ARCHIVÉE - Les agressions sexuelles entre frères et sœurs: Guide à l'intention des parents

Il peut être difficile d'admettre qu'une situation d'exploitation sexuelle pourrait exister entre vos enfants. Le principal, c'est de se faire aider.

Ce livret s'adresse aux parents qui connaissent ou soupçonnent l'existence d'agressions sexuelles entre leurs enfants et qui désirent y remédier. Il s'adresse aussi aux parents qui veulent comprendre et prévenir les agressions sexuelles entre frères et sœurs. Beaucoup de parents refusent de penser que ce phénomène pourrait toucher leur famille; ce livret a pour objet de les aider à voir la réalité en face, d'une manière éclairée.

Qu'entend-on par agressions sexuelles entre frères et sœurs?

Dans ce livret, l'expression « frères et sœurs » désigne les enfants élevés dans une même famille, qu'ils soient issus de lits différents, ou qu'il s'agisse d'enfants adoptés, en famille d'accueil ou naturels. L'exploration naturelle et saine entre des enfants d'âges rapprochés, de même taille et qui ont atteint sensiblement le même stade de développement ainsi que les jeux sexuels mutuels, volontaires et non imposés ne constituent pas de la violence sexuelle entre frères et sœurs. La violence sexuelle entre frères et sœurs, ou inceste, peut se produire entre un frère et une sœur, deux sœurs ou deux frères, mais la forme la plus commune de violence sexuelle est celle qui est infligée par un frère plus âgé à sa sœur cadette. (Gaffast Conn-Caffrey, 1998). Les agressions sexuelles entre frères et sœurs, comme toutes les formes d'agression sexuelle, constituent un abus de pouvoir.

Il peut être difficile d'apprendre l'existence d'agressions sexuelles entre vos enfants.

Lorsque dans une famille un enfant, profitant de son âge ou de sa force, exerce un chantage ou des menaces sur un enfant plus faible pour le forcer à commettre un acte sexuel, on parle d'agression sexuelle. En général, l'agresseur commence par gagner la confiance de la victime, avant de trahir cette confiance pour commettre son délit. L'agresseur peut recourir à la force, à des menaces corporelles, au chantage ou bien à la promesse d'une attention particulière ou d'un cadeau pour que la victime conserve le secret. Cette forme d'agression sexuelle, comme les autres, ne sous-entend pas nécessairement qu'il y ait contact physique. L'agresseur peut en effet obliger d'autres enfants à commettre des actes sexuels entre eux. Il peut aussi les forcer à assister à des actes sexuels ou à regarder des films pornographiques. Il peut aussi leur demander de façon répétée, contre leur gré, de s'habiller, de se laver ou d'aller à la toilette en sa présence.

Quels sont les effets des agressions sexuelles entre frères et sœurs?

Les agressions sexuelles entre frères et sœurs ont souvent des effets très dommageables pour les raisons suivantes :

