Prévention de la transmission des virus transmissibles par le sang en milieu de soins de santé

RMTC

Volume 45–12, le 5 décembre 2019 : VIH

Avis

Prévenir la transmission de virus à diffusion hématogène des travailleurs de la santé infectés aux patients : résumé d’une nouvelle ligne directrice pour le Canada

T Ogunremi1, K Defalco1, BL Johnston2, M Vearncombe3,4, AM Joffe5,6, B Cleghorn2, M Cividino7, DK Wong3,8, T Mazzulli3,9, J Wong10,11, MA Isinger12, Y Robert13, I Boucoiran14, K Dunn1, B Henry11,15

Affiliations

1 Centre de la lutte contre les maladies transmissibles et les infections, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa, ON

2 Université Dalhousie, Halifax, NS

3 Université de Toronto, Toronto, ON

4 Centre des sciences de la santé de Sunnybrook, Toronto, ON

5 Université de l’Alberta, Edmonton, AB

6 Services de santé Alberta, Edmonton, AB

7 Centre de soins de santé St-Joseph de Hamilton, Hamilton,ON

8 Hôpital général de Toronto, Toronto. ON

9 Hôpital Mount Sinai, Toronto, ON

10 Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique, Vancouver, BC

11 Université de la Colombie-Britannique, Vancouver, BC

12 Doctor Health Care Ethics, Ottawa, ON

13 Collège des médecins du Québec, Montréa, QC

14 Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Montréal, QC

15 Ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, Victoria, BC

Correspondance

toju.ogunremi@canada.ca

Citation proposée

Ogunremi T, Defalco K, Johnston BL, Vearncombe M, Joffe AM, Cleghorn B, Cividino M, Wong DK, Mazzulli T, Wong J, Isinger MA, Robert Y, Boucoiran I, Dunn K, Henry B. Prévenir la transmission de virus à diffusion hématogène des travailleurs de la santé infectés aux patients : résumé d’une nouvelle ligne directrice pour le Canada. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2019;45(12):348–54. https://doi.org/10.14745/ccdr.v45i12a03f

Mots-clés : virus à diffusion hématogène, VIH, hépatite C, hépatite B, transmission, pathogènes à diffusion hématogène, travailleurs de la santé, acte à risque de transmission, ligne directrice, recommandations, Canada

Résumé

Contexte : Bien qu’il soit clairement établi que les virus à diffusion hématogène (VDH), notamment le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), le virus de l’hépatite C (VHC) et le virus de l’hépatite B (VHB), sont transmis des patients aux travailleurs de la santé (TS), la transmission de ces virus des TS aux patients lors de la prestation des soins de santé a également été signalée. Au vu des avancées notoires réalisées dans la prévention des infections, les outils de diagnostic et les régimes de traitement, et des améliorations majeures apportées à la méthodologie d’élaboration des lignes directrices, il était nécessaire d’élaborer une ligne directrice fondée sur des données probantes pour remplacer le document consensuel canadien de 1998 relatif à la prise en charge des TS infectés par un VDH.

Objectif : Cet article résume la Ligne directrice canadienne pour la prévention de la transmission de virus à diffusion hématogène par des travailleurs de la santé infectés en milieux de soins.

Méthodes : Un groupe de travail sur l’élaboration de la ligne directrice a été mis en place et des questions clés ont été préparées dans le but d’éclairer le contenu de la ligne directrice. Des examens systématiques ont été réalisés en vue d’évaluer le risque de transmission du VIH, du VHC et du VHB des TS aux patients. Les analyses environnementales qui ont été réalisées ont permis de recueillir des renseignements sur l’établissement de groupes d’experts, la divulgation de l’état sérologique des TS et la conduite de recherches rétrospectives. Les partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux ainsi que les principaux organismes intervenants ont été consultés au sujet de l’élaboration de la ligne directrice.

Résultats : Le risque de transmission des VDH des TS aux patients s’est révélé négligeable, sauf lors des actes à risque de transmission où il existe un risque qu’une blessure subie par un TS se traduise par une exposition des tissus ouverts du patient au sang du TS. Le risque de transmission subséquente et le taux de transmission variaient en fonction du VDH, le VIH présentant le risque et le taux les plus faibles et le VHB les plus élevés. Cette ligne directrice contient des renseignements essentiels, et notamment des recommandations sur les critères à utiliser pour déterminer si une intervention doit être qualifiée d’acte à risque de transmission, la prise en charge des TS infectés par un VDH, y compris les facteurs à considérer pour évaluer leur aptitude à exercer, les groupes d’experts, les obligations de divulgation et le droit à la vie privée des TS et les recherches rétrospectives.

