Objectif pour la qualité de l’eau potable au Canada substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées

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Publiée : 2024-08-09

Renseignements sur les objectifs pour l'eau potable

Le présent document sur l'objectif a été préparé en collaboration avec le Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable.

L'élaboration d'une recommandation aux fins des Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada suit un processus scientifique exhaustif qui s'échelonne sur de nombreuses années. À de rares occasions, de nouveaux renseignements sur un contaminant soulèvent des préoccupations qui doivent être traitées plus rapidement que ne le permet le processus d'élaboration de recommandations. Dans de tels cas, Santé Canada, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, peut établir un objectif afin de réduire l'exposition associée à l'eau potable pendant la révision ou l'élaboration d'une recommandation. C'est le cas avec les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS).

Les objectifs pour l'eau potable définissent la concentration sous laquelle il convient de restreindre la présence d'un contaminant dans l'eau potable, compte tenu des technologies de traitement et des méthodes d'analyse disponibles. Ils sont établis à la suite d'une recension des publications sur la recherche scientifique et des données réglementaires d'autres pays accessibles au moment de leur établissement. En outre, les objectifs pour l'eau potable font l'objet d'un examen à l'externe par des pairs afin de garantir l'intégrité scientifique.

L'objectif établi pour les PFAS dans l'eau potable représente une approche prudente à l'égard du groupe de produits chimiques. La valeur de l'objectif fixée à 30 ng/L (pour la somme des concentrations de 25 PFAS précises) vise à réduire l'exposition aux PFAS présentes dans l'eau potable. Lorsque des PFAS sont détectées dans l'eau potable, il convient alors d'examiner la gestion des risques pour la santé et de discuter du problème et des options de traitement (le cas échéant) avec les parties concernées, en tenant compte des particularités de chaque situation.

Table des matières

Valeur de l'objectif

Afin de réduire l'exposition par l'eau potable, un objectif de 30 ng/L est fixé pour la somme des concentrations de 25 substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS) détectées dans l'eau potable. Ces 25 PFAS sont les suivantes (leurs noms complets figurent à l'annexe A) :

Lorsqu'on calcule la somme des concentrations de PFAS pour la comparer à cet objectif une substance « non détectée » est considérée comme ayant une concentration de zéro. Il est recommandé de maintenir les concentrations de PFAS dans l'eau potable au niveau le plus bas qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre (principe ALARA).

Contexte

En 2018 et 2019, Santé Canada a établi des recommandations pour la qualité de l'eau potable concernant le sulfonate de perfluorooctane (PFOS) et l'acide perfluorooctanoïque (PFOA), ainsi que des valeurs préliminaires pour neuf autres PFAS, soit l'acide perfluorobutanoïque (PFBA), l'acide perfluoropentanoïque (PFPeA), l'acide perfluorohexanoïque (PFHxA), l'acide perfluoroheptanoïque (PFHpA), l'acide perfluorononanoïque (PFNA), le sulfonate de perfluorobutane (PFBS), le sulfonate de perfluorohexane (PFHxS), le sulfonate de fluorotélomère 6:2 (6:2 FTS) et le sulfonate de fluorotélomère 8:2 (8:2 FTS). Ces valeurs s'appliquent à l'eau destinée à la consommation humaine. Les noms complets de toutes les autres PFAS mentionnées dans le présent document figurent à l'annexe B.

Le 24 avril 2021, le gouvernement du Canada a publié un avis signalant son intention de réaliser des activités visant les PFAS en tant que classe de substances. Le 20 mai 2023, le gouvernement du Canada a publié l'Ébauche du rapport sur l'état des substances perfluoroalkyliques et polyfluoroalkyliques (PFAS), qui présente une évaluation qualitative des sources, du devenir, de la présence et des répercussions possibles des PFAS sur l'environnement et la santé humaine, dans l'objectif d'éclairer la prise de décisions concernant la classe des PFAS au Canada. À la lumière de cette évaluation, les recommandations et les valeurs préliminaires pour les PFAS dans l'eau potable font actuellement l'objet d'un examen, compte tenu des avancées scientifiques concernant les technologies de traitement et les méthodes d'analyse ainsi que l'évaluation des dangers et de l'exposition.

Le présent objectif, fondé sur la somme des concentrations de certaines PFAS spécifiques détectées dans l'eau potable au Canada, vise à réduire l'exposition potentielle aux PFAS par l'eau potable pendant la réévaluation des recommandations et des valeurs préliminaires. Cet objectif remplace les deux recommandations précédentes pour la qualité de l'eau potable et les neuf valeurs préliminaires établies pour différentes PFAS. Le présent document technique a été préparé en collaboration avec le Comité fédéral-provincial-territorial sur l'eau potable (CEP).

Considérations relatives à l'exposition

Les PFAS constituent une classe de milliers de substances qui, selon la définition de l'OCDE (2021), comprend tout produit chimique comportant au moins un groupe méthyle perfluoré (–CF3) ou un groupe méthylène perfluoré (–CF2–). Ces substances, à cause de leurs atomes de fluor et de carbone liés, forment des molécules très stables, qui sont essentiellement non réactives et qui persistent dans l'environnement. En raison de leurs propriétés, les PFAS sont utilisées dans un large éventail de procédés industriels et de produits de consommation, tels que les tensioactifs et les produits hydrofuges et oléofuges. Par exemple, on utilise les PFAS dans les mousses extinctrices, les textiles (y compris les tapis et les vêtements), les articles de cuisine antiadhésifs, les cosmétiques et les emballages alimentaires en papier. Au Canada, la fabrication, l'utilisation et l'importation de certaines des PFAS héritées du passé (c.-à-d. le PFOA, le PFOS et les acides perfluorocarboxyliques (PFCA) à longue chaîne, leurs sels et leurs précurseurs) sont interdites, à quelques exceptions près. Les PFAS entrent principalement au Canada dans des produits ou en tant que constituants d'articles manufacturés. Certaines PFAS peuvent être utilisées dans des procédés industriels, ce qui peut entraîner des rejets dans l'environnement par les installations industrielles. Les voies potentielles d'exposition des humains et de l'environnement aux PFAS comprennent les rejets de PFAS par les sites d'enfouissement de déchets solides municipaux, l'incinération dans des installations municipales, le compostage d'emballages alimentaires contenant des PFAS, les systèmes de traitement des eaux usées et l'épandage de biosolides sur les sols (Guerra et coll., 2014; Hamid et coll., 2018, Lazcano et coll., 2020; Liu et coll., 2021a; Gewurtz et coll., 2024). De nombreuses études ont démontré que les PFAS peuvent être transportées sur de grandes distances dans le sol, l'eau et l'air à partir du point d'entrée dans l'environnement. En raison de leur utilisation généralisée et de leur persistance dans l'environnement, on retrouve les PFAS dans le monde entier, dans la population humaine, les poissons, la faune et la flore et dans pratiquement tous les compartiments environnementaux, y compris dans des régions reculées.

La répartition des PFAS dans l'environnement dépend de leurs caractéristiques physico-chimiques particulières, y compris la longueur de leur chaîne, leur charge électrostatique, le type de groupe fonctionnel et le degré de fluoration (ITRC 2023a). Les acides perfluoroalkylés (PFAA) ioniques à chaîne courte ont tendance à être plus solubles dans l'eau et à être moins sujets à l'absorption sur les particules du sol que les PFAA à chaîne longue. Cela leur confère une plus grande mobilité dans l'environnement aquatique. On a constaté que trois PFAS (PFHxA, PFBS, HFPO-DA) étaient particulièrement mobiles dans l'eau (ECHA 2022b). Certaines PFAS, comme les PFAA, ont une tête hydrophile (attirée par l'eau) et une queue hydrophobe (repoussée par l'eau), ce qui leur confère des propriétés similaires à celles des tensioactifs et les amène à s'agréger aux interfaces (comme l'interface entre l'eau et l'air). Ces propriétés expliquent en partie l'utilisation des PFAS dans les mousses à formation de pellicule aqueuse (mousses AFFF), qui permettent de recouvrir d'une fine pellicule d'eau les sources de carburant (ITRC 2023a).

Au Canada, la contamination de l'environnement aquatique par les PFAS peut être due à des sources ponctuelles et diffuses. Les sources diffuses de contamination par les PFAS incluent le ruissellement de surface depuis les zones urbaines et les dépôts atmosphériques humides ou secs (Lalonde et Garron, 2022). Les sources ponctuelles les plus courantes de contamination par les PFAS sont associées à l'utilisation de mousses extinctrices contenant des PFAS. Ces mousses, y compris les mousses AFFF, sont utilisées au cours d'exercices de lutte contre les incendies et pour combattre les incendies de carburant (p. ex. dans les aéroports et les bases militaires) (D'Agostino et Mabury, 2017; Liu et coll., 2021b). Les mousses AFFF contiennent des mélanges exclusifs de PFAS et d'autres produits chimiques (Liu et coll. 2024). Un certain nombre de PFAS ont été détectées dans les eaux souterraines des aéroports et des anciennes zones d'entraînement à la lutte contre les incendies où on avait utilisé des mousses AFFF. On a également trouvé des PFAS dans les eaux souterraines et de surface d'autres types de sites (p. ex. lieux d'intervention d'urgence, bassins pour mousses AFFF, réservoirs de stockage liés à des hangars, zones d'entretien du matériel de lutte contre les incendies et canalisations ou infrastructures touchées par les mousses AFFF) (Awad et coll., 2011; Anderson et coll., 2016; Milley et coll., 2018).

Outre la contamination de l'eau souterraine, les puits peuvent être contaminés par des PFAS provenant de diverses sources, notamment les champs d'épuration domestiques associés à des fosses septiques (Schaider et coll., 2016). Les eaux usées domestiques qui circulent dans les champs d'épuration peuvent contenir des PFAS provenant d'emballages alimentaires, d'articles de cuisine, de vêtements lavés et d'autres articles ménagers (Müller et coll., 2011).

Les personnes vivant au Canada peuvent être exposées aux PFAS par l'eau potable (voir les références ci--dessous), les aliments (Tittlemier et coll., 2007; Aker et coll., 2023), la poussière (Kubwabo et coll., 2005; Shoeib et coll., 2011; De Silva et coll., 2012; Eriksson and Kärrman, 2015; Karaskova et coll., 2016; Steeves et coll., 2023) et l'air intérieur (Shoeib et coll., 2011; Beesoon et coll., 2012). L'eau potable peut être une source majeure d'exposition aux PFAS dans les collectivités où la source d'eau a été contaminée. Toutefois, pour la population générale (c.--à--d. les personnes qui ne sont pas exposées au travail ou qui ne vivent pas à proximité de sources ponctuelles de contamination), l'importance relative de chaque source d'exposition peut varier considérablement entre les sous-groupes de la population et d'une PFAS à l'autre (Sunderland et coll., 2019; De Silva et coll., 2021). En outre, le calcul de la contribution relative des sources d'exposition peut être influencé par les concentrations variables de PFAS dans les milieux d'exposition, les hypothèses divergentes sur la durée et la fréquence de l'exposition humaine, et la prise en compte des précurseurs des PFAS (qui peuvent se dégrader en PFAS plus persistantes) (De Silva et coll., 2021). En raison de tous ces facteurs (ainsi que du manque général de données sur les PFAS dans différents milieux d'exposition), il est impossible de tirer une conclusion générale sur l'importance relative de l'eau potable en tant que source d'exposition aux PFAS pour la population générale canadienne.

