Parler de la consommation de substances de manière humaniste, sécuritaire et non stigmatisante

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Organisation: Agence de la santé publique du Canada

Date de publication : janvier 2020

Une ressource pour les organisations canadiennes des professionnels de la santé et leurs membres (2019)

Table des matières

Remerciements

Les informations contenues dans cette ressource proviennent de la consultation de personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances, de leurs proches, ainsi que d’organisations de professionnels de la santé et autres intervenants au sein du système de santé canadien. Ce projet n’aurait pas été possible sans leur précieuse expertise diversifiée. Notre collaboration avec ces interlocuteurs a mis en lumière, d’une part, les valeurs et perspectives divergentes concernant le langage employé pour parler de tout ce qui touche à la consommation de substances et, d’autre part, la vitesse à laquelle ce langage évolue. C’est pourquoi cette ressource a pour but de refléter l’ensemble des points de vue recherchés, tout en reconnaissant qu’un consensus sur l’adéquation du langage employé ne peut être entièrement atteint et que le contenu de cette ressource devra être soumis à une réévaluation et une révision dans le futur.

Introduction

Les personnes qui consomment des substances font l’objet d’une stigmatisation et d’une discrimination très fortes, dans une variété de contextes de la vie quotidienne. Cette stigmatisation liée à la consommation de substances est notamment saillante au sein du système de santé, où elle engendre des soins de santé de piètre qualité, des effets négatifs sur la santé et des iniquités sociales et en matière de santé significatives. Au sein du système de santé, la stigmatisation liée à la consommation de substances se manifeste dans les politiques, les pratiques, la formation, la culture de travail et les aspects relatifs au cadre bâti, de même que dans les interactions entre les utilisateurs de substances et les fournisseurs de services directs.

Chacun de ces éléments est façonné en fonction du langage employé pour décrire l’utilisation de substances et les personnes qui en consomment. À leur tour, ces éléments créent une norme et contribuent à renforcer une certaine manière de parler de tout ce qui touche à la consommation de substances.

Le langage est, de fait, un outil puissant qui peut soit renforcer soit éviter les attitudes, les opinions et les actions stigmatisantes. Il est essentiel que les professionnels de la santé et leurs organisations réfléchissent au langage employé à l’interne, dans leur communication avec le public et quand ils s’adressent aux patients ou clients en milieux cliniques. N’oubliez pas que la langue évolue avec le temps et, avec elle, c’est notre compréhension des problèmes sociaux et de santé qui change. Nombre de termes autrefois en usage sont maintenant considérés comme étant stigmatisants ou dommageables pour les personnes et les communautés.

Dans certains cas, ce sont certains mots ou termes qui sont stigmatisants, tels que « abus de substances » ou « toxicomane ». Ces situations sont aisément identifiables et peuvent se corriger en substituant le mot ou le terme par un équivalent plus convenable. Toutefois, dans d’autres cas, c’est le ton général du message, ou ses croyances et points de vue sous-jacents, qui stigmatisent et peuvent renforcer une vision étroite ou négative de l’utilisation de substances et des personnes qui en consomment. Ces situations sont plus difficiles à identifier et exigent un niveau plus élevé d’autoréflexion et de sensibilité pour les corriger.

Cette ressource cherche à faciliter la transition vers un langage plus sécuritaire, plus humaniste et non stigmatisant pour parler de l’utilisation de substances dans le système de santé. Les publics à qui elle s’adresse en tout premier lieu sont les professionnels de la santé et les organisations professionnelles de la santé du Canada. De nombreuses autres ressources linguistiques complémentaires existent et peuvent mieux convenir à un public plus général (voir les ressources connexes).

Comment utiliser cette ressource

Cette ressource peut être employée de diverses façons. Tout d’abord, elle peut servir à engager la réflexion et les efforts vers une amélioration du langage utilisé pour parler de la consommation de substances par les professionnels et leurs organisations, au sein du système de santé canadien. Ces intervenants sont bien souvent considérés comme des sources fiables en matière d’information sur la santé. C’est pourquoi leurs choix de langage agissent comme modèles pour les autres et peuvent contribuer à réduire la stigmatisation publique et systémique liée à la consommation de substances.

Ensuite, cette ressource peut être utilisée pour guider le développement et le contenu des produits de communication au sujet de la consommation de substances au sein des organisations de la santé, dont les nouveaux produits et ceux qui sont mis à jour et révisés. Ces produits peuvent inclure les rapports, les communications sur les médias sociaux, les affiches, les pages Web et les feuillets d’information en lien avec la consommation de substances. 