  • Les enfants vivant ensemble, la victime peut se sentir contrainte et prise au piège par l'agresseur pendant un temps prolongé. Cette contrainte peut prendre la forme de chantage, de menace, de stimulation sexuelle ou de violence physique. La force et la menace sont souvent utilisées pour que les jeunes frères et sœurs ne dévoilent pas les agressions sexuelles dont ils sont victimes. Cette forme de contrainte peut miner l'estime de soi des frères et sœurs et contribuer à isoler du reste de sa famille l'enfant qui subit les sévices.
  • Au départ, la victime fait habituellement confiance à l'agresseur à cause des liens familiaux qui les unissent. Lorsqu'un frère ou une sœur abuse de cette confiance, l'enfant se sent trahi, blessé par quelqu'un dont il attendait amour et attention. En outre, vos jeunes enfants s'en remettent naturellement à vous afin que vous trouviez une personne fiable et bienveillante pour les garder. Lorsque la personne que vous choisissez les exploite, ils peuvent de nouveau se sentir trahis, mais cette fois par vous. Ils peuvent même avoir l'impression que vous approuvez ces mauvais traitements.
  • Les victimes se sentent habituellement impuissantes à mettre fin à la situation. Elles se sentent incapables d'arrêter l'agresseur, à cause des menaces qu'il ou elle fait peser sur elles. Elles peuvent aussi se sentir démunies si vous refusez de croire leurs révélations. Ce sentiment d'impuissance peut se maintenir en elles et nuire à leur vie d'adulte.
  • Il peut arriver que les victimes se sentent responsables, ou qu'elles se sentent mauvaises ou « sales ». Si vous déclarez à vos jeunes enfants qu'ils n'ont que ce qu'ils méritent, ou si vous les tenez responsables de quelques façons pour les agressions, ils vous croiront et ils auront honte. Et ce sentiment peut perdurer jusqu'à l'âge adulte. Si vous parvenez à croire et à soutenir votre enfant, vous permettrez à tous vos enfants de mieux se sentir.
  • Les agressions sexuelles entre frères et sœurs (inceste) sont souvent plus dommageables que si elles étaient commises par un étranger. C'est parce que, pour leur sécurité, les enfants dépendent de leur famille et de leurs parents. Il ressort d'études effectuées sur des agresseurs sexuels adolescents que ceux qui s'en prennent à leurs frères et sœurs commettent des délits plus graves et pendant de plus longues durées comparativement aux autres délinquants du même âge. Ce phénomène s'explique par le fait que les victimes (frères et sœurs) sont d'un accès plus facile, et cela, pendant un laps de temps plus long, et que les gestes répréhensibles sont protégés par la loi familiale du silence.

Si vous connaissez ou soupçonnez l'existence d'actes d'exploitation sexuelle entre vos enfants, prenez des mesures. Si vous n'agissez pas, en pensant que « cela leur passera », vous ne ferez qu'entretenir le mal et le silence.

Est-il normal qu'une curiosité sexuelle existe entre frères et sœurs?

Oui. Si une fille de quatre ans touche le pénis de son petit frère pendant que sa mère est en train de le changer, elle démontre une curiosité qui est normale. Il se peut qu'elle n'ait encore jamais vu de pénis et qu'elle veuille savoir à quoi cela ressemble. Lorsqu'un garçon de cinq ans découvre les organes génitaux de sa sœur, il se demande peut-être ce qu'elle a fait de son pénis, si elle l'a perdu ou s'il doit lui en pousser un. Il lui faudra peut-être quelques autres observations et poser des questions pour comprendre que les garçons et les filles ne sont pas faits pareils. En tant que parent, vous pouvez profiter de cette occasion pour donner à vos enfants quelques éléments d'éducation sexuelle adaptés à leur âge.

Si, par contre, votre garçon de 14 ans demande à voir les organes génitaux de sa sœur de cinq ans, il ne manifeste pas une curiosité normale. À cet âge, en principe, il devrait savoir de quoi un sexe féminin a l'air. Il faut donc l'interroger sur son motif. Il se demande peut-être quelle impression cela fait de toucher les organes génitaux d'une femme avec le doigt ou le pénis. Mais satisfaire ainsi sa curiosité avec sa petite sœur tiendrait du délit.

Les enfants de quatre et cinq ans qui baissent leur pantalon pour comparer leurs parties génitales n'agissent probablement que par curiosité. Mais s'il advenait qu'ils persistent dans cette attitude ou que, à mesure que le temps passe, ils se touchent mutuellement le sexe d'une manière répétée, vous devriez intervenir. Si cela vous semble dépasser la simple curiosité, il se peut qu'un des enfants ait assisté à des échanges sexuels entre adultes, qu'il ait eu accès à des images sexuellement explicites par le biais de la pornographie ou qu'il ait été victime d'agressions sexuelles de sorte qu'il reproduit ce qu'il a vu ou entre dans le rôle de l'agresseur.

