Ce que nous avons entendu – Résumé des réponses à l’Avis d’intention de restreindre le marketing et la publicité des opioïdes

Introduction

Les Canadiens sont au deuxième rang mondial des plus grands consommateurs par habitant d'opioïdes d'ordonnance. De plus, les taux de prescription d'opioïdes ainsi que de séjours à l'hôpital et de décès attribuables à la consommation de ces produits ont augmenté rapidement. Les ordonnances remplies par des professionnels de la santé sont une source courante d'opioïdes au Canada. Les professionnels de la santé reçoivent de l'information de diverses sources, y compris de l'industrie pharmaceutique, dans le but d'orienter leurs décisions en matière de prescriptions ainsi que les conseils qu'ils donnent aux patients.

Reconnaissant l'influence du marketing et de la publicité de l'industrie sur les pratiques en matière de prescription, Santé Canada a publié un Avis d'intention (Avis) pour restreindre le marketing et la publicité sur les opioïdes auprès des professionnels de la santé. L'Avis a fait l'objet de commentaires pendant une période de consultation de 30 jours, du 19 juin 2018 au 18 juillet 2018.

Le présent rapport « Ce que nous avons entendu » contient un résumé des commentaires sur l'Avis de Santé Canada, reflétant les opinions de personnes et de groupes qui ont choisi d'y répondre. À ce titre, le présent résumé ne peut pas être rigoureusement généralisé pour englober la population canadienne dans son ensemble et ne reflète pas nécessairement la position du gouvernement du Canada.

Qui a fourni des commentaires à Santé Canada?

Tous les intervenants concernés avaient la possibilité d'émettre des commentaires sur l'Avis. Au total, 42 réponses ont été reçues, y compris de professionnels de la santé, de patients, d'universitaires et de l'industrie pharmaceutique. La ventilation des réponses par groupe d'intervenants est illustrée à la figure 1.

Figure 1 : Nombre de réponses à l'Avis d'intention de restreindre le marketing et la publicité sur les opioïdes par groupe d'intervenants
Type de répondant Total
Professionnels de la santé et associations de professionnels de la santé 21
Patients et organisations de patients 11
Intervenants et associations sectoriels 6
Représentants de gouvernements provinciaux 3
Universitaires 1Note de bas de page *
Nombre total 42
Note de bas de page 1

Remarque : Cette réponse a été soumise au nom de plusieurs individus.

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Qu'ont dit les intervenants?

Résumés des principaux thèmes

Les répondants se sont exprimés sur leurs expériences du marketing et de la publicité portant sur les médicaments, sur le système actuellement en place pour examiner le matériel de marketing et de publicité, ainsi que sur les incidences du matériel de marketing de médicaments sur les pratiques de prescription.

Les répondants étaient favorables aux mesures du gouvernement fédéral pour s'attaquer à la crise des opioïdes et ont proposé diverses mesures qui pourraient permettre de réduire les méfaits liés aux opioïdes. En ce qui a trait plus précisément au marketing et à la publicité sur les opioïdes, les répondants étaient généralement favorables aux restrictions et ont souligné l'importance d'une information éducative non biaisée afin de favoriser des pratiques de prescription appropriées. De nombreux répondants ont relevé que les mesures prises pour restreindre la publicité et le marketing sur les opioïdes ne devraient pas par mégarde limiter la disponibilité de renseignements fondés sur des données probantes.

De nombreux répondants ont également souligné l'importance d'assurer que les personnes souffrant de douleurs aiguës ou chroniques, et sur celles atteintes de troubles liés à l'utilisation d'opioïdes, continueront d'avoir accès aux traitements dont elles ont besoin.

Les répondants ont offert des suggestions sur un éventail de mesures, telles que des exigences en matière de transparence et de divulgation obligatoire, afin d'assurer une meilleure surveillance réglementaire du marketing et de la publicité sur les opioïdes. En outre, certains répondants ont souligné qu'étant donné la complexité des facteurs contribuant à la crise des opioïdes, les mesures requises vont au-delà de la question du marketing et de la publicité sur les opioïdes d'ordonnance

Résumé des commentaires

Professionnels de la santé et associations de professionnels de la santé

Les répondants ont souligné que des renseignements et des activités éducatives fiables et factuels sont essentiels pour appuyer les professionnels de la santé dans leurs rôles en tant que prestataires de soins de bonne qualité aux patients. Les associations de professionnels de la santé appuient la prise d'autres mesures, quoique certains répondants aient exprimé l'inquiétude que le fait de restreindre le marketing et la publicité sur les opioïdes puisse limiter l'accès aux opioïdes pour le traitement de la douleur et des troubles liés à l'utilisation d'opioïdes. En résumé :

