Déclaration
CEFCOM S-07.001 - le 7 août 2007
OTTAWA – Le Lieutenant-général Michel Gauthier, commandant
du COMFEC, a émis la déclaration suivante lors de la publication
des conclusions de la commission d’enquête sur la BOA Robinson :
« J’ai révisé attentivement l’enquête
de la Commission qui a examiné les circonstances ayant conduit au décès
du Soldat Robert Costall à la Base d’opérations avancée
Robinson, en Afghanistan. Je l’ai trouvée complète
et bien préparée. Le chef d’état-major de
la Défense (CÉMD) et moi-même sommes complètement
d’accord avec les recommandations de la Commission. » Le processus
de révision a pris beaucoup de temps pour permettre de rencontrer les
exigences juridiques et autres et pour coordonner avec les forces alliées
impliquées dans l’incident tout en maintenant l’intensité des
opérations en cours en Afghanistan. Le rapport documente clairement
la séquence des événements et le contexte de la situation
au cours de laquelle ce malheureux incident s’est produit. Le Soldat
Costall a été tué suite à une attaque d’une
intensité sans précédent des forces des talibans provenant
de multiples directions. Dans l’intensité de cette bataille, nos
soldats ont été engagés par d’autres forces amies
défendant la BOA Robinson, ce qui a conduit au décès du
Soldat Costall et à un certain nombre de blessés.
Les circonstances auxquelles ont fait face les forces de la Coalition à la
BOA Robinson le 28 mars 2006 étaient aussi fluides qu’elles étaient
complexes. Au cours des 42 jours précédents, la force relativement
faible en nombre défendant la BOA a été attaquée à 21
reprises. De plus, un important convoi de ravitaillement, escorté à la
fois par les forces de l’Armée nationale afghane (ANA) et de la
Coalition provenant d’un autre commandement a été soumis à une
attaque importante et coordonnée et par la suite à une attaque à l’engin
explosif improvisé (EEI) causant des pertes alors qu’il faisait
route vers la BOA Robinson. En réponse à l’attaque contre
le convoi et à la situation à la BOA Robinson, une force d’intervention
rapide (FIR) canadienne a été déployée à court
préavis par le quartier général de la Brigade multinationale
(Sud) de la Coalition pour renforcer la BOA. La FIR, composée d’un
petit poste de commandement, d’un peloton d’infanterie du 1er Bataillon
du Princess Patricia's Canadian Light Infantry (1 PPCLI) et de détachements
de mortiers et médical, est arrivée à la BOA par hélicoptère
après la tombée de la nuit.
En arrivant, la FIR a fait liaison avec les forces sur place et s’est
vue assignée des positions pour soutenir la défense de la BOA.
Peu après, le convoi de ravitaillement est arrivé, augmentant
rapidement la population de la BOA de 200 à 400 personnes provenant
de plusieurs chaînes de commandement différentes. Quelques heures
plus tard, alors que les forces de la Coalition organisaient leur défense,
la BOA a été attaquée en force. Réagissant au tir
soutenu ennemi provenant du nord-est et du nord-ouest, la section 2 de la FIR
s’est déplacée en avant pour renforcer les défenses
nord de la BOA. Ceci l’a placée sur une butte entre le point d’origine
des traçantes de l’ennemi et une position défensive amie
de mitrailleuse. L’équipe de l’arme occupant cette position,
ignorant la présence des éléments de la FIR devant elle
et recevant des tirs de cette direction générale, a ouvert le
feu sur la butte, engageant accidentellement la section 2 et tuant le Soldat
Robert Costall et blessant d’autres soldats canadiens. À titre
de mesure de l’intensité et de la confusion de la situation, un
soldat américain a aussi été tué (Master Sergeant
John Stone de la Garde nationale du Vermont) et d’autres soldats de la
Coalition blessés par des tirs amis peu après cet incident.
Le combat est souvent accompagné de niveaux élevés de
confusion et de friction créé par divers facteurs. Ce phénomène,
communément désigné comme le « bouleversement
provoqué par la guerre », était clairement évident
dans cet incident où des forces insurgées déterminées
ont lancé une attaque depuis au moins deux directions différentes
au milieu d’une nuit très sombre, avec peu ou pas d’illumination
ambiante, contre une équipe défensive de la Coalition épuisée
et assiégée. De plus, le leadership dans la BOA a eu peu de temps
pour intégrer la FIR et les autres forces entrantes en une force cohésive
avant que l’attaque ne survienne, exacerbant les circonstances et le
contexte d’incertitude au cours duquel ce terrible incident s’est
produit.
