Canada (ARC) joue elle aussi un rôle important pour ce qui est d’enquêter sur l’évasion fiscale (et les cas connexes de recyclage des produits de la criminalité), ainsi que pour déceler les organismes de bienfaisance qui présentent un risque et s’assurer que l’on n’abuse pas de ceux-ci pour financer des activités terroristes. Le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC) et les procureurs provinciaux veillent à ce que les criminels soient poursuivis avec toute la rigueur de la loi. La restriction et la confiscation des produits de la criminalité constituent aussi une mesure coercitive importante du Régime. Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) gère tous les biens saisis et restreints dans le cas des poursuites au criminel intentées par le gouvernement du Canada en plus d’offrir des services de comptabilité judiciaire à la GRC. L’ASFC fait respecter le programme Déclaration des mouvements transfrontaliers en espèces et transmet au CANAFE de l’information tirée des rapports et des saisies. Le Régime est par ailleurs assorti de processus d’inscription robustes liés au terrorisme qui permettent de bloquer les actifs des terroristes, conformément au Code criminel et au Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, que dirigent Sécurité publique Canada et Affaires mondiales Canada (AMC), respectivement.

Le gouvernement du Canada est déterminé à lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, tout en respectant la répartition constitutionnelle des pouvoirs, la Charte canadienne des droits et libertés (Charte) et le droit à la vie privée des Canadiens.

En vertu de la LRPCFAT, certaines entreprises sont tenues de révéler de l’information financière privée au CANAFE. Le fait que le CANAFE puisse révéler de l’information financière privée aux organismes d’application de la loi et du renseignement pour enquête pourrait avoir un impact sur les droits à la vie privée protégés par l’article 8 de la Charte (le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives). Toutefois, la LRPCFAT a des mesures de protection en place pour s’assurer que ces droits sont protégés. D’abord, la LRPCFAT précise l’information que le CANAFE peut recevoir et divulguer. La LRPCFAT énonce les organismes d’application de la loi et les organismes de renseignement précis auxquels le CANAFE peut divulguer son renseignement financier. La LRPCFAT limite aussi les circonstances dans lesquelles le CANAFE peut divulguer de l’information à ces organismes. Le CANAFE doit avoir des motifs raisonnables de soupçonner que l’information est pertinente à une enquête ou poursuite à l’égard d’une infraction liée au blanchiment d’argent, au financement d’activités terroristes, ou pertinente à l’enquête sur des menaces à la sécurité du Canada. En conséquence, le CANAFE est indépendant des organismes d’application de la loi et ne mène pas d’enquêtes.

De plus, la LRPCFAT enjoint le commissaire à la protection de la vie privée du Canada à réaliser régulièrement des examens des mesures prises par le CANAFE pour protéger la confidentialité de l’information qu’il reçoit ou recueille en vertu de cette loi. On s’assure ainsi que le CANAFE protège l’information qu’il reçoit dans le cadre de ses opérations. Le commissaire à l’information fait état des constatations de l’examen au Parlement.

Les mesures éventuelles présentées ici visent à maintenir un équilibre entre la nécessité de dissuader et de détecter le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, d’une part, et la protection des droits constitutionnels et du droit à la vie privée des Canadiens, d’autre part.

Le dernier examen parlementaire de la LRPCFAT a été réalisé en 2013 et était assorti d’un rapport au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce intitulé « Suivre l’argent à la trace : Le Canada progresse-t-il dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes? Pas vraiment ». Dans le cadre de l’examen, le Comité a centré ses efforts sur trois aspects principaux dans un contexte plus général visant à s’assurer que le Régime assure le « meilleur rapport coût/avantage » pour le contribuable canadien.

Les recommandations portaient sur la structure et la performance souhaités du régime canadien de LRPC-FAT concernant la supervision, l’examen du rendement, le financement et l’expertise, ainsi que l’atteinte de l’équilibre approprié entre l’échange d’information et la protection des renseignements personnels. Les recommandations étaient largement axées sur un échange d’information plus grand et plus opportun entre les intervenants et les organismes du gouvernement participant directement au Régime afin d’apporter une aide dans les enquêtes et les poursuites liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Enfin, les travaux du Comité se sont également traduits par des recommandations concernant le portée et l’orientation optimales du Régime. Il a été estimé que le régime canadien devrait pouvoir répondre aux développements des normes mondiales sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, les avancées technologiques et l’accroissement de la sensibilisation du public au Régime.

Le rapport de 2013 a souligné la tension inhérente présente au sein du régime canadien de LRPC-FAT entre les objectifs concurrents : de détecter et dissuader le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, tout en protégeant la vie privée et les droits constitutionnels des Canadiens.

Depuis le dernier examen en 2013, l’environnement dans lequel le régime canadien de LRPC-FAT fonctionne a continué d’évoluer. Par exemple, la façon dont les gens interagissent avec les services financiers et les reçoivent a changé avec l’émergence de technologies qui permettent des interactions à distance ou qui favorise un éventail accru de produits financiers complexes, dont les devises virtuelles. En outre, la criminalité financière est plus sophistiquée avec le recours à des blanchisseurs d’argent professionnels, des structures commerciales et juridiques complexes qui sont de plus en plus utilisées pour dissimuler le produit de la criminalité et s’assurer de l’anonymat, ainsi que l’augmentation de la cybercriminalité. De plus, un développement récent important sur le plan juridique au Canada est l’arrêt Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada[8] de la Cour suprême du Canada, qui a statué que les dispositions de la LRPCFAT, telles qu’elles sont actuellement rédigées aux fins d’application auprès des avocats, sont inconstitutionnelles. Il s’agit d’une décision importante dans l’histoire du Régime et, à la lumière des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes que pose la profession juridique, le Ministère étudie toutes les options à sa disposition à cet égard. Cet enjeu est traité en profondeur au chapitre 1 du présent document.

Les partenaires du Ministère et du Régime ont également collaboré sur un certain nombre de projets clés, énoncés ci-dessous, qui ont tous contribué aux efforts de lutte du Canada contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

Depuis le dernier examen, un certain nombre de modifications législatives et réglementaires ont été apportées afin d’améliorer le cadre législatif du Canada et de renforcer son mandat de dissuader et de détecter les activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Certaines de ces modifications ont permis au Canada de mieux se conformer aux normes internationales énoncées par le Groupe d’action financière.

En 2014, des modifications législatives ont été adoptées afin d’atténuer les risques émergents, y compris les devises virtuelles, d’assujettir les casinos en ligne à la LRPCFAT et d’améliorer la capacité du CANAFE à effectuer des divulgations liées aux menaces à la sécurité du Canada, conformément à la réponse du gouvernement à la Commission d’enquête relative aux mesures d’investigation prises à la suite de l’attentat commis contre le vol 182 d’Air India.

En 2015, des modifications législatives ont été apportées afin de combattre la criminalité en col blanc en permettant au CANAFE de communiquer de l’information relative au recyclage des produits de la criminalité aux organismes provinciaux de réglementation du marché des valeurs mobilières.

En outre, des modifications réglementaires ont été apportées en 2016, conformément aux modifications législatives effectuées en 2014, afin de renforcer les normes relatives à la vigilance à l’égard de la clientèle, de combler certains vides dans le Régime, d’améliorer la conformité, la surveillance et l’exécution, et de renforcer l’échange d’information dans le Régime. À titre d’exemple, mentionnons l’instauration d’exigences en matière d’identification plus souples et l’introduction d’obligations relatives aux personnes politiquement vulnérables au Canada.

Plus récemment, des modifications législatives ont été apportées en 2017 afin d’élargir la liste des destinataires qui peuvent recevoir le renseignement financier lié aux menaces à la sécurité du Canada afin d’inclure le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes, de soutenir un renseignement plus efficace sur les bénéficiaires effectifs de personnes morales et d’apporter diverses modifications techniques et d’autres changements pour les fins suivantes : renforcer le cadre, soutenir la conformité, améliorer la capacité des entités déclarantes à opérationnaliser la LRPCFAT et s’assurer que la législation fonctionne comme prévu.

Réalisée à l’aide d’efforts coordonnés par les ministères et les organismes l’évaluation nationale des risques inhérents de 2015 a cerné des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Ce rapport visait à accroître la connaissance sur la situation des institutions financières canadiennes, des entreprises et professions non financières désignées et de tous les Canadiens sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes au Canada. Le rapport donne un aperçu des risques associés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes en ce qui concerne les différentes menaces et vulnérabilités avant l’application de mesures d’atténuation, telles que des mesures législatives, réglementaires et opérationnelles qui viennent prévenir, déceler et interrompre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

Les auteurs de l’évaluation ont attribué une cote de risque très élevée pour ce qui est de la corruption et des pots-de-vin, de la contrefaçon et du piratage, de certains types de fraudes, du trafic de drogues illicites, de la contrebande et du trafic de tabac illégal et du recyclage des produits de la criminalité par des tiers. Les groupes criminels organisés (GCO) transnationaux et les blanchisseurs d’argent professionnels sont les principaux individus mal intentionnés en lien avec le RPC dans le contexte canadien.

La menace de financement des activités terroristes a été évaluée en fonction des groupes et des acteurs les plus préoccupants pour le Canada. L’évaluation indique que des réseaux évoluant au Canada sont soupçonnés d’amasser des fonds, d’en recueillir et d’en transmettre à divers groupes terroristes à l’étranger. Malgré ces activités, la menace de financement des activités terroristes au Canada n’est pas aussi accentuée que dans d’autres régions du monde, où l’on trouve des régimes de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité (RPC) plus faibles et où des groupes terroristes se sont davantage implantés, autant en ce qui concerne les activités terroristes que leur financement.

Parmi les secteurs, produits et services évalués, les banques nationales, les personnes morales (particulièrement les personnes morales à but lucratif), certains types d’entreprises de services monétaires et les fiducies expresses ont été cotées comme étant les plus vulnérables et ont reçu une cote très élevée sur l’échelle d’évaluation des risques. Bon nombre des secteurs et des produits sont largement accessibles aux personnes au Canada et à l’étranger et sont associés à des opérations à volume, à vitesse et à fréquence élevés. Ils peuvent aussi effectuer un nombre important d’opérations avec des clients à haut risque et être exposés à des administrations à risque élevé qui ont de faibles régimes de RPC-FAT et des menaces importantes de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Il existe également dans de nombreux secteurs, des possibilités d’effectuer des opérations avec divers niveaux d’anonymat et de structurer les opérations de façon complexe.

Le secteur des monnaies virtuelles, en particulier les convertibles, compte parmi les secteurs évalués à un niveau élevé de vulnérabilité face au blanchiment d’argent et au financement des activités terroristes. Ce type de produit financier est facilement accessible et présente un haut degré d’anonymat et de transférabilité, ce qui s’avère attrayant auprès de différents acteurs qui souhaitent dissimuler la nature de leurs opérations financières. Cette tendance a été relevée par le plus récent examen parlementaire du régime de LRPC-FAT, ce qui a entraîné des modifications à la LRPCFAT en 2014, afin de régir les activités liées aux monnaies virtuelles dans le cadre du régime. Depuis ce temps, des travaux considérables ont été entrepris afin d’élaborer des règlements techniques et, en de nombreux cas, inédits, dans ce domaine. Étant donné leur degré de complexité et de priorité, ces nouveaux règlements ont dû faire l’objet d’une série de consultations auprès de l’industrie, des collectivités juridiques et d’exécution de la loi, et feront l’objet d’une consultation publique dès qu’ils seront prépubliés dans la Gazette du Canada.

Il importe de noter que les méthodes de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes évoluent constamment, les criminels utilisant sans cesse de nouvelles façons d’exploiter le système financier et les entreprises légitimes à des fins illicites. Ainsi, il est important que le gouvernement renouvelle constamment ses évaluations des risques.

Les régimes nationaux de RPC-FAT renforcent l’intégrité et la stabilité des secteurs financiers nationaux individuels, mais compte tenu de l’interconnectivité du système financier, ils contribuent également à la protection des secteurs financiers des autres pays et du système financier mondial dans son ensemble.

Tel qu’il a été mentionné précédemment, le Groupe d’action financière (GAFI) est une organisation intergouvernementale qui établit des normes visant à normaliser la lutte contre le recyclage des produites de la criminalité et le financement des activités terroristes et qui veille à ce que tous les régimes de RPC-FAT des membres respectent les mêmes critères. Le GAFI surveille la mise en œuvre de ces normes parmi ses 37 membres et dans plus de 190 pays à travers le réseau mondial d’organismes régionaux semblables au GAFI dans le cadre d’examen par les pairs et de rapports publics. Le Canada est un membre fondateur du GAFI et participe activement à ses délibérations.

Le Canada collabore aussi avec ses partenaires internationaux par l’intermédiaire de tribunes telles que les Nations Unies, le G-7 et le G-20 et le groupe de lutte contre le financement de l’État islamique en Irak et au Levant. Le Canada met en œuvre toutes les résolutions du Conseil de Sécurité pertinentes visant à bloquer et à saisir les actifs de personnes et d’entités qui se livrent au terrorisme. De plus, le Canada soutient par une aide technique les régions où il y a un risque plus élevé en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, comme les Antilles, les Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Cette assistance est conçue pour renforcer la capacité des systèmes financiers dans ces régions afin de les empêcher d’être exploités comme instrument de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.