Finalement, cette ressource peut être employée pour insister sur l’importance de changements généralisés à tous les niveaux hiérarchiques du système de santé, afin de réduire la stigmatisation liée à la consommation de substances. Le langage utilisé par les professionnels de la santé et leurs organisations n’est pas « une simple affaire de sémantique »; il reflète les valeurs et les biais qui sont présents dans les normes, cultures et pratiques organisationnelles et qui affectent les soins que reçoivent les personnes qui utilisent des substances. Pour réduire de façon significative la stigmatisation liée à la consommation de substances, la réflexion, la bienveillance et la sensibilité appliquées au langage doivent être accompagnées de changements complémentaires dans la manière qu’a le système de santé de soutenir les personnes qui consomment des substances.

Principes directeurs clés

Les principes directeurs qui suivent peuvent aider les personnes et les organisations à parler de la consommation de substances avec plus de compassion et de manière non stigmatisante.

1. Prenez le temps de stimuler l’autoréflexion (principe de base)

Pratiquez l’autoréflexion et prenez conscience de vos propres biais quand vous parlez de consommation de substances.

Évitez les termes argotiques, dérogatoires ou discriminatoires, en reconnaissant que, si nombre d’entre eux sont employés, ils demeurent inappropriés ou nuisibles.

Défendez un langage sécuritaire et humaniste sans toutefois réprimer les choix linguistiques que les autres ou vous-même pouvez faire. Faites preuve d’indulgence et de patience, en reconnaissant que le langage stigmatisant est souvent employé par habitude (et non volontairement) et que du temps et de la pratique sont nécessaires pour le modifier.

2. Reconnaissez que les individus qui consomment des substances sont des êtres humains dotés à la fois d’identités propres et complexes et d’expériences de vie

Employez un langage axé sur « Les gens d’abord », qui met la personne au premier plan et non un problème ou un comportement lié à la santé (p. ex., « personnes qui consomment des drogues » plutôt que « toxicomanes »). Les étiquettes qui servent à refléter des problèmes ou des comportements réels ou présumés liés à la santé (p. ex, « drogué ») ne laissent pas de place aux autres identités qui peuvent composer la personne qui consomme des substances. Plutôt, elles laissent entendre que sa seule identité est celle en lien avec sa consommation de substances (cf. elle n’est qu’une personne qui consomme des substances). Étiqueter les personnes sous un problème ou un comportement lié à la santé suppose aussi, à tort, qu’il existe un niveau d’homogénéité au sein d’un groupe (p. ex., « tous les drogués sont les mêmes ») et que ces étiquettes sont une part fixe de l’identité d’une personne.

Employez un langage et un ton qui expriment de la bienveillance et de la compassion, plutôt que du jugement ou de la discrimination envers la consommation de substances. Cela inclut de ne pas tirer de conclusions sur la personnalité ou la situation (passée, présente ou future) d’une personne, en faisant preuve à son égard d’empathie et en tenant compte de la complexité des expériences qui ponctuent la vie de chacune et de chacun.

3. Reconnaissez que le trouble lié à l’utilisation de substances est un problème de santé

Évitez d’employer un langage qui suggère que le trouble lié à l’utilisation de substances est un choix ou une défaillance morale.

Reconnaissez que la consommation de substances est un problème de santé qui dépend de facteurs sociaux et de santé complexes, tout comme le sont la nutrition, l’activité physique et la gestion du stress, qui ne sont pas soumises au même niveau de stigmatisation et d’examen que la consommation de substances. 

Employez un langage qui reflète le fait que le traitement, la consommation sécuritaire de substances et le rétablissement sont possibles.

Utilisez une terminologie neutre et précise médicalement et contextuellement pour décrire la consommation de substances, en reconnaissant que les préférences langagières évoluent au sein de la communauté médicale au rythme de notre compréhension des problèmes liés à l’utilisation de substances.

Évitez de mettre l’accent sur la légalité de certaines substances ou certains contextes de consommation pour encourager le changement des comportements. Les personnes qui utilisent des substances illégales sont généralement très au fait des possibles conséquences juridiques liées à leur consommation. Traiter l’utilisation de substances comme un problème criminel dans des contextes de santé peut favoriser, chez ceux qui consomment des substances, un sentiment de peur vis-à-vis de ces conséquences, ainsi qu’une méfiance et un évitement des établissements de santé.