Conclusion : Cette nouvelle ligne directrice présente une approche pancanadienne à la prise en charge des TS infectés par un VDH ainsi que des recommandations visant à empêcher la transmission des VDH des TS aux patients lors de la prestation des soins de santé.

Introduction

La nouvelle Ligne directrice pour la prévention de la transmission de virus à diffusion hématogène par des travailleurs de la santé infectés en milieux de soins (la « Ligne directrice »)Note de bas de page 1 a pour objectif de fixer un cadre national pour l’élaboration de politiques et de procédures visant à prévenir la transmission des virus à diffusion hématogène (VDH), à savoir le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), le virus de l’hépatite C (VHC) et le virus de l’hépatite B (VHB), des travailleurs de la santé (TS) infectés aux patients dans les milieux de soins de santé du Canada. La Ligne directrice a été élaborée par l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), avec l’expertise technique d’un groupe de travail sur l’élaboration de la ligne directrice (le « Groupe de travail ») du Comité consultatif national sur la prévention et le contrôle des infections (CCNPCI)Note de bas de page 2. Elle remplace le Compte rendu de la Conférence de concertation sur les professionnels de la santé infectés : risque de transmission des pathogènes à diffusion hématogèneNote de bas de page 3 publié par Santé Canada en 1998. Cet article résume le processus d’élaboration de la Ligne directrice, les renseignements essentiels qu’elle contient et les recommandations formulées par celle-ci.

La Ligne directrice part du principe que les TS se conforment aux pratiques de base lorsqu’ils prodiguent des soins à tous les patients en tout temps et dans tous les milieuxNote de bas de page 4. Le non-respect des principes de prévention et de contrôle des infections désignés comme pratiques de base pourrait entraîner la transmission des VDH. Les TS qui pratiquent un acte à risque de transmission sont exposés à un risque de blessure percutanée susceptible d’exposer le patient au sang du TS. L’examen que nous avons réalisé de la littérature mondiale nous a permis de mettre en évidence plusieurs cas de transmission de VDH des TS aux patients dans les milieux de soins de santéNote de bas de page 5Note de bas de page 6Note de bas de page 7. Les cas de transmission survenus entre les années 1980 et les années 1990 ont mis en lumière la nécessité d’adopter des politiques et des lignes directrices à l’échelon international dans le but de réduire au minimum le risque de transmission. Pour définir le risque de transmission d’un VDH par un TS infecté à un patient, il faut tenir compte du risque réel fondé sur les données probantes et du risque perçu par le public, car ces deux facteurs permettent d’éclairer ce qui est considéré comme un risque acceptable. Bien qu’un risque de transmission nul soit inatteignable, la disponibilité d’un vaccin qui prévient l’infection au VHB, un traitement efficace pour le VHC entraînant une réponse virologique soutenue et la suppression du VIH avec un traitement antiviral strictement appliqué pourraient rendre le risque de transmission de ces VDH négligeable.

La Ligne directrice offre un résumé complet des renseignements généraux pertinents, des données probantes actuelles et des recommandations dans le but d’éclairer la prévention de la transmission des VDH des TS aux patients lors de la prestation des soins.

Méthodes

Consultation des intervenants et portée

Les principaux partenaires et organismes intervenants ont été consultés préalablement à l’élaboration de la Ligne directrice. Cela a notamment consisté à recueillir leurs commentaires, par l’entremise d’une évaluation des besoins, afin d’éclairer la portée de la Ligne directrice et les questions clés associées à celle-ci.

Un protocole de projet a été élaboré pour décrire les étapes et les méthodes de réalisation des examens systématiques et des analyses environnementales nécessaires pour répondre aux enjeux relevant de la portée de la Ligne directrice et éclairer les recommandations formulées dans celle-ci. Des questions clés ont été élaborées pour répondre aux enjeux déterminés. Six examens systématiques, un examen narratif et trois analyses environnementales ont été réalisés pour éclairer ces questions.

