Avis : Candida auris : recommandations provisoires pour la prévention et le contrôle des infections

Champignon pathogène mondial émergent associé aux soins de santé, Candida auris (C. auris)

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Contexte

Candida auris (C. auris) est un champignon qui peut provoquer des infections invasives et des éclosions associées aux soins de santé. C. auris est souvent résistant à plusieurs médicaments antifongiques et peut être difficile à identifier en laboratoire. On estime que le taux de mortalité des infections invasives à C. auris est supérieur à 40 %, ce qui est similaire à celui d'autres organismes résistants aux médicaments.Note de bas de page 1 L'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a constaté la propagation de C. auris dans les hôpitaux et les foyers de soins de longue durée (SLD) du monde entier, y compris au Canada. Récemment, de multiples éclosions de C. auris associées à des soins de santé et l'identification d'isolats de C. auris pan-résistants à l'échelle internationale ont accru les inquiétudes quant à l'impact de C. auris dans les établissements de soins de santé.

Les données du Laboratoire national de microbiologie (LNM) et du Programme canadien de surveillance des infections nosocomiales (PCSIN) indiquent que 31 cas de C. auris ont été isolés chez des patients hospitalisés dans 6 provinces canadiennes entre 2012 et 2021. Cela inclut les cas infectés et colonisés. La littérature évaluée par les pairs décrit la première série de cas de C. auris et une petite éclosion hospitalière signalée au Canada.Note de bas de page 2Note de bas de page 3Note de bas de page 4 En raison du manque de données, le statut de C. auris dans les foyers de SLD est actuellement inconnu.

La propension de C. auris à se propager peut avoir de sérieuses implications pour le système de santé canadien. Les infections invasives à C. auris peuvent entraîner une morbidité et une mortalité graves, en particulier chez les patients hospitalisés qui sont immunodéprimés ou qui reçoivent des soins intensifs.Note de bas de page 5Note de bas de page 6

C. auris peut :

Les difficultés d'identification de C. auris en laboratoire et les erreurs d'identification par des méthodes phénotypiques et biochimiques sont bien documentées. Toutefois, la situation s'est améliorée grâce aux progrès des technologies de laboratoire (comme les mises à jour des bases de données de MALDI-TOF)Note de bas de page 5Note de bas de page 19. L'identification précoce, le respect des pratiques de prévention et de contrôle des infections, ainsi que le nettoyage et la désinfection stricts et efficaces de l'environnement peuvent prévenir la propagation de C. auris dans les établissements de santé.

Les directives provisoires suivantes sont fondées sur les meilleures preuves disponibles et constituent une mise à jour des recommandations provisoires de l'ASPC sur C. auris de 2017. Ces directives seront mises à jour au fur et à mesure que de nouveaux renseignements seront disponibles.

Aux fins de la présente directive, le terme « patient » sera utilisé pour inclure les personnes recevant des soins de santé qui sont traditionnellement et couramment appelées patients, clients ou résidents.

Recommandations provisoires pour la prévention et le contrôle des infections à C. auris dans les hôpitaux et les foyers de soins de longue durée :