Marketing et publicité
  • En s'inspirant de leur expérience personnelle, certains répondants ont décrit les informations et les activités commanditées offertes par l'industrie et destinées aux professionnels de la santé comme biaisées et renfermant du contenu promotionnel. D'autres répondants ont indiqué que l'information et les possibilités éducatives offertes par l'industrie contenaient de précieux renseignements sur la gestion efficace de la douleur.
  • Les publicités qui omettent ou banalisent les renseignements sur les risques ou effets indésirables d'un médicament sont potentiellement nuisibles.
Information éducative non biaisée
  • Les professionnels de la santé ont un rôle à jouer pour réduire au minimum le biais introduit par l'industrie dans la formation médicale continue en observant les normes, lignes directrices et codes d'éthique existants pour ce qui touche les relations qu'ils entretiennent avec l'industrie pharmaceutique.
  • Les programmes éducatifs et la formation sont importants et il faut distinguer entre les activités promotionnelles et celles qui appuient des pratiques de prescription sécuritaires et appropriées.
  • Les traitements des troublés liés à l'utilisation d'opioïdes constituent un besoin pressant, et les restrictions sur la publicité et le marketing ne devraient donc pas restreindre l'accès des professionnels de la santé à des informations éducatives et à des formations en la matière, freiner le développement de nouveaux traitements ou empêcher l'industrie pharmaceutique de sensibiliser le public à ses produits.
  • Certains répondants ont indiqué que les matériels et programmes éducatifs élaborés ou offerts par l'industrie devraient être examinés par un tiers pour assurer qu'ils sont factuels et fiables, alors que d'autres ont signifié que les matériels éducatifs ne devraient pas être élaborés par des fabricants pharmaceutiques. Les matériels devraient communiquer à la fois les avantages et les risques, et inclure des détails pouvant aider à la prise de décisions, tels que les traitements disponibles sans l'apport d'opioïdes, les lignes directrices sur l'utilisation, l'efficacité du traitement et sa rentabilité.
  • Il est nécessaire de s'attaquer aux problèmes du financement de la formation médicale continue sur la gestion de la douleur au moyen d'options pharmaceutiques et non pharmaceutiques.
Accès aux traitements
  • Restreindre le marketing d'opioïdes pourrait avoir une incidence négative sur les patients souffrant de douleurs s'ils n'ont pas accès aux traitements les plus adéquats pour la gestion de la douleur, en raison de moins de renseignements partagés avec les professionnels de la santé sur les risques liés aux interactions médicamenteuses, aux nouvelles technologies et aux nouveaux médicaments.
Éventail de mesures
  • Les opioïdes illégaux sont un important facteur contribuant à la crise des opioïdes. Les efforts visant à restreindre le marketing et la publicité portant sur les opioïdes d'ordonnance pourraient avoir une efficacité limitée pour régler la crise actuelle.
  • Il est nécessaire de restreindre les activités promotionnelles liées aux opioïdes, ainsi qu'à tous les médicaments d'ordonnance et sans ordonnance. Il devrait y avoir des sanctions strictes en cas de non-conformité, y compris le cas échéant des accusations criminelles.
  • Les restrictions devraient s'appliquer à toutes les formes de communication de l'industrie, notamment les communications verbales, écrites, électroniques et sociomédiatiques, ainsi que les visites en personne de représentants commerciaux auprès des professionnels de la santé.
  • Les restrictions pourraient s'étendre aux groupes de défense qui reçoivent un financement de l'industrie.
  • Le système volontaire actuel de préautorisation pour la publicité sur les médicaments mis en place par des organismes tels que le Conseil consultatif de publicité pharmaceutique doit être plus structuré et systématique et devrait définir des critères de publicité propres aux opioïdes.
  • Il y a un appui pour accroître la transparence, la divulgation et la déclaration obligatoire à l'égard des activités de marketing, du financement et des incitatifs des sociétés pharmaceutiques visant les professionnels de la santé, les associations et les groupes de patients.
  • Il devrait être interdit aux médecins de toucher une rémunération de l'industrie, notamment pour offrir des conférences éducatives à d'autres professionnels de la santé. Les professionnels de la santé devraient être rémunérés pour le temps passé comme conférencier, mais le montant de la rémunération devrait être limité.
  • On pourrait permettre à l'industrie de financer des programmes éducatifs si l'activité a été homologuée par un organisme de réglementation. De la même façon, tout financement de l'industrie visant des organisations devrait servir à des activités d'apprentissage non biaisées.
  • De nouveaux produits opioïdes pourraient être approuvés et assortis de conditions qui exigeraient, par exemple, des études additionnelles pour vérifier les bienfaits cliniques et cerner les lacunes dans les connaissances.

