Répercussions psychosociales : Préparation du Canada en cas de grippe pandémique : Guide de planification pour le secteur de la santé

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Répercussions psychosociales de la pandémie d'influenza (Document PDF - 584  ko - 30 pages)

Répercussions psychosociales de la pandémie d'influenza

Date de la dernière version : 14 mai 2009

Résumé des changements importants :

  • Cette annexe décrit un cadre de planification proposé pour faire face aux répercussions psychosociales d'une pandémie d'influenza ou d'une urgence de grande envergure en santé publique.
  • Cette annexe énumère les principales activités à entreprendre pour prévenir/atténuer les conséquences psychosociales d'une pandémie d'influenza, s'y préparer, intervenir et s'en remettre.
  • Cette annexe ne prescrit pas de structure; elle se fonde plutôt sur la prémisse que les activités seront entreprises conformément aux structures et modalités organisationnelles locales.

Table des matières

1.0 Introduction

Le présent document propose un cadre de planification pour faire face aux répercussions psychosociales d'une pandémie d'influenza ou d'une urgence de grande envergure en santé publique et est destiné, entre autres, aux planificateurs oeuvrant aux divers paliers de gouvernement et aux organisations non gouvernementales.

D'entrée de jeu, nous expliquons pourquoi il est nécessaire de jeter un éclairage psychosocial sur la planification en prévision d'une pandémie d'influenza, puis nous décrivons les principaux éléments de l'évaluation de la planification d'urgence en santé psychosociale, de l'identification des personnes/populations vulnérables, de l'élaboration et de la mise en oeuvre de services de soutien, de l'évaluation et de la modification des programmes et soulignons la nécessité d'une communication et d'un échange d'information intégrés et rapides au sein de tous les ordres de gouvernement, des organisations non gouvernementales, de la population et des médias.

Le cadre de planification proposé décrit en détail les activités pour chaque phase de la pandémie. Ces dernières se fondent sur les dernières recherches sur les dimensions psychosociales des catastrophes, notamment les leçons tirées de l'épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS ) en 2003, les mesures de santé publique prises lors des incidents d'exposition au charbon en 2001 et sur le consensus professionnel touchant les pratiques exemplaires pour l'intervention psychosociale à la suite d'une catastrophe.

L'ampleur et la nature des plans précis élaborés à l'aide de ce cadre varieront et tiendront compte de l'éventail des rôles, responsabilités et ressources dans le domaine de la planification qui existent chez les partenaires en planification en vue d'une pandémie à tous les échelons de gouvernement.

La planification psychosociale porte sur un large éventail d'aspects (p. ex., résilience professionnelle, santé et maladies mentales, cohésion sociale, confiance de la population) et mobilise tous les paliers de gouvernement et de nombreux partenaires. Pour bien planifier les mesures psychosociales en cas de pandémie, une coordination et une collaboration sont nécessaires entre de multiples systèmes si l'on veut que les plans améliorent véritablement la capacité d'intervention du Canada en cas de pandémie. Ce processus risque donc de nécessiter des efforts importants et additionnels de la part des responsables de la planification au sein des systèmes de santé, de santé mentale et des autres systèmes de services sociaux, ce qui sera particulièrement difficile pour les organisations ou les collectivités qui disposent de peu de ressources ou ont un accès limité à des ressources pour la planification (humaines, financières, matérielles), p. ex. en milieu rural, en milieu éloigné ou géographiquement dispersé). Le fait de ne pas tenir compte des aspects psychosociaux de la planification en prévision d'une pandémie pourrait cependant avoir un effet domino, torpillant la capacité générale d'intervention du pays, exacerbant d'autres problèmes liés à la pandémie (p. ex., ralentissements économiques, pénuries de main-d'oeuvre) et minant la viabilité et la continuité des activités économiques et communautaires à court et à long terme.

Impact prévu sur le système de santé canadien évalué à l’aide des taux d’attaque et du logiciel FluAid des CDC aux é. U. : (ASPC)

Selon les estimations, le nombre de personnes qui s’absenteraient du travail parce qu’elles sont malades ou doivent dispenser des soins varierait entre 10 % et 25 % de la population (US Department of Health and Human Services, 2005; Agence de la santé publique du Canada et ministère des Finances du Canada). En 1999 l’impact économique des effets directs ou indirects sur la santé; il était estimé entre 10 et 24 milliards $CAN et n’incluait pas d’autres répercussions sociales (p. ex., tourisme, commerce). Les taux annuels d’utilisation des soins de santé entre une pandémie et durant une année de pandémie ont été comparés à l’aide de données canadiennes (Alberta) :