En 2015, le Canada a fait l’objet d’un processus d’examen par les pairs, et le rapport final a été publié en septembre 2016. Selon le rapport, le Canada comprend bien ses risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, et la collaboration et la coordination liées au RPC-FAT sont en général adéquates sur le plan des politiques et des opérations.

En outre, il a été estimé que le Canada dispose d’un ensemble solide de lois et de règlements sur le RPC-FAT, mais certaines faiblesses ont été observées, dont les suivantes : la disponibilité limitée d’information précise sur la propriété effective; le fait que la profession juridique n’est pas assujettie à la LRPCFAT; le fait que des améliorations pourraient être apportées afin d’accroître le nombre de poursuites liées au recyclage des produits de la criminalité.

De plus, selon le rapport, le cadre canadien de LRPC-FAT pourrait être renforcé en élargissant la portée de la législation afin de couvrir les sociétés de financement et de crédit-bail, ainsi que les prêteurs hypothécaires non réglementés, et pourrait appliquer de nouvelles obligations au secteur des entreprises et professions non financières désignées relativement aux personnes politiquement vulnérables (PPV), les dirigeant des organisations internationales et les exigences en matière d’information sur la propriété effective.

Selon le rapport, le Canada pourrait également mieux lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes en enquêtant davantage sur les stratagèmes plus sophistiqués de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes et en entamant des poursuites à l’encontre des auteurs de ces infractions, tels que des blanchisseurs d’argent professionnels tiers. Une réglementation sur les transferts d’importantes sommes en espèces et sur certaines activités des avocats et des comptables ainsi qu’une information améliorée sur la propriété effective aiderait à y parvenir.

De plus, le rapport note qu’en rendant plus proportionnelles et dissuasives les pénalités pour l’infraction de ces lois, la dissuasion face au recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes serait plus facile.

Si elles sont mises en œuvre, les mesures stratégiques éventuelles figurant dans la présente contribueraient à renforcer le régime canadien de LRPC-FAT et amélioreraient la conformité globale du Canada avec les recommandations du GAFI sur la LRPC-FAT, contribuant ainsi à la protection de l’intégrité du système financier mondial.

Malgré les défis relevés dans l'examen international, le Régime contribue de façon concrète à la sécurité des Canadiens dans les limites des pouvoirs actuellement accordés.

Le régime canadien de LRPC-FAT déploie d'importants efforts de collaboration et de persévérance, ce qui fait partie intégrale de la production du renseignement financier et de la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

L'un de ces exemples est le projet Protection, une initiative menée par une entité déclarante qui a mobilisé des partenaires dans l'ensemble du pays afin de combattre la traite de personnes dans le commerce du sexe. Cette collaboration a permis de publier, en décembre 2016, la publication d'une alerte opérationnelle du CANAFE intitulée : Indicateurs : Recyclage de produits illicites provenant de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle. L'alerte porte principalement sur les types d'opérations financières, les caractéristiques financières et les opérations effectuées dans les comptes qui peuvent amener les entités déclarantes à soupçonner une activité de blanchiment d'argent et à transmettre une déclaration d'opérations douteuses au CANAFE. Ces efforts ont mené à une augmentation de la connaissance des entités déclarantes par rapport à ce type de blanchiment d'argent, et à une augmentation conséquente du nombre de signalements d'opérations suspectes soumis au CANAFE.

Le renseignement financier aide à comprendre le fonctionnement d'un stratagème de traite de personnes. En suivant la piste de l'argent, la police peut déterminer les actifs achetés avec le produit de la criminalité, découvrir d'autres auteurs et victimes par l'intermédiaire de relations financières et corroborer l'histoire de la victime, ce qui pourrait aider à obtenir des condamnations.

Les mesures stratégiques éventuelles décrites dans la présente porte sur l’amélioration de la LRPCFAT afin de soutenir l’efficacité du régime canadien de LRPC-FAT dans son ensemble. Les entités déclarantes jouent un rôle très important dans la détection et la dissuasion des activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement d’activités terroristes. En même temps, le cadre doit s’efforcer de réduire au minimum le fardeau de conformité et les coûts associés aux mesures requises visant à détecter et à prévenir les activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. En plus de mesures axées sur le cadre, un certain nombre de mesures éventuelles portent sur d’autres dispositions législatives qui appuient les objectifs du régime de LRPC-FAT. Les potentiels aspects à améliorer ont été identifiés dans le cadre de discussions avec les ministères et organismes participant au Régime et les membres du Comité consultatif sur le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes.

L’analyse et les motivations qui ont mené à ces idées comprennent les aspects suivants :

Les mesures sont organisées autour des principaux thèmes suivants :

Le gouvernement reconnaît que les mesures visant à améliorer le cadre législatif de LRPC-FAT du Canada devraient maintenir un équilibre approprié entre des objectifs parfois conflictuels au sein du Régime. Elles visent entre autres à ne pas placer un fardeau excessif sur les entités déclarantes, qui sont sur la première ligne de la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. De même, les approches axées sur les risques devraient continuer d’être incorporées lorsqu’il est approprié de le faire, afin de maximiser l’efficacité des efforts. Le recours accru du renseignement financier peut soutenir l’efficacité du Régime afin d’améliorer la sécurité des Canadiens, tout en respectant leur vie privée et les protections constitutionnelles.

Le document de discussion renvoie aux personnes et aux entités assujetties à des obligations en vertu de la LRPCFAT, notamment les suivantes :

De plus, si de nouvelles dispositions étaient adoptées, de nouvelles entreprises et de nouveaux secteurs ou d’autres personnes au Canada pourraient être assujettis par les dispositions du Régime, dont les suivants : l’industrie des guichets automatiques privés à étiquette blanche; le secteur des paris mutuels ou des courses de chevaux; les concessionnaires automobiles; les fournisseurs de service à une compagnie; les assureurs hypothécaires; les bureaux d’enregistrement de titres immobiliers , les sociétés d’assurance de titres; les prêteurs hypothécaires non réglementés par le gouvernement fédéral; les entreprises de véhicules blindés; les sociétés de ventes aux enchères de bijoux; les entreprises de financement, de location et d’affermage.

En dernier lieu, d’autres changements dans l’orientation stratégique peuvent entraîner des conséquences pour des parties autres que celles assujetties à des obligations en vertu de la LRPCFAT, y compris des clients d’entités déclarantes comme les personnes politiquement vulnérables (PPV).

Le ministère des Finances Canada sollicite des points de vue sur ces orientations stratégiques éventuelles afin de positionner le régime législatif de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes du Canada vers l’avenir. L’objectif visé ici est de fournir aux intervenants l’occasion d’examiner ces propositions, ce qui pourrait aussi profiter à la commission parlementaire qui procédera à l’examen de l’administration et de l’application de la LRPCFAT, tel que requis par les dispositions législatives.

D’autres modifications et enjeux à être examiner ultérieurement pourront également être considérés dans le futur. Par exemple, il est prévu que les recommandations soient mises de l’avant dans le cadre de l’examen parlementaire de la LRPCFAT.

L’apport reçu sera donc pleinement pris en considération, y compris en ce qui a trait aux défis de conformité auxquels les entités déclarantes pourraient être confrontées à la suite de l’adoption des mesures contenues dans le présent document ou en raison du calendrier de leur mise en œuvre.

Le présent chapitre explore un vaste éventail d’enjeux qui pourraient être mis en œuvre afin d’améliorer le cadre canadien du LRPC-FAT. Ils comprennent de nombreux secteurs qui font appel à des activités à risque élevé. Toutefois, il est important de noter que l’équilibre doit être établi entre la détection de l’activité financière qui pose un risque de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes et la quantité de ressources, qu’elles soient publiques ou privées, nécessaires afin de s’acquitter des obligations et d’analyser cette activité. Une partie de l’établissement de cet équilibre vise à concevoir un cadre, ainsi que les obligations subséquentes qui en découlent, qui soit en adéquation avec le niveau de risque. Cela est soutenu par l’adoption d’une approche de collaboration avec le secteur privé qui se concentre sur les risques, y compris la considération du risque propre à leur réputation respective.

Les fuites des Panama Papers et des Bahamas Papers de 2016, ainsi que la diffusion des Paradise Papers en 2017, ont souligné la façon dont la structure sociétaire (p. ex., les personnes morales et les fiducies) peut servir à dissimuler la véritable propriété des activités aux fins du recyclage des produits de la criminalité, du financement des activités terroristes, de l’évasion fiscale et de l’évitement fiscal. Il s’en est suivi une attention accrue et soutenue à l’échelle internationale et nationale quant à l’importance de la transparence de la propriété des entreprises.

Un accès opportun pour les autorités compétentes à l’information exacte et à jour sur la propriété effective est recommandé dans les normes du GAFI et est vital pour lutter contre les transferts financiers illicites, y compris le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et l’évasion fiscale. Le G-20 a demandé aux pays de renforcer la mise en œuvre des normes internationales sur la transparence et les bénéficiaires effectifs des personnes morales et les constructions juridiques établies par le GAFI, la disponibilité de l’information sur la propriété effective et l’échange international de ces informations. Les examens par les pairs internationaux ont souligné les aspects à améliorer pour mettre en œuvre efficacement ces normes.

Le Canada ne dispose pas d’un registre central d’information sur le bénéficiaire effectif, et les exigences en matière d’information sont réparties à travers un ensemble de différentes lois, y compris celles sur la constitution en société, l’impôt et les autorités financières. La compétence sur la constitution en société est partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux, et environ 9 % des personnes morales au Canada sont établies en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (LCSA) fédérale. Les provinces et les territoires ont compétence sur la constitution en société d’entreprises dont l’activité est e de compétence provinciale et les sociétés de personnes.

Les exigences relatives à la communication de l’information sur les entreprises sont en place aux niveaux fédéral et provincial; toutefois, il y a des différences entre les administrations en ce qui concerne les exigences liées à la collecte, à la divulgation et à l’accès à cette information. De plus, les risques associés aux actions au porteur[10] ne sont pas entièrement atténués dans l’ensemble des administrations, et il y a peu de mesures pour atténuer les risques associés avec les actionnaires désignés qui peuvent servir à dissimuler la véritable participation majoritaire.

En ce qui concerne les responsabilités de la tenue des registres, il n’y a aucune exigence de recueillir ou de divulguer l’information sur la propriété effective au niveau des entreprises. Les registres d’entreprises existants ont des capacités minimes, lorsqu’il y en a, en matière de mise en conformité quant à la divulgation des renseignements mandatés par la loi, et afin de s’assurer que l’information qui est recueillie est exacte et à jour.

Une première étape essentielle vers la transparence améliorée des entreprises pour les autorités compétentes dans le système fédéral canadien est de fournir une orientation claire et normalisée aux entreprises quant à l’information qu’elles devraient consigner et conserver en ce qui concerne la propriété effective. La spécification des normes en matière d’information, idéalement harmonisées entre les administrations et les lois, facilitera à son tour la considération des différents modèles de collecte de cette information, par exemple, dans les dépôts ou les registres – et permettra un débat plus tangible entre les Canadiens quant à savoir si une telle information devrait être disponible au public.

Depuis 2014, la LRPCFAT exige que les institutions financières, les courtiers en valeurs mobilières, les compagnies d’assurance-vie et les entreprises de services monétaires recueillent de l’information sur la propriété effective pour les personnes morales, les fiducies et les entités autres qu’une personne morale et prennent des mesures raisonnables afin de confirmer l’exactitude de l’information recueillie.

Le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique a déposé le projet de loi C-25 en septembre 2016 afin de soutenir la conformité du Canada avec les normes du GAFI relativement à l’interdiction concernant les actions à porteur. Bien que la LCSA exige que les actions soient sous forme nominative depuis 1975, le projet de loi comprend des modifications à la LCSA et à la Loi canadienne sur les coopératives qui, une fois adoptées, interdiront l’émission d’options et de droits au porteur et exigeront que les sociétés par actions et les entreprises coopératives à qui sont présentés des instruments au porteur les convertissent sous forme nominative.

Le budget fédéral de 2017 comprenait l’engagement du gouvernement du Canada à améliorer la transparence de la propriété effective et des personnes morales afin d’offrir des mesures de protection contre le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes, l’évasion fiscale et l’évitement fiscal, tout en continuant de faciliter les affaires au Canada. Tel qu’il a été annoncé dans le budget fédéral de 2017, le gouvernement du Canada collabore actuellement avec les provinces et les territoires afin de mettre en place une stratégie nationale visant à renforcer la transparence des personnes morales et des constructions juridiques et à améliorer la disponibilité des renseignements sur la propriété effective. De plus, le ministère des Finances examine des manières d’améliorer les exigences de déclaration imposées aux fiducies afin d’améliorer la collecte d’information sur la propriété effective.

À la réunion des ministres des Finances du Canada, tenue en décembre 2017, les ministres ont annoncé une entente de principe en vue d’apporter des modifications aux lois sur les personnes morales fédérales, provinciales et territoriales afin i) de veiller à ce que les personnes morales tiennent une information exacte et à jour sur les bénéficiaires effectifs qui seront mis à la disposition des organismes d’application de la loi, ainsi qu’aux administrations fiscales et d’autres organismes, et ii) d’éliminer l’utilisation d’actions au porteur et de bons de souscription d’actions au porteur ou d’options et de remplacer ceux qui existent par des instruments enregistrés. Tous les efforts seront déployés pour que toutes ces modifications entrent en vigueur dans toutes les administrations d’ici le 1er juillet 2019. Au-delà de cette première étape vers une stratégie nationale, les ministres ont aussi accepté de continuer l’examen des mécanismes afin d’améliorer l’accès opportun à l’information sur la propriété effective par les organismes d’application de la loi et d’autres instances et d’évaluer les risques associés à d’autres instruments juridiques.