Patients et organisations de patients

La majorité des organisations de patients ont exprimé des inquiétudes quant à l'intention de restreindre le marketing et la publicité sur les opioïdes, en raison des conséquences et des incidences involontaires sur les patients. Des membres du grand public, y compris des personnes souffrant de douleurs, ont communiqué un éventail de commentaires qui portaient principalement sur l'importance pour les individus d'avoir accès aux opioïdes pour gérer la douleur. En résumé :

Marketing et publicité
  • La publicité et le marketing sur les opioïdes font partie d'un problème plus large et plus complexe.
  • Les restrictions sur des activités telles que les publicités dans les revues n'auraient probablement pas d'incidence sur les pratiques de prescription.
Information éducative non biaisée
  • Les programmes et matériels éducatifs à l'intention des prescripteurs en vue d'appuyer des pratiques de prescription appropriées, par la formation sur la gestion de la douleur, le recours à des thérapies non conventionnelles et la prise en compte de nouvelles données probantes en évolution, jouent un rôle important.
  • L'industrie pharmaceutique a un rôle important à jouer dans le soutien à la formation médicale continue et dans la mise en place d'une surveillance suffisante.
  • Les activités éducatives commanditées par l'industrie offrent de précieux renseignements aux cliniciens en exercice.
Accès aux traitements
  • Des restrictions sur le marketing pourraient entraîner des réductions dans le nombre de prescriptions ou dans les doses, créer des problèmes d'accès pour ceux qui souffrent de douleurs et stigmatiser encore davantage ceux qui souffrent de douleurs et ceux qui prescrivent des opioïdes pour maîtriser celles-ci.
  • Il peut être difficile de se procurer des opioïdes d'ordonnance pour gérer la douleur. Réduire l'accès aux opioïdes d'ordonnance limiterait les options des patients pour gérer la douleur, aurait une incidence négative sur la qualité de vie de ces derniers et pourrait mener certaines personnes à se procurer des drogues illégales.
Éventail de mesures
  • Cette initiative devrait restreindre le marketing et la publicité sur tous les médicaments, et pas seulement sur les opioïdes. Bien que la crise des opioïdes soit une question complexe et multidimensionnelle, le principal facteur réside dans les opioïdes illégaux plutôt que dans le marketing des opioïdes d'ordonnance.
  • Il y a un soutien pour la prise de mesures immédiates par le gouvernement fédéral en matière de marketing sur les médicaments. Il importe d'entendre les personnes immédiatement touchées par l'utilisation des opioïdes en vue d'orienter l'élaboration de restrictions éventuelles.

Intervenants et associations sectoriels

Les répondants de l'industrie pharmaceutique ont exprimé des inquiétudes quant aux restrictions qui pourraient limiter leur capacité d'offrir des matériels aux professionnels de la santé visant à appuyer une utilisation sécuritaire des produits, et ont insisté sur l'importance de laisser l'industrie continuer à offrir une telle information. D'autres répondants de l'industrie ont souligné les avantages éventuels d'une déclaration obligatoire régulière des activités de marketing et de publicité sur les opioïdes. En résumé :