1.1 Justification : L'importance de la planification psychosociale en prévision d'une pandémie d'influenza

Les conséquences d'une pandémie d'influenza peuvent grandement dépasser celles associées à tout autre type de catastrophe vécue jusqu'à maintenant. En plus de présenter une menace physique pour la santé, les conséquences secondaires d'une pandémie d'influenza seront considérables. La maladie, la mort, les responsabilités relatives à la prestation de soins et la peur de l'infection exerceront des pressions extrêmes sur le système de santé et contribueront aux pénuries soudaines et importantes de personnel et de ressources dans tous les secteurs. Les taux élevés d'absentéisme, les mesures de santé publique et les craintes suscitées par l'infection peuvent entraîner une perturbation de bon nombre des activités commerciales normales, entraînant des ralentissements économiques importants, en particulier dans le secteur du tourisme et d'autres industries de services connexes. Parfois durant de longues périodes et à plusieurs reprises, certains membres de la collectivité ne pourront pas fréquenter l'école, travailler et participer à de nombreuses activités de loisir, pendant qu'ils doivent composer avec l'incertitude constante associée à cette menace et la douleur d'avoir perdu des amis, des parents et des collègues.

Bien que les catastrophes puissent souvent avoir des répercussions secondaires positives, particulièrement durant la période d'intervention et la période immédiate de rétablissement (p. ex., accroissement de l'altruisme, du bénévolat, du sentiment de cohésion sociale), les mesures de santé publique (p. ex., stratégies d'isolement social) et le fait que la pandémie se prolonge et soit très étendue peuvent affaiblir ce potentiel et exacerber les divisions sociales et les troubles, qui sont aussi fréquents au lendemain des catastrophesNote de bas de page 2. Les multiples répercussions secondaires de la pandémie de même que les répercussions primaires (médicales) ont de sérieuses conséquences sur le bien-être psychologique, affectif, comportemental ou psychosocial des individus et des collectivités.

Dans une étude portant sur la façon dont les Américains pourraient réagir à une éclosion de variole, environ 40 % des répondants ont indiqué qu’ils ne se feraient pas vacciner même si la vaccination était imposée. L’adoption et l’application des mesures de santé publique durant une urgence sanitaire ne peuvent être tenues pour acquises – la compréhension des conséquences comportementales d’une pandémie n’est pas seulement un aspect critique des efforts visant à appuyer la résilience sociale et individuelle, elle a aussi des répercussions sur la capacité des gouvernements de mettre en place des stratégies de santé publique et d’intervention d’urgence. Source : Redefining Readiness Study

On n’a qu’à parcourir les études publiées sur l’épidémie de SRAS en 2003 pour comprendre l’importance critique de la planification psychosociale. L’analyse de l’impact psychosocial à long terme du SRAS sur les travailleurs de la santé (TS) met en évidence une augmentation importante des taux d’épuisement professionnel, de détresse psychologique, de stress post-traumatique et de modification de comportement (p. ex., réduction des contacts avec les patients et des heures de travail) chez les TS à l’emploi des hôpitaux qui ont traité les victimes du SRAS comparativement à ceux qui ont oeuvré dans d’autres hôpitauxNote de bas de page 3.

Le SRAS a également provoqué des bouleversements économiques et sociaux disproportionnés, compte tenu des taux relativement limités d’infection (environ 10 000 cas dans le monde) et de mortalité (environ 1 000 décès dans le monde)Note de bas de page 4. L’impact macroéconomique global, par exemple, est estimé entre 30 et 100 milliards de dollarsNote de bas de page 5. De même, les études des incidents de contamination par le charbon aux états-Unis (é. U.), en 2001, indiquent que la capacité d’intervention du réseau de santé publique américain (p. ex., US Centres for Disease Control and Prevention [CDC], services de santé publique) était plutôt « frêle » et « soumise à une grande pression » par un incident qui s’est soldé par seulement 22 cas réelsNote de bas de page 6 et par la prescription d’antibiotiques à un nombre de personnes qui dépassait le nombre de cas réels par un facteur de plus de 1 300Note de bas de page 7. On s’attend de même à ce que le bilan psychosocial d’une pandémie dépasse de loin le bilan médical, pourtant considérable. Voici certaines des répercussions psychosociales au niveau des individus et des familles :