Évitez d’amalgamer la notion de « consommation de substances » avec celle de « trouble lié à l’utilisation de substances ». L’emploi inapproprié ou le suremploi de « trouble lié à l’utilisation de substances » diminue le sens de cette expression terminologique et la gravité de ce problème de santé.

Consultez les directives des pratiques cliniques sur le trouble lié à l’utilisation de substances pour orienter les soins et les services de manière à ce qu’ils soient individualisés, centrés sur le patient et non stigmatisants.

Soyez conscients que certaines personnes souffrant de troubles liés à l’utilisation de substances ne s’identifient pas ni ne reconnaissent le terme « trouble », et ce, pour diverses raisons (p. ex. le fait que le trouble lié à l’utilisation de substances n’est pas une maladie). Dans des contextes de santé, il convient d’utiliser la terminologie médicale acceptée (p. ex., trouble lié à l’utilisation de substances), mais les professionnels de la santé devraient autoriser les personnes à employer les mots qui, selon elles, décrivent le mieux leur identité ou leur expérience.

4. Reconnaissez et faites valoir la résilience, l’expertise et la compétence de ceux ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances

Impliquez de façon significative les personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances dans le développement des politiques, des messages et des questions touchant à la consommation de substances.

Dans la mesure du possible, employez un langage axé sur les points forts, qui met en valeur les compétences, les habiletés et les connaissances des personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances et qui appuie le rétablissement et l’autonomisation personnels.

Respectez les droits des personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances de se référer à elles-mêmes en employant un langage qui pourrait, en d’autres contextes, être considéré comme stigmatisant (p. ex., « toxicomane »). Reconnaissez que ces formes d’autoétiquetage sont souvent le reflet d’une stigmatisation personnelle et intériorisée. L’utilisation de ces autoétiquettes ne donne ni « l’autorisation » de les adopter soi-même ni « le droit » de corriger la personne sur la manière dont elle s’identifie.

5. Évitez d’employer un langage laissant apparaitre des suppositions soit sur les motivations et les objectifs des personnes concernant leur consommation de substances soit sur leur volonté et leur disposition à recevoir certaines formes de soins

Évitez de suggérer que l’abstinence est toujours l’objectif à atteindre pour les personnes qui consomment des substances. Le rétablissement est un continuum et un processus qui diffère d’une personne à l’autre. 

Respectez les utilisations des opioïdes à des fins médicales et le rôle qu’elles peuvent jouer dans la gestion de divers problèmes de santé. Évitez les messages qui stigmatisent les personnes qui consomment des opioïdes d’ordonnance prescrits par un professionnel de la santé (p. ex., en émettant des doutes sur ce qui motive la consommation ou sur la manière dont l’ordonnance est utilisée) ou ceux qui comparent un groupe de personnes qui consomment des opioïdes à un autre.

Engagez avec les patients un dialogue clair et exempt de tout jugement à propos des traitements disponibles, de la thérapie et des autres options de services liés à leur consommation de substances. Respectez leur autonomie et leur disposition à accéder à ces services. Faites glisser le point de mire de « parvenir à l’abstinence » vers « parvenir au bien-être », ce qui, pour certaines personnes, peut inclure une consommation continue de substances.

Communiquez de manière à favoriser une sécurité et une humilité culturelles. Cela comprend l’accueil et le respect des croyances et des savoirs en santé influencés par les cultures, dont la manière de concevoir un problème de santé, la façon d’exprimer des symptômes et les raisons de le faire, ainsi que les formes de traitement et de thérapie. Ces actions peuvent permettre aux patients de se sentir écoutés et compris, améliorant ainsi leur relation avec les fournisseurs de services et augmentant leur engagement et leur sentiment de contrôle à l’égard de leurs soins.

6. Soyez particulièrement vigilants quand vous développez de la documentation sur la consommation de substances destinée à être publiée

Évitez de renforcer le langage stigmatisant employé par d’autres préposés aux communications. Par exemple, quand vous faites référence à d’autres documents, les termes stigmatisants devraient, dans la mesure du possible, être remplacés par des équivalents qui ne dénaturent ni ne modifient l’intention du document auquel vous faites référence. Si la référence est une citation, cet équivalent devrait être indiqué entre crochets.

Tenez compte des messages implicites que peuvent renvoyer les images, au même titre que le langage; évitez de choisir des images qui reflètent des portraits restreints et stéréotypés des personnes qui consomment des substances (p. ex., selon l’âge, l’apparence physique, la classe sociale, etc.) et qui laissent entendre que certains types de personnes sont plus susceptibles que d’autres de consommer des substances.