Les principaux aspects à prendre en compte pour éclairer d’autres travaux en vue d’une stratégie nationale qui appuient la saine gouvernance des personnes morales et s’assurer que des mesures de protection contre l’utilisation abusive des personnes morales comprennent la définition de la façon et de l’emplacement des endroit à partir de où l’information devrait être accessible (p. ex., si l’information sur la propriété effective devrait être recueillie dans un ou plusieurs registres centraux ou un dépôt, si elle devrait être rendue publique) ainsi que le fardeau des coûts et le fardeau administratif pour le secteur privé au Canada.

Le Ministère sollicite les points de vue sur la façon d'améliorer la transparence et les mécanismes afin d'améliorer l'accès dans des délais opportuns à l'information sur la propriété effective par les autorités tout en continuant de faciliter les affaires au Canada. Ainsi, il pourra, entre autres, prendre en compte différents modèles de registres de propriété effective et déterminer si l'information devrait être rendue publique. Le Ministère cherche également à obtenir les points de vue sur les risques associés aux entités juridiques qui ne sont pas des personnes morales, telles que les partenariats juridiques.

Les professionnels du droit qui effectuent des opérations financières au nom de clients peuvent poser un risque de recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, en particulier aux stades du placement et de dispersion du blanchiment d’argent, et présentent donc des risques pour l’intégrité des systèmes financiers nationaux et mondiaux. Ce risque est aussi reconnu par le GAFI. Dans un rapport intitulé Money Laundering and Terrorist Financing Vulnerabilities of Legal Professionals (Vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes des professionnels du droit), le GAFI a découvert que les criminels recherche la participation des professionnels du droit dans leurs activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, parfois parce que ces professionnels sont nécessaires afin d’effectuer certaines opérations mais aussi parfois afin d’accéder à des compétences et à des services juridiques et notariés spécialisés pouvant faciliter le recyclage de produits de la criminalité et le financement d’activités terroristes[11].

Dans l’évaluation nationale des risques inhérents de 2015, le secteur juridique a été évalué comme posant un risque élevé de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada. Ce secteur compte un nombre important de praticiens possédant des connaissances et une expertise spécialisées qui sont vulnérables à l’exploitation en connaissance de cause ou non, à des fins illicites. Ce sont les services financiers offerts par les avocats qui font d’eux les gardiens du système financier et qui les rendent les plus vulnérables. En plus de réaliser des virements télégraphiques, d’émettre des chèques et d’accepter de l’argent, ces services comprennent l’établissement de comptes de fiducie, la constitution et la gestion de personnes morales et de fiducies juridiques, l’exécution d’opérations immobilières et liées aux valeurs mobilières, ainsi que l’établissement et la gestion d’organismes de bienfaisance. La profession juridique offre des services vulnérables à un éventail de particuliers et d’entreprises et elle agit souvent comme tiers pour de nombreuses transactions. La clientèle dans le secteur juridique comprend notamment une combinaison de personnes politiquement vulnérables, qui sont des personnes qui occupent un poste d’influence dans un gouvernement ou les Forces armées, des clients dans les entreprises et des professions vulnérables, ainsi que des clients dont les activités sont tenues dans les endroits davantage source de préoccupations, mais à noter que cette liste n’est pas exhaustive. La profession juridique interagit normalement directement avec les clients, mais peut aussi exercer des activités indirectement. Pour ces raisons, l’application des règles du cadre canadien de LRPC-FAT aux avocats est importante afin de soutenir les efforts pour détecter et dissuader le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

La prestation de certains des services clés par les conseils juridiques est protégée par le secret professionnel, ce qui rend la relation commerciale plus opaque à l’égard des enquêtes des organismes d’application de la loi. En février 2015, la Cour suprême du Canada a statué que les dispositions de la LRPCFAT, telles qu’elles sont actuellement rédigées aux fins d’applications auprès des avocats, sont inconstitutionnelles. En particulier, la Cour a estimé que les dispositions qui enjoignent les avocats à recueillir l’information des clients, à tenir des registres et à effectuer des recherches sur la conformité enfreignaient l’article 7 (le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne) et l’article 8 (protection contre une interférence déraisonnable avec une attente raisonnable de vie privée) de la Charte. Toutefois, la Cour a reconnu l’importante cause publique du régime canadien de LRPC-FAT et le fait que le Parlement pourrait imposer des obligations sur la profession juridique qui relève de ses compétences constitutionnelles.

Au cours des deux dernières années environ, des reportages dans les médias ont souligné le rôle que les avocats peuvent jouer dans diverses affaires douteuses, dont les suivantes : l’établissement de sociétés-écrans; la nomination d’administrateurs désignée; la falsification de dossiers tels qu’il a été mentionné dans les Panama Papers, ou la mauvaise utilisation des comptes de fiducie avec ou sans liens à l’étranger pour des opérations commerciales ou immobilières ici au Canada. Le manque d’inclusion de la profession juridique dans le cadre canadien de LRPC-FAT est une lacune majeure qui affecte négativement la réputation mondiale du Canada, comme cela a été mis en évidence dans le dernier rapport d’évaluation du Canada établi par le GAFI, en 2016.

Au fur et à mesure que les travaux se poursuivent sur cet enjeu, le gouvernement accueille avec enthousiasme la possibilité d’explorer de façon plus approfondie avec les différents barreaux la façon appropriée de se pencher sur le problème des professionnels juridiques étant utilisés pour faciliter le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Nous notons aussi que la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada consulte actuellement sur les modifications aux règles modèles de la profession en ce qui concerne la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Le gouvernement croit que les professionnels juridiques font partie intégrante de la lutte contre le blanchiment d’argent et du financement d’activités terroristes. Dans cette optique, nous avons hâte de nous entretenir avec les barreaux de manière à ce qu’ils jouent un rôle important au sein du régime canadien de LRPC-FAT.

Le Ministère continue de croire que l'application des règles à la profession juridique est importante pour maintenir l'intégrité du cadre canadien de LRPC-FAT. Il est important que, lorsque les avocats servent d'intermédiaires financiers, ils prennent des mesures pour s'assurer qu'ils ne sont pas utilisés involontairement pour recycler les produits de la criminalité ou financer des actes terroristes. Nous chercherons à faire participer les barreaux canadiens aux travaux du gouvernement visant à trouver des solutions. De plus, le Ministère a l'intention de réinstaurer des dispositions législatives et réglementaires conformes à la Constitution qui assujettiraient les conseillers juridiques et les cabinets d'avocats à la LRPCFAT. Le Ministère collabore avec Justice Canada sur l'incidence de la décision et annoncera les prochaines étapes en temps voulu.

Plusieurs lacunes législatives et réglementaires dans la couverture du régime ont été décelées depuis le dernier examen du cadre, notamment par l’intermédiaire de l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada et de l’évaluation récente du Canada par le GAFI. Nombre de ces lacunes impliquent une clarification des exigences existantes pour les entités déclarantes ou l’élargissement de la portée et de l’ampleur des obligations prévues dans la LRPCFAT pour les nouveaux types d’entreprises au Canada. L’ajout de nouveaux types d’entités déclarantes signifierait l’établissement de nouvelles exigences se rapportant à l’identification des clients, la diligence raisonnable, la tenue de registres et le signalement de certaines opérations pour ces secteurs.

De nombreuses mesures qui ont été identifiées pourraient potentiellement créer un nombre important de nouvelles entités déclarantes, créant ainsi un fardeau pour le secteur privé et certaines difficultés pour les responsables de la supervision et de la conformité. Ainsi, il pourrait y avoir des coûts importants associés à certaines de ces mesures pour les entités des secteurs privé et public en cause. Le signalement accru qui s’ensuivrait pourrait créer des préoccupations quant à vie privée des Canadiens. Dans l’évaluation de chaque mesure, les coûts qu’impliquent ces risques devront être comparés et analysés en parallèle avec les avantages potentiels de prévenir ou de repérer certaines activités de RPC/FAT dans les secteurs visés.

Les PPV et les DOI sont des personnes à qui on a confié des fonctions importantes ayant habituellement la possibilité d’influer sur les décisions et la capacité de contrôler certaines ressources. L’influence et le pouvoir d’une PPV ou d’un DOI font en sorte que ces personnes se retrouvent dans une situation où ils ont une incidence sur les décisions politiques, les institutions et les règles de procédure, ainsi que l’attribution des ressources et des finances, ce qui peut les rendre vulnérables à la corruption et au recyclage des produits de la criminalité. La corruption est un enjeu international qui touche tous les pays et, pour cette raison, le GAFI recommande que tous les pays aient en place des obligations relatives aux PPV et aux DOI pour toutes les entités déclarantes.

Actuellement, seuls quatre secteurs d’entités déclarantes ont des obligations se rapportant aux PPV et aux DOI au Canada. Il s’agit des entités financières, des courtiers en valeurs mobilières, des entreprises de services monétaires et des compagnies d’assurance-vie. Ils sont tenus de prendre des mesures raisonnables dans certaines situations afin de déterminer si un client est une PPV étrangère, une PPV nationale, un DOI, un membre de famille visé par règlement[12] ou une personne étroitement associée. D’autres secteurs d’entités déclarantes actuellement assujettis à la LRPCFAT n’ont pas de telles obligations.

Comme mentionné précédemment, la propriété effective renvoie à l’identité des personnes naturelles qui contrôlent ultimement la personne morale ou l’entité, et il ne peut pas s’agir d’une autre personne morale ou entité. Actuellement, seuls quatre secteurs d’entités déclarantes ont des obligations de recueillir l’information sur la propriété effective des personnes morales ou d’autres entités juridiques complexes. Il s’agit des entités financières, des courtiers en valeurs mobilières, des entreprises de services monétaires et des compagnies d’assurance-vie et représentants d’assurance-vie. Le gouvernement reconnaît les défis auxquels ils font face en ayant à confirmer l’information sur la propriété effective; c’est pourquoi le gouvernement continue de travailler en collaboration à la question de la transparence de la propriété effective, telle qu’elle est décrite ci-dessous.

Selon le rapport d’évaluation mutuelle du GAFI du Canada, les exigences liées aux PPV, aux DOI et à la propriété effective n’étaient pas suffisamment larges et ne couvraient pas les entreprises et professions non financières désignées.

Tel qu’il est décrit ci-dessus, un DOI est une personne à qui on a confié des fonctions importantes ayant habituellement la possibilité d’influencer les décisions et la capacité de contrôler les ressources. L’influence et le contrôle d’un DOI donné les mettent dans une situation où ils ont une incidence sur les décisions politiques, les institutions et les règles de procédure, ainsi que l’attribution des ressources et des finances, ce qui peut le rendre vulnérable à la corruption. La LRPCFAT définit actuellement un DOI comme « le poste ou la charge de dirigeant d’une organisation internationale créée par les gouvernements de divers États ou dirigeant d’une institution d’une telle organisation ». Par exemple, cela comprend les organisations établies au moyen d’une entente officiellement signée entre des gouvernements tels que la Cour pénale internationale ou les Nations Unies.

Au cours des dernières années, les scandales de corruption et de subornation ont été reliés à des organisations tels que le Comité international olympique, la Fédération internationale de football association, l’Union des associations européennes de football et la Fédération internationale de l’automobile. Bien qu’ils ne soient pas établis par les gouvernements des États, ces types d’organismes internationaux ont aussi une influence politique considérable sur la société et l’économie mondiale, et ils contrôlent d’importantes ressources financières. Certains pays, tels que la Suisse, ont déjà incorporé ces types d’organisations dans leur définition de DOI. Une telle modification aiderait à renforcer le cadre canadien de LRPC-FAT, en incluant les DOI des organisations où des risques accrus de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes peuvent surgir.

Tel qu’il est décrit ci-dessus, l’influence et le contrôle des PPV peuvent les rendre vulnérables à la corruption et au recyclage des produits de la criminalité. De plus, comme la diffusion des Panama Paper et des Paradise Papers l’ont souligné, les structures sociétaires telles que les personnes morales et les fiducies peuvent être utilisées pour dissimuler la propriété des actifs et potentiellement du produit de la criminalité et de la corruption, y compris par les PPV. Actuellement, en vertu de la LRPCFAT, les institutions financières, les courtiers en valeurs mobilières, les compagnies d’assurance-vie et représentants d’assurance-vie et les entreprises de services monétaires sont tenus d’obtenir et de prendre des mesures raisonnables afin de confirmer l’information sur la propriété effective des clients qui sont des personnes morales, des fiducies et d’autres entités qui ne sont pas des personnes morales. Toutefois, la détermination de savoir si des propriétaires effectifs relevés sont des PPV et l’application des mesures visées par règlement visant à atténuer les risques associés avec les PPV, n’est pas actuellement requis par le Règlement.

