Expérience d’alphabétisation en droit d’auteur
« Mon comportement contribue à la situation à laquelle je réagis » – Mary Parker Follett
Rapport préparé par Mary Parker Follett
Sur cette page
- Introduction
- Cadre conceptuel
- L’expérience
- Pédagogie actuelle
- Éléments de l’expérience
- Cheminement du créateur (23 janvier 2018)
- Atelier Confinement (25 janvier 2018)
- Conception expérimentale (1er – 16 février 2018)
- Entrevues préalables à l’atelier (19 – 28 février 2018)
- Atelier de référence A (26 février – 1er mars 2018)
- Atelier de référence B (5 – 8 mars 2018)
- Entrevues postérieures au programme (12 – 18 mars 2018)
- Examen des données (19 – 30 mars 2018)
- Résultats
- Recommandations
- Annexe A : Compréhension du droit d’auteur
- Annexe B : Questions et réponses des répondants
Tableau des abréviations ou acronymes
- PEC
- Programme d’entrepreneuriat créatif
- MCI
- Direction générale de marché créatif et innovation
- PDA
- Direction générale de la politique du droit d’auteur
- PI
- Propriété intellectuelle
- MDA
- Mécanique ‒ dynamique – esthétique (de l’anglais)
- Université de l’ÉADO
- Université de l’École d’art et de design de l’Ontario
- PCH
- Patrimoine canadien
- PCR
- Programme des cohortes de référence
- STEEEPPV
- Social, Technique, Économique, Environnemental, Émotionnel, Physique, Politique, Valeurs
- TC
- Sigle anonyme pour représenter l’identité de l’avocate
Introduction
Ce qui suit est le résultat d’une expérience visant à évaluer les avantages relatifs des différents modes de prestation de la formation en entrepreneuriat aux artistes et aux designers. L’intention était d’améliorer la compréhension et l’aisance des créateurs individuels à naviguer dans le régime de la propriété intellectuelle (PI) au Canada. Les recherches menées par l’équipe de Creative Marketplace en 2017 — en particulier « Rémunération des créateurs, stratégies de subsistance et utilisation du droit d’auteur » — suggèrent que les créateurs ne sont généralement pas bien préparés pour comprendre leurs droits de propriété intellectuelle ou pour les protéger ou les monétiser. Ce travail répond à ces constatations.
L’expérience a été créée conformément au programme d’expérimentation et aux approches novatrices du gouvernement du Canada pour appuyer la prise de décisions fondées sur des données probantes. Artscape Launchpad, une division de Toronto Artscape Incorporated, a collaboré avec le ministère du Patrimoine canadien (PCH) pendant plusieurs mois dans le but d’évaluer comment la littératie en droit d’auteur peut aider les créateurs à protéger et commercialiser leurs œuvres dans le contexte des programmes existants offerts par Artscape Launchpad.
Bien que la portée ait d’abord été limitée à 18 entrepreneurs créatifs, les participants des cohortes de référence A et B (9 personnes chacune) ont exprimé une meilleure compréhension des mécanismes de la propriété intellectuelle et une confiance accrue dans la recherche de ressources et de soutien sur ces questions. La cohorte A était plus susceptible d’exprimer des impressions négatives quant au système juridique (et de l’experte juridique présente lors de la prestation) et une confiance réduite pour démontrer des réponses adaptatives aux questions de PI ou pour préconiser des changements particuliers dans la façon dont le régime de PI fonctionne. Et ce, malgré le fait que l’experte juridique intégrée aux deux cohortes ait été la même personne.
Le résumé des recommandations qui suit peut être formulé en fonction des résultats de l’expérience :
- L’établissement d’une étroite relation avec le prestataire d’expertise augmente la capacité des créateurs à contextualiser les questions de PI dans diverses situations (connues et inconnues).
- Le fait de mettre intentionnellement en évidence des dissonances entre des systèmes interconnectés dont les valeurs semblent incompatibles (modèles de cocréation juridique ou autochtone dans le cas présent) offre aux apprenants une appréciation plus favorable des deux systèmes et suggère une capacité accrue à trouver des réponses adaptées aux problèmes de PI.
L’application des connaissances juridiques dans de nouveaux contextes semble être améliorée à la fois par des liens affectifs avec le régime de propriété intellectuelle et par une pratique réflexive de synthèse des différentes approches de la connaissance et de la création de sens. Dans cette expérience, on a tissé une étroite relation en intégrant les connaissances d’experts aux activités de développement communautaire avant la diffusion du contenu. La compréhension systémique et les attitudes systémiques ont été soutenues chez la cohorte B par l’introduction d’un contenu sur la propriété intellectuelle dans le cadre d’un cheminement d’apprentissage lors d’un grand festival des médias autochtones où les questions de droit d’auteur sont chroniques et semblent souvent en conflit avec les valeurs organisationnelles.
L’expérience a été lancée par la Direction générale du marché créatif et de l’innovation du ministère du Patrimoine canadien (PCH). La Direction générale est, entre autres, « responsable, dans le cadre de ses activités d’élaboration des politiques, de veiller à ce que le cadre stratégique du droit d’auteur du Canada, pierre angulaire de la politique culturelle, favorise la créativité, l’innovation et l’accès aux œuvres culturelles ».
La politique sur le droit d’auteur réglemente les activités des créateurs directement par législation et indirectement par des mesures incitatives qui les encouragent ou les découragent à se joindre au régime général de propriété intellectuelle. L’amélioration de la sensibilisation des créateurs au droit d’auteur contribue à accroître la créativité, l’innovation et l’accès de tous les Canadiens à des œuvres culturelles adéquatement rémunérées et protégées.
La compréhension et l’application efficaces des lois, règlements, processus et normes de l’industrie constituent un défi permanent pour les créateurs et les détenteurs de droits de propriété intellectuelle. La capacité des créateurs à naviguer dans le régime de propriété intellectuelle est influencée par un éventail de facteurs qui vont au-delà de la connaissance des aspects techniques de la législation et des politiques, et le succès permet aux créateurs de protéger et de commercialiser leurs œuvres de manière à les encourager, à générer des rendements économiques et à réduire l’incertitude quant aux utilisations qu’on fait de leur création.
Le ministère du Patrimoine canadien a cherché l’occasion de démontrer l’efficacité relative de différentes approches en vue de sensibiliser les entrepreneurs créatifs aux questions clés, souvent techniques, qui influencent leur succès sur les marchés nationaux et internationaux. Ce document présente les résultats de ce processus d’expérimentation.
Grâce à ses programmes, Artscape Launchpad fournit aux créateurs les outils, la formation, les ressources, le mentorat et les liens nécessaires pour bâtir des entreprises durables, y compris l’aide pour se brancher sur le marché. Les programmes construits par Artscape Launchpad reposent sur le concept selon lequel le succès dans l’économie créative dépend des autres. Les programmes aident les créateurs à développer l’aspect commercial de leur pratique tout en développant les relations dont ils ont besoin pour réussir.
La pédagogie d’Artscape Launchpad est centrée sur la façon dont les entrepreneurs peuvent être préparés à travailler au-delà des frontières afin de découvrir les possibilités d’impacts culturel, communautaire et commercial et recherche continuellement des occasions d’examiner de façon critique les approches de formation des créateurs.
Cadre conceptuel
L’expérience était motivée par le désir de mieux comprendre les approches pédagogiques disponibles pour aider les créateurs à comprendre le régime de propriété intellectuelle du Canada et à y naviguer. Un cadre expérimental a été choisi afin de contribuer à l’ensemble des recherches existantes menées par des sources gouvernementales et non gouvernementales. Le résultat idéal est un processus continu d’apprentissage et de renouvellement à long terme et durable qui appuie la santé des créateurs et le système de propriété intellectuelle du Canada. L’expérience devrait soutenir l’apprentissage qui peut ensuite être appliqué à l’amélioration du système à l’étude.
Les expériences qui incluent les êtres humains et leurs relations doivent tirer leur source d’une dimension prodiguant une attention et une compassion profondes. De plus, l’expérimentation dans les systèmes humains repose sur une « attitude systémique » et une « vision systémique » de la situation et permet ainsi une « compréhension systémique » des personnes, groupes, organisations et processus.
Attitude systémique : Une attitude qui permet de multiples points de vue sur une question et qui peut accepter la contradiction et la complexité.
Vision systémique : Une vision consciente des adaptations apportées par les systèmes pour réduire la complexité, et la complexité réelle et la dynamique qui peuvent créer une incongruité entre le système et son environnement. Les systèmes existent dans le rapport de tension entre la durabilité et l’éphémère.
Compréhension systémique : Un cadre qui reconnaît que les systèmes sont multidimensionnels et possèdent leur propre vie intérieure, mais qui ne peut exister qu’en étant un sous-système de systèmes plus vastes ou en communiquant avec d’autres systèmes et en établissant des relations.
Il est commode de considérer les systèmes comme des formes orientées vers un but, délibérément et rationnellement conçues, à l’intérieur desquelles les gens agissent d’une manière essentiellement rationnelle. La théorie systémique de l’organisation renverse ces hypothèses en mettant l’accent sur les qualités processuelles, la tendance aux conflits, ainsi que sur la dynamique de la complexité, l’ambivalence et l’incohérence comme caractéristiques essentielles. Le régime de PI au Canada a été conçu avec une intention bien précise. Cependant, la complexité découlant de son application crée des comportements et des résultats inattendus qui doivent être pris en compte et abordés.