Bien que les gouvernements et les systèmes de santé dans le monde aient consacré des ressources importantes à la planification de la lutte contre la pandémie d’influenza, une très petite part de cette activité a porté sur la gestion, l’atténuation des problèmes psychosociaux et les mesures pour y faire face. S’il est vrai que la planification psychosociale en prévision d’une pandémie peut exiger des ressources additionnelles des planificateurs qui ont déjà de la difficulté à faire face aux besoins, le fait de ne pas tenir compte de ces problèmes pourrait avoir un effet domino qui torpillerait les plans existants. Si on ne les prend pas en considération, les réactions psychosociales des individus et des familles au stress affectif et psychologique prolongé et omniprésent associé à une pandémie peuvent miner toute la capacité d’intervention du Canada pour faire face à la pandémie. Les personnes qui se sentent mal appuyées ou accablées par le stress ou la douleur peuvent être moins disposées à respecter les mesures de santé publique. Les problèmes psychologiques et affectifs non réglés peuvent engendrer des comportements (p. ex., fréquentation accrue des établissements de santé, refus de travailler) qui exacerbent d’autres problèmes associés à la pandémie (p. ex., ralentissements économiques, pénuries de main-d’oeuvre) et compromettent la viabilité et la continuité économiques et communautaires à court et à long terme.

Une stratégie globale et multidimensionnelle pour répondre psychosocialement aux réactions affectives, psychologiques et comportementales des gens à une pandémie d’influenza peut atténuer ou prévenir certains de ces effets négatifs et améliorer non seulement la capacité d’intervention du pays mais aussi son rétablissement à long terme. La planification psychosociale en prévision d’une pandémie met l’accent sur l’optimisation de la résilience personnelle et sociale, de la performance au travail et de l’adaption et l’application probable des mesures de santé publique. Pour ce faire, cette planification doit être multisectorielle, holistique et miser sur la collaboration tout en appuyant et en favorisant les alliances avec le système de santé (p. ex., soins médicaux, santé publique, santé mentale, santé des Autochtones) et d’autres systèmes (p. ex., services sociaux) et en intégrant l’expertise des personnes qui fournissent déjà une aide psychosociale et qui oeuvrent dans le domaine de la planification psychosociale en cas de catastrophe. Comme pour toutes les activités de planification d’urgence et en cas de catastrophe, le processus de planification est tout aussi important, sinon plus, que le plan dont il en résulte. Pour être efficace, la capacité d’intervention d’urgence doit compter sur la qualité des relations établies (p. ex., sentiment de confiance, coopération et collaboration) et la contribution des personnes directement et indirectement touchées et visées par les plans.

La prise en compte des impacts psychosociaux d’une pandémie s’apparente étroitement à la pratique de la communication du risque. La communication du risque consiste à produire, à échanger et à diffuser des renseignements adéquats pour permettre aux autorités responsables de gérer les situations à risque et aux personnes intéressées (celles qui sont à risque ou qui se perçoivent comme étant à risque) de prendre des décisions éclairées. Elle vise à faciliter le dialogue et l’échange de renseignements essentiels entre les intéressés et les autorités. Cette mesure de santé publique peut être vitale parce qu’elle préconise la préparation de stratégies de communication et d’atténuation du risque qui s’inspirent des réalités sociales, culturelles et politiques propres à la situation. L’atténuation des impacts psychosociaux d’une urgence en santé publique est donc un des effets clés d’une communication efficace du risque.

1.2 Hypothèses pour la planification psychosociale en prévision d'une pandémie d'influenza

Le Plan canadien de lutte contre la pandémie d'influenza (PCLCPI) se fonde sur une série d'hypothèses de planification décrites précédemment dans le Plan. Bien que les meilleures pratiques de planification dans le domaine de la gestion d'urgence mettent en général l'accent sur l'approche tous risques, on reconnaît maintenant que la planification en prévision d'une pandémie d'influenza et d'autres catastrophes de grande envergure en santé publique (p. ex., attentat terroriste impliquant des agents chimiques, biologiques, nucléaires, radiologiques ou explosifs) comporte des difficultés particulières (p. ex., infrastructure intacte mais taux élevés d'absentéisme et crise de longue durée).