Tels qu’elles sont décrites ci-dessus, les entités déclarantes désignées (les entités financières, les compagnies d’assurance-vie, les courtiers en valeurs mobilières et les entreprises de services monétaires) sont tenues en vertu de la LRPCFAT de prendre des mesures afin de déterminer si leurs clients sont des PPV, tels qu’ils sont décrits ci-dessus. La définition d’un NPV :

Un enjeu plus technique se rapporte à la mise en œuvre des exigences concernant les NPV, car le CANAFE a reçu des demandes d’information sur la signification de divers postes contenus dans la définition. Par exemple, on a demandé de préciser si le terme « maire » s’appliquait à d’autres postes équivalents (par exemple, les préfets, les présidents de conseils de comté, etc.) et de préciser si la définition comprend aussi les chefs des Premières Nations. Les chefs des Premières Nations sont considérés comme faisant partie de la définition des NPV, car ce sont des responsables publics dirigeant des organisations ayant un contrôle et une influence sur une quantité importante de fonds publics en raison de la nature de leur poste. L’inclusion explicite des chefs des Premières Nations placerait ces postes au même niveau que d’autres personnes qui détiennent des postes semblables.

Les guichets automatiques privés, appelés « étiquette blanche » puisqu’ils ne portent pas la marque d’une institution financière, fournissent des services de retrait d’argent comptant en étant reliés à des institutions financières à l’aide de réseaux de paiement tels qu’Interac, VISA et MasterCard.

En 1996, le Tribunal de la concurrence a statué que les principales institutions financières au Canada abusaient de leur position dominante à l’égard des guichets automatiques. Parmi les recours stipulés dans la décision, les guichets automatiques pouvaient aussi être détenus dorénavant par des établissements privés au lieu de seulement par des institutions financières, ce qui a mené à la création de l’industrie des GAEB. Dans ce contexte, les exploitants indépendants (les acquéreurs) sont autorisés à faire partie des réseaux et de donner l’accès aux personnes ou aux entreprises qui possèdent des GAEB, de facturer des frais pour le faire.

Les GAEB peuvent être vulnérables aux abus parce qu’ils peuvent appartenir à des personnes ou à des entités, dont des criminels, soit directement ou par l’intermédiaire de prêts-noms, et peuvent être chargés avec d’importants montants d’argent comptant potentiellement le fruit du produit de la criminalité dans le cadre du stade de placement du recyclage des produits de la criminalité.

En 2008, le Ministère a collaboré avec des représentants des réseaux de paiements canadiens afin d’élaborer pour l’industrie un ensemble de règles volontaires afin de répondre aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes posés par les GAEB. Celles-ci incluaient des mesures telles que l’identification des clients, la tenue de registres et un examen annuel par un auditeur qualifié. Toutefois, les organismes d’application de la loi continuent d’exprimer des préoccupations auprès de l’industrie des GAEB, y compris l’utilisation de ces GAEB par des groupes du crime organisé au Canada.

En 2012, le Québec est devenu la première province à renforcer sa réglementation de l’industrie des GAEB en définissant les guichets automatiques exploités par le secteur privé en tant qu’entreprise de services monétaires, mettant en œuvre un processus d’enregistrement et exigeant de l’information sur le propriétaire de l’entreprise et les activités prévues avant l’enregistrement.

Bien que cette industrie puisse être très vulnérable au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, comme le montre l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, aucun des participants de l’industrie des GAEB n’est actuellement assujetti à la LRPCFAT. Ce traitement différencié pose des risques en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes et les règles commerciales ne sont également pas équitables, en ce sens que les guichets automatiques associés à des institutions financières plus établies sont assujettis à une surveillance plus stricte. À cet égard, il existe un spectre d’options réglementaires disponibles.

Le pari mutuel est un système de paris dans lesquels toutes les gageures d’un type particulier sont placées ensemble dans un pool. Après avoir déduit les taxes et les « frais de service », les détenteurs des billets gagnants se divisent le montant net proportionnellement à leurs mises. Le système de paris mutuels est utilisé dans les courses de chevaux.

Compte tenu que les méthodes pour blanchir de l’argent dans le secteur des courses de chevaux sont similaires à celles pouvant être utilisées dans les casinos, les deux secteurs partagent des vulnérabilités semblables de blanchiment, alors bien que ces vulnérabilités sont déjà assujetties depuis 2007 à la LRPCFAT pour les casinos. Par exemple, les criminels peuvent convertir de petites dénominations d’argent comptant généré des activités criminelles en des billets plus importants au moyen du pari mutuel. De même, des fonds peuvent être déposés dans des comptes de joueur, en personne ou en ligne, en échange de chèques ou de virements télégraphiques. Le GAFI a découvert que ce type d’activité représente un risque important de recyclage des produits de la criminalité au Canada.

Dans le secteur des casinos, les provinces exploitent, gère et règlementent le jeu. Pour ce qui est des courses de chevaux, le rôle réglementaire est partagé entre l’Agence canadienne du pari mutuel (ACPM) et les provinces. L’ACPM est un organisme de service spécial ayant le mandat de maintenir l’intégrité du pari mutuel au Canada. Les gouvernements provinciaux sont responsables de la surveillance des courses de chevaux et de ses participants.

Les entités et les personnes du secteur immobilier qui sont déjà assujetties dans la LRPCFAT comprennent les courtiers, les agents et les promoteurs immobiliers. Toutefois, d’autres organisations telles que les assureurs hypothécaires, les bureaux d’enregistrement de titres immobiliers et les sociétés d’assurance de titres[13] ne le sont pas et jouent un rôle essentiel dans le secteur immobilier au Canada. En raison du type d’information qu’elles reçoivent actuellement dans le cours normal de leurs activités, ces entités se trouvent dans une position unique pour recueillir l’information liée au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes et pour en faire rapport. Elles peuvent offrir une optique ou un point de vue différent en regard des opérations financières.

L’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada a permis de relever quatre méthodes employées couramment pour recycler les produits de la criminalité et le financement des activités terroristes à l’aide d’opérations immobilières : achat ou vente de biens; accès à des institutions financières par des tiers agissant comme intermédiaires; aide à l’achat ou à la vente de biens; et l’utilisation de stratagèmes de prêts et d’hypothèques. Ces activités ont été évaluées comme présentant un risque élevé pour le recyclage des produits de la criminalité au Canada, et un traitement asymétrique entre différentes entités d’un même secteur représente également une enjeu d’équité au niveau réglementaire. De plus, d’autres pays tels que les États-Unis ont déjà instauré des exigences pour ces types d’entités.

Le secteur hypothécaire non réglementé par le gouvernement fédéral est complexe et est composé de diverses sortes d’entités assujetties à différentes obligations réglementaires. Les prêteurs hypothécaires peuvent être cotés en bourse, être détenus par des intérêts privés ou appartenir à des entreprises à capital privé ou appartenir en tout ou en partie à une institution financière canadienne sous réglementation fédérale ou à une institution financière étrangère. Ils comprennent des entreprises telles que les sociétés de financement hypothécaire, les sociétés de placement immobilier, les sociétés de placement hypothécaire, les fiducies de fonds commun de placement, des hypothèques consortiales ou des particuliers qui agissent en tant que prêteurs privés.

Les hypothèques peuvent être utilisées pour recycler les produits de la criminalité en achetant un bien au moyen d’une hypothèque et en effectuant les paiements hypothécaires à l’aide des produits de la criminalité. Le bien peut ensuite être utilisé au sein du marché immobilier afin de générer ce qui semble être des sources de revenus légitime. De plus, il existe divers stratagèmes complexes de prêts et d’hypothèque, y compris la fraude hypothécaire, qui ont été identifiés comme à risque de recyclage des produits de la criminalité dans l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada et dans l’évaluation du GAFI du Canada.

Actuellement, les EPNFD comprennent: les comptables et les cabinets d’expertise comptable; les courtiers immobiliers, les représentants des ventes; les promoteurs immobiliers; les casinos; les négociants en pierres et en métaux précieux; les notaires et les sociétés de notaires de la Colombie-Britannique. Ils sont assujettis à la LRPCFAT pour les activités qui comportent des opérations financières, tels que les opérations en espèces importantes de 10 000 $ ou plus. Toutefois, certaines EPNFD telles que les comptables, se livrent à d’autres activités qui ont été évaluées à risque élevé par l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada et l’évaluation mutuelle du Canada par le GAFI. Ces activités comprennent la création, l’exploitation ou la gestion de personnes morales ou de constructions juridiques, y compris l’organisation des contributions pour ces activités et la gestion de l’argent, de valeurs mobilières ou d’autres actifs d’un client (y compris la gestion de comptes bancaires, d’épargne ou de titres). Ces activités représentent un risque similaire à celui auquel les professionnels du droit sont exposés lorsqu’ils mènent des activités semblables, y compris en ce qui a trait à la question de la propriété effective.

Les entreprises et les professionnels qui fournissent des services liés à la constitution et à l’administration des sociétés sont exposés à des risques inhérents de recyclage des produits de la criminalité, particulièrement lorsqu’ils se livrent à la gestion de sociétés pour leurs clients. Ces services peuvent inclure la constitution d’une personne morale ou d’une société de personnes, en fournissant une adresse professionnelle enregistrée, en agissant en tant que (ou en prenant des dispositions pour qu’une personne agisse en tant que) administrateur ou actionnaire désigné d’une personne morale, en gérant les affaires financières et en produisant tous les ans le formulaire de déclaration de revenus des sociétés d’une entreprise. Tel qu’il a été mentionné précédemment, les cabinets d’avocats et d’expert-comptable, ainsi que les avocats et les comptables individuels, peuvent fournir ces types de services d’entreprise; toutefois, il y a aussi des entités spécialisées dans la prestation de tels services. Les fournisseurs de service à une société peuvent être utilisés sciemment ou autrement afin de faciliter la mauvaise utilisation des sociétés pour le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et l’évasion fiscale. Par exemple, les personnes morales et les fiducies étrangères peuvent être établies rapidement et gérées par des fournisseurs de services aux entreprises et peuvent être structurées pour camoufler le propriétaire effectif et pour dissimuler et convertir des produits de la criminalité. Ces activités représentent le même risque que les professionnels du droit posent lorsqu’ils mènent des activités semblables, y compris se pencher sur la question de la propriété effective.

La structuration des opérations, appelée le « schtroumpfage » – les répartir en de nombreuses plus petites opérations afin d’éviter de déclarer les opérations financières – peut être faite par l’institution ou le client lui-même.

En vertu de la LRPCFAT, les entités déclarantes sont tenues de déclarer les opérations financières qui sont prévues dans le Règlement, y compris une opération importante en espèces, des télévirements internationaux et des déclarations d’un déboursement de casino. Il y a aussi l’obligation de déclarer lorsque plusieurs petites opérations qui égalent 10 000 dollars ou plus sont effectuées dans un délai de 24 heures. Toutefois, il n’y a aucune interdiction explicite contre des entités qui structurent leurs modèles d’affaires ou de prestations de services de manière à éviter le déclenchement des exigences de matière de déclaration. De plus, il n’est pas illégal pour les clients de structurer leurs opérations financières afin de se soustraire à l’examen et à la déclaration des opérations financières. Dans d’autres pays, tels que les États-Unis et l’Australie, la structuration des opérations financière de cette façon constitue une infraction criminelle.

Le Ministère envisage de créer une infraction criminelle pour une entité ou un particulier qui structure des opérations et d’interdire précisément les entités déclarantes d’effectuer des opérations afin d’éviter la déclaration des opérations.

En vertu de la LRPCFAT, les obligations en matière de tenue de registres et de l’identification des clients sont mises en branle pour certains types d’activités ou lorsque des opérations financières atteignent un certain seuil. Par exemple, les entités financières et les entreprises de services monétaires identifient des clients qui effectuent des opérations d’échange de devises étrangères de 3 000 dollars ou plus, et certaines entreprises doivent conserver un relevé de la réception de fonds à 1 000 dollars ou plus.

Bien que la déclaration des opérations financières soit essentielle pour que le CANAFE effectue son analyse et produise un renseignement financier, les dossiers qui sont conservés servent principalement à permettre aux organismes d’application de la loi et autres autorités compétentes d’accéder à ceux-ci en vertu de différents mécanismes législatifs et judiciaires lorsque nécessaire pour leurs opérations et enquêtes. De plus, des dossiers exacts et exhaustifs aident les entités déclarantes à assurer une surveillance et à évaluer les risques de recyclage de produits de la criminalité et de financement d’activités terroristes à partir de leurs activités commerciales. Le Ministère a entendu dire que les divers seuils monétaires créent parfois une complexité qui peut entraîner des obstacles à la conformité et n’est pas proportionnel avec les objectifs escomptés du cadre réglementaire.

Le secteur de financement et de crédit-bail au Canada est vaste et est composé d’importants bailleurs nationaux et internationaux et de plus petites entités indépendantes. Ce secteur fournit un éventail des services de crédit-bail aux particuliers et aux entreprises partout au Canada et à l’étranger. Le secteur d’affacturage au Canada accorde des prêts aux entreprises afin de répondre à leurs besoins en liquidité.

Ces entreprises permettent un éventail de méthodes de paiement, telles que les espèces, les transferts électroniques de fonds (TEF), les mandats et les chèques, offrant ainsi des possibilités d’être utilisées aux stades de placement, de dispersion et d’intégration du recyclage des produits de la criminalité. Dans l’évaluation mutuelle du GAFI du Canada, il a été observé que les sociétés de financement, de crédit-bail et d’affacturage ne sont pas couvertes. De plus, il a été déterminé que ces secteurs posent des risques des produits de la criminalité dans l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada.