De plus, la théorie des systèmes est une vision du monde et une tentative d’explication. Cependant, elle incarne la réflexivité, car le processus d’explication fait référence à l’entité examinée et la perturbe. Le système est modifié par le processus d’expérimentation. Le processus d’intervention génère des résultats tout comme le contenu de l’intervention. Il est difficile et, en fin de compte, inutile de démêler tout cela.
Dans un système complexe comme celui des industries créatives ou du régime de propriété intellectuelle, il n’y a pas de causalité linéaire entre un intrant et un extrant. Le système change plutôt son état interne en raison de l’un de ses intrants ou extrants. De plus, un même intrant peut donner lieu à des extrants différents à des moments différents et des intrants différents peuvent donner le même extrant à des moments différents. Strictement parlant, on ne peut plus faire la distinction entre intrant et extrant.
Les systèmes complexes ne sont pas définis par leurs nombreux composants et les logiques de fonctionnement complexes de leurs relations. Ils sont bien plus que leur dynamique ou la séquence interactive des schémas. La caractéristique fondamentale des systèmes complexes est qu’elle modifie leur état interne. Par des opérations récursives du système, c’est-à-dire en exécutant de façon répétée les mêmes schémas, qui sont basés sur les résultats des opérations en cours, les petits écarts s’accumulent rapidement – le système devient turbulent et bascule dans un nouveau mode de fonctionnement.
Les créateurs et leurs entreprises créatives peuvent être considérés comme des systèmes dynamiques qui interagissent avec des systèmes plus vastes et intègrent les systèmes vivants de leurs membres. La complexité et la dynamique sont des caractéristiques fondamentales de ces systèmes et doivent être représentées dans la conception et la réalisation des expériences. La conception pédagogique de la cohorte B répond à ce besoin en humanisant l’expertise juridique introduite dans le programme (intégration du système humain) et en compliquant les connaissances juridiques partagées en les introduisant dans le contexte d’un festival des arts médiatiques autochtones (interaction entre les systèmes).
Le régime de propriété intellectuelle au Canada est complexe tant du point de vue des mécanismes qui définissent son activité que du point de vue de la dynamique qui se dégage des mécanismes opérationnels. Pour faire face à cette complexité, les créateurs et les autres parties prenantes du système de propriété intellectuelle ont mis au point des modèles d’action, de comportement et de pensée qui peuvent être répétés. Ils réduisent la complexité des incidents à un niveau tolérable et gérable. Ces schémas prennent la forme d’habitudes, de rituels, de comportements modélisés, d’attentes, de préjugés, de constructions de sens et de visions du monde. Le processus de réduction rend les événements prévisibles et adapte le système du créateur aux besoins perçus de la situation à ce moment-là.
Les nouvelles connaissances qui ne parviennent pas à modifier ces schémas d’action, de comportement et de pensée reproductibles n’augmenteront pas la capacité des créateurs à naviguer dans le régime de la PI.
Les constats de l’atelier Cheminement du créateur et de l’atelier Confinement ont montré que la vie intérieure des entreprises créatives est maintenue par la réduction continue de la complexité. Le contrôle est maintenu par des symboles communs, des hiérarchies de valeurs et d’intentions, des coutumes, des rituels, des attributions de rôles, des hiérarchies structurelles, et surtout par l’objectivation des accords (contrats).
L’objectivation du consensus et de la différence passe à la fois par la construction de structures artificielles (collectifs, barrières transactionnelles, contrats, etc.) et par l’intériorisation (habitudes, modèles de perception et d’attente, comportements, préjugés, etc.). Les objectifications permettent d’établir des distinctions permanentes : ce qui est important ou insignifiant, utile ou inutile, permis ou interdit, souhaitable ou indésirable, vrai ou faux, etc. Faire de telles distinctions signifie faire des sélections et, d’un point de vue théorique du système, peut alors être compris comme de l’information. En d’autres termes, lorsqu’un créateur ou un système de créateurs sélectionne un élément parmi tous les signaux générés par le régime de propriété intellectuelle et lui attribue une signification particulière, l’élément particulier devient défini et formé – il revêt une importance pour ce créateur et devient ainsi une information pour ses opérations autoréférentielles permanentes.
La vision systémique attire l’attention sur la tension entre le développement continu d’une organisation et son désir de renforcer les structures organisationnelles internes. Les créateurs adaptent leurs schémas pour tenir compte de leur compréhension des systèmes dans lesquels ils doivent naviguer. La réduction de la complexité permet au créateur d’agir, mais peut nuire à sa survie, à sa capacité d’adaptation et à son apprentissage dans ses interactions avec le système de propriété intellectuelle. Les objectifications limitent non seulement les comportements qu’une organisation peut déployer pour s’adapter à son environnement, mais aussi l’information qu’elle peut utiliser dans la prise de décision et autres activités organisationnelles.
Le cadre appliqué à cette expérience veut que les créateurs et la manière dont ils s’organisent définissent un système social multidimensionnel qui a sa propre vie intérieure, mais qui ne peut exister qu’en étant un sous-système de systèmes plus vastes et en communiquant avec d’autres systèmes en nouant des relations.
La cohorte A de notre expérience a permis aux créateurs d’accéder à l’« information » que le système de propriété intellectuelle jugeait pertinente. Les créateurs étaient libres de demander l’avis d’une représentante du système juridique en fonction de leurs difficultés du moment. L’hypothèse était que cet arrangement améliorerait la compétence technique pour répondre aux besoins actuels, mais qu’il contribuerait peu à soutenir la compétence adaptative en vue de traiter des questions de propriété intellectuelle nouvelles ou inconnues.
La cohorte B demandait aux créateurs de développer de l’empathie et une étroite relation avec une représentante du système de propriété intellectuelle en mettant moins l’accent sur les informations échangées. Les créateurs ont ensuite été stimulés vers d’autres perspectives, modes de pensée et interactions en présentant simultanément des systèmes pleinement réalisés qui semblaient avoir des valeurs et des objectifs contradictoires ou incompatibles. Plus précisément, le système de propriété intellectuelle a été introduit dans le contexte d’un grand festival d’arts médiatiques autochtones qui traite indirectement et directement de la propriété intellectuelle puisqu’il maintient un engagement envers l’expression des valeurs et des modes de connaissance autochtones. L’objectif de la cohorte B était de dissoudre les boucles rigides et étouffantes chez les créateurs causées par la rigidification des structures en encourageant la visualisation des contradictions et en offrant du temps et de l’espace à la réflexion individuelle et collective. La cohorte B a également encouragé la réflexion, le raisonnement et la perception continus à l’aide de catégories systémiques.
Alors que la cohorte de référence A offrait de nombreuses heuristiques dérivées d’une seule perspective (celle d’une représentante du système juridique), la cohorte de référence B offrait moins d’heuristiques, mais de multiples perspectives liées à l’ensemble des interactions entre les aspects individuels, sociaux, structurels, matériels, symboliques et culturels de l’activité du système.
L’expérience
La Direction de la politique du droit d’auteur du ministère du Patrimoine canadien a collaboré avec l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario et Artscape Launchpad pour concevoir et réaliser une expérience visant à évaluer l’efficacité relative de diverses approches pédagogiques (modèles pédagogiques) pour améliorer la capacité des créateurs à comprendre le régime de propriété intellectuelle (PI) au Canada et à y naviguer.
Hypothèses
Le cadre expérimental original portait sur la collaboration d’Artscape Launchpad et du ministère du Patrimoine canadien à l’évaluation de l’efficacité de :
- l’intégration de notions de droit d’auteur dans un programme complet d’initiation à l’entrepreneuriat plutôt que comme un produit autonome;
- fournir l’enseignement sous forme réseautée qui appuie la cocréation et l’application des connaissances.
Les hypothèses initiales étaient les suivantes :
- les approches centrées sur l’information ou sur l’expertise en matière de partage de l’information sur le droit d’auteur et la propriété intellectuelle étaient inadéquates. L’information devrait être intégrée à une culture entrepreneuriale globale;
- la rétention et l’application exigeraient des approches communicatives et collaboratives en matière d’éducation. Essentiellement, l’information serait contextualisée et appliquée sous forme réseautée.
Une troisième hypothèse est ressortie du processus de confinement, à savoir que :
- des communautés diverses (en termes d’expérience, de perspectives et d’heuristique) seraient nécessaires pour mobiliser et appliquer efficacement les connaissances en matière de propriété intellectuelle.
Calendrier
Novembre 2017 : Réunions entre le ministère de la Culture et du Patrimoine et Toronto Artscape Incorporated pour définir les paramètres expérimentaux et la signature des contrats.
Novembre 2017 – avril 2018 : Réunions hebdomadaires entre les principaux intervenants de l’expérience sur la littératie en matière de droit d’auteur au moyen de conférences téléphoniques.
Décembre 2017 : Le cadre expérimental décrit les étapes et les domaines de responsabilité.
Janvier 2018 : Atelier Cheminement du créateur pour mieux comprendre les expériences vécues par les créateurs (6). Atelier offert par des sous-traitants de PCH.
Janvier 2018 : Atelier Confinement offert à un échantillon représentatif de la communauté de la PI (16) afin d’élaborer des thèmes, de dégager des hypothèses et de clarifier les intentions de la recherche.