Lexique pour une expression non stigmatisante de la consommation de substances

Ce lexique identifie plusieurs termes stigmatisants ou pouvant être stigmatisants et les regroupe sous divers sujets. Pour chaque sujet, des équivalents terminologiques sont fournis, accompagnés de renseignements généraux et d’une justification. Souvent, la particularité du contexte déterminera lequel de ces équivalents convient le mieux. Pour certains sujets, il se peut que des professionnels ou des organisations de la santé emploient des termes et des expressions complémentaires et médicalement plus précis qui ceux présentés dans ce lexique; l’intention ici n’est pas de remplacer ce langage plus précis, à condition qu’il ne soit pas stigmatisant.

Les termes de ce lexique présentent des degrés divers de stigmatisation, ce qui a des répercussions sur leur emploi. Par exemple, certains termes véhiculent des idées fortes plaçant une forme de honte ou de faute sur les personnes qui consomment des substances ou sont liés à d’autres formes de stigmatisation (p. ex., le racisme). Ces termes doivent être évités dans leur ensemble. D’autres termes sont moins explicitement stigmatisants, quoique conversationnels ou désuets, et sont décrits de manière plus convenable en recourant aux équivalents fournis dans ce lexique.

Note : Dans ce lexique, la référence au terme « substance(s) » inclut : les drogues à des fins à la fois médicales et non médicales, dont les drogues spécifiques comme les opioïdes, la cocaïne, la méthamphétamine, le cannabis et l’alcool. 