Les entreprises de véhicules blindés offrent des services qui se spécialisent dans le transport sécuritaire de l’argent et d’autres matériaux précieux, tels que les métaux précieux (par exemple, l’or). Au cours des dernières années, les services offerts par les sociétés de véhicules blindés ont pris de l’essor afin d’inclure la collecte et la livraison de l’argent comptant de guichets automatiques à étiquette blanche, le transport de la monnaie en vrac et les matériaux précieux entre les entreprises ainsi que la collecte des dépôts de comptes de clients.

L’une des principales sources de préoccupation est que les fonds sont recueillis et mis en commun dans des comptes contrôlés par l’entreprise de véhicules blindés et sont ensuite transférés par voie électronique dans les comptes de leurs clients, ce qui occulte ultimement l’origine véritable de l’argent. Cet anonymat peut être exploité par d’autres entreprises à risque élevé en matière de recyclage des produits de la criminalité, telles que les guichets automatiques à étiquette blanche.

D’autres administrations, telles que les États-Unis, ont intégré le secteur des véhicules blindés à leur régime de LRPC-FAT. L’absence de réglementation sur la LRPC-FAT au Canada pour l’industrie des véhicules blindés crée un environnement qui permet et facilite les mouvements anonymes d’argent en vrac. Sans mesure d’atténuation en place, ces types de services pourraient faciliter le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, car il n’est pas nécessaire d’identifier les clients, de tenir des registres, de recueillir des sources d’information sur les fonds ou de les signaler.

Des biens de grande valeur, tels que les biens de luxe, les automobiles, les bateaux et les yachts, ainsi que les œuvres d’art et les antiquités peuvent être des façons utiles d’entreposer la valeur de produits issus de la criminalité. L’achat de biens de luxe peut également faire partie d’un style de vie criminel. Il existe de nombreuses façons de recycler les produits de la criminalité, au moyen de ces biens, notamment en les donnant à la famille, aux amis et aux employés des entreprises criminelles comme paiement pour des services, en retournant les biens de grande valeur payés comptant et en obtenant un remboursement par chèque, ou en vendant de tels biens sur le marché secondaire.

Diverses administrations partout dans le monde, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, ont déjà intégré les négociants de biens de grande valeur dans le cadre de leur régime de LRPC-FAT, étant donné le risque élevé de recyclage des produits de la criminalité qu’ils posent. Le rapport d’évaluation mutuelle du GAFI du Canada a indiqué que le commerce des biens à valeur élevée, y compris les sociétés de vente aux enchères, est une activité qui est très vulnérable aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Le rapport a noté que les exigences de LRPC-FAT n’ont pas été étendues à ces secteurs, sauf pour les négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP). Il existe à cet égard un spectre d’options réglementaires disponibles permettant de prendre en compte le fardeau administratif éventuel afin de trouver un cadre réglementaire approprié.

Tel qu’il a été mentionné ci-dessus, les négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP) doivent actuellement répondre à des exigences en vertu de la LRPCFAT; toutefois, l’activité des sociétés de ventes aux enchères de bijoux est exclue de ces exigences. Nombre des risques et des vulnérabilités des NMPPP sont également présents dans l’industrie des sociétés de ventes aux enchères de bijoux. Les méthodes éventuelles de recyclage des produits de la criminalité comprennent les suivantes : l’achat de métaux précieux et de bijoux avec des produits de la criminalité et leur vente subséquente; l’utilisation de comptes détenus auprès des sociétés de ventes aux enchères pour le recyclage des produits de la criminalité; la capacité d’acheter ou de vendre des métaux précieux et des bijoux dans un anonymat relatif.

En incorporant les activités des sociétés de ventes aux enchères de bijoux dans le cadre législatif de la LRPCFAT, des règles du jeu équitables seraient établies dans le secteur des NMPPP et cela assurerait une uniformité des exigences en matière d’information et de divulgation pour toutes les entreprises qui négocient des métaux précieux et des pierres précieuses.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur les risques associés aux secteurs mentionnés dans le présent chapitre et les mesures pour les atténuer.

Bien que la protection de la vie privée des Canadiens soit primordiale, l’échange d’information, particulièrement entre des entités des secteurs public et privé, est essentiel pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Pour cette raison, il existe tant un besoin de mesures de protection contre la circulation de l’information sans restriction afin de protéger les droits et la vie privée des Canadiens, qu’un besoin d’avoir la capacité de partager l’information nécessaire à la protection de la sécurité financière des Canadiens et du système financier canadien. Cette section porte sur les options visant à améliorer l’échange d’information, en ajoutant les destinataires de divulgation, en améliorant les options d’échange d’information entre le secteur privé afin de remédier aux cas de fraude, en améliorant l’échange d’information sur les méthodes et les tendances de RPC-FAT entre le CANAFE et le secteur privé et en améliorant l’échange d’information dans le cadre d’ententes de coopérations juridiques internationales. Une meilleure synchronisation du moment de l’examen de la Loi par le commissaire à la protection de la vie privée mérite également d’être discuté compte tenu de l’expérience à cet égard jusqu’à présent.

Chacune des initiatives possibles devrait être examinée à la lumière de l’incidence qu’elle aurait sur la vie privée des Canadiens ainsi que leur utilité dans l’amélioration des efforts visant à lutter contre le RPC-FAT. Cette tension inhérente aide à veiller à ce que l’échange d’information soit effectuée seulement en fonction d’information utile pour les organismes d’application de la loi et le secteur privé dans leurs activités.

Le CANAFE est actuellement autorisé à divulguer l’information désignée (par exemple, le nom du détenteur de compte, le montant de l’opération et la date) aux organismes canadiens d’application de la loi et à d’autres organismes de la loi, tels que l’Agence des services frontaliers du Canada, l’Agence du revenu du Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité, dans les cas où il existe des motifs raisonnables de soupçonner que l’information serait pertinente à une enquête ou à une poursuite sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ou sur des menaces à la sécurité du Canada.

Le Bureau de la concurrence est un organisme d’application de la loi responsable de l’administration et de l’application de la Loi sur la concurrence, la Loi sur l’emballage et l’étiquetage des produits de consommation (sauf en ce qui concerne les denrées alimentaires), la Loi sur l’étiquetage des textiles et la Loi sur le poinçonnage des métaux précieux. Le Bureau de la concurrence veille à ce que les entreprises et les consommateurs canadiens prospèrent dans un marché concurrentiel et innovateur. La Loi sur la concurrence renferme principalement des dispositions criminelles visant la publicité mensongère (par exemple, en luttant contre les pratiques de marketing trompeuses et la fraude par marketing de masse), les enquêtes sur les cartels, l’abus d’une position dominante dans le marché et l’examen des fusions. Le Bureau détient de plus un vaste éventail de pouvoirs afin d’enquêter sur les comportements anticoncurrentiels et plaide devant les tribunaux les infractions civiles et criminelles alléguées. Afin de faciliter l’atteinte de cet objectif, il serait avantageux pour le Bureau s’il devenait destinataire de divulgation en vertu de la LRPCFAT afin de recevoir le renseignement financier du CANAFE. Selon l’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, la fraude par marketing de masse est considérée comme une menace très répandue au Canada. En conséquence, il est proposé de modifier le paragraphe 55(3) de la LRPCFAT afin d’accorder au CANAFE le pouvoir de divulguer le renseignement financier au Bureau de la concurrence.

Revenu Québec détient des responsabilités semblables à celle de l’Agence du revenu du Canada (ARC) en ce qui concerne l’administration de l’impôt sur le revenu des particuliers au Québec. Au cours des dernières années, Revenu Québec a intensifié ses efforts visant à lutter contre la fraude fiscale et l’évasion fiscale en réalisant des enquêtes criminelles. Toutefois, Revenu Québec, contrairement à l’ARC, n’est pas un destinataire de divulgation dans la LRPCFAT et ne peut donc pas recevoir le renseignement financier du CANAFE. Compte tenu du lien entre le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et les infractions fiscales connexes, ainsi que de la nature des travaux entrepris par l’organisme provincial, il est proposé de modifier le paragraphe 55(3) de la LRPCFAT afin d’accorder le pouvoir au CANAFE de divulguer le renseignement financier à Revenu Québec.

Le gouvernement prend très au sérieux la vie privée et la protection des renseignements personnels. La LPRPDE énonce des mesures visant à protéger les renseignements personnels et les exigences des organisations du secteur privé quant à l’obtention du consentement de la personne visée lorsqu’on recueille, utilise ou divulgue ses renseignements personnels. Par exemple, la LPRPDE accorde aux particuliers le droit de savoir pourquoi une organisation recueille, utilise ou divulgue leurs renseignements personnels, le droit de s’attendre à ce qu’une organisation protège ses renseignements personnels en prenant des mesures de sécurité et le droit de se plaindre au sujet de la façon dont une organisation traite leurs renseignements personnels s’ils estiment que leurs droits à la vie privée n’ont pas été respectés.

Dans certaines circonstances, afin de protéger la sécurité financière des Canadiens et le système financier canadien, la LPRPDE permet la divulgation de certains renseignements personnels sans le consentement ou la connaissance de la personne visée, par exemple, dans les cas de fraude suspectée. Les circonstances et protocoles entourant l’échange efficace et approprié d’information non seulement avec des institutions gouvernementales mais également entre des organisations du secteur privé devraient être examinés dans une optique d’assurer la clarté nécessaire pour toutes les parties prenantes et afin de protéger contre d’éventuelles poursuites criminelles et civiles.

L’information communiquée au CANAFE est analysée et condensée dans le renseignement financier qui, lorsque les seuils législatifs sont respectés, peut être divulgué afin de soutenir les partenaires nationaux et internationaux dans l’enquête et la poursuite d’infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. L’information peut aussi prendre la forme d’études, de méthodes et de tendances utilisées afin de renseigner le public, y compris les entités déclarantes, sur les enjeux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, tels que le projet Protection traité précédemment dans la présente.

Une bonne collaboration entre les entités déclarantes, le CANAFE, les organismes de sécurité nationale et les organismes d’application de la loi constitue un aspect important afin de lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Elle permet le partage de l’expertise et du renseignement sur les méthodes de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, ainsi que de l’information sur les clients et les opérations potentiellement liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.

D’autres pays tels que le Royaume-Uni, les États-Unis et l’Australie ont en place des initiatives où l’expertise et l’information sur les méthodes, les tendances et les opérations financières sont mises en commun au sein du gouvernement et avec le secteur privé. Cet échange d’information, en temps plus opportuns, rend plus efficace la prise de décisions par les entités déclarantes pour la diligence raisonnable, la surveillance des opérations et la production de rapports aux fins de la lutte contre le LRPC-FAT. De plus, elle améliore la capacité des organismes d’application de la loi à enquêter sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et à intenter des poursuites à cet effet.

La capacité des pays à se livrer à une collaboration internationale efficace, y compris la capacité à fournir et à obtenir efficacement une entraide juridique en matière de questions criminelles, est critique à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, dont pour avoir gain de cause dans une poursuite, compte tenu de la nature internationale des actes criminels (par exemple, le mouvement de l’argent entre les frontières afin de faciliter le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes). Il s’agit d’un aspect bien établi du droit international. Des préoccupations quant à l’efficacité du Canada dans le domaine de la collaboration internationale, y compris l’entraide juridique, ont été soulevées durant l’évaluation du GAFI du Canada.

Une augmentation constante et importante du volume de demandes d’entraides présentées au Canada ou de la part de ce dernier au cours des dernières années, combinée aux lacunes relevées dans le cadre d’entraide juridique du Canada, nuit à la capacité du Canada dans le domaine de l’entraide juridique. Il en est particulièrement ainsi pour les demandes d’éléments probants numériques qui ont augmenté de façon exponentielle en raison de l’augmentation de l’utilisation des appareils électroniques personnels (par exemple, les téléphones intelligents) et des réseaux sociaux. De plus, le réseau de traité d’entraide juridique existant requiert la modernisation afin de refléter adéquatement la technologie en évolution et l’accroissement de la mondialisation de la criminalité afin de s’assurer que le Canada peut fournir une entraide juridique dans les procédures de recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes sans délai excessif.

En général, les éléments probants doivent se conformer aux exigences de la Loi sur la preuve au Canada (LPC) afin d’être admis dans les procédures criminelles canadiennes. La LLJMC prévoit une plus grande latitude pour les tribunaux canadiens pour admettre et traiter des éléments probants étrangers obtenus dans le cadre d’une demande de traité d’entraide juridique. Toutefois, des représentants étrangers et les employés d’entreprises étrangères qui fournissent des éléments de preuve, tels que des documents et des registres d’entreprise, ont parfois de la difficulté à se conformer aux exigences d’admissibilité des éléments probants au Canada exposées dans la LPC et la LLJMC, ce qui peut entraîner des retards dans l’obtention d’éléments probants étrangers pour la police canadienne et les procureurs.