Les hypothèses de planification sur lesquelles se base le présent cadre découlent d'un consensus qui règne actuellement parmi les professionnels concernant la réaction humaine à un stress extrême et à des urgences de grande envergure. Elles reconnaissent également qu'une stratégie psychosociale efficace requiert une réponse adaptée au contexteNote de bas de page * qui tient compte de l'influence des facteurs sociaux, culturels, économiques et personnelsNote de bas de page 8, ainsi qu'une analyse des répercussions psychosociales issues des hypothèses de planification sur lesquelles repose le cadre du PCLCPI. Par exemple, le PCLCPI s'appuie sur l'hypothèse qu'une dose standard d'antiviral pourra être administrée à tous ceux qui ont besoin d'un traitement précoce. Sur le plan psychosocial, cette hypothèse a comme effet général de rassurer et de maintenir la confiance en l'équité et l'efficacité des mesures prises par le gouvernement pour lutter contre les premiers problèmes associés à une pandémie d'influenza.

Cependant si la dose requise doit être accrue, il n'est pas certain que ce type d'accès universel sera possible aux premiers stades d'une épidémie. La façon dont les décisions sont prises quant à l'ordre de priorité dans ce scénario et la manière dont cette information est communiquée aux travailleurs de la santé et à la population déclencheront d'autres réactions psychosociales. De même, on suppose que la demande de ressources et d'installations sanitaires sera telle que celles ci ne seront pas accessibles à tous, ce qui nécessitera l'établissement d'un ordre de priorité pour les stratégies de traitement. L'un ou l'autre de ces scénarios peuvent entraîner plusieurs réponses :

Une planification psychosociale efficace prévoirait ces réponses possibles et établirait des plans en conséquence grâce aux moyens suivants :

En plus de tenir compte des répercussions psychosociales issues d’autres hypothèses de planification en vue d’une pandémie, le présent cadre se fonde sur des hypothèses psychosociales précises, notamment :

* Pour une description complète des lignes directrices opérationnelles relatives au soutien psychosocial dans les urgences de grande envergure et autres, voir : SeynaeveNote de bas de page8.

1.3 Objectifs de la planification psychosociale en vue d’une pandémie d’influenza

Le premier objectif d'une intervention psychosociale à la suite d'une catastrophe ou d'une urgence en santé publique est de rétablir et d'accroître la capacité des personnes de reprendre leur vie en comblant leurs besoins sociaux, affectifs, psychologiques et physiques. On soutiendra et renforcera entre autres les systèmes sociaux (p. ex., réseaux de soutien social) et aidera les personnes à retrouver un sentiment de maîtrise, à réduire leur tension psychologique, à gérer efficacement le stress et à améliorer leurs stratégies d'adaptation. Un certain nombre d'objectifs particuliers sont visés :

1.4 Principes de la planification psychosociale

Les lignes directrices pour la planification et la gestion d'une intervention psychosociale en réponse à une pandémie s'inspirent de principes humanitaires centraux (p. ex., valorisation des droits humains et de l'équité). La planification psychosociale devrait faire en sorte que les services de santé mentale, les services psychiatriques et de soutien psychosocial soient disponibles et accessibles de la façon la plus juste possible pour les populations touchées, quels que soient le lieu de travail, la langue et les facteurs individuels (p. ex., sexe, âge, origine ethnique, lieu géographique).

Références

Certains de ces hyperliens donnent accès à des sites d'un organisme qui n'est pas assujetti à la Loi sur les langues officielles. L'information qui s'y trouve est donc dans la langue du site.

Lectures supplémentaires

Paul M. Darby. The Economic Impact of SA RS. Special Briefing. Conference Board of Canada. 2003.

Guberman N, Nicholas E, Nolan M, Rembicki D, Lundh U, Keefe J. Impacts on practitioners of using research-based career assessment tools: experiences from the UK, Canada, and Sweden, with insights from Australia. Health and Social Care in the Community 2003; 11(4):345-55.

Norris FH. Range, magnitude, and duration of the effects of disasters on mental health: review update, 2005. Hanover, NJ: Dartmouth College (Dartmouth Medical School and National Center for PTSD). Consulté le 22 janv. 2008.

Norris FH, Friedman MJ, Watson PJ. 60,000 disaster victims speak: Part II. Summary and implications of the disaster mental health research. Psychiatry: Interpersonal & biological processes 2002; 65:240-60.

Norris FH, Friedman MJ, Watson PJ, Byrne CM, Diaz E, Kaniasty K. 60,000 disaster victims speak: Part I. An empirical review of the empirical literature, 1981-2001. Psychiatry: Interpersonal & Biological Processes 2002; 65:207-39.

Organisation mondiale de la Santé (2003). Rapport sur la santé dans le monde, 2003 - façonner l'avenir. Chapitre 5. SRAS : les leçons tirées d'une nouvelle maladie. Consulté le 2 juin 2003.

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2017-12-05