Février 2018 : Points de décision (6 février, 20 février) pour finaliser la conception expérimentale en consultation avec les partenaires de l’expérience et l’experte juridique contractuelle.
20 – 26 février 2018 : Entrevues préalables à l’atelier réalisées et enregistrées. Techniques d’entrevue qualitative semi-structurée avec l’objectif de 10 entrevues (8 entrevues complétées)
26 février – 1er mars 2018 : Programme de la cohorte de référence « A » (Programme complet d’entrepreneuriat créatif d’une durée de 40 heures)
5 – 8 mars 2018 : Programme de la cohorte de référence « B » (Programme complet d’entrepreneuriat créatif d’une durée de 40 heures)
9 – 16 mars 2018 : Entrevues postérieures à l’atelier réalisées et enregistrées. Techniques d’entrevue qualitative semi-structurée avec un objectif de 10 entrevues (7 entrevues complétées)
Avril 2018 : Analyse des données et évaluation des schémas
Avril 2018 : Réunion des intervenants à Ottawa pour discuter des premières constatations
Mai 2018 : Présentation de la première ébauche
Pédagogie actuelle
L’approche d’Artscape Launchpad en matière de conception pédagogique s’inspire des pratiques et des concepts développés dans le monde des jeux vidéo et met l’accent sur la création d’espaces génératifs qui donnent lieu à des idées et à des solutions novatrices qui sont façonnées grâce aux approches collaboratives, aux perspectives variées et à la compréhension systémique. Alors que de nombreux programmes de formation en entrepreneuriat s’adressent à des individus ou à de petites équipes, celui d’Artscape Launchpad s’articule autour de réseaux de personnes qui peuvent rassembler et recombiner des idées et des concepts différents provenant de divers domaines. Le concept d’entrepreneuriat est considéré comme relationnel et social, et se saisit à travers les interactions continues qui contribuent à un changement positif.
Les programmes appliquent une approche herméneutique qui tient compte des relations entre les membres de la collectivité et avec leur environnement. La conception pédagogique vise à fournir des expériences directes et partagées à des groupes de personnes afin d’améliorer le domaine communicatif dans lequel l’activité entrepreneuriale est intégrée. Plutôt que de promouvoir une recherche personnelle sur la façon dont le sens est cherché et façonné, la conception met l’accent sur la recherche collective de la signification et de la création de sens.
Bien que diverses modalités soient soutenues, y compris des programmes intensifs et échelonnés de 40 heures, des programmes d’une journée et des ateliers plus courts de 2,5 heures, les constantes comprennent le recadrage des problèmes complexes, la suspension des contraintes actuelles et l’aide accordée aux participants afin de voir les problèmes dans une optique qui n’est pas façonnée par les pratiques en vigueur. Une fois l’espace de solution remodelé, de nouvelles solutions peuvent être tracées.
La pédagogie a suscité des réponses positives de la part des participants et a été perçue comme une réponse pragmatique à une communauté d’apprentissage diversifiée dominée par des artistes et des entrepreneurs qui sont souvent mal à l’aise ou réfractaires à des modèles institutionnels occidentaux d’apprentissage formel. Au fil du temps, l’approche de la conception de ces espaces s’est imposée en tant que praxie, avec un vocabulaire et une grammaire distincts.
Bien que dans un état de raffinement et d’évolution constante, l’approche des espaces d’apprentissage développés et déployés à Artscape Launchpad est simplement connue sous le nom de MDA. Le terme MDA est un sigle pour Mechanics — Dynamics — Aesthetics (mécanique – dynamique – esthétique) et provient de son utilisation dans la conception de jeux vidéo et la recherche (Hunicke, LeBlanc et Zubek, 2004). Le modèle MDA offre un moyen d’assurer une cohérence systématique dans les environnements créés. L’idée de base du modèle MDA est que « penser aux jeux comme des artefacts conçus aide à les concevoir comme des systèmes qui construisent le comportement au moyen de l’interaction » (Hunicke, LeBlanc et Zubek, 2004). Les approches traditionnelles de la conception pédagogique sont trop souvent positivistes. Un modèle d’enseignement « médiatique » suppose que les connaissances sont présentées et consommées et que toutes les erreurs de transmission sont intégrées chez l’expéditeur ou le destinataire. Même lorsque la communication est comprise, il faut avoir confiance que le destinataire sera capable d’appliquer ces connaissances d’une manière significative ou dans un contexte social.
Les approches de diffusion sont inappropriées lorsqu’il s’agit d’encourager la création collective de connaissances et le dépassement des frontières disciplinaires. Les jeux vidéo, en tant qu’artefacts, n’existent que dans le contexte de l’interaction. Il y a une interaction constante entre les interprétations subjectives de l’expérience d’un jeu et la progression objective du jeu lorsque les joueurs prennent des décisions basées sur leur interprétation de l’environnement du jeu. Cela suggère une approche différente de la conception des espaces d’apprentissage. Si un environnement d’apprentissage social, comme un jeu, n’existe que par ses interactions, alors l’accent doit être mis sur la nature et l’expérience de ces interactions (l’esthétique). Plutôt que de prioriser ce que le concepteur veut que les apprenants fassent, l’accent est mis sur ce qu’ils doivent ressentir afin de générer des interactions plus positives dans l’environnement d’apprentissage.
Une approche esthétique crée des conditions dans lesquelles de nouveaux comportements souhaitables, intrinsèquement dérivés et centrés sur des interactions positives avec d’autres apprenants et objets d’apprentissage, sont plus susceptibles d’apparaître. L’approche MDA n’est pas une approche de manipulation ou de « ludification », mais plutôt de conception d’espaces et d’expériences qui sont plus susceptibles d’inspirer l’application des perspectives et heuristiques nécessaires pour relever les défis adaptatifs des entrepreneurs.
En tant qu’approche de conception, le modèle MDA s’est avéré particulièrement efficace pour :
- l’ouverture et le soutien de modes de pensée, de perceptions et d’interactions et de points de vue différents;
- synthétiser les différentes préférences et approches disciplinaires en matière de création de sens;
- le démantèlement des comportements invisibles ou obstinés;
- reconnaître et réconcilier les paradoxes et les contradictions;
- accroître la réflexion et soutenir une prise de décision cohérente.
En tant qu’approche et praxie, le modèle semble approprié comme stratégie pour préparer les apprenants à réussir dans un contexte économique et social défini par la multidisciplinarité, la complexité et le changement.
Le modèle MDA est une méthodologie itérative qui tient compte à la fois de l’expérience de l’apprenant en matière de dynamique du système et des contrôles qui permettent cette dynamique du système. Comme les espaces d’apprentissage visent des adaptations transformationnelles de la perspective et du comportement, l’accent est mis sur les contrôles plutôt que sur l’esthétique. La vision qu’a Artscape Launchpad du développement entrepreneurial est axée sur le processus continu d’apprentissage plutôt que sur un ensemble de compétences ou de comportements à pratiquer et à appliquer. Une réflexion structurée sur l’expérience esthétique et les processus collectifs de création de sens permet aux groupes d’interroger les modèles de comportement existants et d’appliquer de nouveaux comportements selon les exigences du contexte conçu. Grâce à une recherche collective sur une expérience esthétique partagée, un groupe peut amorcer un processus d’adaptation au contexte émergent. Les groupes passent de « qu’est-ce que cela signifie pour moi? » à « qu’est-ce que cela signifie pour nous? » à « comment pourrions-nous avancer? ».
Conception expérimentale
La conception initiale est le fruit d’une consultation entre PCH et Artscape Launchpad. L’atelier Cheminement du créateur et l’atelier Confinement ont approfondi les thèmes initiaux de conception et fourni un cadre pour la réalisation d’essais à variables multiples fondés sur les modifications apportées à la conception et à la pédagogie des programmes d’études existants.
Deux séances du Programme d’entrepreneuriat créatif offertes consécutivement à la fin de février et au début de mars 2018 ont été choisies comme sites pour la prestation expérimentale. Artscape Launchpad applique une esthétique du don à tous les environnements d’apprentissage et les deux séances du Programme d’entrepreneuriat créatif sélectionnées pour l’expérience n’ont pas été modifiées par rapport aux modèles existants, sauf les variations clés nécessaires pour évaluer l’exactitude des hypothèses décrites précédemment.
Le Programme en entrepreneuriat créatif (PEC) est un programme de 40 heures qui peut être offert de façon intensive (32 heures d’enseignement en classe sur 4 ou 5 jours avec 8 heures de travail à domicile) ou échelonnée (intervalles hebdomadaires ou plus longs entre les éléments pédagogiques). Le programme demande aux créateurs de se pencher sur des questions difficiles concernant l’aspect commercial de leur pratique créative, de repérer des alliés qui feront avancer les choses et de mettre en pratique de nouvelles façons de s’organiser afin que les choses puissent être mises en œuvre dans un secteur en évolution constante et rapide.
Les sujets abordés comprennent le financement, le droit d’auteur, les modèles d’affaires, l’engagement communautaire, l’image de marque, la technologie, les marchés émergents et les publics. La conception est axée sur des interactions qui encouragent un sentiment de générosité au sein de la communauté d’apprentissage. Plus précisément, les centres de conception permettent aux participants de contribuer au succès de leurs camarades tout en découvrant des relations inattendues ou nouvelles qui peuvent faire progresser leurs propres ambitions créatives.