La Commission a déterminé que le Soldat Costall avait été tué et
les autres Canadiens blessés par un tir ami provenant d’une position
défensive de mitrailleuse américaine à l’intérieur
du complexe défensif de la BOA Robinson. Outre la confusion et la friction
inhérente associée au moment où l’attaque a eu lieu
et aux autres circonstances de l’attaque, la commission a identifié trois
causes qui ont contribué à l’incident de tir ami comme étant
une coordination et un contrôle incomplets, une faible connaissance de
la situation et une erreur d’identification au combat sur le champ de
bataille. Ces erreurs et omissions ont affaibli la connaissance de la situation
parmi les différents éléments de la BOA, avec les conséquences
inévitables et désastreuses que nous connaissons.
Ce tragique incident a été le résultat d’un alignement
malheureux d’un certain nombre d’actions et d’omissions au
milieu de l’intensité du combat. En révisant les actions
des individus et les causes de l’incident, j’ai soigneusement considéré les
circonstances atténuantes identifiées par la commission dans
son rapport :
La force sur place avait connu une période prolongée d’attaques
intenses qui, combinées au travail épuisant d’établir
et de construire la BOA, a conduit à un état de fatigue mentale
et physique de la part des soldats et des leaders sur place.
Toute la série d’événements, incluant l’arrivée
de la FIR, l’arrivée du convoi et l’attaque qui a suivi
s’est produite lors d’une des nuits les plus sombres de l’année.
La visibilité était encore plus limitée par le sol poudreux
qui demeurait en suspension dans l’air longtemps après avoir été soulevé.
Les
forces défensives, en moins d’une heure, ont reçu
la FIR avec peu de préavis et le convoi qui avait de nombreux morts
et blessés dont on devait s’occuper.
La défense de la BOA exigeait l’intégration d’une
grande variété de forces provenant d’un large assortiment
d’unités et de nations, avec la menace reconnue d’une
attaque imminente.
Il s’agissait du premier engagement de combat majeur
pour les membres de la FIR.
Cette attaque, lancée depuis deux points, était la plus complexe
et la plus intense contre la BOA que les défenseurs avaient connu
jusqu’à ce jour.
En considérant tous les facteurs prévalant à ce moment
et les actions de tous les individus, je soutiens pleinement les conclusions
de la Commission à l’effet qu’aucun blâme ne peut
ou ne devrait être assigné à un individu. Selon nous, il
n’y a rien dans le rapport de la Commission suggérant qu’un
individu ait agi sciemment de façon incorrecte. Basé sur les
preuves, le leadership à tous les niveaux a fait de son mieux dans des
circonstances extrêmement difficiles.
La commission a aussi présenté plusieurs recommandations pour
améliorer l’équipement, l’instruction et les tactiques
pour réduire la probabilité d’une répétition
d’un tel incident dans l’avenir. Ces recommandations ont toutes été endossées à mon
niveau et à celui du CÉMD. Les détails concernant les
solutions et leur mise en œuvre ne peuvent être fournis pour des
raisons de sécurité opérationnelle mais on peut dire
que la plupart ont été résolues et que les solutions envisagées
pour le reste sont en cours. Même avec ces améliorations cependant,
la complexité et les exigences du combat sont telles que le risque de
répéter de tels incidents ne peut tout simplement pas être
réduit à zéro.
Pendant tout ce processus, nous avons travaillé en coopération
avec les autorités américaines pour enquêter sur toutes
les circonstances entourant ce qui s’est produit cette nuit-là.
La coopération que nous avons reçue de l’Armée américaine
a été exemplaire. Le président de la Commission a tenu
la famille Costall informée de notre approche et de tous les aspects
du processus de la Commission d’enquête au fur et à mesure
de leurs progrès.
Tous les soldats qui ont combattu les talibans cette nuit-là l’ont
fait avec courage et honneur, en particulier le Soldat Costall et le Master
Sergeant Stone, qui ont chacun fait l’ultime sacrifice au service de
leurs nations et du gouvernement afghan. Finalement, leur mort a été causée
par une attaque déterminée par des forces opposées au
gouvernement démocratiquement élu de l’Afghanistan. Ils
sont morts en défendant leurs collègues soldats, dans la noble
poursuite de donner une vie meilleure et plus paisible au peuple afghan. Nous
ne les oublierons pas. »
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