Document de conseils sur le benzène dans l'air intérieur résidentiel

2013
Cat : H144-14/1-2-2013F-PDF
ISBN : 978-0-660-21682-9

Toile de fond

Le benzène est un composé organique volatil (COV) caractérisé par une tension de vapeur relativement élevée, une solubilité dans l'eau allant de modérée à élevée et un faible coefficient de partage octanol-eau, qui est essentiellement libéré dans l'air. Santé Canada l'a désigné comme un contaminant de l'air intérieur d'intérêt prioritaire à la suite de consultations effectuées auprès des ministères de la santé provinciaux et territoriaux ainsi que des partenaires de l'industrie et des organismes de l'environnement.

Exposition

L'exposition au benzène de la population canadienne en général est attribuée avant tout à l'inhalation de l'air intérieur, en raison des concentrations plus élevées habituellement mesurées à l'intérieur et du nombre beaucoup plus considérable d'heures passées à l'intérieur par la plupart des gens. Les autres voies d'exposition (l'ingestion de même que l'absorption cutanée) contribuent de façon minimale à l'absorption totale de benzène (Santé Canada 2009). Dans les études menées par Santé Canada, les concentrations médianes de benzène mesurées dans les résidences canadiennes varient de 0,5 à 2,2 µg/m3 (Santé Canada, 2012; Santé Canada, 2010a; Santé Canada, 2010b). Les concentrations intérieures sont environ trois fois plus élevées dans les résidences dotées d'un garage attenant, par comparaison avec les concentrations mesurées dans les résidences sans garage ou dont le garage n'est pas attenant. Les concentrations extérieures médianes sont habituellement inférieures à 1 µg/m3. Le rapport des concentrations intérieures/concentrations extérieures varie de 1,5 à 2,4 (médianes) et demeurait au dessus de 1 au 25e centile, ce qui porte à croire que les sources intérieures contribuent fortement à l'exposition dans la majorité des résidences.

Plus de la moitié des maisons unifamiliales au Canada possède un garage attenant. Les garages attenants, dans le cas des résidences qui en comportent, constituent la principale source intérieure de benzène dans les résidences, puisque les émissions de gaz d'échappement ainsi que les gaz d'évaporation produits par le matériel à essence et les solvants entreposés dans les garages peuvent s'infiltrer dans les résidences (Héroux et al. 2010; Héroux et al. 2008; Jia, Batterman et Godwin 2008; Batterman, Jia et Hatzivasilis 2007). Le tabagisme est aussi un élément contribuant de façon considérable aux concentrations de benzène dans l'air intérieur (Héroux et al. 2010; Héroux et al. 2008).

Organisation : Santé Canada
Date publiée : 2013

Sujets connexes

Les sources connues ne peuvent toutefois expliquer la totalité des concentrations de benzène mesurées durant les études et il peut y avoir d'autres sources qui ne sont pas encore répertoriées dans les maisons. Certaines résidences de non-fumeurs sans garage attenant peuvent contenir des concentrations de benzène dans l'air intérieur semblables à celles qui ont été mesurées dans les résidences dotées d'un garage attenant. Bien que du benzène ait été décelé dans des matériaux de construction, les taux d'émanations mesurés étaient, à quelques exceptions près (les adhésifs et les produits de calfeutrage, par exemple), généralement faibles (< 4 µg m-2 h-1) (Choi et al. 2010; Won et al. 2005; Yu et Crump 1998; US EPA 1992; Wallace, Pellizzari et Leaderer 1987). Le nombre de produits d'entretien domestique et de produits de consommation pour lesquels la teneur en benzène a été déclarée est limité (Kwon et al. 2008; Kwon et al. 2007; Sack et al. 1992; US EPA 1992; Wallace, Pellizzari et Leaderer 1987) et, dans la majorité des études effectuées, le benzène n'a pas été associé à des produits ou à des activités d'entretien domestique (Missia et al. 2010; Héroux et al. 2008; Jia, Batterman et Godwin 2008; Jia, D'Souza et Batterman 2008; Park et Ikeda 2006; Brown 2002; Ilgen et al. 2001; Kim, Harrad et Harrison 2001). Il serait donc justifié d'adopter une approche plus systématique afin de repérer les autres sources de benzène dans l'air intérieur.

L'infiltration de vapeurs provenant d'eaux souterraines ou de sols contaminés lorsqu'ils contiennent du benzène et la volatilisation du benzène, s'il est présent dans l'eau du bain, de la douche ou dans l'eau s'écoulant des robinets, sont d'autres sources possibles d'exposition au benzène à l'intérieur des résidences. La recommandation de Santé Canada pour la qualité de l'eau potable vise à tenir compte de toutes les voies d'exposition (ingestion, inhalation, absorption cutanée). Par conséquent, si l'alimentation en eau de la résidence est conforme à la recommandation touchant la teneur en benzène de l'eau potable, le risque d'une telle exposition devrait être négligeable.

Effets sur la santé

Chez l'humain, une exposition de quelques minutes au benzène a été associée à des étourdissements, des tremblements, des nausées, des vomissements, des maux de tête et de la somnolence à des concentrations élevées comprises entre 700 et 3 000 ppm (2 240 et 9 600 mg/m3). Les effets relevés à la suite d'une exposition subchronique ou chronique à des niveaux aussi bas que < 1 ppm (< 3,2 mg/m3) comprennent une détérioration progressive des fonctions hématopoïétiques, notamment une altération de la moelle osseuse, des modifications des cellules sanguines en circulation et une réponse immunitaire altérée (ATSDR 2007).