Les objectifs du Programme en entrepreneuriat créatif (PEC)
- Compréhension de la façon dont les différentes relations et activités constituent l’ensemble de l’entreprise tout en maintenant la pratique créative au centre;
- Identification des personnes que l’apprenant essaie de servir et de leurs besoins;
- Augmentation de la rapidité et de l’impact global des initiatives du projet;
- De nouvelles idées et solutions à l’aide d’une nouvelle boîte à outils en vue d’aider les apprenants et leur(s) équipe(s) à penser en collaboration et à travailler ensemble sur des projets;
- Cartographie et plan destinés à générer de nouveaux revenus et de nouveaux marchés pour le travail créatif;
- Confiance en la possibilité de partager des idées avec des publics familiers et inconnus.
Ordre du jour quotidien (résumé)
Jour 1 : Qui êtes-vous? Pourquoi êtes-vous là? Cartographie de l’environnement extérieur. C’est quoi l’idée? Quelle valeur créez-vous? Qu’est-ce qu’on en pense? Où vous situez-vous? Organisation du travail et des limites.
Jour 2 : Concevoir des interactions et des collaborations. Partenariats. Raconter votre histoire. Pourquoi les relations sont-elles importantes?
Jour 3 : Quel est le modèle d’affaires? Observations et interprétations. Être réglo. Études de cas. Parler d’argent. La frénésie.
Jour 4 : Perspectives et mise en œuvre. Prototypage et mise à l’essai d’hypothèses. Autres sources de revenus. Stratégies de développement des affaires.
Jour 5 : Raconter votre histoire... encore et encore. Les médias sociaux. L’industrie se connecte et prochaines étapes. Cartographie de l’environnement intérieur.
Dans les deux séances (cohortes de référence A et B), l’animateur principal était le même et l’animateur travaillait dans la même classe. Outre les différences décrites, le contenu du programme était le même chez les deux cohortes. Des droits de scolarité ont été offerts gratuitement aux personnes désireuses de participer à l’étude, bien qu’elles n’aient pas été informées de la substance de l’expérience avant ou pendant la prestation. La taille des classes était identique. Le groupe A a commencé avec dix participants, mais un désistement à mi-parcours a laissé le groupe à neuf participants, tandis que le groupe B en a accueilli neuf tout au long du programme.
Dans la cohorte A, trois participants sur neuf se sont identifiés comme Néo-Canadiens, six sur neuf ont déclaré appartenir à une communauté de couleur et appartenir à une tranche d’âge allant du début de la vingtaine au début de la quarantaine. Les disciplines représentées comprenaient la photographie, la poésie, la musique, les arts communautaires, la danse, le cinéma, la publicité, les arts visuels, les musées et les services de galerie. Deux des participants se sont identifiés comme étant de sexe masculin et sept comme étant de sexe féminin.
Dans la cohorte B, deux participants sur neuf se sont identifiés comme Néo-Canadiens, sept sur neuf ont déclaré provenir d’une communauté de couleur et d’une tranche d’âge allant du début de la vingtaine à la fin de la cinquantaine. Les disciplines représentées comprenaient la musique, la photographie, la danse, le théâtre, les arts visuels, l’éducation artistique, la conception graphique et l’organisation de festivals.
Les structures A/B testées peuvent être résumées comme suit :
- Une experte juridique donne une séance de 150 minutes sur les questions de propriété intellectuelle et de législation lors de la troisième journée inscrite au programme. Elle n’est présente que pour la séance et fournit ses coordonnées pour le suivi, le cas échéant;
- Une experte juridique donne une séance d’information de 45 minutes sur les questions de propriété intellectuelle et de législation lors de la troisième journée inscrite au programme, immédiatement avant la visite d’un festival de films autochtones à Toronto, en Ontario (ImagineNATIVE). Elle est présente les jours 1, 2 et 4 de 13 h 30 jusqu’à la fin du programme (16 h 30 ou 17 h) à titre de participante sans offrir d’expertise juridique, de contenu ou de facilitation.
Éléments de l’expérience
Cheminement du créateur (23 janvier 2018)
Cet atelier a été dirigé par des représentants de l’Université de l’ÉADO avec l’appui de Patrimoine canadien et d’Artscape Daniels Launchpad. L’atelier d’une journée a invité six créateurs comme participants et visait à comprendre leur parcours et leurs besoins. Les objectifs étaient d’établir le connu des créateurs, les inconnus connus et les inconnus tout au long du parcours des créateurs, de cerner leurs points névralgiques et leurs besoins et de lancer la conversation sur la façon dont l’information et les connaissances sur le droit d’auteur devraient être transmises aux créateurs.
Questions clés
- Quels sont les trois principaux enjeux qui vous touchent actuellement ou qui touchent votre collectivité?
- Quels sont les trois principaux besoins actuels de votre collectivité/circonscription?
- Le droit d’auteur est-il quelque chose dont vous êtes bien au fait?
- Comment pensez-vous qu’une meilleure compréhension du droit d’auteur pourrait vous être bénéfique?
- Voyez-vous une façon d’aborder ces questions sociales que vous ne voyez pas actuellement?
La personnalité virtuelle d’un créateur a été créée en tenant compte des facteurs STEEEPPV (sociaux, techniques, économiques, environnementaux, émotionnels, physiques, politiques, valeurs) qui affectent le processus d’un créateur et les barrières et tensions qui affectent son accès aux moyens de maximiser la valeur de son travail. La personnalité virtuelle a ensuite été présentée aux participants sous la forme d’un récit décrivant le cheminement du créateur. On a ensuite demandé aux participants de valider la carte du cheminement du créateur, en mettant l’accent sur les principaux événements personnels qu’ils ont vécus.
Atelier Confinement (25 janvier 2018)
L’objectif de l’atelier Confinement était d’interroger les niveaux de confiance dans la formulation de la question présentée par le ministère du Patrimoine canadien à l’équipe de mise en œuvre. L’atelier a permis à divers intervenants d’examiner si le cadre actuel de la question était approprié et utile (et partagé avec d’autres). Le confinement est un moyen d’explorer, de visualiser et de synthétiser collectivement les croyances, les hypothèses, les souhaits et les intentions essentiels des personnes dans un système avant d’entreprendre un processus de résolution de problèmes. Le résultat est une compréhension commune du contexte plus large et de son importance pour l’action future.
L’atelier était axé sur le groupe de collaboration (qui est pertinent), les activités du système (quelles interactions sont pertinentes) et la stabilité globale (comment le travail est-il ancré) afin de s’engager dans le processus expérimental. Le confinement implique l’interrogation de modèles mentaux et d’hypothèses implicites jusqu’ici valides. La révision était le résultat probable. De là naîtrait un « conteneur » ‒ une attention concertée vers les intentions, les hypothèses et les convictions mutuelles.
Cela est particulièrement important lorsque l’on parle de systèmes complexes. Un « système » se traduit le mieux par un « cadre des effets » ou une « structure des effets ». Différentes variables d’influence interagissent les unes avec les autres et sont liées les unes aux autres ou à elles-mêmes. Un système complexe a de nombreux intrants possibles, de nombreux extrants possibles et des modèles et dynamiques de liens inconnus. De plus, la frontière entre ce qui contribue à l’effet (de l’effet) et ce qui n’est que l’environnement ne deviendra visible qu’avec le temps. L’encadrement superficiel d’un système peut reproduire par inadvertance des modèles passés et limiter l’ensemble des solutions disponibles pour l’expérience.
Les thèmes suivants ont été au centre de la conception de l’« atelier Confinement » :
Référence contextuelle : Étant donné que les systèmes complexes changent constamment leurs modes de fonctionnement, on ne peut comprendre le cadre des effets que par rapport à un contexte donné. Un contexte commun permet un examen commun d’un cadre des effets.
Dépendance de trajectoire : La façon dont le système réagit à un intrant donné dépend de son historique. Il n’y a pas « d’opération d’annulation » pour les fonctions précédemment traitées. Le passé ne peut être récupéré, car les schémas fonctionnels ont changé qualitativement. La sélection de certaines trajectoires et l’ignorance d’autres doivent se faire explicitement.
Référence à l’ensemble du système : Pour définir un système particulier, une certaine compréhension de l’ensemble du système est nécessaire. La cartographie des connexions intérieures et extérieures permet d’avoir une meilleure image de l’ensemble du système.
La taille du groupe à l’atelier Confinement était de 15 personnes représentant les communautés suivantes :
- spécialistes des politiques;
- spécialistes du contenu;
- personnes avec une vaste expérience de la vie;
- concepteurs d’expérience (formation);
- étudiants.
Conception expérimentale (1er – 16 février 2018)
Recruitment des cohortes A et B (8 – 23 février 2018)
Profil des participants : De façon générale, les programmes Launchpad se composent de créateurs qui s’identifient à l’une des 17 classifications nationales des professions qui font partie des industries créatives au Canada. Bon nombre d’entre eux sont en début ou en milieu de carrière et ont la preuve que leur travail est apprécié, mais ils n’ont pas d’approche ou de soutien pour faire avancer ces ambitions. Les participants à la rampe de lancement sont diversifiés sur les plans disciplinaire, démographique et géographique (à l’extérieur du centre-ville) et expriment un sentiment d’être « périphériques » à l’activité artistique dominante. Un bon nombre reçoivent de petites subventions (1500 $/2000 $), mais pas à des niveaux qui leur permettent de gagner leur vie. Dix-neuf participants ont été recrutés pour participer à l’expérience. Dix ont été attribués à la cohorte A et neuf à la cohorte B. Des exigences relatives à son travail ont amené un participant à se retirer de la cohorte A après le premier jour, de sorte que les deux groupes ont finalement eu neuf participants.