La consultation des organismes concernés s’est poursuivie en fonction des besoins tout au long de l’élaboration de la Ligne directrice, et une consultation générale finale regroupant l’ensemble des partenaires compétents, les principaux organismes intervenants et des experts a été organisée après l’achèvement de l’ébauche complète de la Ligne directrice.

Examen des enquêtes épidémiologiques

Les cas de risque d’exposition à un VDH par un TS infecté (avec ou sans transmission aux patients) publiés à l’échelle internationale ont été examinés dans le but de recenser les facteurs influant sur le risque de blessure percutanée chez les TS et le risque subséquent de transmission de VDH aux patients.

L’approche utilisée pour cerner le risque associé aux interventions décrites dans les enquêtes épidémiologiques et la catégorisation des actes à risque de transmission dans les principales lignes directrices internationales ont été examinées pour éclairer la définition d’un acte à risque de transmission dans la Ligne directrice.

Examens systématiques

Six examens systématiques portant sur la littérature publiée entre 1995 et 2016 ont été réalisés pour répondre aux questions clés et, plus particulièrement, évaluer les facteurs influant sur le risque de transmission du VIH, du VHC et du VHB aux patients par les TS infectés et examiner l’infectivité de chaque virus par rapport à la charge virale sérique source au moment de l’exposition. Quatre bases de données ont été examinées : Ovid MEDLINE, EMBASE, Global Health et Scopus. Des critères de sélection définis au préalable ont permis de recenser les études (publiées en anglais et en français) réputées admissibles pour éclairer les sections pertinentes de la Ligne directrice. L’évaluation critique des études admissibles et la notation des données probantes contenues dans celles-ci ont été réalisées à l’aide de la Trousse d’outils d’évaluation critique de l’ASPCNote de bas de page 8. Les données probantes issues des études admissibles ont été examinées et synthétisées. Les détails complets des questions clés, des critères d’admissibilité des études et des conclusions des examens systématiques pour chaque VDH feront l’objet d’articles publiés séparément.

Un examen narratif des études pertinentes et un examen systématique des essais contrôlés randomisésNote de bas de page 9 ont été réalisés pour éclairer une question clé portant sur l’efficacité clinique du port d’une double paire de gants.

Analyses environnementales

Des analyses environnementales ont été réalisées pour répondre à des questions clés liées à des enjeux organisationnels, réglementaires ou éthiques qui n’étaient pas entièrement ou directement éclairés par la recherche scientifique. Elles ont permis de recueillir des renseignements contextuels et de connaître l’opinion générale internationale sur l’établissement de groupes d’experts, la divulgation de l’état sérologique des TS et la conduite de recherches rétrospectives. La réalisation d’analyses environnementales supposait de procéder à la détermination et à l’examen de documents pertinents obtenus grâce à une recherche dans la littérature grise ou dans les articles ne faisant pas partie de la littérature médicale indexée, y compris les documents stratégiques des organismes de réglementation et des associations professionnelles, les autres lignes directrices internationales et provinciales et les rapports des institutions gouvernementales.

Expertise technique nécessaire à l’examen des données probantes et formulation de recommandations

Le Groupe de travail a apporté l’expertise technique nécessaire à l’examen des données probantes relatives aux facteurs de risque de transmission, notamment en précisant la définition d’un acte à risque de transmission et en formulant des recommandations. Le groupe était composé de membres experts en maladies infectieuses, en microbiologie et virologie médicale, en prévention et contrôle des infections, en santé publique, en santé du travail, en hépatologie, en dentisterie, en éthique médicale et en obstétrique et gynécologie (se reporter à la Ligne directrice pour connaître les noms et les affiliations des membres du groupe)Note de bas de page 1. Le Groupe de travail relevait du CCNPCI.

Conclusions

Consultation des intervenants et portée

Les commentaires recueillis lors de la consultation préliminaire des intervenants (évaluation des besoins) ont permis de cerner les principales questions à intégrer dans une ligne directrice nationale sur ce sujet (figure 1).