Le benzène est classé parmi les cancérogènes (US EPA 1998; Environnement Canada et Santé et Bien-être social Canada 1993; CIRC 1987). Le benzène affecte le système sanguiformateur (ou système hématopoïétique) par suite d'une exposition professionnelle à de faibles concentrations < 1 ppm (3,2 mg/m3), et aucun indice ne semble indiquer l'existence d'un seuil. Il a été démontré que l'exposition prolongée au benzène cause la leucémie, un cancer du sang ou de la moelle osseuse, chez les personnes exposées dans leur milieu de travail, de même que la leucémie et des lymphomes chez les rats et les souris de laboratoire (Santé Canada 2009; OEHHA 2001; Hayes et al. 1997; Rinsky, Young et Smith 1981). Le mode d'action cancérogène du benzène n'est pas très bien compris; toutefois, une série d'événements biologiques importants allant du métabolisme du benzène au développement d'une leucémie ont été proposés (Meek et Klaunig 2010).

Santé Canada et d'autres organisations ont caractérisé le risque de cancer associé à l'exposition au benzène présent dans l'air (Santé Canada 1996; OEHHA 2001; USEPA 2000). Toutes ces valeurs peuvent se traduire en un risque accru de leucémie au cours d'une vie et ont comme point de départ les études épidémiologiques qui ont porté sur des travailleurs exposés au benzène dans leur milieu de travail. Le calcul de toute valeur de référence exige un examen minutieux de nombreux facteurs et l'adoption de plusieurs hypothèses. Les différences de ces données clés sont conformes à la plage de valeurs toxicologiques de référence qui ont été publiées pour le benzène. Toutefois, compte tenu des incertitudes liées à l'extrapolation des risques associés à des expositions professionnelles à des concentrations inférieures pertinentes pour l'environnement, la forme de la courbe dose-réponse et le mode d'action de la leucémie associée au benzène, les concentrations de référence se situent à l'intérieur d'une marge similaire d'incertitude.

D'après les analyses des risques de cancer effectuées par Santé Canada (1996), la United States Environmental Protection Agency (USEPA 2000) et le Office of Environmental Health Hazard Assessment de la California Environmental Protection Agency (OEHHA 2001), les concentrations associées à un risque de leucémie de 1 x 10-6 (un sur un million) vont de 0,06 µg/m3 (risque unitaire le plus justifiable défini par l'OEHHA [2001]) à 0,45 µg/m3 (limite supérieure de la plage de concentrations présentée par l'USEPA [2000]). L'Organisation mondiale de la santé (OMS, 2010) et la Commission européenne (2005) ont formulé des avis sur les concentrations de benzène à l'intérieur. Ces deux organisations suggèrent que les concentrations de benzène à l'intérieur soient réduites au minimum dans la mesure du possible, mais aucune n'a établi de valeur-guide numérique pour les concentrations de benzène à l'intérieur.

Le risque réel de cancer attribuable au benzène dans la plupart des résidences canadiennes, même s'il n'est pas toujours négligeable, est très faible. Les concentrations dans l'environnement sont inférieures d'au moins trois ordres de grandeur (dans une plage exprimée en µg/m3) aux concentrations de l'exposition en milieu de travail qui ont été mesurées au cours des études clés (dans une plage exprimée en mg/m3), et des hypothèses conservatrices ont été utilisées pour l'extrapolation des risques qui se fonde sur des expositions importantes. L'incertitude associée à l'estimation du risque de cancer associé aux concentrations présentes dans les milieux peut toutefois être moindre lorsque le mode d'action entraînant la toxicité chez l'humain est clairement établi et mis en application pour estimer plus précisément la relation dose-réponse au cours de faibles expositions.

Conseils

En se fondant sur les estimations des risques cancérogènes du benzène, qui font état de la possibilité d'un risque faible, mais non négligeable, associé aux niveaux d'exposition à l'intérieur, Santé Canada a adopté un approche qualitative et recommande de prendre des mesures afin de réduire autant que possible l'exposition au benzène dans l'air intérieur. Des mesures visant à restreindre les sources d'exposition intérieures connues peuvent réduire les concentrations de benzène de façon à ce que le risque pour les occupants des résidences soit très faible. À mesure que de nouvelles sources de benzène seront connues et que des mesures visant à restreindre ces sources seront développées, Santé Canada ajoutera des recommandations afin de réduire les niveaux de benzène à ses communications avec les professionnels en bâtiments et en santé de même qu'avec le public.

On ne peut caractériser toutes les sources intérieures de benzène dans les résidences canadiennes, mais les mesures visant les principaux prédicteurs connus devraient vraisemblablement avoir une influence considérable sur les concentrations mesurées dans l'air intérieur. Les méthodes de réduction de l'exposition devraient être orientées vers les principales sources de benzène à l'intérieur des résidences, sur lesquelles les propriétaires peuvent agir, notamment les garages attenants et l'usage de tabac à l'intérieur. Les concentrations de benzène dans l'air intérieur peuvent être réduites au moyen des mesures suivantes :

On peut considérer, lorsque cela est possible, retirer des garages attenants les solvants et tous les équipements, les outils ou les moteurs fonctionnant à essence, puisque la plupart des petits moteurs ne sont pas équipés d'un dispositif de lutte contre les émanations générées par les gaz d'évaporation.

Bien que certaines données (SCHL 2004; Ilgen et al. 2001) appuient la réduction des concentrations de benzène dans l'air intérieur provenant des garages attenants après la mise en application de ces méthodes de réduction de l'exposition, d'autres recherches sont nécessaires afin de déterminer quelles sont les mesures d'atténuation les plus réalisables sur le plan technique et les plus rentables en vue de limiter la migration du benzène des garages attenants vers l'intérieur des résidences. De même, des recherches doivent porter sur les variables prédictives des concentrations élevées de benzène dans les résidences dotées d'un garage non-attenant ou sans garage.

Références

Détails de la page

2015-12-24