Dans l’évaluation du Canada, le GAFI a noté que le Canada demande ou obtient rarement une assistance internationale relativement aux enquêtes et poursuites canadiennes concernant le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. L’un des principaux enjeux dans l’entraide juridique est de s’assurer que les éléments probants seront admissibles lorsqu’ils seront obtenus de l’étranger. Les modifications législatives potentielles prendraient en compte les récentes décisions des tribunaux se rapportant aux droits à la vie privée dans la preuve numérique et accroîtraient l’efficience et l’efficacité du cadre canadien d’entraide juridique. Elles pourraient ainsi accroître la capacité du Canada à entamer des poursuites dans les affaires de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes à l’aide de l’information provenant de l’étranger, compte tenu de la nature de plus en plus mondiale des mécanismes de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.

Le commissaire à la protection de la vie privée a l’autorité d’auditer les pratiques en matière de manipulation des renseignements personnels de tous les ministères et organismes fédéraux en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels. De plus, conformément au paragraphe 72(2) de la LRPCFAT, le commissaire doit réaliser un examen tous les deux ans des mesures prises par le CANAFE pour protéger la confidentialité de l’information qu’il reçoit ou recueille. Toutefois, depuis que cette exigence a été établie en 2006, le Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) a réalisé des audits moins fréquemment que les examens biennaux mandatés par la LRPCFAT, dont les rapports ont été publiés en 2009, en 2013 et en 2017. Lorsque l’exigence de deux ans était envisagée par le Parlement, le Canada puis le commissaire à la protection de la vie privée ont soulevé des préoccupations sur la faisabilité de cette exigence et ont demandé aux parlementaires de revoir la fréquence des examens obligatoires.[14]

Dans ce contexte, le Ministère sollicite les points de vue sur les mérites de changer la fréquence de l’examen obligatoire du commissaire à la protection à la vie privée pour qu’il passe de deux à quatre ans. Une période plus longue entre les examens sur la vie privée refléterait la pratique actuelle du CPVP, ce qui permet un examen périodique plus approfondi. Cette proposition n’influera pas sur la capacité du CPVP à réaliser des examens des activités du CANAFE plus fréquemment si le CPVP le juge nécessaire, conformément aux pouvoirs existants prévus à l’article 37 de la Loi sur la protection des renseignements personnels. De plus, le CANAFE est assujetti à la surveillance par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, sous réserve de l’approbation du Parlement, par l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, tels qu’il est énoncé dans le projet de loi C-59.

Le Ministère a consulté le CPVP sur cette mesure.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur la question de savoir s’il est recommandable d’accroître le nombre de destinataires de divulgation et sur la façon d’améliorer les partenariats liés à l’échange d’information.

Le présent chapitre porte sur le défi auquel font face les organismes d’application de la loi, les organismes de renseignement et le secteur privé dans un environnement en constant changement, y compris en ce qui concerne les pratiques criminelles qui évoluent et le rythme des avancées technologiques. De plus, les mesures discutées dans la présente découlent de l’environnement international des politiques dans lequel d’autres pays utilisent de nouveaux outils et méthodes visant à détecter et à prévenir le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Pour évaluer s’il faut adopter ou non ces mesures au Canada, ces questions sont évaluées en considérant le besoin d’équilibrer les mesures de protection importantes telles que la Charte et les droits à la vie privée, ainsi que l’équilibre entre le fardeau que ces mesures pourraient imposer et les avantages qu’elles pourraient apporter à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Les mesures visant l’application de la loi devraient aussi être équilibrées par rapport à d’autres priorités et au risque lié à l’exécution frontalière.

L’une des difficultés les plus reconnues au niveau des enquêtes et des poursuites liés aux infractions de recyclage des produits de la criminalité est l’exigence juridique de devoir prouver que des produits de la criminalité ont été recyclés tout en ayant eu conscience du fait que les fonds en questions avaient été tirés d’une infraction criminelle sous-jacente par exemple, le trafic de drogue ou la fraude. Cette exigence est particulièrement problématique compte tenu de l’utilisation de blanchisseurs d’argent professionnels qui prennent leur distance intentionnellement des organisations criminelles et des infractions sous-jacentes afin de prémunir leur entreprise d’un gain de cause dans les poursuites.

En vertu de l’article 462.31 du Code criminel, les procureurs doivent établir la connaissance ou la croyance qu’une partie ou la totalité du bien ou des produits a été obtenue ou provient, directement ou indirectement, soit de la perpétration d’une infraction désignée, soit d’un acte ou d’une omission qui, au Canada, aurait constitué une infraction désignée. L’établissement de la connaissances d’une infraction précise est un défi important qui peut contribuer au taux relativement faible de gain de cause dans les poursuites concernant le recyclage des produits de la criminalité au Canada. D’autres pays, tels que le Royaume-Uni et l’Australie, ont d’autres types d’infractions standards où la composante en lien avec l’élément de connaissance (ou mens rea) de l’infraction est différente, en faisant plutôt référence au soupçon ou à l’insouciance (ne montrer aucun égard pour le danger ou les conséquences ou agir de façon négligente).

En vertu de la LRPCFAT, les TEF internationaux entrants et sortants de plus de 10 000 dollars sont signalés au CANAFE lorsqu’ils sont effectués par un client. Toutefois, cela ne saisit pas les transferts qui transitent par des institutions financières canadiennes où le Canada n’est pas le lieu d’envoi ou la destination, tels que ceux provenant des relations bancaires correspondantes. De plus, il y a d’autres types de transferts qui se rapportent à des méthodes de paiement nouvelles et en évolution, par exemple, des lettres de crédit et de finance, l’échange, de métaux précieux et de valeurs mobilières qui ne sont pas assujettis actuellement.

Cette situation crée un certain vide dans l’information que le CANAFE reçoit et empêche le CANAFE d’identifier certaines opérations potentielles de recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes qui ont lieu dans le système financier canadien et qui transitent à travers celui-ci. Reconnaissant les mécanismes existants déjà en place pour que les TEF soient communiqués au CANAFE, cette mesure cherche à incorporer les transferts initiés par des non-clients dans les systèmes existants et ce, sans créer de fardeau excessif.

Malgré la présence accrue des méthodes de paiement autre qu’en espèces au Canada, les espèces demeurent un mode de paiement important. Il existe un éventail de raisons historiques et culturelles pour lesquelles certaines personnes au Canada n’ont pas recours aux services financiers traditionnels et s’en remettent aux espèces. De plus, les espèces sont toujours couramment utilisées par les criminels et elles demeurent intrinsèquement liées à la plupart des activités criminelles. Dans le rapport d’évaluation mutuelle du GAFI du Canada, le recours aux effets au porteur (par exemple, les espèces) afin de faciliter les opérations illicites a été considéré comme une préoccupation clé. Les coupures de grande valeur sont particulièrement un problème, car il est probable qu’elles favorisent le transport et la contrebande de sommes de grandes valeur de manière à pouvoir éviter d’attirer les soupçons des responsables des organismes d’application de la loi. Reconnaissant que les coupures de grande valeur sont utilisées par le crime organisé et pour le recyclage des produits de la criminalité, le Canada ne produit plus de billet de 1 000 dollars depuis 2000. Le retrait du cours légal des coupures de grande valeur pourrait être considéré comme la prochaine étape pratique afin de renforcer la confiance selon laquelle la devise canadienne est utilisée pour des opérations légitimes au Canada et à l’étranger. Cette étape serait conforme avec les pratiques récentes d’autres pays.

Le transport physique de l’argent d’un pays à l’autre est l’une des plus anciennes et les formes les plus simples de recyclage des produits de la criminalité et il est encore répandu aujourd’hui. Une étude du GAFI a noté qu’« [TRADUCTION] il n’y a aucune estimation entièrement fiable pour le montant d’argent blanchi de cette manière, mais le montant semblerait se situer entre des centaines de milliards et un billion de dollars américains par années »[15]. De plus, la monnaie en vrac est souvent utilisée dans l’achat de biens immobiliers et d’autres biens de grande valeur comme moyen pour les criminels de recycler leurs fonds illicites.

Au Canada, il y a des réseaux criminels partout au pays qui sont responsables du traitement de milliers de millions de dollars en produits de la criminalité sous forme de monnaie en vrac. Ces opérations sont souvent observées par les organismes d’application de la loi dans les endroits publics où des sacs ou des boîtes d’espèces sont échangés. Les personnes qui fournissent des espèces dans ces situations ont des liens avec des organisations et des activités criminelles, et elles n’ont pas de motifs légitimes pour posséder ces montants d’argent. Toutefois, l’utilisation de plusieurs transferts de fonds, le recours aux transporteurs de fonds professionnels et le placement de fonds dans le système financier rendent difficiles pour les organismes d’application de la loi l’établissement du lien entre les fonds et la perpétration d’une infraction criminelle précise.

En ce qui concerne les questions entourant la monnaie en vrac, il faudrait envisager de déterminer s’il est approprié d’instaurer une limite sur le montant de monnaie en vrac qu’une personne peut transporter au Canada sans but légitime, si le Canada devrait élaborer un registre d’entreprises pour les entreprises qui traitent des volumes élevés de fonds et s’il devrait y avoir une limite sur le montant d’espèces qu’une entreprise au Canada devrait pourvoir accepter et/ou devoir divulguer. Ces types de mesures d’atténuation visant à s’attaquer à la question de la monnaie en vrac ont tous été mis en œuvre sous une forme ou une autre par d’autres pays tels que les États-Unis, la France et le Royaume-Uni.

Les ordonnances de ciblage géographique établissent des obligations précises pour les personnes et les entités dans certaines zones géographiques afin qu’elles fassent l’objet d’un examen plus approfondi relativement à des opérations précises en conséquence des risques plus élevés de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes auxquelles elles font face au Canada. Celles-ci sont en général établies pour une période précise.

Les zones géographiques sont en général ciblées parce qu’il s’agit de destinations populaires pour les produits et les biens immobiliers de luxe. Celles-ci sont susceptibles d’impliquer un pourcentage plus élevés de large transaction en espèces et font l’objet d’une attention accrue par les organismes d’application de la loi. Les ordonnances de ciblage géographique sont couramment utilisées aux États-Unis afin de cibler les opérations immobilières et autres opérations concernant les produits de grande valeur.

Les ordonnances de ciblage géographique ne sont pas prévues dans la LRPCFAT; toutefois, elles pourraient être utiles afin d’améliorer le renseignement financier sur les activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes pour des segments qui sont considérés comme à risque plus élevé en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Elles pourraient accorder une plus grande latitude afin de faciliter une approche fondée sur les risques en permettant au gouvernement d’établir des obligations temporaires ciblant des personnes ou des entités dans certaines zones géographiques. Il existe différentes façons grâce auxquelles cet outil pourrait être mis en œuvre au Canada et il serait important de bien tenir compte de la supervision d’un tel mécanisme s’il était intégré dans le régime canadien de LRPC-FAT.

La partie 2 de la LRPCFAT est appliquée par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et exige que les personnes ou les entités signalent l’importation et l’exportation d’instruments de change et monétaires de 10 000 dollars ou plus. Les instruments monétaires sont les actions, les obligations, les bons du Trésor, les traites bancaires, les billets à ordre, les chèques de voyage, les chèques endossés et les mandats sous la forme à porteur ou d’une autre forme qui permet de transmettre le titre à la passation.

La partie 2 permet aussi à l’ASFC d’effectuer des recherches lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu’une personne ou une entité transporte des instruments de change ou monétaires non déclarés. Les montants non déclarés peuvent être saisis par l’ASFC ou confisqués lorsqu’il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu’il s’agit de produits de la criminalité ou de fonds destinés au financement d’activités terroristes.

La définition canadienne d’instrument monétaire, tel qu’il est décrit ci-dessus, est relativement étroite et ne capture pas le mouvement transfrontalier de d’autres types de biens de valeurs qui pourraient être utilisés aux fins de recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes. Cette question a été notée dans l’évaluation mutuelle du GAFI du Canada. D’autres types d’instruments pourraient inclure les diamants, l’or et d’autres métaux précieux, des produits de paiement prépayés, etc. Le risque associé à ces éléments repose sur leur transportabilité et la facilité relative de transporter et d’obtenir potentiellement des éléments de valeur monétaire élevée de façon anonyme.

Au Canada, les pénalités associées à l’omission de déclarer des instruments de change et monétaires dépassant 10 000 dollars se situent entre 250 et 5 000 dollars. Dans l’évaluation mutuelle du GAFI du Canada, il a été noté que cette structure de pénalités n’est ni proportionnelle ni dissuasive. Comparativement aux autres pays, les pénalités au Canada sont faibles. Certains pays, tels que l’Espagne, imposent une pénalité minimale globale correspondant au double de la valeur; en Australie, la pénalité minimale varie selon la valeur des espèces non déclarées. Aux États-Unis, toutes les espèces peuvent être saisies et confisquées s’il y a une fausse déclaration ou s’il n’y a aucune déclaration, en imposant une pénalité égale au montant non déclaré. Afin de s’assurer que les pénalités canadiennes soient suffisamment dissuasives, la révision de la structure de pénalité est à l’étude.