Bien qu'il y ait actuellement peu de données concernant les PFAS dans les sources d'eau douce et l'eau potable au Canada, l'information dont on dispose s'améliore progressivement. Le nombre et le type de PFAS présentes dans une source donnée d'approvisionnement en eau potable varient selon la source de la contamination, les conditions environnementales ainsi que les utilisations nouvelles et passées de la source.

Le gouvernement du Canada assure la surveillance des PFAS dans des sites d'échantillonnage d'eau douce de l'ensemble du pays. Par exemple, de 2013 à 2020, 29 sites ont été échantillonnés au Canada (dans toutes les provinces à l'exception de l'Alberta et de l'Île-du-Prince-Édouard) en vue de l'analyse des concentrations de 13 PFAS et des tendances associées à leur présence. Les sites et la fréquence d'échantillonnage ont varié au cours de l'étude. Des PFAS ont été détectées dans les eaux de surface dans chaque province où des échantillons ont été prélevés. Les limites de détection allaient de 0,4 à 1,6 ng/L. Parmi les 13 PFAS détectées dans 566 échantillons d'eau douce, le PFBA, le PFPeA, le PFHxA, le PFHpA, le PFOA et le PFOS ont été détectés plus fréquemment que les autres PFAS. Au sein de ce groupe de PFAS, les concentrations de PFBA et de PFPeA ont augmenté de manière significative entre 2013 et 2020, tandis que les concentrations de PFHpA, de PFOA et de PFOS ont diminué. Les concentrations maximales relevées ont été de 138 ng/L pour le PFBS (bien que cette PFAS ait été détectée moins fréquemment que les six autres mentionnées ci-dessus) et de 137 ng/L pour le PFHxA. Les auteurs ont constaté que, dans cette étude, les PFAS de remplacement, notamment le PFBA, le PFPeA, le PFHxA, le PFHpA et le PFBS, ont été détectées plus souvent que dans les études canadiennes précédentes (Lalonde et Garron, 2022).

Les PFAS n'ont pas fait l'objet d'une surveillance régulière dans les stations de traitement de l'eau potable au Canada. Les données de surveillance existantes ne concernent souvent qu'un nombre limité de PFAS. En outre, il existe une variabilité dans les types de PFAS étudiées, les méthodes analytiques utilisées, les limites de détection, la fréquence d'échantillonnage et la conception générale des études. Il est donc difficile de se faire une idée précise des concentrations de PFAS dans l'eau potable au Canada. Les renseignements ci-dessous comprennent un résumé des données présentées par les provinces, ainsi que des renseignements tirés de la littérature scientifique.

En Saskatchewan, la Water Security Agency a prélevé des échantillons d'eau potable (n = 7) dans sept stations de traitement de l'eau en 2018-2019 afin de mesurer les concentrations de PFOA et de PFOS dans l'eau potable traitée. Aucune de ces deux PFAS n'a été détectée (limite de détection de la méthode [LDM] : 2 ng/L) dans l'eau potable de six des sept collectivités. Le PFOA a été détecté dans l'unique échantillon prélevé dans une station de traitement de l'eau potable, à une concentration de 3 ng/L (Saskatchewan Water Security Agency, 2022). En 2023, la Water Security Agency a de nouveau prélevé et analysé des échantillons d'eau potable (n = 7) provenant de 7 stations de traitement de l'eau. L'analyse a porté sur un plus grand nombre de PFAS (représentant jusqu'à 30 paramètres), et les limites de détection des méthodes utilisées étaient plus basses. Au moins une PFAS a été détectée dans chaque échantillon. Un maximum de 4 PFAS a été détecté dans quelques échantillons d'eau traitée. Dans un échantillon, la concentration maximale totale des PFAS (23 ng/L) était inférieure à l'objectif de 30 ng/L.

Entre 2012 et 2016, le ministère de l'Environnement, de la Protection de la nature et des Parcs de l'Ontario a mesuré la présence et la concentration de 14 PFAS (PFBA, PFPeA, PFHxA, PFHpA, PFOA, PFNA, PFDA, PFUnA, PFDoA, PFBS, PFHxS, PFOS, PFDS et PFOSA) dans 25 systèmes d'approvisionnement en eau potable en Ontario (prises d'eau et eau potable traitée). Les LDM variaient de 0,5 à 1 ng/L, et les résultats inférieurs à la LDM ont été remplacés par des valeurs correspondant à la moitié de la LDM (Kleywegt et coll., 2020). Aucune trace de PFUnA, de PFDoA, de PFDS et de PFOSA n'a été détectée dans les échantillons d'eau potable. Les composés les plus fréquemment détectés dans l'eau potable de l'Ontario étaient le PFOA (73 %; médiane de 1,1 ng/L, maximum de 6,6 ng/L), le PFBA (67 %; médiane de 2,4 ng/L, maximum de 10 ng/L), le PFHxA (54 %; médiane de 1,3 ng/L, maximum de 13 ng/L), le PFPeA (51 %; médiane de 1,0 ng/L, maximum de 15 ng/L) et le PFOS (50 %; médiane de 0,63 ng/L, maximum de 5,9 ng/L).

Des concentrations médianes de PFBA, de PFPeA, de PFHxA, de PFOA et de PFOS ont été signalées dans des échantillons d'eau potable provenant de 19 sites situés autour du lac Ontario et du fleuve Saint-Laurent (n = 8) et d'autres lacs et petites rivières au Canada (n = 11). Les concentrations maximales de PFAS étaient comprises entre 0,1 ng/L (PFDA) et 4,1 ng/L (PFOS) dans les échantillons des Grands Lacs et du Saint-Laurent, et entre 0,1 ng/L (PFUnA) et 4,9 ng/L (PFOA) pour le reste des échantillons d'eau du robinet prélevés au Canada. Le PFHxA a été détecté dans tous les échantillons d'eau du robinet prélevés au Canada dans cette étude. D'autres PFAS ont été fréquemment détectées, notamment le PFBA (95 %), le PFHxS et le PFOS (89 % chacun), tandis que le PFPeA, le PFHpA, le PFOA, le PFNA, le PFDA et le PFBS ont été détectés dans au moins 84 % des échantillons. Parmi les autres PFAS détectées dans les eaux canadiennes figurent le PFOSA (53 %), le 6:2 FTSA (37 %) et le 5:3 FTCA (11 %), ainsi que le PFUnA, le PFDoA et le 7:3 FTCA, chacune de ces substances ayant été détectée dans moins de 10 % des échantillons. Selon les résultats d'une méthode d'analyse qualitative, le FBSA, le FHxSA, le PFECHS et le PFPeS étaient parfois présents dans l'eau du robinet (les concentrations semi-quantitatives allaient d'en deçà de la limite de détection jusqu'à 1,2 ng/L), alors que le PFEtS, le PFPrS et le PFPeS étaient présents à des concentrations inférieures à la limite de détection dans tous les échantillons canadiens. Les limites de détection dans l'eau du robinet variaient de 0,01 à 0,08 ng/L (Kaboré et coll., 2018).

Dans le cadre d'une étude menée à Niagara-on-the-Lake (Ontario) sur 5 échantillons d'eau du robinet, le PFOA et le PFOS ont été détectés à des concentrations de 2,1 et de 3,3 ng/L (moyennes arithmétiques). Le PFBA, le PFPeA, le PFHxA, le PFHpA, le PFNA, le PFDA, le PFUnA, le PFHxS et le PFEtS ont également été détectés dans les échantillons. Les limites de quantification allaient de 0,004 à 1,6 ng/L (Mak et coll., 2009).

Dans 7 sites au Québec, des échantillons d'eau brute et d'eau traitée ont été prélevés tous les mois entre avril 2007 et mars 2008. Le PFOA a été détecté dans 75 % des échantillons d'eau traitée (LDM de 0,3 à 0,6 ng/L), avec une valeur médiane de 2,5 ng/L et une valeur maximale de 73,0 ng/L. Le PFOS a été détecté dans 52 % des échantillons traités (LDM de 0,3 à 0,6 ng/L), avec une valeur médiane de 1,0 ng/L et une valeur maximale de 12,0 ng/L. Le PFNA et le PFUnA ont également été détectés dans quelques échantillons (Berryman et coll., 2012).

Entre 2016 et 2021, le ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) du Québec a prélevé des échantillons dans 41 installations de production d'eau potable pour y rechercher 18 PFAS (PFBA, PFPeA, PFHxA, PFHpA, PFOA, PFNA, PFDA, PFUnA, PFBS, PFHxS, PFHpS, PFOS, PFDS, FHUEA, FOUEA, 4:2 FTS, 6:2 FTS, 8:2 FTS). L'échantillonnage visait à la fois des systèmes alimentés en eaux de surface et, à partir de 2018, des systèmes alimentés en eaux souterraines (MELCC, 2022). Les sites d'échantillonnage ont été sélectionnés en fonction des résultats antérieurs de détection de PFAS, de préoccupations relatives aux sites ou de leur proximité avec des sources ponctuelles potentielles de PFAS. Les limites de détection étaient comprises entre 0,5 et 5 ng/L pour les échantillons d'eau brute et entre 0,3 et 5 ng/L pour les échantillons d'eau traitée. Parmi les 18 PFAS analysées, 6 (PFPeA, PFHxA, PFHpA, PFOA, PFNA et PFOS) ont été détectées dans 10 % ou plus des échantillons prélevés. Les données de 2016 montrent une réduction des concentrations maximales de PFOA et de PFOS (6 ng/L et 3 ng/L, respectivement) par rapport aux concentrations maximales mesurées dans les eaux de surface des mêmes sites échantillonnés en 2007-2008 (66 ng/L pour le PFOA et 8,8 ng/L pour le PFOS). Dans le fleuve Saint-Laurent et certaines rivières, 5 substances (PFHxA, PFHpA, PFOA, PFNA et PFOS) ont été détectées dans au moins 30 % des échantillons. Les substances le plus souvent détectées étaient le PFOA et le PFHxA (72 % et 59 %, respectivement); toutes deux présentaient une concentration maximale de 6 ng/L et une concentration médiane de 2 ng/L. Dans le lac Memphrémagog, le PFOA (médiane de 1 ng/L, maximum de 2 ng/L) et le PFHxA (médiane de 1,5 ng/L, maximum de 3 ng/L) ont été détectés dans l'eau brute; les deux substances ont également été détectées dans l'eau potable traitée à une concentration maximale de 1 ng/L et à une concentration médiane de 1 ng/L chacune. Dans les sources d'approvisionnement en eau souterraine, le PFPeA (médiane de 4 ng/L, maximum de 48 ng/L) et le PFHxA (médiane de 3 ng/L, maximum de 30 ng/L) ont été trouvés dans 14 % et 17 % des échantillons, respectivement, tandis que le PFOA (médiane de 2 ng/L, maximum de 4 ng/L) et le PFOS (médiane de 2 ng/L, maximum de 3 ng/L) ont été trouvés dans 6 % et 4 % des échantillons (MELCC, 2022).