Il n'est pas bon de penser que tous les jeux sont inoffensifs. Il vaut mieux essayer de comprendre ce qui se cache derrière un comportement. Lorsqu'un enfant répète sans cesse les mêmes jeux, il y a lieu de se demander s'il va bien.

Voici quelques questions que vous pouvez vous poser, ou poser à un professionnel :

  • Est-ce le comportement que vous attendriez d'un enfant de cet âge?
  • Depuis combien de temps le comportement en question
    se manifeste-t-il?
  • À quoi le comportement en question vise-t-il?
  • Avez-vous l'impression que l'un des enfants joue à
    contrecœur?

Voici quelques exemples de comportements que l'on trouve chez les enfants d'âge préscolaire :

Comportement normal Comportement alarmant
Se touche le sexe avant de s'endormir. Se touche fréquemment le sexe au lieu de jouer.
Cherche à comprendre ce qui différencie les filles et les garçons. Insiste après qu'on a répondu d'une manière acceptable à ses questions sur le sexe.
Aime observer les adultes dans la salle de bains. S'obstine à observer les adultes dans la salle de bains.
Joue au « docteur » avec d'autres enfants. Oblige d'autres enfants à jouer au docteur.
Joue au « papa et à la maman » en alternant les rôles. Imite des actes sexuels.
Il y a des avantages que le tribunal ordonne des séances de counseling pour l'agresseur impliqué dans la violence sexuelle entre frères et soeurs, telle qu'apprendre à se sentir responsable de son propre comportement et à se maîtriser.

Si vous ne savez quoi penser d'un comportement donné, adressez-vous à un professionnel (médecin, infirmière ou conseiller d'école, travailleur social, responsable de garderie, psychologue pour enfants, etc.). Vous pourriez aussi consulter le livret, de la même série, intitulé Les enfants sexuellement agressifs : Guide à l'intention des parents et des enseignants.

Quel rapport y a-t-il entre cette forme d'agression et d'autres formes d'agression?

Les agressions sexuelles entre frères et sœurs dénotent un abus de pouvoir et d'autorité. Il est fréquent que les enfants qui exploitent sexuellement leurs jeunes frères et sœurs profitent également d'eux sous d'autres formes.

L'acte qui consiste à rabaisser, tourmenter ou humilier continuellement un enfant plus jeune à propos de sa taille, de son sexe ou d'autres traits personnels est appelé violence psychologique. Effrayer de jeunes enfants dans le noir, leur dire que personne ne les aime ou leur annoncer que des choses terribles vont leur arriver, c'est aussi faire preuve de violence psychologique.

Pour rassurer leurs parents, les enfants qui s'amusent à frapper, à pincer ou à étouffer des frères et sœurs plus faibles ou moins âgés déclarent le plus souvent que « ce n'était qu'un jeu » ou « une simple bagarre ». Mais, à partir du moment où l'enfant le plus jeune subit une contrainte, il ne s'agit plus d'un « jeu », mais de sévices.

L'histoire de Mathieu

En vertu de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, Mathieu a été accusé d'avoir agressé sexuellement sa jeune sœur Vanessa. Son agent de surveillance a décidé d'appliquer la décision rendue par le tribunal, voulant que Mathieu suive des séances de counseling.

Mathieu, âgé de 15 ans, a expliqué au conseiller que ses camarades de classe étaient plus forts et sexuellement plus « doués » que lui, et que l'un d'entre eux l'avait mis au défi de faire l'amour avec une fille. Or, il n'aurait jamais osé parler à une fille, et encore moins l'inviter à sortir avec lui. Il a reconnu avoir eu des relations sexuelles avec sa jeune sœur Vanessa un soir qu'il en avait la garde.

Sa mère a alors révélé au conseiller que, à plusieurs reprises, le père de Mathieu l'avait forcée à avoir des relations sexuelles en présence de leurs enfants. Elle a aussi raconté qu'il la battait souvent lorsque le repas n'était pas prêt à l'heure. Le conseiller lui a recommandé de mettre Mathieu et Vanessa dans un foyer de transition à titre temporaire, en attendant de décider si elle devait rester ou non avec son mari.