Entrevues préalables à l’atelier (19 – 28 février 2018)
Des artefacts de communication (vocalisés et comportementaux) ont été examinés en vue d’explorer les effets de la conception expérimentale. Les gens ne sont pas facilement influencés par l’action directe et ils ne sont pas complètement transparents. Les structures se reproduisent constamment par des moyens de communication. Les entrepreneurs changent constamment et créent de nouvelles structures pour faire face à la complexité et créer de l’ordre sous forme de souvenirs historiques, de succès (collectifs/organisationnels) mémorisés de façon structurelle et de perceptions et attentes coordonnées. L’ordre structurel interne, les conceptions sensorielles et les visions du monde apportent sécurité et stabilité, mais entravent en même temps les réactions aux changements dans un environnement dynamique et en évolution rapide. Les entrevues menées avant et après l’atelier ont mis en évidence des changements dans la façon dont les artefacts de communication ont évolué à la suite de leur participation à l’atelier.
Les entrevues ont été menées par Robert Wakulut, un avocat qui travaille avec Artscape Launchpad en consultation avec l’équipe de mise en œuvre de l’expérience. À l’aide d’un outil de vidéoconférence, M. Wakulut a mené des entrevues qualitatives semi-structurées visant à faire ressortir l’expérience vécue par les participants dans leur interaction avec le régime de PI. Les entrevues ont également permis à M. Wakulut d’évaluer le niveau actuel de compréhension.
Le script de l’entrevue était le suivant :
- Parlez-moi de vos expériences en matière de droit d’auteur et de propriété intellectuelle.
- Que savez-vous de la véracité du régime de PI applicable aux créateurs du Canada?
- Selon vous, qu’en est-il du régime de PI applicable aux créateurs du Canada?
- Qu’aimeriez-vous qui soit vrai en ce qui a trait au régime de PI au Canada pour les créateurs?
- Selon vous, qu’est-ce qui n’est plus vrai en ce qui concerne le régime de PI pour les créateurs du Canada?
- Quels sont les obstacles à l’obtention de l’information dont vous avez besoin?
- Quelles sont les ressources disponibles?
- Quelles différences aimeriez-vous voir?
Atelier de référence A (26 février – 1er mars 2018)
Les deux cohortes ont effectué une brève évaluation de deux pages de leur niveau actuel de connaissance du régime de PI au Canada. Les réponses sont résumées à l’annexe A. Il y avait une forte corrélation entre le niveau d’expertise autoévalué et le rendement sur certaines questions techniques clés posées, et il y avait peu de variation entre les deux cohortes dans les connaissances déclarées ou démontrées. Les réponses ont également été comparées aux résultats des entrevues qualitatives afin d’évaluer tout changement résultant de la participation.
Atelier de référence B (5 – 8 mars 2018)
Apprentissage en simple boucle ou apprentissage en double boucle
Dans l’apprentissage en simple boucle, si un agent n’atteint pas ses objectifs, il changera généralement son approche. Avec le temps, il peut même élaborer de nouvelles stratégies. Grâce à la rétroaction, il apprend à agir en meilleure adéquation avec son système (organisation) et son environnement. Cependant, il peut aussi réfléchir à ses propres désirs, valeurs et normes, et conclure que quelque chose ne va pas dans la relation entre ses intentions et ses approches. L’apprentissage en double boucle permet de briser les schémas de pensée afin d’activer les processus d’autodirection et d’autoorganisation d’un agent.
L’atelier de référence A était axé sur la fourniture d’outils aux participants pour qu’ils puissent s’engager dans un apprentissage en simple boucle. Le contenu partagé a permis aux participants de mieux s’aligner sur le régime de PI en tant qu’élément central de leur pratique. L’atelier de référence B a tenté d’encourager l’apprentissage en double boucle en demandant aux participants d’examiner leurs intentions et de concilier divers systèmes concurrents afin d’activer les processus d’autoorganisation. La capacité d’intégrer les valeurs ancrées de divers systèmes favorise l’alignement adaptatif avec les préférences et les approches de l’entrepreneur.
Entrevues postérieures au programme (12 – 18 mars 2018)
L’entrevue postérieure au programme visait à évaluer comment les artefacts de communication, y compris les heuristiques et les perspectives disponibles, des participants avaient changé depuis leur participation au programme.
- Que pensez-vous de la participation de l’avocate au programme?
- Qu’avez-vous appris que vous ne saviez pas déjà?
- Comment votre compréhension du système juridique a-t-elle changé à la suite de votre participation?
- Quels changements préconiseriez-vous dans la façon dont le système juridique aborde la propriété intellectuelle?
Examen des données (19 – 30 mars 2018)
Rapport (avril 2018)
Notes sur le processus
Atelier Confinement
L’atelier Confinement a généré quatre grandes questions qui ont dégagé des modèles d’action pour la conception de l’expérience finale.
- La question du droit d’auteur en tant que pratique
- La littératie en matière de droit d’auteur en tant que sujet autonome à apprendre par opposition à la littératie en matière de droit d’auteur en tant que pratique qui doit être appliquée dans le cadre d’un programme complet en entrepreneuriat.
- La question du droit d’auteur en tant que distance
- La littératie en matière de droit d’auteur qui doit être apprise avec une communauté de collègues entrepreneurs créatifs par opposition à la littératie en matière de droit d’auteur qui doit être construite en collaboration grâce à des interactions avec une cohorte représentative de l’écologie de la PI.
- La question du droit d’auteur en tant que justice
- La littératie en matière de droit d’auteur qui doit être apprise sous forme d’abstraction avec des cas inclus comparativement à la littératie en matière de droit d’auteur qui doit être développée grâce à la création de cas en intégrant les apprenants dans les collectivités affectées par le régime du droit d’auteur.
- La question du droit d’auteur en tant que redevabilité
- La littératie en matière de droit d’auteur qui doit être apprise en vue de faire progresser les ambitions créatives d’un entrepreneur par opposition à la littératie développée afin d’aider les autres qui tentent de naviguer dans le paysage de la PI.
Afin de limiter les variables appliquées à la conception expérimentale, l’équipe de mise en œuvre a choisi de travailler avec des éléments des enjeux 1 et 3.
L’atelier Confinement a également soulevé d’importantes questions sur ce à quoi pourrait ressembler une application réussie de l’apprentissage dans des domaines tels que :
- la capacité de naviguer dans le régime existant ou de l’exploiter;
- la capacité de créer des regroupements qui prennent en charge différents mécanismes de propriété intellectuelle;
- la capacité de militer pour ou contre des éléments du régime;
- la capacité de franchir les frontières en vue de réduire les frictions dans l’application du régime actuel (y compris les normes de l’industrie).
Les entrevues préalables et postérieures à l’atelier ont été conçues pour refléter ces questions. Des variations pédagogiques entre l’atelier A et l’atelier B ont également été constituées afin de mieux comprendre ces questions.
Récursion
Le processus d’intervention a modifié récursivement le cadre expérimental. Le processus d’expérimentation (par opposition au contenu de l’expérience) a fait ressortir des points clés qui n’avaient pas été initialement prévus.
En particulier,
- des schémas d’oppression sont mêlés aux questions de propriété intellectuelle;
- les réponses techniques (heuristiques) diffèrent considérablement selon le point de vue de l’intervenant;
- les « espaces » intersubjectifs contribuent à la façon dont l’information est reçue et transformée en connaissances selon différentes personnes.
Plus précisément, ces questions ont trait à la façon dont les communautés racialisées et marginalisées vivent à la fois le régime de propriété intellectuelle et les interventions visant à combler les lacunes au niveau des connaissances de la communauté des créateurs. Différentes expériences vécues suggèrent des besoins différents fondés sur les autoperceptions que l’on a des privilèges. Une possibilité d’étude future pourrait consister à étudier comment le genre et les profils raciaux affectent la relation entre les créateurs et les systèmes de propriété intellectuelle.
Résultats
L’expérience a, à bien des égards, attiré l’attention sur la tension entre le développement continu d’une entreprise entrepreneuriale et son désir de renforcer les structures organisationnelles internes. La réduction de la complexité permet d’effectuer le travail de façon efficiente et efficace. Toutefois, comme les entrepreneurs interagissent avec d’autres systèmes dans un environnement dynamique, la réduction de la complexité peut entraver ou empêcher la survie, l’adaptabilité et l’apprentissage du système. Les objectifications limitent non seulement les comportements disponibles qu’une organisation peut déployer pour s’adapter à son environnement, mais aussi l’information qu’elle peut utiliser dans la prise de décision et d’autres activités organisationnelles.
Dans la cohorte de référence B, l’intention était d’encourager l’apprentissage en double boucle grâce à une pédagogie qui attirait l’attention sur les tensions entre la durée (réduction interne de la complexité) et le changement (apprentissage et croissance) et entre le monde intérieur (intentions) et le milieu.