Tableau 1. Terminologie concernant les personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de consommation de substances
Évitez ces termes stigmatisants Équivalents terminologiques non stigmatisants Renseignements généraux/ justification
Personnes qui consomment des substances
  • drogués
  • toxicomanes
  • abuseurs (de drogues)
  • personnes qui consomment/ utilisent des substances
  • personnes qui consomment/utilisent des substances de manière régulière
  • personnes qui souffrent d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances (en fonction du contexte)
Toutes les personnes qui consomment des substances ne souffrent pas d’un trouble lié à l’utilisation de substances, même si leur consommation est source de méfaits sociaux ou physiques. L’emploi de ces termes dépend donc du contexte.
  • accros
  • personnes souffrant/qui souffrent d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances
  • personnes présentant/qui présentent un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances
  • personnes atteintes d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances
  • personnes vivant une expérience concrète d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances
-
  • injecteurs
  • personnes qui s’injectent des drogues
  • personnes qui utilisent des drogues par injection
La stigmatisation liée à la consommation de substances varie selon divers facteurs, dont les substances et les méthodes de consommation. Du fait que l’injection est plus stigmatisée que d’autres méthodes de consommation de substances,Note de bas de page il’étiquette « injecteurs » véhicule des préjugés plus importants.
  • alcooliques
  • personnes souffrant/qui souffrent d’un trouble lié à la consommation d’alcool
  • personnes présentant/qui présentent un trouble lié à la consommation d’alcool
  • personnes atteintes d’un trouble lié à la consommation d’alcool
-
  • consommateurs compulsifs
  • buveurs excessifs
  • personnes qui s’adonnent à une forte consommation épisodique d’alcool
-
  • consommateurs de substances à usage récréatif
  • consommateurs récréatifs
  • personnes qui consomment/utilisent des substances à des fins non médicales (dans certains contextes)
  • personnes qui consomment/utilisent des substances occasionnellement (dans certains contextes)
  • « Récréatif » laisse entendre que la consommation de substances est une chose que les personnes font « pour s’amuser ». Employer « consommateurs de substances à usage récréatif » pour décrire une personne qui utilise des substances en dehors d’un contexte médical peut stigmatiser les personnes qui souffrent d’un trouble lié à l’utilisation de substances. Ce terme minimise la gravité des troubles liés à l’utilisation de substances en tant que problème de santé et ne reflète pas le fait que de nombreuses personnes s’autoadministrent des substances pour gérer et soulager des douleurs physiques ou émotionnelles.
  • « Usage récréatif de substances » peut être utilisé pour décrire des contextes de consommation non problématique de substances (p. ex., prendre quelques verres entre amis lors de rencontres sociales, consommation occasionnelle de cannabis par des adultes), mais peut être mieux décrit par des termes ou expressions, tels que « occasionnel » ou « à des fins non médicales », selon le sens recherché. Quand on fait référence aux personnes qui utilisent des substances de cette manière, il est toujours mieux d’adopter un langage axé sur la personne d’abord.
  • jargon ou étiquettes, tels que : drogué, camé, toxico, etc.
- -
  • [en référence à une personne] sale
- -
Personnes qui ont consommé des substances
  • anciens drogués
  • anciens toxicomanes
  • anciens accros
  • personnes ayant vécu une expérience concrète de consommation/d’utilisation de substances
  • personnes se rétablissant d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances
  • personnes qui ont consommé/utilisé des substances
  • personnes qui ont consommé/utilisé des substances par le passé
  • personnes qui ont un passé de consommation/d’utilisation de substances
-
  • toxicomanes en rétablissement
  • personne en cours de rétablissement [d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances]
  • personne se rétablissant [d’un trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances]
Se rétablir d’un trouble lié à l’utilisation de substances peut ou non signifier l’abstinence de substances.
  • anciens alcooliques
  • personnes ayant vécu une expérience concrète d’un trouble lié à la consommation d’alcool
  • personnes rétablies d’un trouble lié à la consommation d’alcool
-
  • [en référence à une personne] propre
- -
Tableau 2. Terminologie concernant les comportements liés à la consommation de substances
Évitez ces termes stigmatisants Équivalents terminologiques
non stigmatisants
Renseignements généraux/
justification
Consommation de substances
  • abus de substances
  • mauvais usage de substances
  • habitude des substances
  • consommation/utilisation de substances
  • trouble lié à l’utilisation/la consommation/l’usage de substances (dans certains contextes)
  • « Abus », « mauvais usage » et « habitude » sont très stigmatisants, car ces termes posent un jugement et suggèrent une mauvaise conduite volontaire ou une défaillance morale.
  • Toutes les personnes qui consomment des substances ne souffrent pas d’un trouble lié à l’utilisation de substances. L’emploi de ces termes sera donc approprié uniquement dans les cas médicalement pertinents.
  • alcoolisme
  • trouble lié à la consommation d’alcool
L’édition actuelle du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-V) place le « trouble lié à la consommation d’alcool » dans la catégorie des troubles liés à la consommation de substances, remplaçant ainsi les expressions « abus d’alcool » et « dépendance à l’alcool ». Le trouble lié à la consommation d’alcool est un problème de santé aux sous-classifications diverses pouvant être diagnostiqué à l’aide d’un critère précis. Bien qu’il soit encore largement employé, le terme « alcoolisme » est de moins en moins utilisé dans les contextes cliniques et politiques, au niveau international, car sa capacité à décrire le continuum des comportements associés à la consommation excessive d’alcool ne fait pas l’unanimité.
  • drogues/médicaments de choix
  • substances consommées/utilisées
En faisant référence aux « drogues/médicaments de choix » des personnes, on minimise la gravité potentielle de leur consommation de substances et des méfaits associés, de même qu’on suggère que la consommation de substances est essentiellement le reflet d’un choix personnel. Quand on l’emploie auprès d’une personne (p. ex., « Quelle est votre drogue de choix / Quel est votre médicament de choix? »), on indique que l’on présume d’un certain niveau ou d’une certaine forme de consommation de substances de sa part. Dans un contexte clinique, il vaut mieux demander aux personnes si elles utilisent des substances et, si oui, lesquelles.
  • usage récréatif de substances (dans certains contextes)
  • consommation ou utilisation de substances à des fins médicales/non médicales
  • consommation ou utilisation occasionnelle/régulière/quotidienne de substances