Plusieurs facteurs ont conduit Mathieu à commettre son délit. Son père faisait subir à sa mère des mauvais traitements d'ordre physique, mental et sexuel; il se comportait aussi en père maltraitant, sur le plan sexuel et affectif, en contraignant sa mère à avoir des rapports sexuels devant Mathieu; et, par son exemple, il amenait Mathieu à penser qu'il était acceptable pour un père de famille d'user de la force sur ses proches. Pour aggraver le tout, il faisait régner sur la famille une discipline tellement stricte que Mathieu ne pouvait mener une vie sociale normale avec les autres adolescents. C'est pourquoi, sous la pression de ses camarades, il a essayé d'obtenir les renseignements et l'expérience qui lui manquaient en violentant sa jeune sœur.

Il peut être difficile d'admettre qu'une situation d'exploitation sexuelle pourrait exister entre vos enfants. Et c'est peut-être encore plus difficile lorsqu'il fait d'avouer à quelqu'un d'autre. Le principal, c'est de se faire aider.

Dans le cas des agressions sexuelles entre frères et sœurs, il est très utile que le tribunal ordonne des séances de counseling. Mathieu a ainsi pu apprendre quelques aptitudes sociales qui lui ont permis de mieux se sentir dans sa peau avec les enfants de son âge, et il a cessé d'imiter le comportement violent et dénaturé de son père. Il a aussi appris à se sentir responsable de son propre comportement et à se maîtriser. Cette crise familiale a eu d'autres issues heureuses : la mère de Mathieu a réussi à couper les ponts avec son mari abusif et Vanessa a commencé à voir un conseiller en matière de violence sexuelle. Après l'avoir jugé coupable, le tribunal a condamné le père de Mathieu à suivre des séances de counseling pour qu'il modifie sa façon de traiter les femmes et les enfants.

Quels facteurs contribuent aux agressions sexuelles entre frères et sœurs?

Ce phénomène n'est pas attribuable à un seul facteur, mais bien à plusieurs, dont voici quelques exemples :