Munoz et coll. (2023) ont mené une étude pour valider une nouvelle technique analytique et caractériser les PFAS dans des échantillons d'eau de tout le Québec. Entre 2018 et 2021, ils ont prélevé en tout 463 échantillons d'eau du robinet dans 376 municipalités du Québec et les ont analysés pour détecter la présence de PFAS. Des analyses ciblées ont permis d'identifier 31 PFAS dans les échantillons d'eau, et 23 PFAS supplémentaires ont été identifiées dans le cadre d'une analyse non ciblée. Les limites de détection individuelles étaient comprises entre 0,001 et 0,082 ng/L, 99,3 % des échantillons d'eau du robinet contenaient des PFAS, et les sommes des concentrations des PFAS détectées dans chaque échantillon se situaient entre des valeurs inférieures à la limite de détection et 108 ng/L (médiane de 2 ng/L, 95e centile de 13 ng/L). Seuls 10 échantillons provenant de cinq localités présentaient des concentrations totales de PFAS supérieures à 30 ng/L. Les PFAS les plus fréquemment détectées étaient le PFOA (88 %, médiane de 0,27 ng/L, maximum de 8,1 ng/L) et le PFOS (80 %, médiane de 0,15 ng/L, maximum de 13 ng/L). En outre, les sulfonamides perfluoroalkylés (FASA) à chaîne courte (C3-C6) ont été fréquemment détectés (p. ex., 50 % de détection pour le FBSA), mais à des concentrations plus faibles (< 1 ng/L). Il convient de noter que cette étude a également révélé la présence de PFAS émergentes, telles que le 6:2 FTSAS-sulfone et le 5:1:2 FtB, à des concentrations supérieures à 1 ng/L, mais de façon ponctuelle seulement. En outre, des PFAS qui n'avaient jamais été mesurées dans l'eau potable auparavant (p. ex. HO-X:2 FTS, composés apparentés au FTSAS, composés apparentés au N-SPAmP-FASA, TAmPr-FASA, X:3 FtB et X:1:2 FtB) ont été détectées dans certains échantillons. Dans l'ensemble, les concentrations de PFAS étaient plus élevées dans l'eau du robinet provenant d'une source d'eau de surface que dans les échantillons d'eau du robinet provenant d'une source d'eau souterraine. Toutefois, sur les 10 sites les plus contaminés, six prélevaient leur eau potable de sources souterraines. L'étude de Munoz et coll. (2023) était exhaustive et portait sur de nombreux échantillons couvrant une grande partie de la province. Les auteurs ont également mesuré un nombre relativement élevé de PFAS, souvent avec une LDM inférieure à celle d'autres méthodes d'analyse.

En Nouvelle-Écosse, depuis 2019, les municipalités sont tenues d'analyser l'eau potable brute et traitée pour y détecter la présence de PFOA et de PFOS. À ce jour, aucune de ces deux substances n'a été détectée dans les neuf systèmes examinés (NSECC, 2022). Toutefois, il convient de noter que la méthode analytique utilisée dans ces analyses avait une LDM relativement élevée de 20 ng/L.

Dans une étude pilote réalisée en 2023 dans 14 stations de traitement de l'eau, le gouvernement du Canada a mesuré les concentrations de PFAS dans des échantillons appariés de la source d'eau et d'eau traitée prélevés pendant l'hiver. Les échantillons ont été analysés à l'aide d'une méthode mise au point pour mesurer 38 PFAS. Les LDM de cette méthode variaient de 0,01 à 0,23 ng/L. Les PFAS détectées le plus fréquemment dans l'eau potable ont été le PFBA, le PFPeA, le PFHxA, le PFHpA, le PFOA, le PFNA, le PFBS, le PFPeS, le PFHxS, le PFHpS et le PFOS. Les concentrations médianes des différentes PFAS, estimées à partir des graphiques, étaient comprises entre 0,05 et 0,80 ng/L dans l'eau brute, et entre 0,06 et 0,35 ng/L dans l'eau traitée (Fan, 2023). Les données de l'étude serviront à l'élaboration des recommandations pour l'eau potable.

Aux États-Unis, des données représentatives au niveau national sur la présence de 6 PFAS (PFHpA, PFOA, PFNA, PFBS, PFHxS, PFOS) dans l'eau potable ont été recueillies dans le cadre de la troisième campagne obligatoire de surveillance des contaminants non réglementés (Third Unregulated Contaminant Monitoring Rule, UCMR 3). Les seuils minimaux de déclaration (SMD) établis par l'U.S. EPA pour les composés surveillés allaient de 10 à 90 ng/L et étaient généralement supérieurs à la limite de quantification utilisée dans la plupart des études publiées (Hu et coll., 2016). Les données recueillies entre 2013 et 2015 ont révélé que 1,6 % des 36 977 échantillons et 4 % des 4 920 systèmes publics d'approvisionnement en eau contenaient au moins une PFAS détectable (Guelfo et Adamson, 2018). Le PFOA (SMD de 20 ng/L) et le PFOS (SMD de 40 ng/L) étaient les PFAS le plus souvent détectées (1,03 % et 0,79 %, respectivement) parmi les systèmes de toute taille et de tout type de source. Les concentrations maximales de PFOS (7 000 ng/L), de PFHxS (1 600 ng/L), de PFHpA (410 ng/L), de PFOA (349 ng/L) et de PFNA (56 ng/L) ont été détectées dans de grands systèmes alimentés par une source d'approvisionnement en eau souterraine. Le PFBS (SMD de 90 ng/L) a été détecté seulement dans de grands systèmes, et la concentration maximale de 370 ng/L a été observée dans un grand système alimenté par une source d'approvisionnement en eau de surface (Crone et coll., 2019). Une analyse des données obtenues en vertu de la règle UCMR 3 a révélé qu'environ 50 % des échantillons dans lesquels on avait détecté des PFAS contenaient deux PFAS ou plus et que, dans 72 % des cas, les PFAS avaient été détectées dans des eaux souterraines (Guelfo et Adamson, 2018). Certaines activités à proximité des systèmes d'approvisionnement en eau étaient des prédicteurs significatifs de la fréquence de détection et des concentrations des PFAS, notamment le nombre de sites industriels qui fabriquent ou utilisent des PFAS, le nombre de zones militaires d'entraînement à la lutte contre les incendies et le nombre de stations de traitement des eaux usées (Hu et coll., 2016).

Dans le cadre du cinquième cycle de l'UCMR (UCMR 5), 29 PFAS doivent faire l'objet d'échantillonnages entre 2023 et 2025. L' U.S. EPA a fixé des SMD allant de 2 à 8 ng/L à l'égard de chacune des substances à l'étude, à l'exception du NFDHA, pour lequel le SMD est de 20 ng/L. Selon les données préliminaires, qui représentent environ 15 % des résultats totaux, 18 de ces 29 PFAS ont été mesurées à une concentration égale ou supérieure à leur SMD dans au moins un système d'approvisionnement en eau. Dans les quelque 3 000 systèmes d'approvisionnement en eau échantillonnés, les substances les plus fréquemment détectées sont le PFPeA (14 %), le PFBA (14 %), le PFHxA (13 %) et le PFBS (12 %). Le PFOA et le PFOS ont été détectés dans 9,5 % et 10,7 % des réseaux, respectivement. Les SMD inférieurs de l'UCMR 5 peuvent expliquer en partie la fréquence de détection accrue de ces substances par rapport aux résultats de l'UCMR 3.

Considérations relatives à la santé

En raison de l'utilisation généralisée et de la persistance des PFAS, et du fait que de nombreuses PFAS sont mobiles et peuvent s'accumuler, les PFAS sont devenues omniprésentes dans l'environnement. On retrouve certaines PFAS chez les humains, dans la faune et dans presque tous les compartiments environnementaux du monde (Wang et coll., 2017).

Chez les humains, certaines PFAS bien étudiées, notamment les acides perfluorocarboxyliques et sulfoniques (PFCA et PFSA), sont facilement absorbées par l'organisme et se lient aux protéines du sang. Cette liaison est leur principal mécanisme de transport dans l'organisme (Kudo, 2015; Forsthuber et coll., 2020). Une fois distribuées dans l'organisme, ces substances s'accumulent dans le sang et les tissus bien perfusés tels que le foie et les reins (Kudo, 2015). Certaines de ces substances peuvent traverser la barrière placentaire et entraîner une exposition in utero du fœtus en développement (Mamsen et coll., 2019; Wang et coll., 2019; Li et coll., 2020; McAdam et coll., 2023). Elles peuvent également être transmises aux nourrissons et aux enfants par le lait maternel (VanNoy et coll., 2018; Rawn et coll., 2022; Zheng et coll., 2022). De nombreuses PFAS, y compris les PFCA et les PFSA, ne sont pas métabolisées dans l'organisme, probablement en raison de leur grande stabilité et de la faible réactivité des liaisons carbone-fluor (ATSDR, 2021). Toutefois, les précurseurs tels que les alcools fluorotélomériques (FTOH) et les esters de phosphate de polyfluoroalkyle (PAP) peuvent être biotransformés en plusieurs métabolites, dont les PFCA et les PFSA, qui ne se dégradent pas (Butt et coll., 2014). Les données disponibles montrent que certaines PFAS sont éliminées très lentement de l'organisme, probablement en raison de leur forte affinité de liaison aux protéines et des processus de réabsorption internes (Yang et coll., 2010; EFSA, 2020). Ainsi, certaines PFAS (p. ex. PFOA, PFNA, PFHxS et PFOS) peuvent s'accumuler et persister dans l'organisme pendant des années (ATSDR, 2021). D'autres PFAS à chaîne plus courte (p. ex. le PFBA et le PFHxA) sont éliminées plus rapidement, avec des demi-vies estimées allant de plusieurs jours à plusieurs semaines (Chang et coll., 2008; Russell et coll., 2015).

On dispose de renseignements toxicologiques (in vitro et in vivo) et épidémiologiques pour seulement un nombre limité de PFAS. Les risques pour la santé humaine associés à ces PFAS ont été examinés par un certain nombre d'agences internationales et dans des publications scientifiques (p. ex. EFSA, 2020; ATSDR, 2021; Fenton et coll., 2021; ECHA, 2022a, 2022b, 2023; NASEM, 2022; Polcher et coll., 2023). Les PFAS les plus étudiées sont les PFCA (y compris le PFOA) et les PFSA (y compris le PFOS). Il existe des données limitées pour plusieurs autres types de PFAS (p. ex. les PFAS à base d'éther, les FASA et les substances à base de fluorotélomères), mais il n'y a pas de données pour la grande majorité des PFAS (Pelch et coll., 2021; Sanexen, 2022a).