  • « Récréatif » laisse entendre que la consommation de substances est une chose que les personnes font « pour s’amuser ». Employer « usage récréatif de substances » pour décrire l’utilisation de substances en dehors d’un contexte médical peut stigmatiser les personnes qui souffrent d’un trouble lié à l’utilisation de substances. Ce terme minimise la gravité des troubles liés à l’utilisation de substances en tant que problème de santé et ne reflète pas le fait que de nombreuses personnes s’autoadministrent des substances pour gérer et soulager des douleurs physiques ou émotionnelles.
  • « Usage récréatif de substances » peut être utilisé pour décrire des contextes de consommation non problématique de substances (p. ex., prendre quelques verres entre amis lors de rencontres sociales, consommation occasionnelle de cannabis par des adultes), mais peut être mieux décrit par des termes ou expressions, tels que « occasionnel » ou « à des fins non médicales », selon le sens recherché.
  • jargon, tel que : se shooter, se défoncer, se torcher, se charger, être gelé, être paqueté, etc.
  • consommer/utiliser des substances
  • intoxiqué, en état d’ébriété
  • consommation excessive d’alcool, forte consommation épisodique d’alcool
Historiquement, la « consommation excessive d’alcool » renvoie au fait de boire en grandes quantités pendant plusieurs jours consécutifs (cf. « aller se cuiter ») et est typiquement associée aux personnes souffrant d’un trouble lié à la consommation d’alcool. Toutefois, la consommation excessive d’alcool est maintenant reconnue comme étant un épisode ponctuel de consommation d’alcool suffisamment importante pour augmenter les risques de conséquences négatives pour la personne qui consomme ou pour les autres.
Utilisation de médicaments d’ordonnance, autre que celle prescrite par un professionnel de la santé
  • abus de médicaments/d’opioïdes d’ordonnance
  • mauvais usage de médicaments/d’opioïdes d’ordonnance
  • non-respect/non-conformité
  • [usage] contre l’avis médical
  • consommation/utilisation de médicaments d’ordonnance
  • consommation/utilisation de médicament/d’opioïdes non prescrits à la personne
  • consommation/utilisation de médicaments/d’opioïdes d’une manière autre que celle prescrite par un professionnel de la santé
  • « Abus » et « mauvais usage » sont très stigmatisants, car ces termes posent un jugement et suggèrent une mauvaise conduite volontaire ou une défaillance morale. De plus, ces termes ne reconnaissent pas les méfaits potentiels (dont la dépendance) qui peuvent provenir de l’utilisation de médicaments d’ordonnance, exactement telle que prescrite par un professionnel de la santé.
  • Employer « non-respect/non-conformité » et « [usage] contre l’avis médical » suggère de la négligence ou un acte de désobéissance volontaire.
Récurrence de la consommation de substances
  • tomber, retomber, rechuter [dans la consommation]
  • faire une rechute
  • glisser [dans la consommation]
  • arrêter ou se remettre [à consommer]
  • récurrence de la consommation/l’utilisation de substances
  • récurrence du trouble lié à la consommation/l’utilisation/l’usage de substances [symptômes]
Bien que des termes comme « tomber » ou « rechuter » soient communément employés, ils peuvent être stigmatisants, du fait qu’ils suggèrent un échec ou un choix, et ils peuvent être paralysants. Ces termes ne sont pas en cohérence avec la nature chronique et probablement récurrente des troubles liés à l’utilisation de substances et avec le fait que les améliorations en matière de gestion de la consommation de substances (trouble) sont souvent non linéaires. Ils créent aussi des dichotomies entre « abstinence (bien) » et « consommation (mal) », qui ne tiennent pas compte des formes de rétablissement non basé sur l’abstinence. Cette binarité crée des attentes irréalistes concernant le rétablissement et la gestion des troubles liés à l’utilisation de substances.
Drogues illégales/marché illégal
  • marché noir
  • marché des drogues illicites
  • drogues/opioïdes illicites
  • drogues de rue
  • marché d’approvisionnement illégal de drogues
  • marché non réglementé/substances non réglementées
  • drogues obtenues/opioïdes obtenus illégalement
  • médicaments/opioïdes d’ordonnance détournés
  • drogues produites/opioïdes produits illégalement
  • « Illicite » a une connotation morale qui peut être stigmatisante. « Illégal » est un terme plus simple qu’« illicite » et n’est pas porteur d’un jugement similaire.
  • « Noir » est souvent employé comme adjectif pour véhiculer la nature illégale ou simplement « mauvaise » d’une chose (p. ex., le marché noir, une série noire, la bête noire), ce qui a des dessous clairement racistes.
  • « Opioïdes d’ordonnance détournés » peut renvoyer aux opioïdes d’ordonnance qui ne sont pas pris selon la prescription établie par un professionnel de la santé, dont ceux qui s’achètent et se vendent sur le marché non réglementé.
Tableau 3. Terminologie concernant les substances
Évitez ces termes stigmatisants Équivalents terminologiques non stigmatisants Renseignements généraux/ Justification
Nom correct de la substance
  • boisson
  • alcool
  • Il existe des centaines de « noms de rue » et de termes argotiques pour décrire les diverses substances et cette terminologie évolue et change rapidement. Les termes présentés ici n’en sont qu’un petit échantillon. 
  • Au lieu d’employer des mots informels ou argotiques pour dénommer une substance, comme « boisson » ou « dope », il est important d’employer les noms corrects/formels de substances, afin de réduire les stéréotypes dommageables ou les sous-entendus racistes qui sont souvent associés aux mots d’argot.Note de bas de page ii
  • Il vaut mieux, dans le cadre des efforts de sensibilisation à la question de la consommation de substances (cf. par le biais de l’interaction avec les patients, dans les publications, etc.) mettre l’accent sur les noms formels de substances. À des fins éducatives, ces efforts peuvent aussi reconnaître l’existence des termes d’argot associés (cf. si on considère l’usage commun qui en est fait), sans toutefois ni les cautionner ni les utiliser comme descripteurs par défaut.
  • Bien qu’il soit communément employé, le terme « marijuana » a des origines racistes reconnues. Ce terme « aux accents exotiques » a été largement adopté par les prohibitionnistes, il y a une centaine d’années, pour insister sur le caractère « étranger » de la substance et sa consommation parmi les Américains non blancs, ce qui résonnait dans la xénophobie ambiante de l’époque. Le terme « cannabis » est historiquement moins chargé et stigmatisant.
  • glace, speed
  • méthamphétamine
  • poudre, blanche
  • héroïne
  • E, exta, Adam
  • ecstasy, MDMA
  • herbe, pot, marijuana, marie-jeanne
  • cannabis
Tableau 4. Terminologie concernant le diagnostic, le traitement et le rétablissement
Évitez ces termes stigmatisants Équivalents terminologiques non stigmatisants Renseignements généraux/ justification
Résultats des tests sur les substances
  • test de dépistage de drogues propre
  • résultat négatif au test de dépistage de drogues
  • sans drogue
Bien que les termes « propre » et « sale » soient communément employés pour renvoyer aux personnes qui consomment des drogues, ils sont stigmatisants et posent un jugement de valeur.Note de bas de page iii
  • test de dépistage de drogues sale
  • test de dépistage de drogues raté/manqué
  • résultat positif au test de dépistage de drogues
 