  1. Les pratiques courantes, y compris le respect de l'hygiène des mains, sont requises pour les soins de tous les patients à tout moment.
  2. Les patients admis dans un hôpital ou un foyer de SLD doivent être soumis à des précautions préventives contre les contacts et à un dépistage de C. auris s'ils ont été admis dans un hôpital ou un foyer de SLD à l'étranger (y compris aux États-Unis) au cours des 12 derniers mois ou s'ils ont été transférés d'un établissement de santé canadien où une éclosion de C. auris est en cours (si on le sait).
  3. Le dépistage de C. auris doit comprendre un seul écouvillonnage bilatéral de l'aisselle et de l'aine du patient. En outre, des écouvillons uniques de sites précédemment colonisés ou pertinents sur le plan clinique peuvent également être indiqués (par exemple : plaies, sites de sortie de dispositifs, conduit auditif externe).
  4. Les patients suspectés ou confirmés positifs pour C. auris doivent être soignés dans une chambre individuelle avec une salle de bain dédiée, en respectant les précautions de contact avec des blouses et des gants. Lorsqu'une salle de bain dédiée n'est pas disponible, une commode dédiée peut être utilisée.
  5. Lorsqu'une colonisation ou une infection par C. auris inconnue auparavant est identifiée chez un patient qui n'est pas déjà soumis aux précautions de contact :
    1. Tous les contacts étroits avec le patient avant l'identification (tels que les colocataires passés et présents, les compagnons de salle de bain ou les patients qui ont occupé la chambre immédiatement avant le patient concerné) doivent être placés dans une chambre individuelle avec des précautions préventives contre les contacts et des échantillons doivent être prélevés pour tester la présence de C. auris. Les contacts étroits avec les patients qui ont fait l'objet d'un dépistage doivent rester sous précautions de contact jusqu'à ce que la prévention et le contrôle des infections les autorisent.
    2. Les compagnons de service ou d'unité qui ne sont pas des contacts étroits doivent être testés (c'est-à-dire le test de prévalence ponctuelle). Envisager des précautions de contact jusqu'à ce que les résultats de la prévalence ponctuelle soient disponibles. Les chambres individuelles ne sont pas nécessaires pour les compagnons de service ou d'unité qui ne sont pas des contacts étroits en attendant les résultats du test de prévalence ponctuelle.
  6. Lorsqu'un cas unique est identifié, les établissements sont encouragés à demander une identification au niveau de l'espèce pour tous les isolats qui seraient normalement déclarés comme Candida pendant une période limitée (par exemple, 4 à 8 semaines), lorsqu'une nouvelle infection ou colonisation par C. auris est identifiée chez un patient.
  7. Pour les patients identifiés comme colonisés ou infectés par C. auris, une chambre individuelle et des précautions de contact doivent être mises en place pour la durée de l'admission à l'hôpital ainsi que pour toute admission ultérieure ou future à l'hôpital. Il n'existe pas de critères cliniques ou microbiologiques éprouvés permettant de prédire de manière fiable la disparition de la colonisation ou de l'infection. La durée des précautions lors des contacts avec les résidents ou les clients atteints de C. auris dans les foyers de SLD ou autres établissements de santé doit être déterminée en collaboration avec l'épidémiologie locale et régionale, l'administration de l'établissement et les professionnels de la prévention et du contrôle des infections.
  8. Les fournitures de soins à usage unique et jetables doivent être utilisées pour un patient atteint de C. auris dans la mesure du possible. L'équipement et les fournitures de soins aux patients réutilisables et non critiques doivent être identifiés et entreposés dans la chambre du patient, dédiés au patient pour la durée de son admission et nettoyés et désinfectés de manière appropriée avant d'être utilisés sur un autre patient.
  9. Le nettoyage et la désinfection de l'environnement de la chambre d'un patient atteint de C. auris doivent être effectués à l'aide de désinfectants hospitaliers ou de soins de santé approuvés par Santé Canada et ayant des allégations d'efficacité contre C. auris (avec des numéros d'identification de médicament). Les composés d'ammonium quaternaire ne doivent pas être utilisés en raison de leur activité réduite contre C. auris. Il faut suivre les instructions du fabricant concernant l'utilisation, le temps de contact humide et le type de surface et d'équipement. Toutes les surfaces horizontales et fréquemment touchées doivent être nettoyées au moins une fois par jour et lorsqu'elles sont visiblement souillés.
  10. Le nettoyage final de l'équipement et de l'environnement du patient, y compris le retrait et le nettoyage du linge d'hôpital et des rideaux d'intimité, doit être effectué lors de la sortie ou du transfert du patient. Toutes les fournitures de soins aux patients à usage unique et jetables entreposées dans la chambre du patient doivent être jetées pendant le nettoyage final.
  11. Le transfert de patients colonisés ou infectés par C. auris au sein d'un même établissement ou d'un établissement à l'autre doit être évité, à moins qu'il ne soit nécessaire pour des raisons médicales et pour les transitions de soins (par exemple, des soins aigus vers les SLD). L'unité, le service ou l'établissement destinataire doit être informé à l'avance. Tous les établissements de santé devraient être en mesure de prendre en charge les patients atteints de C. auris et la colonisation ou infection par C. auris ne devrait pas être une raison de refuser le transfert.
  12. Toute transmission de C. auris entre patients au sein d'un établissement de santé doit être considérée comme une éclosion nécessitant des mesures supplémentaires de prévention et de contrôle des infections. Les mesures de réponse aux  éclosions de C. auris doivent être mises en œuvre en consultation avec les professionnels locaux de la santé publique, de l'administration de l'établissement, et de la prévention et du contrôle des infections.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur les mesures générales de prévention et de contrôle des infections :

Les infections à C. auris étant un problème émergent au Canada, il est important de :

Références

Note de bas de page 1

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