Sur la base des renseignements dont on dispose, il est évident que l'exposition à certaines PFAS est susceptible de nuire à plusieurs systèmes et organes (ATSDR, 2021). De plus, il a été déterminé que de nombreuses PFAS affectent les mêmes systèmes et organes. Les effets couramment rapportés dans les études chez l'animal comprennent des effets sur le foie, le système immunitaire, les reins, la reproduction, le développement, le système endocrinien (thyroïde), le système nerveux et le métabolisme (lipides, homéostasie du glucose, poids corporel). Les résultats des études épidémiologiques mettent en évidence des effets similaires chez les humains (Fenton et coll., 2021; Sanexen, 2022a), et il semble y avoir un consensus quant au fait qu'actuellement, les données les plus cohérentes se rapportent aux effets sur les lipides sériques, les enzymes hépatiques, la réponse vaccinale et la croissance des fœtus (ATSDR, 2021; ITRC, 2023b). En outre, le Centre international de recherche sur le cancer a classé le PFOA comme cancérogène pour les humains (groupe 1) et le PFOS comme cancérogène possible pour les humains (groupe 2B) (Zahm et coll., 2023). L'EPA de la Californie a également ajouté le PFOS à sa liste de produits chimiques réputés cancérogènes (OEHHA, 2021). Plusieurs des effets mentionnés ci-dessus ont même été observés à des niveaux d'exposition présents dans la population générale (c.-à-d. sans exposition à une source de contamination particulière) (ITRC, 2023c).

Les nouvelles données sur les PFAS bien étudiées montrent que leurs effets se manifestent à des concentrations plus faibles que dans les études précédentes (p. ex. le HFPO-DA et son sel d'ammonium [U.S. EPA, 2021a]) et qu'elles ont des effets préoccupants à l'égard de paramètres qui n'avaient pas été pris en compte auparavant (p. ex. les répercussions sur le microbiome intestinal [Lamichhane et coll., 2023]).

À l'heure actuelle, seul un petit nombre de PFAS font l'objet d'enquêtes de biosurveillance humaine au Canada et à l'étranger. Les enquêtes canadiennes de biosurveillance montrent que certaines PFAS (p. ex. le PFOA, le PFOS et le PFHxS) sont présentes chez presque 100 % des Canadiens, malgré les mesures de gestion des risques mises en place au Canada depuis plusieurs années. D'autres PFAS (p. ex. le PFDA et le PFUnA) sont couramment détectées dans plus de 50 % de la population (Santé Canada, 2021a). Si l'on tient compte des populations autochtones, les concentrations de PFOA, de PFHxS et de PFOS étaient plus faibles dans les populations des Premières Nations vivant dans les réserves (données de 2011) que dans la population canadienne générale (données de 2009-2011), tandis que les concentrations de PFNA et de PFDA étaient similaires chez les deux populations (Santé Canada, 2023). Cependant, certains sous-groupes de la population, dont les enfants et les jeunes de certaines communautés anishnabes, présentaient des concentrations de PFNA considérablement plus élevées que dans les groupes comparables de la population canadienne en général (Caron-Beaudoin et coll., 2019; Lemire et coll., 2019; Dubeau et coll., 2022). En outre, les jeunes, les femmes enceintes et les adultes des communautés du Nunavik présentaient des concentrations de PFNA, de PFDA, de PFUnA et de PFOS substantiellement plus élevées que dans les groupes comparables de la population canadienne générale (Caron-Beaudoin et coll., 2020; Aker et coll., 2023). Les études indiquent également que dans les régions où l'eau potable est une source d'exposition importante aux PFAS, le traitement de l'eau potable en vue de réduire les concentrations de PFAS peut diminuer les concentrations sériques de PFAS et, éventuellement, les effets néfastes sur la santé (Herrick et coll., 2017; Waterfield et coll., 2020).

La population canadienne est exposée à plusieurs PFAS simultanément, comme le montrent les données de biosurveillance (Santé Canada, 2021a). Étant donné l'exposition simultanée à de multiples PFAS et la similitude des effets touchés, des préoccupations ont été soulevées quant à la possibilité d'effets cumulatifs des PFAS (ECHA 2022a). Or, les dangers de l'exposition aux mélanges de PFAS sont largement inconnus. Un nombre limité d'études in vitro et in vivo sur les mélanges ont révélé que les PFAS peuvent avoir des effets antagonistes, synergiques ou additifs selon l'espèce animale étudiée, la dose administrée, le rapport des doses et les composants du mélange (Ojo et coll., 2021; Addicks et coll. 2023).

Considérations relatives à l'analyse

Méthodes d'analyse

Il existe actuellement deux méthodes normalisées et validées pour la quantification des PFAS dans l'eau potable publiées par l'U.S. EPA (U.S. EPA, 2020a, 2020b). Il est important que les méthodes d'analyse choisies fournissent des résultats quantitatifs pour les 25 PFAS visées par le présent objectif. La méthode choisie doit être conforme aux meilleures pratiques actuelles permettant une analyse précise des PFAS dans les milieux aqueux (p. ex. analyse par dilution isotopique et échange anionique faible [WAX]). Les méthodes doivent également être sensibles et pratiques afin qu'on puisse les appliquer dans les laboratoires commerciaux et respecter les SMD spécifiés par les autorités responsables. Par exemple, dans le cadre de l'UCMR 5, des SMD compris entre 2 et 20 ng/L ont été établis (U.S. EPA, 2021b) pour l'analyse des PFAS dans l'eau potable à l'aide des méthodes approuvées par l' U.S. EPA (voir l'annexe A). De nombreux laboratoires peuvent fournir des résultats précis au seuil de 2 ng/L pour la plupart des PFAS et au seuil de 5 ng/L pour les autres (U.S. EPA, 2021b). Les clients devraient s'assurer auprès des laboratoires que ceux-ci peuvent mesurer de façon fiable les PFAS dans l'eau potable à une concentration égale ou inférieure aux SMD établis par les autorités responsables. Le tableau 1 résume les méthodes normalisées établies par l' U.S. EPA pour la mesure des PFAS dans l'eau potable ou dans les matrices aqueuses (eaux usées, eaux de surface et eaux souterraines).

Tableau 1. Méthodes normalisées de l' U.S. EPA pour l'analyse des PFAS dans l'eau
Méthode (référence) Description de la méthode Commentaires

EPA Method 533

(U.S. EPA, 2020b)

Méthode CL-SM/SM avec EPS à échange d'anions et dilution isotopique pour la détermination de certaines PFAS dans l'eau potable

Mesure de 25 PFAS (aucune ne comportant plus de 12 atomes de carbone), y compris des acides perfluorés, des sulfonates, des fluorotélomères et des acides oxycarboxyliques polyfluorés ou perfluorés.

Nécessite l'utilisation de la CL-SM/SM en mode MRM.

EPA Method 537.1

(U.S. EPA, 2020a)

Méthode CL-SM/SM avec EPS hydrophobe pour la détermination de certaines PFAS dans l'eau potable

Mesure 18 PFAS, y compris les acides perfluorocarboxyliques contenant jusqu'à 14 atomes de carbone. Cette méthode de mesures des concentrations repose sur des interactions hydrophobes et, à ce titre, elle ne convient pas aux PFAS plus hydrophiles à chaîne carbonée plus courte, comme le PFBA et le PFPeA.

N'utilise pas l'analyse par dilution isotopique.

EPA Method 1633 (U.S. EPA, 2024a)

Méthode CL-SM/SM avec EPS et dilution isotopique pour la détermination de certaines PFAS dans des échantillons aqueux, solides, de biosolides et de tissus

Mesure jusqu'à 40 PFAS dans des matrices aqueuses (eaux usées, eaux de surface, eaux souterraines).

Nécessite l'utilisation de la CL-SM/SM en mode MRM. Ne comprend pas d'étape de neutralisation.

Méthode axée sur le rendement.

EPS = extraction en phase solide; CL-SM/SM = chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem; MRM = détection des réactions multiples [multiple-reaction-monitoring].

L'U.S. EPA a approuvé l'utilisation des méthodes 533 et 537.1 pour mesurer les PFAS dans l'eau potable. Santé Canada recommande l'utilisation de la méthode 533, car elle respecte les meilleures pratiques actuelles (comme la dilution isotopique), ce qui n'est pas le cas avec la méthode 537.1. Bien que la méthode 1633 ne soit pas approuvée par l' U.S. EPA pour l'analyse de l'eau potable, elle figure dans le tableau 1, car elle a fait l'objet d'une étude de validation multilaboratoires pour la détermination des PFAS spécifiées dans des échantillons aqueux tels que ceux d'eau de surface et d'eau souterraine. Des études ont été menées afin d'évaluer l'effet du chlore libre et de trois agents de neutralisation du chlore ou de tamponnage (trizma, acétate d'ammonium et thiosulfate) sur le rendement de la méthode. Il a été déterminé que la présence de chlore affecte certaines des PFAS (précurseurs de sulfonamides) ciblées par la méthode 1633. Parmi les agents de neutralisation testés, le thiosulfate offre le meilleur rendement en ce qui a trait au respect des spécifications pour toutes les PFAS mesurées par la méthode (SGS Canada, 2024). La méthode 1633 est « axée sur le rendement », ce qui signifie que des modifications peuvent être apportées sans examen supplémentaire de l' U.S. EPA pour améliorer le rendement (p. ex. pour atténuer les interférences ou améliorer la sensibilité, l'exactitude ou la précision des résultats), à la condition que tous les critères de rendement de la méthode soient respectés.

L'autorité responsable en matière d'eau potable dans la juridiction concernée peut choisir d'approuver l'utilisation de la méthode 1633 pour l'eau potable ou de valider et d'approuver une autre méthode d'analyse (y compris l'établissement de SMD) qui mesure les 25 PFAS visées par le présent objectif dans l'eau potable. Il est recommandé que toute méthode approuvée respecte au minimum les SMD établis par l'UCMR 5 pour chaque substance (voir l'annexe A). Les 25 PFAS visées par l'objectif sont représentatives des PFAS observées dans les données canadiennes, comme il est décrit à la section sur les considérations relatives à l'exposition. Cependant, de nombreux gouvernements élaborent de nouvelles méthodes d'analyse permettant de mesurer un plus grand nombre de PFAS. Il est donc possible que le profil des PFAS détectées dans l'eau potable et leur nombre changent avec le temps. Santé Canada demeurera à l'affût des nouvelles recherches et recommandera les changements nécessaires.

Bien que certaines méthodes permettent de mesurer un plus grand nombre de PFAS, seules les concentrations des 25 PFAS indiquées sont à additionner afin de les comparer à l'objectif. Toute concentration supérieure au SMD établi devrait être incluse dans la somme des concentrations de PFAS, la valeur zéro étant attribuée à toute valeur inférieure au SMD établi (c.-à-d., le résultat d'une substance « non détectée »). Si le laboratoire peut mesurer de manière adéquate des concentrations inférieures aux SMD établis par les autorités responsables, on devrait additionner ces concentrations inférieures afin de les comparer à l'objectif.