Trouble lié à l’utilisation de substances
  • toxicomanie (dans certains contextes)
  • trouble (léger/modéré/sévère) lié à l’utilisation de substances
  • dépendance à une substance
  • Les troubles liés à l’utilisation problématique de substances peuvent être diagnostiqués selon leur degré de sévérité (faible, modéré ou sévère). Le terme « toxicomanie » a été adopté par le passé pour décrire le degré « sévère » des troubles liés à l’utilisation de substances. Plusieurs substances et comportements peuvent mener à un état de dépendance; cependant, la dépendance elle-même n’est pas, et n’a jamais été, un problème de santé qui puisse être diagnostiqué indépendamment.Note de bas de page iv 
  • Le terme « trouble » est plus précis médicalement que « dépendance » et permet de faire entendre que les troubles liés à l’utilisation de substances comme un problème de santé légitime. Il convient de l’employer uniquement dans les cas où les personnes présentent les problèmes de santé nécessaires au diagnostic d’un trouble lié à l’utilisation de substances et tels que spécifiés dans le DSM-V.
Traitement par agoniste opioïde
  • thérapie de remplacement
  • thérapie de substitution
  • menottes liquides
  • thérapie médicamenteuse/ assistée par des médicaments
  • traitement par agoniste opioïde
  • thérapie par agoniste opioïde
  • thérapie/traitement d’entretien aux opioïdes
  • Les termes « remplacement » ou « substitution » peuvent laisser entendre que les traitements par agoniste opioïde (comme la méthadone ou la buprénorphine) sont similaires à des drogues de rue, et peuvent faire allusion à un simple changement latéral d’une substance à une autre. Cela minimise les mérites potentiels de cette approche de traitement/thérapie et son rôle au sein des plans de traitement médicalement complet.
  • Certains professionnels de la santé préfèrent le terme « thérapie » à celui de « traitement » pour renvoyer à cette forme de soins, du fait qu’il s’agit d’un engagement à long terme. « Traitement » signifie souvent un remède plus limité dans le temps que « thérapie ».
Reconnaissance de diverses voies menant au rétablissement et des divers obstacles à celui-ci
  • non conforme
  • démotivé
  • résistant
  • a fait le choix de ne pas [recevoir de soins/un service spécifique]
  • [la personne] choisit de ne pas [recevoir de soins/un service spécifique]
  • [la personne] rencontre des obstacles à l’accès de services
  • n’est pas prêt/prête pour le moment à examiner des solutions de rétablissement
  • [choisit de] s’engager dans une consommation à moindre risque
  • « Non conforme » ou « démotivé » sont des expressions terminologiques négativement chargées et signifient que le comportement est le simple reflet d’une défaillance personnelle et de mauvais choix, diminuant ainsi l’importance des facteurs contextuels.
  • Employer des formulations telles que « la personne choisit de ne pas [recevoir de soins/un service spécifique] » met de l’avant la capacité d’agir, la compassion et le droit de la personne de choisir le type de rétablissement qui convient le mieux à ses besoins personnels.Note de bas de page v
  • Pour diverses raisons, il arrive que les personnes ne puissent pas ou ne veuillent pas accéder à des services spécifiques ou recevoir certains types de soins. La capacité d’agir individuelle des personnes et le contexte unique qui est le leur doivent être respectés en adoptant une approche qui tente « d’aller à la rencontre de leurs besoins ». Cette approche de soins se ressent dans les efforts qui visent à donner aux personnes l’occasion de choisir et de contrôler les décisions liées à leurs soins et à ne pas présumer de leurs objectifs en matière de traitement ou de rétablissement. On encourage les professionnels de la santé à respecter et accepter le degré de disposition de chaque personne.
  • De même, il arrive que les personnes ne puissent pas ou ne veuillent pas cesser de consommer des substances pour diverses raisons, et qu’elles choisissent, dans le cadre de leur rétablissement personnel, d’adopter des pratiques de consommation à moindre risque (p. ex., en modérant la fréquence, la quantité, la forme, la teneur, la méthode de consommation de substances). Tous les efforts personnels qui visent à réduire les méfaits liés à la consommation de substances devraient être soutenus, plutôt qu’étiquetés « insuffisants » ou « infructueux » simplement parce que la personne ne met pas un terme à sa consommation de substances.
Aborder les défis liés à la consommation de substances
  • travailleurs de première ligne
  • fournisseurs de services directs/soins
Même si l’expression « de première ligne » est communément employée pour décrire les professionnels de la santé qui travaillent dans des disciplines non spécifiques, elle est aussi considérée comme étant un terme militaire. « Fournisseurs de services directs/soins » est plus convenable et plus centré sur le patient/client.
  • combattre/lutter/s’attaquer à
  • guerre (aux drogues)
  • aborder/prendre des mesures/répondre à
  • soutenir les personnes qui consomment des substances
  • Typiquement, ce que l’on combat est mauvais ou malfaisant (cf. dans le cadre des guerres ou dans les films de superhéros) et en contexte de consommation de substances, on ne peut pas clairement déterminer si ce combat est mené contre le problème de santé/le comportement ou contre la personne. Ce langage peut amener les personnes qui consomment des drogues à se sentir menacées ou marginalisées. 
  • Les références à la « guerre » aux drogues laissent entendre que l’on met l’accent sur l’application des lois et sur la criminalité (plutôt que sur approche globale visant l’amélioration de la santé publique) et contiennent des connotations militaires évidentes.