La différence décisive entre la cohorte A et la cohorte B était le processus d’apprentissage prévu : apprentissage préstructuré, connaissances spécialisées et recettes par opposition à l’apprentissage social et à l’apprentissage au sujet de l’apprentissage.
La prestation des ateliers A et B a fait ressortir des modèles de comportement qui ont été repris dans les données générées par les entrevues avant et après l’atelier.
Plus précisément, les créateurs du programme interprétaient subjectivement leurs interactions avec le système juridique de plusieurs façons.
- Ce qu’ils pensaient de « l’experte » (leur capacité et leur capacité de créer de l’espace pour que cette experte puisse contribuer à leur cheminement – personnel, subjectif).
- La façon dont ils ont vécu le mode de prestation (présentation par opposition à une visite sur place)
- Ce qu’ils ont appris (les nouvelles informations qu’ils ont ajoutées à leur boîte à outils – heuristiques)
- La façon dont le système juridique réglemente leurs interactions (plus grande sensibilisation quant aux raisons et à la façon dont le système juridique les éclaire sur ce qu’il fait et sur la manière que cela se fait – perspectives).
- Une position normative sur l’état actuel du système juridique (à savoir s’il réglemente efficacement ou non l’activité créative – subjectif et systémique)
La réglementation se réfère ici à la façon dont le système façonne la dynamique du travail créatif plutôt qu’à son sens strictement juridique.
Les niveaux de connaissances initiaux étaient faibles, 13 des 17 participants ayant répondu correctement à trois ou moins des cinq questions posées lors de l’admission. Huit des 17 participants ont également indiqué avoir très peu confiance en leurs capacités. À une seule exception près, les notes correspondaient étroitement au niveau de compétence autoévalué.
Les membres de la cohorte A ont fourni des réponses détaillées aux questions liées aux points 1, 2 et 3 ci-dessus, mais ont été moins en mesure de faire référence à une connaissance plus large de la façon dont le système juridique les éclaire sur ce qu’il fait et comment cela se produit (4,) ou de prendre une position normative sur la phase actuelle du système juridique (5).
Les membres de la cohorte B en avaient moins à dire au sujet de leur relation avec l’experte et de la méthode de prestation que sur la façon dont le système en général réglemente leur activité (4) et sur la façon dont le système juridique doit évoluer.
1. Perceptions de l’experte
Les membres de la cohorte A ont souvent décrit l’avocate (anonymisée sous le sigle TC ici) en des termes qui l’objectivaient. Ils ont eu 2,5 heures avec l’experte et elle a fait une présentation PowerPoint sur les questions juridiques clés concernant les créateurs. Bien des personnes ont affirmé avoir appris de nouvelles choses, mais ont exprimé une opinion négative ou réductionniste de l’avocate. Un participant a décrit comment « la plupart des gens avaient été très rebutés par cette session » et comment « elle n’était pas l’une des nôtres ». Une participante a souligné directement la variance de la conception dans sa rétroaction, affirmant qu’« elle n’était pas là pendant tout ce temps et qu’il n’y avait pas de maillage » et à quel point « on se sent mal lorsqu’on fait venir une personne ici pour nous dire comment faire les choses ».
D’autres étaient moins antagonistes à l’égard de l’avocate, mais la décrivaient tout de même en des termes centrés sur sa fonction quant à la formation. Une participante a estimé que l’avocate était « très douée pour expliquer son rôle » et qu’elle était « un havre de connaissances », même si elle a déclaré que « cela la dépassait un peu ».
Une troisième personne interrogée avait oublié le nom de l’avocate et on a dû le lui rappeler. Elle a dit : « Qui est XXX? C’est qui, déjà? Ah oui, je me souviens d’elle. Elle était très bien informée… Elle en savait beaucoup... Comme un sergent instructeur. Très, très, très à la hauteur » et peu de temps après a fait le triste constat que le droit d’auteur n’est « pas le sujet le plus divertissant ».
La cohorte B a passé plus de temps avec TC, bien que la participation de TC se soit limitée à se joindre aux conversations et aux activités comme n’importe quel autre participant, souvent en petits groupes ou en paires. Quoique qu’elle ait été présentée comme avocate, aucun participant de la cohorte B n’a demandé conseil à TC avant sa présentation le troisième jour et sa visite à ImagineNATIVE plus tard ce matin-là. Quand on leur a posé des questions au sujet de TC et de sa participation, les personnes interrogées ont donné une description plus nuancée de TC en tant que personne.
Une personne interrogée a affirmé que TC était efficace en raison de sa formation artistique et que « parce qu’elle était une artiste, elle pouvait anticiper » les types de questions que les artistes se posaient. La même personne interrogée a avoué que les contacts avec un avocat étaient une crainte avant le programme, mais que maintenant « un processus de compréhension s’était amorcé ».
Une autre personne de la cohorte B s’est montrée généreuse dans ses éloges à l’égard de TC. Elle a longuement discuté de la façon dont elle a « parlé à TC de nos environnements. Cela m’a ouvert les yeux » Elle a poursuivi en ces termes : « C’était formidable de l’avoir là. J’étais très heureuse qu’elle soit là et que nous puissions aller la voir à n’importe quel moment » et que « je pense que son apport et sa présence dans la classe, voire sa participation, ont été très encourageants et très utiles ». Lorsqu’on lui a demandé si cela avait changé sa perception des avocats, elle a répondu : « Oui, certainement. Elle était vraiment cool, terre à terre, très facile à aborder, très encourageante. Elle a partagé son expertise et ses conseils au besoin. Elle a vraiment changé mon point de vue. Je pensais qu’elle ne ferait que s’asseoir (sans rien dire) ». Plus tard, elle nous a fait part qu’« elle se sentait très proche de chacun d’entre nous ». Elle a appris à savoir ce que nous essayions de faire et a donné son avis quand nous en avions besoin et nous a ouvert les yeux sur ce que nous essayions de faire ». Par conséquent, la participante se sentait plus à l’aise avec les avocats, alors qu’auparavant « je me sentais intimidée. Mes questions n’avaient pas vraiment d’importance », mais maintenant « je me sens plus à l’aise d’être simplement moi-même et de demander : “Qu’est-ce que cela signifie? Qu’est-ce que ça veut dire?”. »
Il n’est pas surprenant que l’intégration de TC dans les éléments programmatiques qui lui demandaient de participer en tant que pair ait accru l’intimité au sein de la cohorte B. Bien que les deux groupes aient fait valoir une meilleure connaissance du régime de propriété intellectuelle, on a pu observer un véritable changement quant aux questions axées sur le fonctionnement d’un système global et sur la formulation des arguments quant à la façon dont le régime pourrait évoluer.
2. Mode de prestation
La cohorte A a reçu un atelier de 2,5 heures sur la propriété intellectuelle à l’intention des créateurs. Le contenu était dense et accompagné de douzaines de diapositives qui ont été mises à la disposition des participants à la suite de l’atelier en cliquant sur un lien Dropbox. La cohorte B a reçu 45 minutes de formation sur la propriété intellectuelle. La séance de 45 minutes a été présentée dans le hall d’entrée du 401, Richmond à Toronto, un édifice très achalandé rempli d’organismes artistiques, dont ImagineNATIVE, le plus grand diffuseur de contenu d’écran autochtone au monde. Les diapositives étaient impossibles étant donné l’endroit et bien des participants ont été forcés de se tenir debout ou de s’asseoir sur le sol. Immédiatement après le contenu, les participants ont rencontré un ancien directeur général et président actuel du conseil d’administration d’ImagineNATIVE pour discuter de l’historique, des possibilités et des défis de l’organisation. La veille au soir, on avait demandé aux participants de visionner un court métrage sur certains des problèmes que les peuples autochtones (en l’occurrence un chanteur maori) avaient rencontrés lors de leurs tentatives de commercialisation de la musique en Allemagne.
On a présenté à la cohorte B un aperçu de deux systèmes indépendants et interdépendants, le système de propriété intellectuelle et les approches collaboratives à la production et à la présentation des médias autochtones. On leur a ensuite demandé, dans le cadre d’une réflexion structurée, de concilier les valeurs et la dynamique de chaque système en fonction de leur pratique et des relations entre eux.
La cohorte A a répondu à la structure traditionnelle de l’atelier en commentant à la fois le contenu et l’approche. Une participante a déploré le « temps excessif consacré au droit d’auteur » et le fait qu’ils « passaient beaucoup de temps sur les procédures tactiques du droit d’auteur ». Elle a continué en disant que les « anciennes façons de faire du droit d’auteur sont “rebutantes” et que l’approche fixe était rebutante, ressentie comme une intrusion ».
Une autre participante de la cohorte A a perçu l’interaction comme antagoniste et comment « cela nous faisait bien ressentir le “nous” et le “eux” ». Elle a ajouté qu’elle « ne se rendait pas compte qu’il y avait tant de cloisonnements et de divisions » et qu’elle « trouvait que la partie juridique était très condensée ».
La cohorte B a davantage décrit son expérience en termes de tensions et d’intégrations. Une participante, commentant la conversation avec ImagineNATIVE et le film qu’ils avaient regardé précédemment, de dire « ce que j’estimais être la loi est en quelque sorte fixé » et que vous « devez rester couvert ». Elle a ensuite parlé de la nécessité de trouver une façon de réussir à manœuvrer et à se frayer un chemin à travers la loi. Cela suggère un état d’esprit différent, car la loi est vécue comme une chose vivante et dynamique plutôt que comme un ensemble de règles déconnectées d’un but fondamental ou les unes des autres.