Autant que possible, les responsables de systèmes de distribution d'eau potable devraient analyser un plus grand nombre de PFAS que les 25 PFAS visées par l'objectif (p. ex. en utilisant la méthode 1633 de l' U.S. EPA) afin de mieux comprendre le profil des PFAS présentes dans l'eau potable. Cela les aiderait à étayer le choix du traitement employé en vue de réduire autant que possible l'exposition. Il est également utile de caractériser le site pour mieux comprendre les sources potentielles de PFAS dans l'eau de source. Des conseils sur la caractérisation du site sont disponibles ailleurs (U.S. EPA, 2022a; ITRC, 2023, 2023d).

Méthodes de dépistage

Dans des conditions environnementales propices, les précurseurs des PFAS peuvent se dégrader en acides perfluoroalkylés (PFAA). Le test des précurseurs oxydables totaux (test TOP) permet d'oxyder les précurseurs des PFAS et de les transformer en leurs PFAA correspondants, lesquels peuvent ensuite être mesurés à l'aide des méthodes de l' U.S. EPA ou d'autres méthodes. Il s'agit d'un outil de dépistage utile, qui permet de mieux comprendre la quantité de PFAS présente dans un échantillon, y compris les espèces inconnues de précurseurs qui, autrement, auraient pu passer inaperçues (c.-à-d. la charge totale en PFAS). Comme l'essai TOP n'identifie pas les précurseurs individuels, les données sont généralement exprimées en termes de variation nette dans les concentrations de PFAA avant et après l'oxydation (Rodowa et coll., 2020). Le test TOP peut sous-estimer les précurseurs des PFCA à chaîne ultra courte (C2 – C3) qui ne sont actuellement pas couverts par les méthodes d'analyse par CL-SM/SM (Ateia et coll., 2023). Les meilleures pratiques et les limites du test TOP sont décrites plus en détail dans Ateia et coll. (2023) et dans ITRC (2023e).

L'analyse de la teneur en fluor organique total (test TOF) est une autre méthode d'analyse de substitution courante que l'on peut utiliser pour détecter les PFAS dans l'eau potable. Bien que le test TOF puisse se révéler utile, il ne parvient pas à différencier le fluor présent dans les composés PFAS de ceux qui ne sont pas des PFAS. Jusqu'à présent, il n'existe pas de méthode démontrée qui permet d'éviter les étapes de préparation des échantillons et la perte d'une partie du TOF.

L'U.S. EPA (2024b) a publié une méthode d'analyse du fluor organique adsorbable (AOF) (EPA Method 1621) dans des matrices aqueuses; la méthode a recours à l'adsorption sur charbon pour préparer l'échantillon au rinçage du fluorure, puis à la chromatographie ionique à combustion. Cependant, l'application de cette méthode à l'eau potable est limitée, car la limite minimale de détection est bien supérieure aux concentrations généralement observées dans les sources d'eau potable.

Les tests TOP et TOF permettent d'évaluer la concentration de PFAS au-delà des substances énumérées dans les méthodes ci-dessus et apportent des informations complémentaires. Toutefois, il s'agit de techniques qualitatives qui n'ont pas encore été normalisées ou qui n'ont pas fait l'objet d'une validation multilaboratoires. Malgré leurs limites, ces tests peuvent permettre de mieux comprendre les PFAS qui sont présentes ou qui peuvent être présentes dans l'eau et les effets qu'elles ont sur l'exploitation des systèmes d'approvisionnement en eau potable. Au cours du traitement, ces PFAS supplémentaires peuvent présenter des temps de percée plus courts, ce qui nécessite de régénérer ou de remplacer les milieux filtrants plus souvent. Les données issues de ces tests pourraient être utilisées en complément des données obtenues par des méthodes quantitatives. On trouvera dans les documents de l'ITRC (2023e, 2023f) de plus amples renseignements sur l'échantillonnage et l'analyse, y compris les limites et les meilleures pratiques pour la collecte d'échantillons, pour les méthodes qualitatives et quantitatives.

Considérations relatives au traitement

L'approche de la source au robinet ou du plan de gestion de la sécurité sanitaire de l'eau consiste à choisir avec soin une source d'eau de la plus haute qualité et à la protéger. Il s'agit d'une approche acceptée pour gérer les risques liés à la salubrité de l'eau potable (O'Connor, 2002; CCME, 2004; OMS, 2012). Tous les responsables de systèmes de distribution d'eau potable devraient mettre en œuvre un plan complet et actualisé de gestion des risques liés à la salubrité de l'eau. Afin d'évaluer le système d'approvisionnement en eau à l'aide de ces approches, il faut caractériser la source d'eau, décrire les barrières du système de traitement qui empêchent ou réduisent la contamination, déterminer les conditions qui peuvent entraîner une contamination et mettre en œuvre des mesures de contrôle. Il y aurait lieu d'effectuer une évaluation de la vulnérabilité pour déterminer les dangers, y compris les sources potentielles de contamination et la vulnérabilité de la source d'approvisionnement en eau à la contamination par les PFAS (Santé Canada, 2021b). Il est nécessaire de caractériser la source d'eau afin de déterminer la présence des PFAS, leur identité et leur concentration. Si une réduction des concentrations de PFAS s'impose, ces renseignements essentiels permettront d'établir les paramètres de conception ainsi que les conditions opérationnelles du mode de traitement sélectionné.

Des interventions sur les sources d'approvisionnement en eau potable, comme par exemple changer de source d'eau ou abandonner l'usage d'un puits ou d'une source d'eau contaminés ou mélanger les sources d'eau, peuvent également être envisagées pour réduire les concentrations élevées de PFAS dans l'eau potable. Il est crucial de caractériser toutes les autres sources d'eau envisagées, afin de garantir la qualité globale de l'eau traitée.

Traitement des eaux municipales

Généralement, les études sur l'efficacité du traitement sont réalisées avec une série limitée de PFAS, à des concentrations beaucoup plus élevées que celles qui sont observées dans les eaux potables brutes et traitées (Crone et coll., 2019). L'efficacité de l'enlèvement peut varier grandement pour les PFAS ayant des propriétés physico-chimiques différentes (p. ex. la longueur de la chaîne carbonée) lorsqu'elles sont évaluées à des concentrations applicables à l'eau potable. Les principaux points à prendre en compte lors du choix des technologies de traitement pour l'enlèvement des PFAS sont la présence d'espèces de PFAS et d'anions en compétition, la présence de matière organique et la fréquence de régénération ou de remplacement requise pour le milieu sorbant utilisé (Appleman et coll., 2013). L'efficacité du traitement de l'eau potable du point de vue de l'enlèvement des PFAS dépend de plusieurs facteurs, notamment les caractéristiques de la source d'approvisionnement en eau, la concentration et le type de PFAS, les objectifs du traitement et le bon fonctionnement du système en tout temps. L'élimination ou la manipulation des milieux sorbants, des concentrés ou des résidus est un facteur important lors du choix d'une technologie de traitement pour éliminer les PFAS. Par exemple, les milieux filtrants (comme le charbon actif en poudre [CAP] et le charbon actif en grains [CAG]) et les milieux échangeurs d'ions devront, une fois utilisés, être éliminés à l'aide de méthodes spécialisées, comme la régénération ou la destruction à haute température, afin d'éviter les rejets de PFAS dans l'environnement. De même, les technologies membranaires génèrent des résidus liquides de PFAS (p. ex. eaux de rejet) qui devront être traités ou éliminés selon des procédures spécialisées (U.S. EPA, 2022b).

La destruction des PFAS (p. ex. celles qui sont présentes dans les résidus de traitement ou les milieux épuisés) est un domaine de recherche complexe et en pleine expansion. La plupart des techniques de destruction des PFAS en sont au stade de développement et il est donc difficile d'évaluer pleinement leur efficacité et leur coût dans le contexte de l'eau potable. Néanmoins, les résultats sont prometteurs (Berg et coll., 2022; Meegoda et coll., 2022). Les technologies existantes et émergentes de destruction des PFAS comprennent l'oxydation électrochimique, la dégradation thermique, l'oxydation par l'eau supercritique, le traitement par plasma et la sonolyse (Meegoda et coll., 2022). Toutefois, le choix de la technologie de traitement peut être limité par la disponibilité des options d'élimination des résidus de traitement (y compris les milieux filtrants) et par les exigences des autorités responsables en matière d'élimination.

Les technologies courantes de traitement de l'eau potable (p. ex. la coagulation, la floculation et l'oxydation) ne sont pas efficaces pour enlever les PFAS. Bien qu'il existe des technologies de traitement qui permettent d'enlever efficacement certaines PFAS, aucun traitement ne peut à lui seul enlever une large gamme de PFAS dans toutes les conditions. Les technologies de traitement les plus efficaces (efficacité d'enlèvement > 90 % pour certaines PFAS) sont le charbon actif en grains [CAG], la filtration sur membrane (osmose inverse [OI] et nanofiltration [NF]) et l'échange d'anions (AIX) (Appleman et coll., 2013, 2014; Dickenson et Higgins, 2016; Sanexen, 2022b). Chaque technologie de traitement présente des avantages et des inconvénients. La réduction des concentrations en PFAS peut nécessiter le recours à une chaîne de traitement comprenant plus d'une technologie, ou encore l'utilisation d'une technologie plusieurs fois de suite pour traiter l'ensemble des PFAS présentes dans l'eau brute. Pour assurer un enlèvement continu et efficace, chaque station de traitement doit établir des conditions et des paramètres opérationnels fondés sur la ou les technologies de traitement choisies et les caractéristiques de l'eau brute, dont le type de PFAS, la concentration de PFAS et les objectifs de traitement.

C'est pour le CAG que l'on dispose du plus grand nombre de données les plus pertinentes, applicables sur le terrain, qui ont été obtenues à l'échelle pilote ou à grande échelle (Sanexen, 2022b); le CAG s'est d'ailleurs avéré efficace pour enlever les PFAS de l'eau potable à des concentrations relativement faibles (Appleman et coll., 2014). De plus, le CAG peut être utilisé avec de l'eau de différentes compositions chimiques et conserver ses caractéristiques de performance. Toutefois, le CAG a démontré une affinité plus grande pour les PFAS dont la chaîne carbonée compte plus de six atomes de carbone que pour les PFAS à chaîne plus courte (Gagliano et coll., 2020). En outre, les sulfonates perfluorés sont adsorbés plus facilement par le CAG que les acides carboxyliques perfluorés en raison de leur hydrophobicité accrue (Du et coll., 2014). Par conséquent, les milieux au CAG doivent être régénérés ou remplacés plus souvent lors du traitement de certaines PFAS (Rodowa et coll., 2020). Les paramètres opérationnels tels que le type de CAG (p. ex. charbon bitumineux), la taille du lit de charbon et le taux de chargement hydraulique influent également sur la durée de fonctionnement du filtre (Belkouteb et coll., 2020). Il est essentiel de déterminer le temps de percée pour s'assurer que l'enlèvement des PFAS continue à répondre à l'objectif de traitement.