Ressources connexes

Notes en fin de texte

Note i

Simmonds, L., & Coomber, R. (2009). Injecting drug users: a stigmatised and stigmatising population. International Journal of Drug Policy, 20(2), 121-130.

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Endnote ii

Steiner, Leela & Nicol, Anne-Marie & Eykelbosh, Angela. (2019). How we talk about “Pot” matters: strategies for improved cannabis risk communication. Environmental Health Review. 62. 8-13. 10.5864/d2019-005.

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Endnote iii

Boticelli, M.P. Memorandum to Heads of Executive Departments and Agencies: Changing Federal Terminology Regarding Substance Use and Substance Use Disorders. Executive Office of the President, Office of National Drug Control Policy (ONDCP). January 9, 2017, retrieved August 1 from https://www.whitehouse.gov/sites/whitehouse.gov/files/images/Memo%20-%20Changing%20Federal%20Terminology%20Regrading%20Substance%20Use%20and%20Substance%20Use%20Disorders.pdft

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Endnote iv

Hasin, D.S., O’Brien, C.P., Auriacombe, M., Guilherme, B., et al. DSM-5 Criteria for Substance Use Disorders: Recommendations and Rationale. American Journal of Psychiatry. (2013). 170(8):834-851. doi: 10.1176/appi.ajp.2013.12060782

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Endnote v

the Heart. Reducing Stigma. Language Matters. Retrieved May 15, 2019 from https://towardtheheart.com/reducing-stigma

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