3. Ce qu’ils ont retenu
Les deux cohortes ont affirmé avoir approfondi leurs connaissances en matière de propriété intellectuelle.
Un participant de la cohorte A a déclaré qu’il en avait « appris davantage sur les détails de la PI », tandis qu’un autre avait l’impression que « beaucoup de choses que je ne connaissais même pas m’ont été données ». Un autre participant encore a déclaré : « J’en sais un peu plus qu’avant ». Lorsqu’on lui a demandé de développer, il a dit : « Je sais mieux quel genre de questions poser, comme quand devrais-je envisager de consulter un avocat ». Enfin, une autre personne interrogée a déclaré qu’elle avait « appris à connaître les droits moraux, ce qui est utile à savoir ».
La cohorte B a présenté une histoire semblable d’amélioration des connaissances. L’un d’eux a fait remarquer qu’« une grande partie de la conversation sur la propriété intellectuelle était très, très nouvelle pour moi » et que « cette information, il faudrait que j’y retourne, si je veux m’y attaquer ». Un autre commentaire lié à la recherche de nouvelles connaissances était « Je pense que je saurais quelles questions poser » ainsi qu’« une meilleure compréhension de l’endroit où chercher ».
4. Comment le système juridique réglemente l’action
La cohorte A a été moins en mesure d’expliquer comment le système juridique réglemente actuellement ses actions. Lorsqu’ils ont su adopter une perspective systémique quant à leur participation au régime de PI, le langage avait tendance à être axé sur la rigidité ou la peur. Dans certains cas, la résistance envers l’avocate a donné lieu à de nouvelles pistes d’enquête. Une personne interrogée a demandé « quelle est une façon pertinente pour cette communauté et comment nous travaillons pour être en mesure d’appliquer certaines de ces nécessités du droit d’auteur sans compromettre nos relations et notre intégrité comme artistes ». L’hypothèse ici était que le régime de PI compromettait inévitablement les relations et l’intégrité en tant qu’artistes. Elle a également quitté le programme en s’inquiétant du fait que le régime de PI n’était « pas aussi fluide que je le pensais auparavant ». Elle a précisé que « ce n’était pas comme une continuation de ce que nous faisons déjà. C’était comme si nous devions aller à l’encontre de notre intuition ou de notre façon de travailler afin de pouvoir nous insérer dans ce système qui existe ». Elle a ajouté que cela « lui donnait l’impression d’être très formel, pas comme l’entrepreneuriat créatif qui est basé à 90 % sur les relations » et qu’« il y a beaucoup plus de strates dans ces contrats qu’il n’y paraît ».
Une autre participante a comparé le reste du programme avec le volet juridique, déclarant que « je suis repartie avec plus d’outils de vie que d’outils d’affaires » et qu’elle « a appris beaucoup d’habilités fondamentales, en particulier la générosité ». Cependant, elle n’avait pas encore trouvé « d’occasions d’appliquer la composante juridique ».
Une autre personne interrogée a déclaré qu’elle avait « beaucoup appris sur la propriété intellectuelle et sur la façon de se faire avoir ». Une quatrième a indiqué repartir avec un besoin accru de « mettre les choses par écrit » de « peur d’être exposée ou non protégée ».
La cohorte B était mieux en mesure de comprendre comment le système juridique fonctionne à leur égard en tant que créateurs. Une participante a fait référence à plusieurs reprises à son expérience chez ImagineNATIVE. Elle a beaucoup sympathisé avec les créateurs autochtones et a compris que la façon dont on interagit avec le régime de propriété intellectuelle est « un choix et ensuite le choix d’une voie ». Son apprentissage a également été encadré dans un langage adaptatif, soutenant que « je pense que je saurais quelles questions poser » et « j’ai une meilleure compréhension de l’endroit où chercher ».
Une autre personne interrogée de la cohorte B a déclaré : « J’avais fait mes propres recherches. J’avais beaucoup d’informations erronées ». Le programme semble avoir démontré les limites des connaissances actuelles, comme elle l’a également déclaré : « Ma compréhension a changé dans une certaine mesure. J’ai encore beaucoup à apprendre... Je fais plus attention grâce au programme ». La personne interrogée s’était en fait rendue à la bibliothèque pour sortir quelques livres afin de combler des lacunes importantes.
5. Point de vue sur le régime de la PI
Le sondage mené à l’admission demandait aux participants quels changements ils aimeraient voir apporter au régime et aux règles de propriété intellectuelle au Canada. La capacité de prendre une position éclairée sur un système est une preuve clé que les participants sont capables de s’engager de façon productive dans le système ainsi que dans sa logique et ses hypothèses internes. Sur les dix-sept réponses reçues, cinq n’ont pas été en mesure de le faire. Cinq autres ont préconisé plus d’information ou une information plus accessible pour les créateurs. L’un d’eux a abordé des questions qui ne relèvent pas du régime de propriété intellectuelle (subventions). Trois d’entre eux se sont penchés sur les questions numériques, mais sans trop de détails en termes de ce qu’un changement devrait offrir. Deux ont formulé des recommandations très précises liées à leur pratique actuelle. Enfin, un participant a parlé de la logique et des hypothèses sous-jacentes du système en déclarant qu’« il devrait s’agir de créer de la valeur pour l’artiste avant l’industrie ».
Les membres de la cohorte A, interrogés sur les changements qu’ils aimeraient voir apporter, n’ont fourni que peu d’information nouvelle. Deux participants n’ont pas été en mesure de formuler de recommandation, même si l’un d’entre eux en avait fait lors de l’entrevue initiale. Une troisième personne interrogée « veut que le gouvernement ait un cours pour les entrepreneurs ». Une quatrième personne interrogée a déclaré qu’elle n’avait rien à revendiquer, car elle ne voyait « pas de trous flagrants » dans la façon dont elle était protégée.
La cohorte B a généré des réponses plus complètes à la question et a souvent lié ces réponses à leur expérience avec ImagineNATIVE. Au sujet des marques de commerce, un participant a déclaré : « Je peux voir où elles sont utiles et où il y a potentiellement des problèmes ». Un autre a reconnu que l’expertise juridique n’est pas si différente de l’expertise artistique ou technique et que bon nombre d’entre eux « ont des compétences très développées dans une certaine partie de leur vie » et que travailler au-delà de ces frontières peut renforcer chacun. Une autre personne interrogée de la cohorte B a donné plusieurs réponses bien qu’elle n’ait donné aucune réponse, que ce soit par écrit ou enregistré, au cours du processus d’admission. Elle « veut plus de formation pour les artistes dans divers contextes » et estime que « le système devrait mieux faire en sorte que les artistes tirent pleinement profit de leur travail ». Elle a également appliqué les connaissances juridiques qu’elle a acquises dans son autre entreprise, qui existe à l’extérieur du domaine de la création. La transférabilité des compétences suggère une capacité d’adaptation associée à une capacité de réflexion critique sur le fonctionnement du système actuel.
Recommandations
Les créateurs développent des modèles de pensée et de comportement au fil du temps afin de réduire la complexité de l’exploitation d’une entreprise entrepreneuriale avec des modèles de marché mixtes et divers intervenants. Cependant, la viabilité générée par ces objectifs peut devenir inadaptée avec le temps. Un participant a ri de la façon dont la désinformation sur le droit d’auteur dans le domaine de la musique a amené d’autres artistes à quitter la salle au moment de la composition de l’œuvre. Le schéma du comportement a mis à rude épreuve les relations et était fondé sur des informations erronées qui avaient été intériorisées de façon routinière.
Une formation réussie exige que les structures ossifiées soient remises en question d’une manière qui permette à de nouvelles formes de s’implanter. La façon dont un participant reçoit subjectivement de l’information nouvelle joue un rôle essentiel à la fois dans sa capacité de réfléchir de façon critique sur les hypothèses qui sous-tendent le système à l’origine de l’information et dans sa volonté de s’engager dans une démarche collective de création de sens afin d’appliquer l’information à sa propre expérience vécue.
En se basant sur les variations pédagogiques offertes à deux cohortes d’entrepreneurs créatifs participant à un programme complet de formation en entrepreneuriat, il est possible de faire les recommandations suivantes.
- Le fait d’être intime avec le mécanisme de prestation réduit les obstacles à l’internalisation des nouvelles informations et à leur intégration dans des systèmes d’activités plus larges. C’est ce que l’on a constaté dans le cadre de cette expérience en incluant l’« experte juridique » à titre de participante à part entière dans certains aspects du programme. Les participants ont été en mesure de communiquer d’abord avec l’« experte » en tant qu’être humain, ce qui a créé une plus grande volonté de donner un sens à l’information juridique qui leur était offerte. Le rejet délibéré a défini la cohorte A d’une manière qui n’apparaissait pas chez la cohorte B, bien que le contenu principal et la source du contenu aient été inchangés.
- Il y a un désir de démêler le contenu des autres systèmes avec lesquels il se connecte. Cependant, en offrant des perspectives multiples sur des systèmes multiples et interpénétrants, on déclenche des processus herméneutiques qui provoquent un processus de création individuelle et collective de sens. Plus précisément, des systèmes apparemment contradictoires ou incompatibles peuvent être juxtaposés afin de créer une meilleure compréhension de ces systèmes séparément et dans leurs relations entre eux et avec la collectivité apprenante.