Si vous connaissez ou soupçonnez l'existence d'actes d'exploitation sexuelle entre vos enfants, prenez des mesures. Si vous n'agissez pas, en pensant que « cela leur passera », vous ne ferez qu'entretenir le mal et le silence.
  • Abus de pouvoir après s'être vu confier des responsabilités. Dans une famille, il est important que les aînés apprennent à prendre soin de leurs jeunes frères et sœurs. Mais il est tout aussi important qu'ils sachent que ces responsabilités sont limitées. Elles leur donnent le droit de prendre des décisions lorsqu'ils ont la garde d'enfants plus jeunes, mais pas le droit de les mener par le bout du nez, de les accabler, de les menacer ou de leur faire du mal. En tant que parent, vous devez leur faire voir qu'être responsable ne signifie pas agir selon son bon vouloir. Mathieu est un bon exemple de garçon aîné qui fait mauvais usage des responsabilités qu'on lui donne.
  • Enfants témoins ou victimes d'agressions sexuelles. Les enfants sexuellement exploités par des membres de leur famille, par des adultes ou par des enfants plus âgés réagissent parfois en devenant violents physiquement. Ils peuvent aussi réagir en faisant subir le même genre de traitement à des enfants plus jeunes à force de cajoleries, de manipulations ou de contrainte. Les frères et sœurs peuvent ainsi devenir aussi des victimes par contrecoup. On dit parfois des enfants qui reproduisent ainsi leur passé d'individus agressés sexuellement qu'ils sont « sexuellement réactifs ». Il est important pour vous de savoir que les enfants victimes de mauvais traitements sexuels peuvent devenir des « délinquants sexuels ».
  • Pornographie facile d'accès. Les parents qui laissent du matériel pornographique à la portée de leur progéniture courent le risque de voir leurs enfants imiter les comportements sexuels des adultes. De plus, les enfants qui peuvent accéder à Internet sans la supervision d'un adulte risquent d'être exposés à du matériel pornographique ou d'entrer en relation avec des adultes ou des adolescents qui sont des prédateurs sexuels.
  • Négligence. Les enfants qui sont négligés, sur le plan physique ou affectif, ou souvent laissés à eux-mêmes, sont plus susceptibles de se livrer à toutes sortes d'expériences sexuelles. Ils peuvent mettre en pratique des comportements sexuels appris avec d'autres enfants, vus dans du matériel pornographique ou expérimenter par eux-mêmes, pour essayer d'en retirer du plaisir. Un tel comportement peut s'expliquer en partie par la volonté d'assouvir des besoins de base tels que donner et recevoir de la chaleur humaine. À première vue, il peut sembler que les relations sexuelles entre frères et sœurs qui commencent de cette façon obéissent à un besoin de curiosité et soient mutuellement consenties. C'est pourtant rarement le cas, à cause des différences de pouvoir qui existent entre les enfants. Lorsque ce comportement persiste ou s'intensifie, il peut devenir abusif, surtout si l'un des enfants désire y mettre fin et l'autre non.
  • Absence d'éducation sexuelle. Les enfants et les adolescents à qui l'on ne donne pas une éducation sur leur développement physique et sexuel adaptée à leur âge ont plus tendance à devenir des agresseurs sexuels.
  • Socialisation insuffisante. À l'instar de Mathieu, les enfants qu'on ne laisse pas jouer avec leurs camarades et les adolescents à qui on interdit de faire des connaissances, de danser ou de rencontrer leurs amis en dehors de la maison ont une plus grande propension à exploiter sexuellement leurs jeunes frères et sœurs.
  • Déni. Essayer de minimiser un comportement inhabituel ou de faire comme s'il n'existait pas, c'est être dans le « déni ». Certains parents peuvent choisir de fermer les yeux sur les incidents qui se sont produits parce qu'ils ne savent pas comment y faire face ou parce qu'ils leur rappellent de mauvais souvenirs. Certes, ce genre de réaction ne peut être la cause d'agressions sexuelles entre frères et sœurs, mais elle contribue à les entretenir.
  • Sentiment d'accablement. Lorsque vous vous sentez submergé par vos propres problèmes (stress émotionnel, maladie, chômage, etc.), il peut arriver qu'un incident échappe à votre attention. Dans ce cas, votre famille étendue ou un organisme de services sociaux pourra vous apporter un soulagement et vous aider à voir plus clair dans ce qui arrive à votre famille.

Pourquoi peut-il être difficile de reconnaître les agressions sexuelles entre frères et sœurs dans ma famille?

Pour les parents, il peut être difficile de reconnaître qu'il existe une situation d'exploitation sexuelle entre leurs enfants. Plusieurs raisons expliquent pourquoi les parents ont de la difficulté à voir ce qui se passe entre leurs enfants :

  • La victime peut être trop jeune pour se rendre compte de la situation. Elle peut penser que c'est quelque chose qui se fait dans toutes les familles.
  • L'incident peut survenir lorsque l'agresseur se trouve en position de force, par exemple, lorsqu'il a la garde de son petit frère ou de sa petite sœur.
  • L'agresseur peut contraindre sa victime au silence en la menaçant de violence physique.
  • L'enfant s'attribue la faute de l'incident, surtout lorsqu'il ou elle en retire un certain plaisir, ce qui peut expliquer son silence.
  • L'enfant agressé désire peut-être vous parler, mais ne sait pas comment s'exprimer sur ce qu'il subit. Il peut penser qu'il vous a fait comprendre indirectement ce qui se passait ou que vous êtes déjà au courant. Beaucoup d'enfants craignent aussi de causer du souci à leurs parents.
  • Il se peut aussi que vous vous doutiez de quelque chose mais que vous choisissiez de vous fermer les yeux. Il vous est peut-être difficile de croire que l'un de vos enfants puisse être un agresseur sexuel.