La fraude commerciale est un risque stratégique mondial croissant et un hyperonyme pour les techniques visant à manipuler le commerce légitime, les processus commerciaux, financiers et douaniers en vue d’obtenir un gain illicite direct ou de camoufler les produits de la criminalité, y compris le financement des activités terroristes. Ce dernier est en général appelé « blanchiment de capitaux liés aux activités commerciales ». La fraude commerciale alimente la criminalité mondiale, le terrorisme, l’évasion des sanctions internationales et la corruption. De plus, elle prive les pays des droits et de recettes fiscales et fausse la concurrence économique légitime. La fraude commerciale et le blanchiment de capitaux liés aux activités commerciales sont dissimulés à travers un volume massif de commerce légitime international et touchent les mandats et les secteurs d’activité de nombreuses entités du gouvernement et du secteur privé, ce qui les rend extrêmement difficiles à détecter. Plusieurs estimations ont évalué la valeur des transferts financiers illicites fondés sur le dont certaines l’évaluant jusqu’à 7 % du produit intérieur brut mondial.

Les États-Unis ont fait des enquêtes sur la fraude commerciale et le blanchiment de capitaux liés aux activités commerciales une priorité et ont mis en œuvre divers programmes, tels que les unités de transparence commerciale qui utilisent les données commerciales des États-Unis et de pays partenaires afin examiner les anomalies suspectes et de déterminer les cibles probables d’enquêtes. La Grande-Bretagne a créé un centre de renseignement sur le recyclage des produits de la criminalité afin de mettre en commun l’expertise du gouvernement et du secteur privé afin de cerner les principaux risques de recyclage des produits de la criminalité, y compris le blanchiment de capitaux liés aux activités commerciales.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur la façon d'atténuer les vulnérabilités liées au blanchiment d'argent et au financement d'activités terroristes, à la frontière.

Le présent chapitre porte sur la façon dont le cadre est géré et supervisé. En examinant les mesures dans cet espace, il est important d’avoir à l’esprit les compromis éventuels qui doivent être pris en compte au moment de décider de l’utilisation des mécanismes législatifs et réglementaires par rapport aux outils administratifs qui peuvent être disponibles tels que l’utilisation de directives, ou de documents d’éducation, de communication et de persuasion qui peuvent s’avérer tout aussi efficaces.

L’expression « atténuation des risques » renvoie à la pratique des institutions financières (ou d’autres entreprises) d’interrompre les relations avec des clients et de fermer leurs comptes, que ce soit des particuliers ou des institutions, parce que l’institution financière considère que le client est à risque élevé. La question d’atténuation des risques représente une tendance mondiale fondée sur un ensemble complexe de facteurs qui comprend, sans s’y limiter, un changement de l’orientation commerciale et des changements au niveau de la tolérance aux risques. Compte tenu de l’incidence potentielle de cette tendance sur l’inclusion financière nationale et sur les envois internationaux de fonds, l’atténuation des risques est devenue le sujet d’études réalisée par des groupes tels que le Conseil de stabilité financière.

En vertu de la LRPCFAT, les entités déclarantes doivent gérer (mais pas nécessairement éliminer) leur exposition en adoptant une approche axée sur les risques relativement à leurs clients. Cette évaluation est censée être réalisée au cas par cas et ne devrait pas avoir une incidence sur l’ensemble d’une industrie. De plus, les exigences relatives à la diligence raisonnable des clients dans la LRPCFAT appliquent une règle « connaissez votre client ».

Certaines entreprises de services monétaires (ESM) ont connu des difficultés relativement au maintien de comptes avec des institutions financières en conséquence de cette tendance d’atténuation des risques. Cette situation reflète la perception selon laquelle les ESM sont intrinsèquement à risque élevé et la croyance erronée dans certains cas selon laquelle les institutions financières doivent « connaître le client de son client ». Cela entrave en conséquence leur capacité de transmettre les versements et a un impact sérieux sur le modèle commercial de ces ESM. De plus, si elles ne sont pas en mesure de maintenir des comptes avec des institutions financières légitimes, les opérations financières pourraient être acheminées par des voies informelles qui rendent ces opérations plus opaques pour les organismes de réglementations et d’application de la loi lorsqu’ils enquêtent sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.

Lorsque les ESM exercent effectivement leurs activités au Canada, ils ont besoin d’un accès aux services financiers, comme il a été mentionné précédemment, et d’une inscription auprès du CANAFE. Afin de s’assurer de l’intégrité du registre et de ceux qui exploitent des ESM au Canada, certaines exigences sont mises en place.

L’Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada reconnaît que, bien que le secteur des ESM soit diversifié, il est généralement vulnérable au recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes. Afin d’exercer des activités en tant qu’ESM au Canada, les personnes ou les entités doivent s’inscrire auprès du CANAFE et doivent renouveler leur inscription tous les deux ans. La LRPCFAT énonce les exigences existantes de s’inscrire pour les ESM, ainsi que les circonstances dans lesquelles ces personnes ou entités peuvent être inadmissibles à l’inscription (par exemple, certaines condamnations criminelles liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme).

Malgré ces exigences, le CANAFE a estimé au fil des années que les demandes et les procédures d’inscription pourraient être améliorées afin de protéger l’intégralité du système financier. Par exemple, la liste des infractions qui rendent un demandeur non admissible pourrait être élargie. De plus, la suspension de l’inscription d’une ESM pourrait être effectuée sur une base discrétionnaire lorsque les propriétaires et les exploitants d’une ESM sont assujettis à des procédures de la cour pénale qui si elles devaient se traduire par une condamnation, les rendraient non admissibles à l’inscription et ce, tout en maintenant les mesures de protection juridiques appropriées.

La nature des services bancaires et financiers évolue rapidement. Les institutions financières exploitent le monde en constante évolution et rapide des solutions technologiques numériques afin d'améliorer leur capacité à être plus efficient et efficace. Elles doivent donc être notamment à la fine pointe des moyens sécurisés pour mener les procédures « connaissez votre client » afin de répondre aux demandes des consommateur d'un environnement en ligne.

Il y a actuellement une dépendance à la consultation et à la validation physique des documents d'identification afin de s'assurer qu'ils sont originaux, valides et à jour. La technologie avancée a la capacité d’effectuer une validation à distance, par exemple, en offrant des processus de numérisation en ligne qui permettent la validation, l'extraction de données et les processus d'authentification des documents afin d'évaluer la légitimité des documents d'identification, comme les passeports, les visas, les pièces d’identité, les permis de conduire, etc. L’utilisation d’une chaîne de blocs, l'identification à l'aide de la biométrie, la reconnaissance faciale et d'autres méthodes avancées pouvant être plus fiable et efficace que l'œil humain, sont tous des domaines faisant l'objet d'une attention et de développements intenses.

Le rythme rapide de croissance et d'innovation dans le secteur de la technologie financière, et les concepts de « l’identification numérique » plus précisément, demande un renforcement des méthodes d'identification actuelle, l'exploration de nouvelles méthodes d'identification, tout en tentant de tirer parti des nouvelles technologies afin de faciliter et d’améliorer l’efficacité de la diligence raisonnable des clients aux fins du régime de LRPC-FAT.

Des modifications règlementaires en 2016 ont introduit plus de souplesse pour les mesures visant à vérifier l'identité d'un client, particulièrement dans le contexte virtuel. Ces mesures comprenaient l'utilisation d'un dossier de crédit et la capacité à se référer à l'information provenant de deux sources indépendantes et fiables afin de vérifier l’identité d'un client (par exemple, une facture d'un service public, un relevé bancaire ou un dossier de crédit). La capacité à s’en remettre à l'information fournie par des organismes fédéraux ou provinciaux qui sont autorisés à vérifier l'identité de personnes (par exemple, les bureaux de permis de conduire) a aussi été ajoutée. Toutefois, le Règlement doit continuer à demeurer souple et à s'adapter à un environnement de développement rapide et de technologies émergentes. Un progrès continu vers des exigences fondées davantage sur les principes pourrait permettre aux entités déclarantes d'adopter une approche axée sur les risques par rapport aux nouvelles technologies. Une telle approche à l'égard de la réglementation fournirait un cadre plus souple qui permettrait de mieux tirer profit des solutions technologiques, ce qui devrait ultimement améliorer l'efficacité du régime de LRPC-FAT.

En raison de la croissance rapide du secteur de la technologie financière, plusieurs administrations (par exemples, l’Ontario, le Royaume-Uni et Singapore) ont élaboré des projet pilotes réglementaires afin de permettre aux entreprises en démarrage d'exercer ses activités dans un environnement supervisé sans avoir nécessairement à se conformer à toutes les exigences réglementaires qui pourraient s'appliquer autrement. Le volet du projet pilote réglementaire permet aux entreprises de technologie financière d'appliquer des exemptions à durée limitée afin de mettre à l'essai leurs produits, services ou applications dans un environnement réel ou d'avoir des approches plus souples à l'égard de la conformité aux exigences, pourvu que cela ne pose pas de risque à l'intégrité du régime canadien de LRPC-FAT.

L’abstention administrative est un pouvoir plus vaste qui permet à un organisme de réglementation d'exempter temporairement ou en permanence des catégories entières d’entreprises ou de secteurs, ou bien toutes les entités réglementées. L’exemption et l’abstention administrative rendraient le cadre de LRPC-FAT plus souple, plus axé sur les risques et ferait en sorte que celui-ci appuierait davantage l’innovation favorisant ainsi une plus grande adoption des approches liées à technologie de l’autoréglementation. Toutefois, une attention particulière doit être portée sur les considérations entourant l’approbation de tels projets réglementaires pilotes.

Après que des modifications à la LRPCFAT ou à son règlement sont élaborées, le CANAFE joue un rôle clé pour fournir des directives aux entités déclarantes sur leurs obligations et exigences dans la mise en œuvre de ces changements. De plus, le Bureau du surintendant des institutions financières (BISF), dans le cadre de son mandat prudentiel avec les institutions financières sous réglementation fédérale, joue continuellement un rôle important dans la supervision et la prestation de directives à ces institutions. Le CANAFE rédige les directives en fonction de la LRPCFAT pendant que le BISF rédige celles-ci en fonction des attentes en matière de supervision, et des discussions avec l'industrie sur de telles directives a lieu à divers stades. Ces directives sont renforcées de façon importante lorsque le CANAFE et le BISF peuvent consulter l'industrie sur la version préliminaire de celles-ci et en discuter avec elle. Des consultations ont déjà eu lieu de façon officieuse dans des réunions et des discussions entre le gouvernement et le secteur privé, y compris dans le cadre de mécanismes consultatifs ponctuels et permanents. D’autres organismes de réglementation comme l'Agence de la consommation en matière financière du Canada utilise un cadre de mobilisation des intervenants et de consultation avec eux afin d'orienter leurs activités.

Les programmes de dénonciation se sont avérés des outils utiles permettant à des organisations de recevoir des signalements d'actes répréhensibles et d’inconduites dans différents contextes. Divers attributs d’un cadre de dénonciation existent déjà dans le cadre de LRPC-FAT existant, car le CANAFE détient le pouvoir de recevoir de façon anonyme de l'information de la part du public relativement à des infractions soupçonnées de recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes ainsi que des contraventions à la LRPCFAT. De plus, les protections visées par le Règlement pour l'information personnelle et privée détenue par le CANAFE protège l'anonymat de la personne qui soumet l'information. Certains estiment que les attributs existants sont robustes et pourraient être communiqués plus clairement au public. Pourtant, certaines parties croient que les protections pourraient aller plus loin et que d'autres attributs d'un cadre de dénonciation type, tel qu’un mécanisme pour se renseigner sur le statut de leur soumission ou des fonds spécialement dédiés au cadre, ne sont pas présents.

Les programmes de dénonciation font maintenant partie du paysage organisationnel dans l'ensemble d’une gamme de secteurs d'activité au Canada. Parmi les ministères et organismes du gouvernement ayant établi de tels programmes, mentionnons l’Agence du revenu du Canada, le Bureau de la concurrence et l’Office national de l'énergie.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur la façon de moderniser le cadre afin d'aborder les enjeux liés aux ESM, aux méthodes d'identification et à la surveillance.

Le but du régime de SAP dans la LRPCFAT est d'encourager les particuliers et les entités à se conformer à leurs obligations en vertu de la Loi et du Règlement. La réglementation sur les SAP établit les infractions, leur niveau de gravité et le montant maximum prescrit pour chacune de ces infractions. Ces infractions comprennent l'omission de :

Des pénalités maximales sont établies dans le Règlement et sont imposées par le CANAFE. S’il y a lieu, un avis d'infraction est émis aux entités jugées comme non conformes et des montants de pénalités correspondants sont mesurées et ce, de façon proportionnelle aux différents cas particuliers de non-conformité. Entre autres, l’avis d’infraction identifie la nature de l'infraction et le montant de la pénalité ainsi que le droit de présenter des observations au directeur.

Une variété de résultats sont possibles, y compris payer la SAP initiale, conclure une entente de conformité avec le CANAFE, demander un examen par le directeur du CANAFE et interjeter appel auprès de la Cour fédérale (seulement dans le cas d'infractions graves ou très graves, et ce, seulement après que des observations aient été présentées au directeur). Une fois que toutes les procédures ont été épuisées, le CANAFE peut rendre public le nom de la personne ou de l'entité, les infractions et le montant de la pénalité imposée).

La désignation publique du contrevenant peut agir comme un moyen de dissuasion contre les infractions aux règles sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Dans de nombreux cas, le risque à la réputation d'une entité nommée publiquement est un moyen dissuasif plus important que la SAP même.