Les propriétés des résines échangeuses d'anions (résines AIX), notamment la porosité, le groupe fonctionnel et la matrice polymère, influent sur l'efficacité de la réduction des PFAS (Gagliano et coll., 2020). Étant donné que de nombreuses PFAS existent sous forme d'anions à des pH applicables à l'eau potable, les résines AIX à base forte sont capables d'enlever ces espèces de PFAS (Crone et coll., 2019). Le procédé AIX enlève également de manière préférentielle les PFAS à longue chaîne et les perfluorosulfonates (Appleman et coll., 2014). Cependant, la modification des caractéristiques des résines AIX (p. ex. l'hydrophobicité du groupe fonctionnel) peut augmenter la capacité de sorption des PFAS moins hydrophobes (Chularueangaksorn et coll., 2014; Zaggia et coll., 2016). Bien que les résines AIX offrent l'avantage d'une plus grande capacité d'adsorption que le CAG, elles sont généralement limitées à une seule utilisation pour les applications liées à l'eau potable (Ross et coll., 2018; Crone et coll., 2019). On a toutefois réussi à régénérer les résines AIX dans certaines études (Crone et coll., 2019), mais il a fallu recourir à des procédures complexes ou non standard.

Les technologies membranaires que sont l'OI et la NF permettent toutes les deux d'enlever très efficacement de nombreuses PFAS. L'OI enlève efficacement les PFAS de toutes les longueurs de chaîne selon un mécanisme d'exclusion par la taille et un mécanisme de rejet selon la charge. La NF repose principalement sur la répulsion électrostatique et l'hydrophobicité, en particulier pour enlever les PFAS à chaîne courte (Dickenson et Higgins, 2016; Zeng et coll., 2017). Le taux de rejet par OI et par NF peut varier d'une PFAS à l'autre, et il peut être sensiblement plus faible pour les PFAS à charge neutre comme le PFOSA (Steinle-Darling et Reinhard, 2008; Steinle-Darling et coll., 2010; Sanexen, 2022). Les problèmes d'encrassement et d'entartrage limitent l'application à grande échelle des technologies membranaires telles que l'OI et la NF.

Un nombre limité d'études à l'échelle de banc d'essai ont porté sur l'enlèvement des acides perfluoroalkylés (7 PFCA et 3 PFSA) par filtration sur CAP. D'après les résultats de ces études, la filtration sur CAP présentait une efficacité médiane d'enlèvement de 64,5 % à l'égard des PFAS individuelles et de 79,3 % pour la somme des PFAS (Sanexen, 2022b). Cependant, l'efficacité d'enlèvement dépend du type de PFAS et peut être sous-évaluée ou surévaluée selon le groupe de PFAS pris en considération.

En raison de son manque d'efficacité, la filtration sur CAP doit être combinée à d'autres technologies de traitement (p. ex. les méthodes avec CAP et coagulation) pour atteindre un taux d'enlèvement de 90 % ou plus (Bao et coll., 2014; Pramanik et coll., 2015). Pramanik et coll. (2015) ont obtenu des taux d'enlèvement de 95 % et 91 % pour le PFOA et le PFOS, respectivement, à l'aide d'un traitement associant le CAP et une coagulation subséquente au polychlorure d'aluminium. Ces procédés de traitement combinés peuvent réduire l'exposition aux PFAS sans investissements majeurs pour les responsables de systèmes de distribution d'eau potable qui disposent l'équipement pour l'ajout de coagulants et de CAP. En outre, cette méthode de traitement peut représenter une solution provisoire de réduction des PFAS avant l'installation de technologies de traitement plus avancées. L'augmentation des concentrations de CAP et du temps de contact peut également accroître l'efficacité de l'enlèvement des PFAS par filtration sur CAP (Qu et coll., 2009; Bao et coll., 2014; Pramanik et coll., 2015). Même si ces résultats, obtenus à l'échelle du banc d'essai, sont encourageants, ils n'ont été obtenus que pour un nombre limité d'espèces de PFAS. L'augmentation des concentrations de carbone organique dissous (COD) dans l'eau brute peut avoir un impact négatif sur l'efficacité de l'enlèvement des PFAS par filtration sur CAP. Lorsqu'ils ont évalué l'enlèvement du PFOA et du PFOS, Pramanik et coll. (2015) ont constaté que les concentrations élevées de COD dans l'eau d'alimentation avaient un impact plus important sur la performance de la filtration avec CAP que sur la performance de la filtration avec CAG. L'élimination sécuritaire des boues décantées contenant le CAP chargé en PFAS est aussi un facteur important à prendre en considération.

Caractère réalisable du traitement

Des études évaluant le caractère réalisable des méthodes de réduction des PFAS à l'échelle pilote et à grande échelle ont démontré que le CAG, l'AIX et l'OI peuvent chacun réduire efficacement les concentrations de PFCA et de PFSA dans l'eau brute (Sanexen, 2022b). En général, ces études ont été menées avec des concentrations de PFAS plus élevées que celles que l'on trouve dans les sources d'eau au Canada. Il existe donc certaines incertitudes quant à l'efficacité de chaque technologie de traitement à des concentrations inférieures de PFAS. De plus, les conditions propres au site peuvent varier considérablement, ce qui influe sur l'efficacité de la technologie de traitement et nécessite des stratégies propres au système. Par exemple, l'efficacité de la réduction des PFAS par les méthodes CAG et AIX peut être affectée fortement par des ions compétitifs, tels que les matières organiques naturelles et les ions sulfate, chlorure et bicarbonate, dans l'eau de source. Par conséquent, la caractérisation de l'eau de source devrait faire partie des évaluations de routine du système. Il est important de comprendre les paramètres de qualité de l'eau en fonction des changements saisonniers, temporels et climatiques pour bien gérer les opérations de traitement. Pour réduire efficacement les concentrations en PFAS, les systèmes d'approvisionnement en eau potable doivent être configurés et exploités adéquatement, ce qui peut rendre les conditions d'exploitation difficiles (p. ex. très longs temps de contact en fût vide; régénération ou remplacement fréquents des milieux filtrants) et peut s'avérer irréalisable d'un point de vue pratique ou économique pour certaines stations de traitement.

Technologies de traitement de l'eau à l'échelle résidentielle

Dans le cas des particuliers qui s'approvisionnent en eau potable à partir d'un puits privé contaminé par des PFAS, l'installation d'un dispositif de traitement de l'eau potable permettrait de réduire la concentration d'un nombre limité de PFAS dans l'eau. Certains dispositifs résidentiels peuvent avoir une capacité nominale permettant de traiter des volumes supérieurs à ceux d'une seule résidence de sorte qu'ils peuvent aussi être utilisés dans des petits systèmes. Avant d'installer un dispositif de traitement, il faut faire analyser l'eau afin de déterminer les caractéristiques chimiques générales ainsi que la concentration et la répartition des espèces de PFAS dans la source d'approvisionnement en eau. Idéalement, un laboratoire accrédité devrait analyser périodiquement l'eau entrant dans le dispositif de traitement et l'eau traitée, afin de vérifier l'efficacité du dispositif de traitement. Les consommateurs devraient vérifier la durée de vie prévue des composants de leur dispositif de traitement selon les recommandations du fabricant et veiller à leur entretien au besoin. Les dispositifs de traitement peuvent perdre leur capacité d'enlèvement avec l'usage et le temps, ils doivent être entretenus et/ou être remplacés au besoin. Il est important de respecter les recommandations du fabricant concernant le fonctionnement et l'entretien d'un dispositif de traitement (p. ex. remplacer les milieux filtrants).

Les dispositifs de traitement peuvent être certifiés conformes à la norme NSF 53 (pour le CAG) et à la norme NSF 58 (pour l'OI) (NSF International, 2022a, 2022b) pour la réduction de 7 PFAS dans l'eau potable à des concentrations égales ou inférieures à une concentration totale de 20 ng/L. Les critères concernant les PFAS s'appliquent à la concentration totale des 7 PFAS suivantes : PFHpA, PFOA, PFNA, PFDA, PFBS, PFHxS et PFOS. Les systèmes de traitement peuvent également être certifiés selon ces deux normes à l'égard des PFAS suivantes : PFHpA, PFOA, PFNA, PFHxS et PFOS. L'utilisation de dispositifs de traitement certifiés en fonction de ces critères aidera les propriétaires à réduire leur exposition aux PFAS par l'eau potable. Des travaux sont en cours en vue d'intégrer à ces normes les concentrations maximales (MCL [maximum contaminant level]) établies en vertu de la règle finale de l'U.S. EPA pour six PFAS dans l'eau potable, à savoir PFOA, PFOS, PFBS, PFHxS, PFNA et HFPO-DA (U.S. EPA, 2024c). Les MCL sont décrits plus en détail à la section « Considérations internationales ».

Les normes NSF ne traitent pas de l'échange d'ions. Par conséquent, aucun système d'échange d'ions sur résine n'est actuellement certifié expressément pour la réduction des PFAS. Toutefois, les systèmes d'échange d'ions à résines sélectives pour les PFAS devraient les éliminer efficacement. Les systèmes de traitement par échange d'ions sont habituellement installés au point d'entrée d'un bâtiment ou d'une maison, et sont généralement conçus et construits par les fournisseurs ou les vendeurs de systèmes d'eau potable pour être utilisés à l'échelle de petits systèmes ou résidentielle. Si le système choisi de traitement de l'eau potable n'est pas certifié pour l'enlèvement des PFAS, il est fortement recommandé de s'assurer que les matériaux et les composants du système sont certifiés conformes à la norme NSF/ANSI/CAN 61 (pour le relargage) (NSF International, 2022c). Tous les produits chimiques utilisés dans le système de traitement devraient être certifiés selon la norme NSF/ANSI/CAN 60 (pour les additifs) (NSF International, 2021). Ces normes garantissent que les systèmes peuvent être utilisés en toute sécurité avec l'eau potable.

Herkert et coll. (2020) ont évalué l'efficacité des filtres d'eau potable résidentiels au point d'utilisation et au point d'entrée pour enlever un groupe de 16 PFAS. L'étude portait sur divers systèmes installés au point d'utilisation (p. ex. des filtres à charbon pour pichet, réfrigérateur ou robinet; des systèmes à bloc de charbon et à OI installés sous l'évier) et sur certains systèmes au point d'entrée. Les systèmes installés au point d'entrée employaient du CAG ou comportaient à la fois du CAG et un milieu échangeur d'ions. Tous les systèmes d'OI et les filtres à charbon à deux étapes installés sous l'évier présentaient une efficacité d'enlèvement ≥ 90 % pour toutes les PFAS évaluées, à l'exception du GenX (efficacité d'enlèvement > 74 %). Les autres filtres au charbon actif employés au point d'utilisation présentaient des taux variables d'enlèvement des PFAS, les PFAS à longue chaîne étant éliminées plus efficacement (∼ 60-70 %) que les PFAS à chaîne courte (∼ 40 %). Avec les systèmes installés au point d'entrée, l'enlèvement des PFAS était largement erratique et imprévisible. Des concentrations accrues de PFAS ont été observées dans l'eau filtrée par certains systèmes installés au point d'entrée, ce qui semble indiquer une saturation du milieu filtrant et une désorption des PFAS dans l'eau filtrée.