Marketing et publicité
  • L'industrie pharmaceutique a soulevé des inquiétudes quant à la prémisse de la proposition, laissant entendre qu'il est simpliste de dépeindre les interactions entre l'industrie et les professionnels de la santé comme du marketing, indiquant que la déclaration obligatoire d'activités de publicité serait superflue, et soulignant que de nombreuses activités relevées ne devraient pas être considérées comme de la publicité.
Information éducative non biaisée
  • Il est important de pouvoir diffuser des informations non promotionnelles auprès des professionnels de la santé relativement à la prescription appropriée et à l'utilisation sécuritaire de médicaments d'ordonnance.
  • L'accès des professionnels de la santé aux programmes et matériels éducatifs est fondamental. Les programmes de formation continue en matière de santé fondés sur des données probantes et accrédités de façon indépendante sont essentiels à l'amélioration des soins cliniques et de l'état de santé des patients.
Accès aux traitements
  • Toute restriction devrait prendre en compte les incidences éventuelles et les conséquences non voulues sur les patients qui souffrent de douleurs chroniques et sur ceux atteints par des troubles liés à l'utilisation d'opioïdes. En particulier, les produits ou l'information visant à réduire ou à prévenir les risques ou les préjudices associés à la consommation problématique d'opioïdes méritent une attention particulière lors de l'instauration de restrictions. Certains répondants croient que des mesures récentes exigeant des plans de gestion des risques visant les opioïdes sont utiles, alors que d'autres ont contesté la raison d'être de règlements.
Éventail de mesures
  • D'autres répondants ont souligné que la prise en compte de la crise des opioïdes permet de faire des gains économiques et sociaux, et que des mesures de transparence telles que la déclaration obligatoire du marketing et de la publicité sur les opioïdes permettraient aux investisseurs de responsabiliser les entreprises.

Représentants de gouvernements provinciaux

Les répondants dans ce groupe ont offert divers commentaires sur les restrictions éventuelles. En résumé :

Information éducative non biaisée
  • Les décisions de prescrire des opioïdes ne sont pas influencées uniquement par le marketing de l'industrie.
  • Il importe que les matériels de marketing fassent la part égale aux préjudices et aux bienfaits éventuels des opioïdes.
  • Toute restriction devrait quand même permettre d'offrir de l'information, de l'enseignement et de la formation aux professionnels de la santé relativement à la consommation appropriée d'opioïdes, ainsi que de distribuer des résultats de recherches cliniques et des matériels éducatifs. Cela peut encourager les professionnels de la santé à prendre des décisions fondées sur des données probantes quant au traitement à offrir, lequel peut comprendre des médicaments avec et sans opioïdes.
Accès aux traitements
  • Les restrictions ne doivent pas avoir d'incidence sur l'accès des personnes qui souhaitent gérer la douleur.
Éventail de mesures
  • Des mesures pour améliorer les pratiques de prescription appropriées aideront à contrer la crise des opioïdes.
  • Une transparence accrue autour du marketing et de la publicité sur les opioïdes est importante. Les organismes de réglementation devraient être mobilisés pour exécuter des politiques appropriées dans le but de favoriser la conformité.

Universitaires

L'unique soumission représentait 11 universitaires de divers établissements universitaires au Canada, aux États-Unis et en Australie. Cette soumission était fortement en faveur de restreindre le marketing et la publicité sur les produits opioïdes, tout en insistant sur le fait que les effets de la promotion des médicaments en général ne se limitent pas aux opioïdes. En résumé :

Marketing et publicités
  • La crise des opioïdes actuelle peut en partie être attribuée aux pratiques de marketing de l'industrie pharmaceutique, en raison des ressources considérables de cette dernière en matière de promotion, et à la qualité souvent mauvaise de l'information communiquée dans les matériels promotionnels.
  • Les médecins sont exposés à de multiples méthodes de promotion des médicaments, et on souligne que les preuves laissent entendre que le recours à l'information provenant de sociétés pharmaceutiques est associé à des pratiques de prescription moins appropriées.
Éventail de mesures
  • Une réglementation améliorée de la promotion des médicaments est requise. De plus, le Conseil consultatif de publicité pharmaceutique, qui examine et préautorise la publicité sur les médicaments, n'est pas suffisamment dégagé de l'influence de l'industrie pharmaceutique, et un nouvel organisme de réglementation indépendant devrait être établi.
  • Plus particulièrement par rapport aux opioïdes, il devrait y avoir une surveillance accrue par Santé Canada de la promotion, des restrictions sur les publicités, ainsi que des exigences pour obliger les entreprises à élaborer des plans de soutien aux pratiques de prescription appropriées. Les matériels destinés aux professionnels de la santé devraient inclure des conseils sur la déprescription de produits.

Mot de la fin

Nous remercions tous les répondants de leurs commentaires sur cette proposition.

Les commentaires reçus éclaireront les prochaines étapes qu'entreprendra le gouvernement fédéral, notamment l'élaboration de politiques et la mise en place de restrictions éventuelles. Nous poursuivrons nos entretiens avec les intervenants et les experts en la matière tout au long de l'automne 2018.

Pour en savoir davantage

Consultez la page sur le marketing et la publicité visant les opioïdes pour des mises à jour sur nos travaux.

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