Figure 1 : Principales questions ou controverses soulevées concernant la prise en charge de travailleurs de la santé infectés par un virus à diffusion hématogène

Figure 1 note a

Figure 1 : Principales questions ou controverses soulevées concernant la prise en charge de travailleurs de la santé infectés par un virus à diffusion hématogène

Description textuelle : Figure 1

Figure 1 : Principales questions ou controverses soulevées concernant la prise en charge de travailleurs de la santé infectés par un virus à diffusion hématogène

Des questions et/ou controverses durant la prise en charge des travailleurs de la santé infectés par un virus à diffusion hématogène ont été soulevées et regroupées dans les six catégories (avec sous-catégories) suivantes :

  • Actes à risque de transmission
    • Définition d’un acte à risque de transmission
    • Prophylaxie post-exposition pour les patients et les travailleurs de la santé
    • Obligation des travailleurs de la santé de connaître leur statut sérologique
  • Risque de transmission des virus à diffusion hématogène
    • Prévalence et épidémiologie des virus à diffusion hématogène
    • Déterminants du risque
    • Revue des incidents d’exposition de patients
    • Charge virale
    • Vaccination contre l’hépatite B
    • Formation sur la prévention et le contrôle des infections
  • Groupes d’experts
    • Rôles et responsabilités
    • Compensation financière
      • Les questions liées à la compensation financière des membres de groupes d’experts vont au-delà de la portée de la ligne directrice
  • Prise en charge d’un travailleur de la santé infecté par un virus à diffusion hématogène
    • Traitement
    • Surveillance
    • Restrictions liées à la pratique
    • Compensation financière
      • Les questions liées à la compensation financière des travailleurs de la santé vont au-delà de la portée de la ligne directrice
    • Étudiants, stagiaires et membres de faculté infectés par un virus à diffusion hématogène
  • Recherche rétrospective des patients exposés à la source de l’infection
    • Conséquences pour la santé publique
  • Questions éthiques et juridiques
    • Divulgation de l’information aux patients
    • Obligations en matière de production de rapports
    • Confidentialité de l’information sur la santé personnelle des travailleurs de la santé

Tous les commentaires reçus dans le cadre de la consultation générale finale ont été examinés et traités au besoin par le Groupe de travail, avant la finalisation de la ligne directrice. La liste de tous les partenaires, organismes et experts invités à formuler des commentaires figure dans la Ligne directriceNote de bas de page 1.

Examen des enquêtes épidémiologiques

Le type et la durée de l’intervention pratiquée, les techniques et compétences opératoires et le respect des pratiques de prévention et de contrôle des infections faisaient partie des facteurs influant sur le risque de blessure percutanée chez les TS. La nature de la blessure et de l’exposition, la fréquence des blessures, la taille de l’inoculum ou le volume de sang lors d’un accident d’exposition, la charge virale et l’état clinique de la source et la réceptivité de la personne exposée faisaient partie des facteurs influant sur le risque de transmission.

La transmissibilité du VDH et l’état immunologique du TS font également partie des autres facteurs influant sur le risque de transmission. Les enquêtes recensées faisant état d’un risque d’exposition des patients aux TS infectés par le VIH, le VHC ou le VHB sont résumées dans le tableau 1. Le nombre d’accidents d’exposition avec transmission était le plus faible pour le VIH et le plus élevé pour le VHB.

Tableau 1 : Enquêtes épidémiologiques portant sur le risque d’exposition des patients à un virus à diffusion hématogène lors des interventions pratiquées par des travailleurs de la santé infectés
Virus
(année de publication)
Nombre d’enquêtes n’impliquant aucune transmission Nombre d’enquêtes impliquant une transmission Nombre de patients infectés Nombre total d’enquêtes
VIH
(1985-2017)
45 4 9 49
VHC
(1996-2013)
7Note a de Tableau 1 24 68Note a de Tableau 1 31
VHB
(1986-2013)
3 29 237 32
Total 55 57 314 112

Actes à risque de transmission

Les actes à risque de transmission sont des interventions invasives au cours desquelles il existe un risque qu’une blessure subie par un TS se traduise par une exposition des tissus ouverts du patient au sang du TS. Les actes à risque de transmission varient d’une spécialité chirurgicale à l’autre. Trois conditions doivent être réunies pour qu’un TS infecté transmette un VDH à un patient lors d’un acte à risque de transmission :

  • le TS doit subir une blessure ou être atteint d’une affection susceptible d’occasionner une exposition
  • le sang du TS doit entrer en contact avec une plaie, un tissu lésé, une membrane muqueuse ou toute autre porte d’entrée similaire du patient
  • la virémie doit être suffisamment élevée chez le TS

Examens systématiques

Les études admissibles consistaient essentiellement en des comptes rendus d’accidents d’exposition avec ou sans transmission subséquente. Ces études ont permis de cerner les facteurs de risque de transmission de VDH et, ainsi, les pratiques exemplaires à adopter pour prévenir la transmission. Le Groupe de travail a procédé à l’analyse des conclusions issues des examens systématiques. Cette analyse, associée à une opinion d’expert pour combler les éventuelles lacunes, a contribué à éclairer la formulation des recommandations. Les examens systématiques complets sont en cours de publication et ne figurent pas dans ce résumé.