Les parents qui ont l'habitude de faire le bilan de la journée avec leurs enfants et de leur demander si tout va bien ont plus de chances de dépister les cas d'agression sexuelle entre frères et sœurs.

Si l'un de mes enfants exploite un de ses frères et sœurs, que dois-je faire?

Si l'un de vos enfants exploite sexuellement un de ses frères et sœurs, signalez l'incident à l'agence de protection de l'enfance de votre province. La procédure à suivre peut varier d'une province à l'autre, mais cet organisme a pour rôle d'aider la victime comme l'agresseur. Si l'enfant a 12 ans ou plus, l'agence de protection de l'enfance doit impérativement avertir la police. La police décide alors s'il convient ou non de porter une accusation contre l'enfant. Si l'enfant est âgé de moins de 12 ans, aucune accusation d'agression sexuelle ne peut être portée contre lui.

Il peut être difficile d'admettre qu'une situation d'exploitation sexuelle pourrait exister entre vos enfants. Et c'est peut-être encore plus difficile lorsqu'il faut l'avouer à quelqu'un d'autre. Le principal, c'est de se faire aider. Cette aide peut souvent s'obtenir auprès de la famille ou des amis, mais il se peut aussi que vous deviez vous en remettre à des tiers. Il s'agit souvent de professionnels. La découverte de la réalité plonge souvent les parents dans un état de désespoir et de confusion. Vous pouvez ressentir de la déception et vous dire que vous avez échoué dans votre rôle de mère ou de père. Joignez-vous à un groupe de soutien pour les parents afin de mieux comprendre la nature de vos sentiments et de mieux les assumer.

Quel que soit l'âge de votre enfant, plusieurs choses peuvent se passer après que vous avez pris contact avec l'agence de protection de l'enfance :

Enfant de moins de 12 ans.

Beaucoup de centres offrant des services de counseling aux victimes d'agressions sexuelles ont aussi des programmes destinés aux auteurs d'agressions de ce type, pour autant qu'ils soient âgés de moins de 12 ans. Souvent, ces enfants font eux-mêmes l'objet d'une exploitation sexuelle. Ils ont besoin d'être conseillés en tant que victimes, mais aussi pour qu'ils modifient leur comportement à l'égard des autres enfants.

Enfant de 12 ans et plus.

Il y a plusieurs avantages à faire intervenir la police et la justice criminelle lorsque l'agresseur est un enfant de plus de 12 ans :

  • La victime sait qu'on la croit et qu'on appuie sa démarche.
  • L'agresseur peut obtenir l'aide dont il ou elle a besoin.
  • Le juge peut préparer un plan de traitement pour l'agresseur.
  • Nous énonçons clairement que la violence sexuelle à l'égard des enfants est traitée sérieusement par la société dans laquelle nous vivons.

Le traitement destiné à l'agresseur peut prendre plusieurs formes. Une solution consiste à laisser le jeune agresseur en liberté surveillée, en l'obligeant à recevoir des services de counseling dans son foyer. Un agent de surveillance sera alors chargé de veiller à ce que l'ordonnance du juge soit respectée.

Selon la gravité des infractions qu'il aura commises, le jeune agresseur peut être placé pendant un certain temps en centre de détention. Ces centres emploient des conseillers et des travailleurs sociaux spécialisés dans le traitement des agresseurs sexuels adolescents. Le traitement peut consister en des réunions de groupe pendant lesquelles l'agresseur réfléchit attentivement à son comportement, et en des services de counseling personnalisés qui l'aident à comprendre ses actes. On peut aussi apprendre à l'agresseur quelques moyens élémentaires de bien vivre en société : comment se faire des amis de son âge, comment prendre rendez-vous avec une jeune fille, comment acquérir un bon comportement sexuel. Le plus important, c'est que les services de counseling peuvent empêcher le jeune agresseur de persister dans la délinquance à l'âge adulte.