Lorsqu'on choisit un dispositif de traitement de l'eau potable, il convient d'accorder une attention particulière aux déchets générés par le traitement qui contiennent des PFAS. Par exemple, les dispositifs d'OI pour le traitement à l'échelle résidentielle génèrent des déchets liquides, qui sont rejetés à l'égout ou dans la fosse septique, tandis que les filtres à CAG épuisés et contaminés peuvent être envoyés à un site d'enfouissement. Par conséquent, les PFAS peuvent être réintroduites dans l'environnement. Les propriétaires devraient également consulter les autorités locales pour déterminer si une méthode de traitement ou une autre source d'eau potable est recommandée, et également pour connaître les options disponibles pour l'élimination des dispositifs de traitement, des milieux filtrants ou des résidus qui peuvent contenir des concentrations élevées de PFAS.

Application de l'objectif

Remarque : Des conseils spécifiques concernant l'application des objectifs pour l'eau potable devraient être obtenus auprès de l'autorité responsables en matière d'eau potable.

Un objectif de 30 ng/L s'applique à la somme des concentrations des 25 PFAS précisées qui sont détectées dans l'eau potable. On calcule cette somme en additionnant la concentration de chacune des PFAS détectées en une concentration égale ou supérieure au SMD établi par les autorités responsables ou par le laboratoire (la valeur la plus basse des SMD étant retenue). Bien que les autorités responsables puissent choisir de mesurer plus de 25 PFAS, l'objectif de 30 ng/L s'applique uniquement à la somme des concentrations des 25 PFAS visées. Les renseignements concernant les PFAS supplémentaires (p. ex. les types détectés, leur concentration, la fréquence de détection) sont précieux et on peut s'en servir pour mieux comprendre le profil des PFAS dans l'échantillon d'eau.

L'analyse des PFAS est très spécialisée et devrait être effectuée par un laboratoire accrédité pour ce type d'analyse.

Étant donné que l'objectif est basé sur la faisabilité de l'analyse et du traitement, si une personne est exposée à une quantité de PFAS supérieure à cet objectif, cela ne signifie pas nécessairement que des problèmes de santé surviendront. L'apparition de problèmes de santé dépend de la quantité, de la fréquence et de la durée d'exposition d'une personne, ainsi que de la nature des PFAS auxquelles elle est exposée. Les caractéristiques propres à une personne (âge, habitudes et état de santé général) peuvent influer sur la façon dont son organisme réagira à l'exposition aux produits chimiques.

En cas de dépassement de l'objectif de 30 ng/L, les autorités responsables devraient évaluer soigneusement les options de gestion des risques pour la santé et les options de traitement (le cas échéant), en collaboration avec les partenaires et les parties intéressées, en tenant compte des particularités de la situation. S'il y a lieu, on appliquera des mesures correctives. Ces mesures pourraient notamment comprendre un nouvel échantillonnage, l'évaluation du profil des PFAS détectées, la protection ou la modification des sources d'eau et l'évaluation des stratégies de traitement de l'eau, telles que le choix ou la combinaison de différentes technologies de traitement d'après la qualité de l'eau et les résultats du nouvel échantillonnage. Cet objectif constitue une référence vers laquelle toutes les juridictions doivent tendre. Toutefois, atteindre cet objectif peut prendre du temps, étant donné la complexité et le coût des activités de mesure et de gestion des PFAS.

Compte tenu de la possibilité d'une exposition simultanée à plusieurs PFAS, du risque d'effets négatifs sur la santé et des données limitées sur de nombreuses PFAS, il est recommandé, si un traitement est nécessaire, de maintenir les concentrations de PFAS au niveau le plus bas qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre (ALARA).

Si les concentrations mesurées des PFAS dans l'eau potable approchent ou dépassent l' objectif de 30 ng/L, il peut s'avérer utile d'examiner les types de PFAS qui sont présentes dans les plus grandes concentrations. Par exemple, le PFOA, le PFOS, le PFHxS et le PFNA sont actuellement considérés comme faisant partie des PFAS les plus toxiques (Polcher et coll., 2023). Si le profil des PFAS révèle de fortes concentrations de ces substances, on devrait envisager des mesures d'atténuation vigoureuses (p. ex. le traitement) à titre de précaution. Il convient de noter que l'Institut national de santé publique du Québec a élaboré des organigrammes pour faciliter la prise de décisions lorsque des PFAS sont détectées dans l'eau potable (INSPQ, 2023; Ponce et coll., 2024).

Les systèmes d'eau devraient caractériser leurs sources d'eau afin d'évaluer les concentrations de PFAS, en particulier si les sources d'approvisionnement en eau potable peuvent être affectées par des zones d'entraînement à la lutte contre les incendies, des bases militaires, des aéroports, des usines ou des sites d'élimination des déchets. Si un traitement est nécessaire pour réduire la concentration en PFAS et tendre vers l'objectif, la source devrait être échantillonnée lors des activités de surveillance de la conformité. Les échantillons seraient prélevés après le traitement, mais avant la distribution de l'eau, généralement au point d'entrée du réseau de distribution. Par ailleurs, des échantillons appariés de l'eau de source et de l'eau traitée devraient être prélevés pour confirmer l'efficacité du traitement.

On devrait procéder à la surveillance des PFAS au moins une fois par année. Les systèmes d'approvisionnement en eau potable devraient consulter les autorités responsables pour déterminer la fréquence appropriée de contrôle, selon leur situation particulière. Les systèmes d'approvisionnement en eau potable qui disposent de données de référence montrant l'absence de PFAS peuvent réduire la fréquence des contrôles, en consultation avec les autorités responsables.

Dans le cas des propriétaires dont l'eau potable provient d'un puits privé contaminé par des PFAS, l'utilisation d'un système de traitement de l'eau potable permettrait de réduire la concentration d'un nombre de PFAS dans l'eau potable. Les dispositifs de traitement peuvent être certifiés pour la réduction de 7 PFAS dans l'eau potable à une concentration totale d'au plus 20 ng/L (la liste des PFAS figure à la section sur les technologies de traitement de l'eau en milieu résidentiel) conformément à la norme NSF 53 (CAG) et à la norme NSF 58 (OI) (NSF International, 2022a, 2022b). L'utilisation de dispositifs de traitement certifiés selon ces critères, même si la certification ne couvre un nombre limité de PFAS, aidera les particuliers à réduire leur exposition aux PFAS présentes dans l'eau potable.

Considérations internationales

Diverses organisations nationales et internationales ont établi des valeurs recommandées pour les PFAS dans l'eau potable. D'autres instances (notamment la Commission européenne, la Suède, le Danemark et certains États américains) ont fixé une valeur recommandée unique qui s'applique à une combinaison de PFAS dans l'eau potable. Par exemple, le Conseil de l'Union européenne a adopté une directive qui prévoit une limite de 100 ng/L pour la somme de 20 PFAS et une limite de 500 ng/L pour la somme de toutes les PFAS dans l'eau potable. Les États membres ont jusqu'en janvier 2026 pour se conformer à ces limites (UE, 2020). L'État du Maine a fixé une limite de 20 ng/L pour 6 PFAS mesurées individuellement ou combinées (State of Maine, 2021). Le Danemark a fixé une valeur de qualité de l'eau potable de 2 ng/L pour la somme des concentrations de 4 PFAS (Danish Ministry of the Environment, 2021).

L'U.S. EPA a établi un règlement national sur l'eau potable (National Primary Drinking Water Regulation), qui prescrit des niveaux ayant force de loi (MCL) pour six PFAS dans l'eau potable : PFOA, PFOS, PFBS, PFHxS, PFNA et HFPO-DA. Les MCL de 4 ng/L pour le PFOA et le PFOS sont basés sur le seuil pratique d'évaluation quantitative de ces substances (en d'autres mots, la concentration la plus basse qui peut être mesurée de manière fiable selon les limites déterminées de précision et d'exactitude dans des conditions normales de laboratoire). Une concentration de 10 ng/L s'applique au PFNA, au PFHxS et au HFPO-DA. En outre, l'U.S. EPA a établi un indice de danger inférieur à 1 pour les mélanges contenant au moins deux des substances suivantes : PFNA, PFBS, PFHxS et HFPO-DA. L'indice de danger est la somme des quotients de danger (c.-à-d. le rapport entre la concentration de PFAS dans l'eau et la valeur basée sur la santé) pour chaque PFAS. L' U.S. EPA a également fixé des objectifs (non exécutoires) de concentrations maximales de contaminants, basés sur la santé, de 0 ng/L pour le PFOA et le PFOS et de 10 ng/L pour le PFNA, le PFHxS et le HFPO-DA (U.S. EPA, 2024b).

Bien que l'Organisation mondiale de la Santé ait élaboré un premier document d'information sur le PFOA et le PFOS dans l'eau potable en 2022, elle a élargi son examen afin d'inclure la présence et les effets sur la santé de substances autres que le PFOS et le PFOA. Le document sera également élargi pour y inclure les sources d'exposition autres que l'eau potable (WHO, 2023).

Justification

Étant donné le risque d'exposition simultanée à plusieurs PFAS, le risque d'effets nocifs sur la santé, ainsi que les données incertaines et limitées sur de nombreuses PFAS, il est justifié d'appliquer aux PFAS une approche de précaution par groupe de substances. Plus les concentrations de PFAS sont faibles, plus le risque pour la santé publique est faible. Ainsi, l'objectif pour les PFAS dans l'eau potable est basé sur la somme des concentrations des PFAS détectées dans l'eau potable. On devrait calculer cette somme en additionnant la concentration de chacune des 25 PFAS énumérées dans l'objectif, et visez que cette concentration totale ne dépasse pas 30 ng/L. Aux fins de l'objectif, un résultat de non-détection est considéré comme ayant une valeur de zéro. Pour les raisons susmentionnées, il est également recommandé que les stations de traitement s'efforcent de maintenir les concentrations de PFAS dans l'eau potable au niveau le plus bas qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre (ALARA).

L'objectif fixé à 30 ng/L vise à réduire l'exposition aux PFAS présentes dans l'eau potable. Il a été déterminé que cette valeur peut être raisonnablement atteinte par des méthodes de traitement, compte tenu des facteurs suivants :

Cet objectif offre au secteur canadien de l'eau potable une méthode efficace de gestion du risque fondée sur une seule valeur cible pour ce groupe de substances chimiques, dans le but de réduire l'exposition aux PFAS et, de ce fait, de réduire le risque pour la santé.

L'établissement de cet objectif ne s'appuie pas sur l'approche classique axée sur la santé, en partie en raison de l'évolution rapide de la science, qui est complexe. Il n'y a actuellement aucun consensus concernant les effets sur la santé dénotant la plus grande sensibilité, et les méthodes d'évaluation des dangers et des risques sont variées. Par conséquent, les valeurs fondées sur la santé qui ont été fixées par diverses autorités responsables diffèrent entre elles. Avec la publication régulière de nouvelles données toxicologiques qui révèlent un nombre croissant d'effets sur la santé associés à l'exposition aux PFAS, les valeurs toxicologiques de référence (VTR) pour ces substances tendent à diminuer. En outre, la population canadienne est exposée simultanément à plusieurs PFAS, et le danger potentiel associé à l'exposition à ces mélanges n'est pas connu. Ainsi, une évaluation substance par substance des VTR disponibles pour chaque PFAS ne constitue pas une approche durable pour gérer les PFAS dans l'eau potable.