Recommandations de la Ligne directrice : VIH, VHC et VHB

Les recommandations suivantes s’appliquent sans distinction aux TS infectés par l’un des trois VDH (se reporter à la Ligne directrice pour connaître le contexte dans son ensemble et consulter les notes de bas de page qui s’y rapportent) :

  • tous les TS qui pratiquent des actes à risque de transmission ont l’obligation éthique et professionnelle de connaître leur état sérologique à l’égard du VIH, du VHC et du VHB
    • s’ils sont séronégatifs, les TS doivent se soumettre à des tests de dépistage à des intervalles appropriés en fonction de leur niveau de risque et à la suite de tout accident d’exposition
  • les TS infectés par le VIH, le VHC ou le VHB qui ne pratiquent pas d’actes à risque de transmission ne devraient pas être limités dans l’exercice de leurs fonctions uniquement en raison de leur état sérologique à l’égard d’un VDH
  • en cas de transmission du VIH, du VHC ou du VHB d’un TS à un patient, le TS devrait immédiatement cesser la pratique clinique jusqu’à ce qu’il soit jugé apte à exercer ses fonctions de nouveau

Les recommandations applicables spécifiquement aux TS infectés par le VIH, le VHC ou le VHB sont résumées dans les tableau 2, tableau 3 et tableau 4, respectivement.

Tableau 2 : Recommandations concernant la prise en charge des travailleurs de la santé infectés par le VIH
Recommandations
Les TS infectés par le VIH devraient consulter un médecin spécialisé dans la prise en charge du VIH pour assurer le maintien d’une santé optimale et une prise en charge conforme aux recommandations actuelles, ce qui comprend une surveillance régulière du taux de l’ARN du VIH.
Les TS infectés par le VIH devraient se voir retirer le droit de pratiquer des actes à risque de transmission jusqu’à ce qu’ils :
  • soient suivis par un médecin spécialisé dans la prise en charge du VIH;
  • reçoivent une polythérapie antirétrovirale efficace ou qu’ils aient été reconnus comme un contrôleur d’élite;
  • présentent une charge virale indétectableNote a de Tableau 2.
Les TS infectés par le VIH qui reçoivent une polythérapie antirétrovirale efficace (ou qui sont des contrôleurs d’élite) et qui présentent une charge virale indétectable ne devraient pas être limités dans l’exercice de leurs fonctions uniquement en raison de leur état sérologique à l’égard du VIH.
Tableau 3 : Recommandations concernant la prise en charge des travailleurs de la santé infectés par le virus de l’hépatite C
Recommandations
La confirmation d’une infection active au VHC devrait se faire à l’aide du dosage de l’ARN du VHC. Les TS infectés par le VHC devraient consulter un médecin spécialisé dans la prise en charge du VHC pour assurer le maintien d’une santé optimale et une prise en charge conforme aux recommandations actuelles.
Les TS ayant obtenu un résultat positif au dosage de l’ARN du VHC devraient se voir retirer le droit de pratiquer des actes à risque de transmission jusqu’à ce qu’ils : Remarque : Les groupes d’experts peuvent individualiser les restrictions à la pratique pour permettre à un TS d’effectuer des actes à risque de transmission pendant qu’il est soumis à un traitement efficace si le virus est indétectable. La pratique du TS devrait donc être restreinte après le traitement jusqu’à la confirmation d’une réponse virologique soutenue.
Les TS qui ont obtenu un résultat négatif au dosage de l’ARN du VHC 12 semaines après le traitement peuvent être considérés comme présentant une réponse virologique soutenue et ne devraient pas être limités dans l’exercice de leurs fonctions uniquement en raison de leur état sérologique à l’égard du VHC.
Tableau 4 : Recommandations concernant la prise en charge des travailleurs de la santé infectés par le virus de l’hépatite B
Recommandations
Les TS qui demeurent vulnérables au VHB (résultats négatifs aux tests de détection des anti-HBs et anti-HBc) doivent se soumettre à des tests de dépistage à des intervalles appropriés en fonction de leur niveau de risque et à la suite de toute exposition.
Les TS qui sont nés ou qui ont déjà habité dans un pays où le VHB est fortement endémique devraient subir des tests de détection des anti-HBc et de l’AgHBs afin de connaître leur état sérologique complet pour le VHBNote a de Tableau 4Note b de Tableau 4.
Les TS infectés par le VHB devraient consulter un médecin spécialisé dans la prise en charge du VHB pour assurer le maintien d’une santé optimale et une prise en charge conforme aux recommandations actuelles, ce qui comprend une surveillance régulière du taux d’ADN du VHBNote c de Tableau 4.
Les TS infectés par le VHB devraient se voir retirer le droit de pratiquer des actes à risque de transmission jusqu’à ce qu’ils :
  • soient suivis par un médecin spécialisé dans la prise en charge du VHB;
  • que leur taux d’ADN du VHB soit inférieur à 103 UI/ml (5 x 103 GE/ml)Note d de Tableau 4 ou l’équivalent et fasse l’objet d’une surveillance régulière (tous les 3 à 6 mois)Note e de Tableau 4.
Les TS qui sont infectés par le VHB et dont le taux d’ADN du VHB est inférieur ou égal à 103 UI/ml (5 x 103 GE/ml)Note d de Tableau 4 ou l’équivalent ne devraient pas être limités dans l’exercice de leurs fonctions uniquement en raison de leur état sérologique à l’égard du VHB.