La LRPCFAT établit le pouvoir discrétionnaire du CANAFE de rendre public une partie de l'information liée à une SAP lorsque des procédures relatives à une infraction sont terminées, y compris lorsque tous les appels judiciaires ont été épuisés. Étant donné que le CANAFE ne peut rendre publique certaines informations se rapportant à une SAP qu’une fois que toutes les procédures ont pris fin, ce qui peut dans de nombreux cas représenté une période considérable depuis l'infraction initiale, l'effet de dissuasion de nommer le contrevenant peut être grandement dilué ce qui crée potentiellement un incitatif à se livrer à un litige prolongé. Dans le cadre de l’exercice du pouvoir discrétionnaire de nommer publiquement une personne ou une entité, il convient de prendre en compte les critères ou les situations où il serait approprié de ne pas nommer le contrevenant, par exemple, lorsque cela pourrait nuire à la stabilité du système financier canadien.

Dans le cadre d’un processus d’appel de la SAP, une personne ou une entité peut demander à la Cour une ordonnance de confidentialité. Ces ordonnances peuvent varier, en allant de la protection de l’information déposée en cour jusqu’au maintien de la confidentialité de l’identité du contrevenant. Cela représente une différence importante avec les processus de litige habituels dans d’autres sphères de conformité fédérale où l’identité des personnes et des entités réglementées est rendue publique lorsque celles-ci contestent une pénalité qui leur a été imposée.

L’intention initiale de la politique de permettre des ordonnances de confidentialité en vertu de la LRPCFAT était de servir de précaution afin d’éviter la divulgation du renseignement financier et non de protéger une partie ou la totalité de l’information liée à une entité déclarante.

Pour déterminer le montant de la pénalité, le programme de SAP prend en compte les dommages causés par l’infraction, par exemple la mesure dans laquelle l’infraction nuit à la capacité du Canada à détecter et à prévenir le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et il prend également en considération les antécédents en matière de conformité de l’entité déclarante et la nature non punitive des SAP.

Dans de récentes décisions des tribunaux, les juges ont maintenu les infractions imposées par le CANAFE, mais ils ont estimé que la formule utilisée pour calculer la SAP était vague et manquait de transparence. L’inclusion d’une formule de calcul des SAP dans le Règlement accroîtrait la transparence et assurerait une meilleure clarté.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur la façon d'aborder les enjeux liés aux sanctions administratives pécuniaires.

Le présent chapitre porte sur des questions techniques qui amélioraient l’administration et le fonctionnement de la LRPCFAT et de son règlement, et qui clarifieraient les exigences qui aideraient les entités déclarantes à s’acquitter de leurs obligations.

L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) recueille les déclarations sur les mouvements transfrontaliers des devises et des instruments monétaires en vertu de la LRPCFAT. Actuellement, ces déclarations sont effectuées manuellement sur papier par les voyageurs et les entités les soumettent à l’ASFC. L’ASFC transcrit cette information dans une base de données électronique du CANAFE ou envoie par télécopie ou courrier la version papier des déclarations. Des copies de ces déclarations ne sont présentement ni conservées ni analysées par l’ASFC. Ce processus manuel est problématique étant donné que l’information recueillie peut être de piètre qualité (parfois l’information est illisible) ou incomplète.

Alors que le régime passe à un système de collecte d’information automatisée, il y a une opportunité de développer des moyens plus efficaces de collecter l’information de la part des voyageurs une fois que celle-ci a été vérifiée par les agents des services frontaliers. La collecte et la transmission électronique de déclarations accroîtraient l’exactitude de l’information, la vitesse à laquelle les déclarations sont soumises et la valeur du renseignement de cette information pour le CANAFE.

De plus, la conservation par l’ASFC de ces déclarations constituerait une nouvelle source d’information au moment de l’analyse et de la gestion du débit des personnes qui franchissent les frontières, permettrait à l’ASFC d’améliorer les indicateurs relatifs au recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et accroîtrait la sécurité frontalière. La non-conservation des déclarations des mouvements transfrontaliers des devises par l’ASFC a aussi été une lacune identifiée dans l’évaluation du Canada par le GAFI. Il sera important de prendre en compte les questions de mise en œuvre, telles que le coût, le temps et la quantité de ressources qui seraient attribuables à cette déclaration électronique.

La « règle de voyage », à l’article 9.5 de la LRPCFAT, énonce que chaque entité déclarante doit inclure à l’ETP le nom, l’adresse et le numéro de compte ou autres numéros de référence du client qui a fait la requête initiale d’ETP et que l’entité doit également prendre des mesures raisonnables afin de s’assurer que tout transfert qu’elle reçoit comprend cette information.

L’esprit de la politique pour cette exigence est de communiquer l’information du client d’origine avec le TEF, de sorte que les autorités compétentes et les institutions financières peuvent suivre l’argent et être conscientes des risques et des soupçons associés aux TEF. Contrairement à cette intention, le CANAFE a découvert que les intermédiaires financiers ne communiquent pas l’information du client d’origine, mais indique plutôt l’institution financière d’origine ou une autre institution financière dans le processus d’opération, en tant que client qui a demandé le TEF aux fins de la règle de voyage.

En vertu de l’article 9.6 de la LRPCFAT, les entités déclarantes sont tenues d’évaluer elles-mêmes les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes de leurs activités commerciales et de prendre des mesures particulières afin d’atténuer ce risque seulement si ce risque est considéré comme élevé. Il n’y a aucune obligation explicite d’atténuer des risques qui sont jugés moins élevés que le critère de référence « élevé », en fonction du niveau de risque en présence.

Les relations bancaires correspondantes sont établies entre les banques afin de faciliter les opérations entre les banques effectuées en leur nom, de permettre des opérations au nom de leurs clients et de rendre des services disponibles directement aux clients de d’autres banques. Le service bancaire correspondant représente une importante composante de la facilitation des flux financiers internationaux. Au moment de l’établissement de la relation, la LRPCFAT exige uniquement que les institutions financières évaluent la relation au départ.

Actuellement, cette exigence ne cadre pas avec les normes internationales, selon lesquelles les institutions financières devraient évaluer continuellement les relations et les institutions correspondantes et devraient identifier et prendre des mesures raisonnables pour vérifier l’identité des bénéficiaires effectifs lorsqu’ils entrent dans une relation commerciale avec une institution correspondante. L’évaluation fait en sorte que les institutions répondantes sont assujetties à la supervision nationale appropriée, qu’il n’y a aucun changement à la situation de l’institution financière (par exemple, des amendes ou des sanctions) et que le profil de risque de LRPC/FAT n’a pas changé. Tout changement ne requerrait pas de cessation de la relation, seulement un ajustement à l’approche fondée sur le risque utilisée.

Les entreprises et les secteurs qui sont assujettis à la LRPCFAT sont définis à l’article 5 de la Loi. Par la suite, ils sont appelés « personnes ou entités au sens de l’article 5 » ou « personne ou entité » tout au long de la Loi ou du Règlement. Dans certaines dispositions de la LRPCFAT, le langage peut être compliqué lorsqu’on utilise à plusieurs reprises l’expression « personne ou entité » parce que les dispositions utilisant ces termes peuvent faire référence tant aux entité déclarantes qu’aux clients de ces entités déclarantes. La définition du terme « entité déclarante » permettrait une clarification de la LRPCFAT et accroîtrait sa lisibilité.

Dans le règlement de la LRPCFAT figurent plusieurs annexes qui exposent précisément l’information que les entités déclarantes sont tenues de déclarer. Cette information est souvent répétée à travers les différentes annexes, car l’information requise est la même.

Il peut être exigeant en temps de garder à jour ces annexes et astreignant pour les entités déclarantes de créer de nouveaux formulaires et processus pour se conformer aux divers annexes. La rationalisation des annexes et la création d’une annexe de déclarations uniforme peuvent être utiles pour réduire le fardeau réglementaire et la duplication inutile.

En vertu de la LRPCFAT, il existe un processus de rechange, appelé le registre de rechange des opérations importantes en espèces, permettant aux entités déclarantes de ne pas envoyer des déclarations relatives aux opérations importantes en espèces dans certains cas, par exemple, lorsqu’un client est une société exerçant des activités commerciales dans des secteurs donnés (par exemple, les entreprises de détail, les sociétés de transport, etc.). Cette mesure visait à faciliter le fardeau de la déclaration imposé aux entités déclarantes plus petites.

Toutefois, il est compris que la majorité des entités déclarantes n’ont jamais vraiment tiré parti du registre de rechange des opérations importantes en espèces et continuent d’envoyer des déclarations au CANAFE pour toutes les opérations, même si celles-ci étaient admissibles à un registre de rechange. L’abrogation de cette exception rationaliserait le processus de déclaration d’opérations importantes en espèces pour les entités déclarantes et fournirait de l’information sur le renseignement financier pour que le CANAFE l’analyse.

Le Ministère cherche à obtenir des points de vue sur ces enjeux liés aux définitions et dispositions administratives.

LRPC/FAT – Lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes

LCSA – Loi canadienne sur les sociétés par actions

ASFC – Agence des services frontaliers du Canada

SCRS – Service canadien du renseignement de sécurité

ARC – Agence du revenu du Canada.

EPNFD – Entreprises et professions non financières désignées

GAFI – Groupe d’action financière

CANAFE – Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada

AMC – Affaires mondiales Canada

DOI – Dirigeant d’une organisation internationale ;

ESM – Entreprise de services monétaires

BISF – Bureau du surintendant des institutions financières

LRPCFAT – Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes

PPV – Personne politiquement vulnérable

SPPC – Service des poursuites pénales du Canada

SPC – Sécurité publique Canada.

SPAC – Services publics et Approvisionnement Canada

GRC – Gendarmerie royale du Canada

The Financial Action Task Force - International Standards on Combatting Money Laundering and the Financing of Terrorism and Proliferation (Groupe d’action financière – Normes internationales sur la lutte du recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes et de sa prolifération) (en anglais seulement)

Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes

Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada – Rapport annuel de 2016

Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada

Suivre l’argent à la trace : Le Canada progresse-t-il dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes? Pas vraiment?


1 Ministère des Finances Canada, Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, Gendarmerie royale du Canada, Agence des services frontaliers du Canada, Service canadien du renseignement de sécurité, Agence du revenu du Canada, Ministère de Justice Canada, Service des poursuites pénales du Canada, Sécurité publique Canada, Bureau du surintendant des institutions financières, Affaires mondiales Canada, Services publics et approvisionnement Canada et Innovation, sciences et développement économique Canada.

2 Le Comité consultatif sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes est un comité des secteurs public et privé composé de représentants des ministères et organismes chargés du régime ainsi que de chaque secteur d’entités déclarantes. Il est coprésidé par des représentants du ministère des Finances Canada et du secteur privé.

3 Le recyclage des produits de la criminalité est composé de trois stades distincts : le placement, la dispersion et l’intégration. Le stade du placement est celui au cours duquel les fonds provenant d’une activité illégale ou les fonds visant à soutenir une activité illégale sont introduits pour la première fois dans le système financier. Le stade de la dispersion comporte la dissimulation et la distanciation de fonds illicites de leur source illégale par l’utilisation d’une série de transactions et/ou de parties qui est conçue pour dissimuler la source des fonds illicites. Le stade de l’intégration du recyclage des produits de la criminalité engendre des fonds illicites considérés comme « blanchis » et plus entièrement intégrés dans le système financier, de sorte que le criminel peut utiliser des fonds « propres ».

4 Le site du FMI.

5 Les huit partenaires financés sont l’Agence des services frontaliers du Canada, l’Agence du revenu du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité, le ministère des Finances du Canada, le ministère de la Justice du Canada, le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le Service des poursuites pénales du Canada et la Gendarmerie royale du Canada.

6 Les entreprises et professions non financières désignées (EPNFD) comprennent les suivants : les comptables et les cabinets d’expertise comptable; les courtiers immobiliers, les agents immobiliers; les promoteurs immobiliers; les casinos; les avocats et les cabinets d’avocats; les courtiers en pierres et en métaux précieux; les notaires de la Colombie-Britannique.

7 La propriété effective renvoie à l'identité des personnes naturelles qui contrôlent ultimement la personne morale ou l'entité. Il ne peut donc pas s'agir d'une autre personne morale ou entité.

8 Canada (Procureur général) c. Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, 2015 CSC 7, [2015] 1 R.C.S. 401.

9 Les dispositions se rapportant à la profession juridique ne sont pas exécutoires, car la Cour suprême du Canada a statué qu’elles étaient inconstitutionnelles en 2015.

10 Une action au porteur est un titre de capitaux propres détenu entièrement par la personne qui détient le certificat d’actions physique. La société par actions émettrice n’enregistre pas le détenteur de l’action ou tout transfert de propriété. La société disperse les dividendes aux actions au porteur lorsqu’un coupon physique est présenté à la société, et parce que l’action n’est pas enregistrée, le transfert de la propriété des actions comporte la livraison du document physique.

11 Pour obtenir une copie du rapport (en anglais seulement), accédez au site du Groupe d'action financière.

12 Un membre de famille visé par règlement comprend les personnes suivantes : l’époux ou le conjoint de fait de la personne; ses enfants; sa mère ou son père; la mère ou le père de son conjoint; un enfant de sa mère et de son père.

13 Les entreprises qui offrent des polices d’assurance qui protège les propriétaires résidentiels et commerciaux et/ou leurs prêteurs contre les pertes liées au titre ou à la propriété du bien.

14 Site du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.

15 Site du Groupe d'action financière (en anglais seulement).

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