S'il existe dans votre province un programme d'aide aux victimes, il se peut que la ou les victime (s) d'agressions sexuelles entre frères et sœurs aient droit à des services de counseling gratuits. Le policier, le travailleur social ou l'employé des services de soutien aux victimes qui s'occupe de vous devrait pouvoir vous renseigner. Une fois que vous aurez signalé l'incident, il pourra être important, pour que votre famille s'en remette, que l'agresseur comme les victimes suivent des séances de counseling.

L'histoire de Jérémie

Une fois que vous aurez signalé l'incident, il pourra être important, pour que votre famille s'en remettre, qui l'agresseur comme les victimes sui veut des séances de counseling.

Jérémie, âgé de 11 ans, a senti des pulsions sexuelles monter en lui alors qu'il regardait un vidéoclip de musique hip hop. Il s'est alors demandé quelle impression cela lui ferait de voir sa sœur Ariane, 8 ans, danser nue devant lui. À deux ou trois reprises, comme ses parents étaient sortis pour la soirée, il a réussi à convaincre sa sœur de se déshabiller et de danser devant le téléviseur. Il lui a affirmé qu'un jour elle serait une grande danseuse et une chanteuse célèbre. Par la suite, Ariane a pris l'habitude de passer et repasser devant le téléviseur juste pour attirer son attention. Un jour que Jérémie se plaignait d'être gêné par Ariane, cette dernière a raconté à sa mère ce que Jérémie lui avait demandé de faire. Sa mère s'est rendue à l'évidence que Jérémie avait eu un comportement répréhensible.

Comment puis-je intervenir pour mettre fin aux agressions sexuelles entre frères et sœurs?

  • Rappelez-vous que, lorsque vous prenez connaissance d'un comportement répréhensible de la part d'un enfant âgé de 12 ans et plus, vous devez le signaler à l'agence de protection de l'enfance ou à la police.
  • Si vous avez besoin d'aide, vous aurez peut-être intérêt à voir un conseiller ou à vous joindre à un groupe de soutien pour les parents.
  • Essayez de trouver un moment approprié et un endroit tranquille pour discuter avec vos enfants dans le calme. Ce pourra être dans la salle de séjour ou autour de la table de la cuisine. Cela dépend de l'endroit où vos conversations familiales se tiennent habituellement.
  • Interrogez séparément les enfants concernés sur ce qu'ils ressentent par rapport au comportement répréhensible. Il est important que vous demandiez à l'enfant le plus jeune s'il a peur ou est intimidé par son aîné(e). Demandez à l'enfant agresseur comment, d'après lui ou elle, se sent la victime. Par exemple : « D'après toi, Jérémie, qu'a pu penser Ariane pendant qu'elle faisait ce que tu lui demandais. »
  • Énoncez le problème, puis parlez-en. Exemple : « Ariane dansait nue devant le poste de télévision parce qu'elle croyait qu'elle devait faire tout ce que tu lui demandais. »
  • Entendez-vous sur les mesures à prendre. Dans le cas d'Ariane et de Jérémie, celui-ci a décidé de ne plus forcer Ariane à faire ce qui ne lui plaisait pas, et de respecter l'intimité de sa sœur. Quant à Ariane, elle s'est engagée à signaler tout nouvel abus de pouvoir éventuel à sa mère. Les deux enfants ont convenu de faire intervenir l'un de leurs parents s'ils ne pouvaient pas remédier à la situation par eux-mêmes.
  • Vérifiez régulièrement si les engagements pris des deux côtés sont tenus de façon à ce que les enfants se sentent en sécurité.
  • Profitez de ce genre d'occasion pour réfléchir à certains des problèmes sous-jacents et pour en discuter. Comment réagir, par exemple, au sujet de l'intérêt de Jérémie pour les vidéoclips de musique hip hop à connotation sexuelle, ou devant son excès d'autorité? Comment réagir quand on s'aperçoit qu'Ariane est prête à faire tout ce que lui demande son frère, qu'elle aime les flatteries, qu'elle a besoin d'attention? Ce sont des problèmes auxquels beaucoup de familles sont confrontées quotidiennement. La façon dont elles y répondent a une grande incidence sur leur aptitude à prévenir les agressions sexuelles et à y mettre fin.