Annexe A : Compréhension du droit d’auteur
- Qu’est-ce que le droit d’auteur?
- Un système de droit pour protéger les marques, les idées et les inventions.
- Un système de droit qui accorde le droit exclusif de reproduire et de publier des œuvres originales.
- Un système de droit qui prévoit le droit exclusif de copier les œuvres originales d’autres personnes.
- Pouvez-vous protéger une idée par le droit d’auteur?
- Non – Comment créerions-nous quelque chose de nouveau si une seule personne pouvait monopoliser les idées?!
- Oui – c’est tout l’objet de la loi sur le droit d’auteur.
- Non – Les idées sont protégées par le droit des brevets.
- Le droit d’auteur s’applique-t-il à Internet?
- Non – Si je mets une copie de ma photographie originale sur Internet, le droit d’auteur ne s’applique plus, n’importe qui peut la prendre.
- Non – Internet est du domaine public.
- Oui – Internet ne modifie pas de façon inhérente mes droits en vertu de la loi sur le droit d’auteur.
- Quelqu’un peint une moustache sur la Joconde. En quoi cette action est-elle contraire à la loi?
- Elle porte atteinte aux droits moraux du peintre.
- Elle viole les droits d’auteur du peintre.
- Elle viole les droits de marque du peintre.
- Le droit d’auteur doit-il être enregistré pour exister?
- Oui – vous devez enregistrer votre droit d’auteur auprès de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada pour bénéficier de la protection de la loi sur le droit d’auteur.
- Non – Le droit d’auteur s’applique automatiquement à une œuvre fixe et originale.
- Oui – vous devez enregistrer les droits d’auteur dans toutes les juridictions où vous prévoyez exposer l’œuvre.
Fréquence de réponse correcte
17 terminé sur 19 participants
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Annexe B : Questions et réponses des répondants
- Dans quelle mesure avez-vous confiance dans votre compréhension du régime et des règles de propriété intellectuelle au Canada? Pourquoi ou pourquoi pas?
- Pas trop confiant parce que je ne suis pas avocat.
- Je n’ai pas confiance en ma compréhension du droit de la PI au Canada. C’est en grande partie parce que je n’ai pas eu à m’en préoccuper directement dans mon travail ici, jusqu’à présent.
- Plutôt confiant. J’ai l’impression de comprendre ce qui doit être breveté, mais j’hésite à partager les ressources parce que je crains le vol.
- Je ne suis pas du tout confiant.
- Je n’en ai aucune idée. Parce que je pense que je n’avais pas besoin de savoir et que c’est un sujet trop aride. Désolé : (
- Pas assez confiant parce que j’ai besoin de plus renseignements juridiques.
- Comme ci, comme ça.
- Je suis plus confiant maintenant que je connais les particularités du droit intellectuel. Sais qu’il existe des moyens spécifiques de me protéger, ce qui m’aidera à aller de l’avant avec le peu que je sais actuellement.
- J’ai travaillé comme rédacteur photo pour une société de photographie et je connais donc bien le droit d’auteur tel qu’il s’applique à cette industrie. L’un de mes principaux enseignements en matière de propriété intellectuelle est qu’il y a beaucoup de zones grises où il faut naviguer. Et la plupart des photographes avec qui j’ai travaillé, y compris moi-même, trouvent cela déroutant.
- Plutôt confiant. Je connais les règles et les dispositions dans leur ensemble, mais en tant que créateur, je n’ai pas confiance en mes droits lorsque je conclus un contrat, etc.
- Assez confiant d’après ce que j’ai appris pendant mes études. Je ne comprends pas les « zones grises » lorsque plusieurs collaborateurs sont impliqués/espaces numériques/initiatives mondiales là où les limites sont floues.
- Je n’ai qu’une confiance relative dans les règles entourant ma profession (photographie), car je n’ai pas eu beaucoup d’interaction avec les questions de droit d’auteur.
- J’en ai une certaine compréhension, mais pas en profondeur. Aucune expérience préalable sauf en classe de musique.
- En fait, je ne suis pas versé dans ce domaine. Je n’ai jamais entendu parler du régime.
- Je ne sais pas ce qu’est la « propriété intellectuelle », mais j’ai très hâte d’apprendre. J’ai fait des recherches sur l’art des affaires depuis un certain temps et je n’ai pas encore rencontré ce terme.
- Plutôt confiant, mais j’aimerais en faire l’expérience de façon plus pratique, surtout dans les industries créatives.
- Pas du tout. On ne me les a jamais expliquées auparavant. Merci.
- Dans quelle mesure pensez-vous que le régime et les règles actuels soutiennent bien les créateurs?
- Pas bien, parce que l’auteur du « contrat » écrit toujours en sa faveur.
- Aucune réponse.
- Pas très bien. Beaucoup de travail est donné gratuitement, beaucoup de dessins sont copiés. Tout ce qui marche est copié.
- Je ne suis pas au courant de ce qui est actuellement disponible. On pourrait faire davantage pour rendre l’information accessible.
- OMD! Je ne sais pas, je ne sais pas. J’aimerais le savoir.
- Pas très bien. De nombreuses grandes entreprises volent encore les styles de travail des artistes. Beaucoup d’artistes émergents ne connaissent pas parfaitement la législation en matière de droits d’auteur.
- Probablement pas si bien que ça étant donné que nous sommes passés d’un monde analogique au monde numérique.
- Le régime actuel nous aidera à mettre en place des lignes directrices claires pour mieux protéger nos idées et nos œuvres originales. La plus grande partie de notre travail consiste à collaborer et à chercher des inspirations pour nos efforts. Il est important que nous connaissions les limites qui ont été tracées auparavant en matière de protection.
- La plupart des artistes ne comprennent pas le droit d’auteur. Il y a très peu de renseignements et de ressources à la disposition des artistes pour apprendre à se protéger. J’ai appris le droit d’auteur à la dure par l’expérience et les conséquences négatives. Je sais qu’une grande partie des droits d’auteur et de la propriété intellectuelle se trouve dans une zone grise et doit être évaluée au cas par cas.
- Je ne suis pas sûr. Il semble que les entreprises et les institutions ont des ressources pour comprendre leurs droits (avocats, etc.), mais les créateurs n’ont pas les ressources pour être autant informés. La relation de pouvoir obscurcit aussi les choses. Le régime peut être suffisant ou non. C’est la pratique qui peut être inégale.
- Je crois que le droit d’auteur est inhérent au Canada et que les résidents sont protégés par défaut sans enregistrement officiel, mais cela devient moins favorable lorsque l’on examine la façon dont les œuvres artistiques sont (ou dans la plupart des cas ne sont pas) créditées si elles sont commandées par un organisme – les gens qui paient en prennent le crédit.
- Je pense (pour autant que je sache) que le régime actuel s’est amélioré et offre un assez bon soutien aux créateurs.
- Je pense qu’ils sont en train d’établir les règles, mais dans certains cas, ne le sont pas non plus. Il y a beaucoup de fonds pour les arts et les artistes, mais beaucoup de stipulations empêchent l’artiste d’y avoir accès.
- Aucune réponse.
- Aucune réponse.
- Pas très bien. Souvent, les créateurs n’ont pas le temps de réfléchir à cet aspect de leur pratique. Des formations dans le langage des créateurs, adaptées à leur parcours, sont nécessaires.
- Ça s’améliore.
- Quels changements aimeriez-vous voir dans le régime et les règles de propriété intellectuelle au Canada?
- Il devrait s’agir de créer de la valeur pour l’artiste avant l’industrie.
- Pas de réponse.
- Droit d’auteur basé sur la vidéo similaire à celui de la musique. Si la vidéo suit le même schéma ou le même thème, je pense qu’il devrait y avoir une protection similaire à celle des mélodies.
- Aucun commentaire.
- Désolé!
- Les faire publier en termes simples.
- Droits de propriété intellectuelle numérique.
- Je pense que si je pouvais avoir un entretien en particulier avec un professionnel qui peut me donner une séance verbale sur la façon dont le droit intellectuel affectera personnellement mon entreprise, cela pourrait être une aide pour une personne comme moi.
- Davantage de sensibilisation et d’information sur la propriété intellectuelle.
- Je ne suis pas sûr... Accès en langage clair et simple? Quelqu’un disponible pour aider les créateurs à répondre à leurs questions sur la PI.
- Des lignes directrices plus précises plutôt que des droits d’auteur vaguement définis – protection au-delà des frontières et dans les espaces numériques.
- Peut-être davantage de protection ou de sensibilisation lorsqu’il s’agit de la façon dont le régime couvre la propriété intellectuelle dans le domaine numérique/Web.
- J’aimerais que des subventions soient accordées aux artistes indo-caribéens pour documenter l’art fondé sur la culture et fournir plus de financement aux artistes sans trop d’obstacles (sur le plan contractuel), parfois les idées artistiques novatrices ne cadrent pas bien avec les critères actuels du processus, mais constituent des possibilités viables.
- Aucune réponse.
- Aucune réponse.
- Langage plus accessible. Plus de partage des connaissances, plus de ressources et un soutien adapté (c.-à-d. renforcement des capacités au sein des collectivités).
- Plus d’informations facilement disponibles.