Co-infection par des virus à diffusion hématogène

Si un TS qui pratique des actes à risque de transmission est co-infecté par une combinaison du VIH, du VHC ou du VHB, il doit satisfaire aux critères définis recommandés pour assurer le travail sécuritaire des TS qui sont infectés par chaque virus.

Port d’une double paire de gants

Dans l’ensemble, il n’y avait pas suffisamment de données probantes pour recommander de porter ou non une double paire de gants afin de prévenir la transmission des VDH des TS aux patients.

Analyses environnementales et expertise technique

Les conclusions issues des analyses environnementales et les opinions fournies par les experts ont permis d’éclairer le contenu de la Ligne directrice relativement à l’établissement de groupes d’experts (GE), à la divulgation de l’état sérologique des TS et à la conduite de recherches rétrospectives, ainsi que de formuler des recommandations adaptées à la réalité canadienne. Les lecteurs qui souhaitent consulter l’intégralité de la discussion afférente aux analyses environnementales sont invités à se reporter à la Ligne directriceNote de bas de page 1.

Groupe d’expert

Au moment de l’élaboration de la Ligne directrice, les TS infectés par un VDH n’avaient pas tous accès à un GE. Les recommandations formulées pour l’établissement des GE concernent les domaines suivants :

  • reddition de comptes, gouvernance et composition d’un GE
  • rôles et responsabilités du GE
  • renvoi des TS à un GE
  • mise en œuvre et surveillance des recommandations du GE et conformité à celles-ci
  • modèle de processus du GE visant les TS réglementés infectés par un VDH

Divulgation de l’état sérologique des travailleurs de la santé

Nombre de lignes directrices et de politiques actuelles traitant des TS et des infections aux VDH ne contiennent aucune recommandation explicite concernant les obligations de divulgation des TS envers leurs patients. Le tableau 5 présente les recommandations formulées à ce sujet dans la Ligne directrice.

Tableau 5 : Recommandations concernant les obligations de divulgation des travailleurs de la santé et leur droit à la vie privée
Recommandations
Un TS infecté par un VDH qui pratique des actes à risque de transmission n’est pas tenu de divulguer systématiquement son état sérologique aux patients pour obtenir leur consentement éclairé, pourvu que l’état de santé et le champ de pratique du TS aient été évalués par un groupe d’experts et que les recommandations des experts soient respectées.
Tous les TS, y compris ceux qui sont infectés par un VDH, ont un droit à la vie privée et à la confidentialité des renseignements personnels sur leur santé.
Les organismes de réglementation devraient se doter de politiques sur la prise en charge des TS infectés par un VDH, et ces politiques devraient clairement énoncer comment le droit des TS à la vie privée sera protégé.
Si un patient est exposé au sang d’un TS, le TS doit demander un suivi conformément aux processus de son organisme et le patient doit être promptement informé de la nature de l’exposition subie ainsi que du protocole post-exposition à suivre. Cependant, l’identité et la confidentialité du TS doivent être protégées dans toute la mesure du possible.