Est-ce que notre famille s'en remettra?

Expliquez à vos enfants que leur corps leur appartient et que tout le monde doit le respecter.

OUI! Même si la situation dure depuis longtemps, vos enfants pourront reprendre le dessus. Ils auront besoin d'amour et de compréhension, et il faudra les aider à voir plus clair dans leurs pensées et dans leurs sentiments.

Toutes les familles connaissent des moments troubles lorsqu'un ou plusieurs de leurs membres ont des problèmes. Votre capacité à faire face aux problèmes vous permettra de vous en sortir. En communiquant avec votre entourage et en lui apportant votre soutien, vous participez à créer un nouveau sentiment de confiance chez les membres de la famille.

Comment prévenir les agressions sexuelles entre frères et soeurs dans ma famille?

La meilleure façon de prévenir les agressions sexuelles entre frères et soeurs est de prêter attention à vos enfants :

  • Prévoyez chaque jour un moment pour permettre à vos enfants de vous raconter ce qu'ils ont fait ou les sentiments, positifs et négatifs, qu'ils ont éprouvés pendant la journée. Ce pourra être après le retour de l'école ou avant le coucher.
  • Assurez-vous que la personne qui a la garde des enfants s'en occupe bien, que cette personne soit un membre de la famille ou non. Au petit déjeuner, vous pouvez poser à vos enfants des questions précises sur la soirée précédente. Ont-ils regardé, par exemple, leur émission de télévision préférée? Ont-ils joué à des jeux vidéo? Se sont-ils bien entendus avec leur gardien ou leur gardienne? Cette personne s'est-elle montrée gentille? Aimeraient-ils qu'elle s'occupe encore d'eux?
  • Soyez disposé à parler de sexualité. Regardez en famille des films d'éducation sexuelle et lisez avec vos enfants des livres sur le sujet. Essayez de trouver à la bibliothèque des documents éducatifs adaptés à l'âge de votre enfant.
  • Demandez à la direction de l'école de vos enfants de présenter des films sur la prévention des agressions sexuelles ou de donner des cours sur le sujet. La plupart des écoles le font, mais cela ne coûte rien de vous renseigner. Le message transmis est habituellement le suivant : « Si quelqu'un te fait faire quelque chose qui ne te semble pas normal, parles-en à un adulte de confiance. »
  • Tâchez de savoir en tout temps à quel endroit vos enfants jouent, et avec qui. Redoublez de prudence s'ils fréquentent des enfants portés sur les jeux à connotation sexuelle.
  • Expliquez à vos enfants que leur corps leur appartient et que tout le monde doit le respecter.
  • Surveillez les scènes de violence à la télévision et l'accès à l'interne. Les films et les émissions qui établissent un lien entre le sexe et la violence transmettent aux enfants un message dangereux.
  • Encouragez les attitudes et les comportements non sexistes. Répartissez, par exemple, le pouvoir, les responsabilités et les privilèges de façon égale entre les garçons et les filles; soyez juste dans l'attribution des tâches ménagères, et découragez les plaisanteries et les moqueries à caractère sexiste.
  • Croyez ce que les enfants racontent. Il est rare qu'ils inventent des histoires d'agressions sexuelles pour faire du tort à un frère ou une soeur.
Oui! Même si la situation dure depuis longtemps, vos enfants pourront reprendre le dessus.

Des ressources additionnelles sont disponibles à votre centre de ressources communautaire, à votre bibliothèque publique ou au Centre national d'information sur la violence dans la famille.

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