Conformément à l’engagement pris dans la lettre de mandat du ministre du Patrimoine canadien, le gouvernement est en train d’élaborer un cadre législatif et réglementaire destiné à lutter contre les méfaits en ligne. L’objectif est de promouvoir un environnement en ligne sécuritaire et inclusif afin que tous les Canadiens puissent s’exprimer sans être la cible d’attaques haineuses ou menaçantes.
B. Contexte et situation actuelle
Le Ministère a adopté une approche coordonnée pour contrer le contenu nuisible en ligne en collaboration avec d’autres ministères. Le leadership assumé par le Ministère dans ce dossier est conforme aux principaux programmes et aux affectations de ressources dans le cadre de l’Initiative de citoyenneté numérique (ICN), à la lettre de mandat du ministre du Patrimoine canadien et aux engagements pris dans le discours du Trône de 2020.
En janvier 2019, la ministre des Institutions démocratiques a annoncé une série de mesures visant à protéger les élections fédérales de 2019 et la démocratie canadienne. L’ICN a été créée dans le contexte du pilier « Améliorer la préparation des citoyens » de cette initiative, qui comprenait un investissement de 7 millions de dollars dans les activités axées sur les citoyens devant être entreprises par Patrimoine canadien dans le but de renforcer chez les citoyens la réflexion critique des citoyens par rapport à la désinformation en ligne, la résilience par rapport aux méfaits en ligne et la capacité de participation aux processus démocratiques.
Dans la lettre de mandat de 2019 du ministre du Patrimoine canadien, le gouvernement s’était engagé à adopter de nouveaux règlements visant les plateformes de médias sociaux, à commencer par l’obligation pour les exploitants de plateformes de retirer dans les 24 heures tout contenu illégal, y compris les discours haineux, le contenu incitant à la violence, toute exploitation sexuelle des enfants et toute propagande terroriste.
La lettre de mandat du ministre fait également état d’initiatives horizontales liées à la gouvernance des plateformes en ligne, comme le soutien au ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie pour créer de nouveaux règlements visant à mieux protéger les données personnelles, ainsi que la création d’un poste de commissaire aux données.
Enfin, dans le discours du Trône du 23 septembre 2020, le gouvernement s’est engagé à s’attaquer au racisme systémique et à le faire en tenant compte des expériences vécues par les communautés racialisées et les peuples autochtones. L’une des façons mentionnées consiste à prendre des mesures contre la haine en ligne.
Les plateformes de médias sociaux comme Facebook ou Twitter sont de plus en plus essentielles à la participation à la vie démocratique, culturelle et publique. Une majorité écrasante d’adultes au Canada (94 %) ont un compte sur au moins une plateforme de médias sociaux, ce qui fait du Canada l’un des pays les plus branchés au monde;
Toutefois, les plateformes de médias sociaux peuvent aussi être utilisées pour menacer, intimider et harceler les gens, ou pour promouvoir des points de vue racistes, antisémites, islamophobes, misogynes et homophobes qui ciblent certaines communautés, mettent en danger la sécurité des gens et minent la cohésion sociale ou la démocratie au Canada;
La pandémie de COVID-19 a exacerbé le problème. L’augmentation des méfaits en ligne liés à la COVID-19 a été documentée, notamment le racisme, les crimes haineux et le harcèlement verbal ou physique. Cette situation porte à croire qu’il faudrait accélérer la prise de mesures plutôt que de la retarder;
Enfin, plusieurs articles de presse ont récemment dénoncé le fléau de l’exploitation sexuelle des enfants et demandé au gouvernement d’intervenir à cet égard. Cette situation a amené Pornhub, qui est le site pornographique le plus populaire au monde et qui a des bureaux à Montréal, à s’engager à adopter des pratiques plus sévères pour protéger sa plateforme contre le contenu illégal.
La motion suivante a également été présentée lors de la dernière session au Comité permanent du Patrimoine canadien : « entreprendre une étude sur la création et la mise en œuvre de nouvelles mesures visant les fournisseurs de services Internet des plateformes de médias en ligne, exigeant d’eux qu’ils surveillent, traitent et suppriment les contenus qui constituent des discours haineux et qu’ils suppriment tout autre contenu illégal au Canada ou interdit par le Code criminel. »
C. Considérations d’ordre stratégique
L’attention du public à l’égard des méfaits en ligne s’est accrue en réponse à des événements survenus dans le monde entier qui minent la sécurité publique des communautés marginalisées tout en menaçant la sécurité nationale. Des événements comme ceux qui ont eu lieu au Capitole en janvier 2021, aux États-Unis, ainsi que les attaques terroristes contre le Centre culturel islamique de Québec, les actes de vandalisme récents sur les lieux de culte musulmans, juifs et sikhs, et la coordination élargie des activités des suprémacistes blancs à l’échelle mondiale sont à l’origine d’appels à l’action pour remédier aux graves conséquences des méfaits en ligne.
Les sondages ont montré que les Canadiens appuient l’intervention du gouvernement dans ce domaine. Un récent sondage commandé pour la Fondation canadienne des relations raciales a révélé qu’une majorité de Canadiens appuient l’adoption de mesures gouvernementales pour lutter contre la haine et le racisme en ligne. Le sondage a également révélé que 80 % des Canadiens sont d’accord avec l’idée d’obliger les entreprises de médias sociaux à supprimer tout contenu haineux dans les 24 heures.
Patrimoine canadien est en train d’élaborer une approche stratégique pour respecter l’engagement énoncé dans la lettre de mandat du ministre en s’appuyant sur l’évolution de politiques semblables d’autres États. Un certain nombre de gouvernements d’autres pays, comme l’Allemagne, l’Australie, la France, l’Union européenne, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande, ont proposé ou adopté des lois qui obligent les exploitants de plateformes en ligne à restreindre certaines formes de contenu et d’activités. Le ministre du Patrimoine canadien, de concert avec les fonctionnaires du Ministère à tous les niveaux, a collaboré avec des pays aux vues similaires afin de dégager des pratiques exemplaires tout en élaborant une approche canadienne.
La vitesse, l’échelle et la portée des discours nuisibles sur les plateformes de médias sociaux dans le monde sont importants. Aujourd’hui, il existe un déséquilibre entre la surveillance limitée des plateformes en ligne et la menace importante que représentent pour la société les discours nuisibles. L’absence d’exigences réglementaires générales au Canada visant à obliger les exploitants de médias sociaux à repérer, à gérer et à réduire le contenu nuisible sur leurs plateformes. La seule exception est celle des retraits ordonnés par les tribunaux en vertu des dispositions judicieusement restreintes du Code criminel, ce qui a pour effet de ne pas vraiment inciter les exploitants de plateformes de médias sociaux à être proactifs.
La réalité, c’est que le statu quo ne suffit pas pour contrer le contenu nuisible sur les plateformes de médias sociaux. Laisser la modération du contenu ou l’autoréglementation à la seule discrétion des exploitants de plateformes n’est pas une solution pour endiguer la propagation de ces méfaits. De plus, les organismes d’application de la loi et de sécurité font face à un certain nombre de défis pour s’attaquer aux méfaits en ligne, compte tenu des limites des ressources et de la capacité de faire face à l’ampleur et au rythme des préjudices en ligne.