Bon nombre des PFAS visées par l'objectif font partie des PFAS les plus étudiées (soit les PFCA et les PFSA) et des PFAS qui sont actuellement considérées comme étant les plus toxiques (notamment le PFOA, le PFNA, le PFHxS et le PFOS) (Sanexen, 2022a, Polcher et coll., 2023). Ce groupe comprend également les PFAS les plus couramment détectées dans l'eau potable (p. ex. le PFBA, le PFPeA, le PFHxA, le PFOA et le PFOS). Bien qu'il existe des données limitées sur la surveillance des PFAS dans l'eau potable au Canada, les données obtenues ailleurs montrent que bon nombre de ces substances sont détectées dans l'eau et d'autres milieux environnementaux et indiquent qu'elles peuvent être transférées ou lessivées dans l'eau potable (Reade et Pelch, 2020).

L'objectif vise 25 PFAS qui peuvent être mesurées par les méthodes analytiques normalisées et validées existantes, ou par une autre méthode validée par les autorités responsables. Le but est de réduire l'exposition aux PFAS qui sont quantifiables, tout en laissant une certaine latitude dans le choix de la méthode à utiliser. Il peut être difficile de prévoir quelles PFAS seront présentes dans un échantillon d'eau potable. C'est pourquoi les systèmes d'approvisionnement en eau potable devraient, dans la mesure du possible, s'efforcer d'analyser d'autres PFAS en plus de celles visées par l'objectif, au moyen de méthodes validées, afin d'avoir une meilleure compréhension sur des PFAS présentes dans l'eau potable. Cela leur permettra de renseigner le choix du procédé de traitement et, en fin de compte, de réduire autant que faire se peut l'exposition aux PFAS.

L'adoption d'un objectif visant un groupe de substances nécessite la prise en compte de plusieurs points importants, ce qui a été fait pour les PFAS. Les PFAS étudiées à ce jour se sont avérées extrêmement persistantes, mobiles et difficiles, voire impossibles à enlever de l'environnement une fois qu'elles y sont libérées. Ces propriétés rendent l'exposition aux PFAS inévitable et potentiellement continue. Les effets néfastes associés individuellement à chaque PFAS sont actuellement inconnus pour la plupart d'entre eux. Cependant, pour les PFAS bien étudiées (notamment le PFOA et le PFOS), de plus en plus d'effets nocifs sont mis au jour à des niveaux toujours plus faibles. Dans le cas des PFAS moins bien étudiées, des effets nocifs sont constatés au fur et à mesure que les recherches progressent. Par conséquent, d'après les connaissances que l'on possède sur les PFAS bien étudiées et la possibilité que d'autres PFAS se comportent de manière similaire, le groupe des PFAS suscite des préoccupations potentielles pour la santé humaine. Une approche de précaution par groupe de substances est donc justifiée.

Compte tenu de tous les facteurs susmentionnés, cet objectif est considéré comme étant l'approche la plus appropriée pour réduire l'exposition potentielle à de nombreuses PFAS par l'eau potable, pendant que les recommandations officielles sont en cours de révision. L'objectif restera en vigueur jusqu'à la publication de la mise à jour des Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada. La révision complète des recommandations pour les PFAS dans l'eau potable comprendra un examen approfondi des nouvelles données toxicologiques (p. ex. les VTR) et des évaluations des risques. Santé Canada demeurera à l'affût des nouvelles recherches et recommandera les changements nécessaires.

Références

Annexe A – Liste des 25 PFAS et seuils minimaux de déclaration associés aux méthodes d'analyse 533, 537.1 et 1633 de l' U.S. EPANote de bas de page a

Abréviation et no CAS PFAS (nombre total de carbone) Visée par la méthode EPA Method 533? (O/N) Visée par la méthode EPA Method 537.1? (O/N) Visée par la méthode EPA Method 1633? (O/N) SMDNote de bas de page b selon l'UCMR 5, en ng/L (voir la note)

11Cl-PF3OUdS

763051-92-9

acide 11-chloroicosafluoro-3-oxaundécane-1-sulfonique (C10) O O O 5

9Cl-PF3ONS

756426-58-1

acide 9-chlorohexadécafluoro-3-oxanonane-1-sulfonique (C8) O O O 2

ADONA

919005-14-4

acide 4,8-dioxa-3H-perfluorononanoïque (C7) O O O 3

HFPO-DANote de bas de page c

13252-13-6

acide dimère d'oxyde d'hexafluoropropylène (C6) O O O 5

PFBS

375-73-5

acide perfluorobutanesulfonique (C4) O O O 3

PFDA

335-76-2

acide perfluorodécanoïque (C10) O O O 3

PFDoA

307-55-1

acide perfluorododécanoïque (C12) O O O 3

PFHpA

375-85-9

acide perfluoroheptanoïque (C7) O O O 3

PFHxS

355-46-4

acide perfluorohexanesulfonique (C6) O O O 3

PFHxA

307-24-4

acide perfluorohexanoïque (C6) O O O 3

PFNA

375-95-1

acide perfluorononanoïque (C9) O O O 4

PFOS

1763-23-1

acide perfluorooctanesulfonique (C8) O O O 4

PFOA

335-67-1

acide perfluorooctanoïque (C8) O O O 4

PFUnA

2058-94-8

acide perfluoroundécanoïque (C11) O O O 2

NFDHA

151772-58-6

acide nonafluoro-3,6-dioxaheptanoïque (C5) O N O 20

PFBA

375-22-4

acide perfluorobutanoïque (C4) O N O 5

8:2 FTS

39108-34-4

acide 1H,1H,2H,2H-perfluorodécanesulfonique (C10) O N O 5

PFEESA

113507-82-7

acide perfluoro(2-éthoxyéthane)sulfonique (C4) O N O 3

PFHpS

375-92-8

acide perfluoroheptanesulfonique (C7) O N O 3

4:2 FTS

757124-72-4

acide 1H,1H,2H,2H-perfluorohexanesulfonique (C4) O N O 3

PFMPA

377-73-1

acide perfluoro-3-méthoxypropanoïque (C4) O N O 4

PFMBA

863090-89-5

acide perfluoro-4-méthoxybutanoïque (C5) O N O 3

6:2 FTS

27619-97-2

acide 1H,1H,2H,2H-perfluorooctanesulfonique (C8) O N O 5

PFPeA

2706-90-3

acide perfluoropentanoïque (C5) O N O 3

PFPeS

2706-91-4

acide perfluoropentanesulfonique (C5) O N O 4

Remarque : Le SMD établi selon l'UCMR est défini comme étant la concentration mesurable la plus faible qui, avec un niveau de confiance de 95 %, peut être atteinte par au moins 75 % des laboratoires participant aux études nationales de l' U.S. EPA sur l'établissement des SMD dans le cadre de l'UCMR pour les PFAS, avec la méthode d'analyse précisée. D'autres SMD peuvent être établis par un laboratoire à des fins particulières ou par les autorités responsables.

Tableau adapté de l' U.S. EPA (U.S. EPA, 2021b).

Note de bas de page 1

La méthode 1633 de l'U.S. EPA porte sur plus de 25 PFAS. Nous présentons ici les 25 PFAS visées par l'objectif, aux fins de comparaison avec la concentration totale.

Retour à la référence de la note de bas de page a

Note de bas de page 2

SMD = seuil minimal de déclaration, établi par l'U.S. EPA pour les analyses réalisées selon la règle UCMR 5 (U.S. EPA, 2021b).

Retour à la référence de la note de bas de page b

Note de bas de page 3

Le HFPO-DA et le sel d'ammonium du HFPO-DA sont des composants de l'auxiliaire technologique GenX, et ces deux substances sont mesurées sous forme d'anion du HFPO-DA selon cette méthode.

Retour à la référence de la note de bas de page c

Annexe B – Liste des abréviations

(Veuillez noter que cette liste ne comprend que les PFAS dont le nom n'est pas écrit au long dans l'annexe A.)

5:1:2 FtB
fluorotélomère (5:1:2) bétaïne
5:3 FTCA
acide fluorotélomère (5:3) carboxylique
6:2 FTSA
acide fluorotélomère (6:2) sulfonique
6:2 FTSAS-sulfone
analogue sulfonylé du fluorotélomère (6:2) thioéther amido sulfonate
7:3 FTCA
acide fluorotélomère (7:3) carboxylique
AOF
fluor organique adsorbable
AFFF
mousse à formation de pellicule aqueuse
AIX
échange d'anions
ALARA
niveau le plus bas qu'il soit raisonnablement possible d'atteindre
COD
carbone organique dissous
FASA
sulfonamide perfluoroalkylé
FBSA
perfluorobutane sulfonamide
FHUEA
acide 2H-perfluoro-2-octénoïque
FHxSA
perfluorohexane sulfonamide
FOUEA
acide 2H-perfluoro-2-décénoïque
FTCA
acide fluorotélomère carboxylique
FTOH
alcools fluorotélomériques
FTSA
acide sulfonique fluorotélomérique
FTSAS
fluorotélomères thioéther amido sulfonates
CAG
charbon actif en grains
HO-X:2 FTS
hydroxyfluorotélomère (X:2) sulfonates
CL-SM/SM
chromatographie en phase liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem
MCL
concentration maximale de contaminant [maximum contaminant level]
LDM
limite de détection de la méthode
SMD
seuil minimal de déclaration
MRM
détection des réactions multiples [multiple-reaction-monitoring]
NF
nanofiltration
N-SPAmP-FASA
N-sulfopropyl diméthylammoniopropyl perfluoroalcane sulfonamide
CAP
charbon actif en poudre
PAP
ester de phosphate de polyfluoroalkyle
PFAA
acides perfluoroalkylés
PFAS
substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées
PFCA
acides perfluorocarboxyliques
PFSA
acides perfluorosulfoniques
PFDS
acide perfluorodécane sulfonique
PFECHS
acide perfluoroéthylcyclohexane sulfonique
PFEtS
acide perfluoroéthane sulfonique
PFOSA
perfluorooctane sulfonamide
PFPrS
acide perfluoropropane sulfonique
OI
osmose inverse
EPS
extraction en phase solide
TAmPr-FASA
triméthylammoniopropyl perfluoroalcane sulfonamide
TOF
fluor organique total
TOP
précurseurs oxydables totaux
VTR
valeur toxicologique de référence
UCMR
Unregulated Contaminants Monitoring Rule (États-Unis)
EPA
Environmental Protection Agency des États-Unis
WAX
échange anionique faible
X:3 FtB
fluorotélomère (X:3) bétaïne
X:1:2 FtB
fluorotélomère (X:1:2) bétaïne

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