Recherches rétrospectives

La recherche rétrospective est une activité nécessitant d’importantes ressources humaines et financières pour recenser, informer, conseiller et tester tous les patients ayant subi une exposition potentielle. La Ligne directrice prévoit une liste de vérification et un algorithme pour déterminer s’il est nécessaire de procéder à une recherche rétrospective, ainsi que les éléments à prendre en considération dans sa réalisationNote de bas de page 1. Une recherche rétrospective peut être entreprise pour les raisons suivantes :

  • informer les patients de leur exposition potentielle
  • recenser les patients infectés et leur fournir des conseils appropriés et des recommandations en matière de traitement
  • prévenir la transmission secondaire
  • rassurer le public
  • préserver la confiance du public à l’égard du système de santé
  • alimenter la base de données probantes sur le risque de transmission

Discussion

Cette Ligne directrice fondée sur des données probantes présente un examen complet de la littérature pertinente et fixe une orientation nationale sur la politique organisationnelle à adopter pour faciliter la mise en place d’une approche pancanadienne cohérente dans la prise en charge des TS infectés par un VDH. Elle décrit les mesures à prendre pour réduire davantage le risque minimal de transmission des VDH des TS aux patients, tout en conciliant les attentes raisonnables du public (protection contre les préjudices) et celles de chaque TS (droit à la vie privée).

Tous les TS doivent se conformer aux pratiques de base, comme se laver les mains dans les circonstances appropriées et utiliser de l’équipement de protection individuelle au besoinNote de bas de page 4. Tous les TS doivent recevoir une formation et une éducation adéquates sur la prévention et la gestion des blessures professionnelles et de l’exposition potentielle dans le cadre d’un programme de santé au travail. En outre, il est essentiel de sensibiliser continuellement les TS à leur propre statut sérologique pour assurer le maintien d’une santé optimale et garantir la sécurité des patients lors des actes à risque de transmission.

D’après les rapports publiés, le risque moyen de transmission à la suite d’une exposition est le plus élevé pour le VHB et le plus faible pour le VIHNote de bas de page 10. Bien qu’il existe un certain risque d’infection associé au contact des tissus ouverts d’un patient avec le sang d’un TS ayant une charge virale circulante élevée, ce risque devient presque nul lorsque le TS en question suit un traitement et parvient à éradiquer le virus circulant dans son sang (dans le cas du VHC) ou à en diminuer la quantité (dans les cas du VIH et du VHB). Par ailleurs, avec l’avènement des vaccins contre l’hépatite B, la plupart des TS sont protégés des risques d’infection par ce VDH.

Cette Ligne directrice s’applique à tous les TS et contient des recommandations précises à l’intention des TC infectés par un VDH. Ces recommandations sont destinées à aider les personnes intervenant dans l’évaluation et la prise en charge des TS, soit à titre individuel (par exemple, médecin traitant, membres de groupes d’experts), soit de manière générale (organismes de réglementation).

Conclusion

Cette Ligne directrice a été élaborée suivant une méthodologie rigoureuse comprenant des examens systématiques robustes, un examen narratif, des analyses environnementales, des résumés d’enquêtes épidémiologiques publiées et la notation des données probantes disponibles en tenant compte de l’opinion d’experts pour élaborer les recommandations. Le respect des recommandations formulées dans la présente Ligne directrice se traduira par une pratique plus sécuritaire pour les TS infectés par un virus à diffusion hématogène. Bien que la Ligne directrice contienne les dernières données scientifiques disponibles, il pourrait être nécessaire de mettre à jour les recommandations à mesure que de nouvelles données probantes seront disponibles.

Déclaration des auteurs

  • T. O. — Conceptualisation, gestion de projet, méthodologie, recherche, extraction de données, rédaction (première ébauche), rédaction (examen et révision)
  • K. D. — Conceptualisation, gestion de projet, recherche, extraction de données, rédaction (examen et révision)
  • B. L. J., M. V., B. H. — Conceptualisation, expertise clinique, interprétation de données, contenu intellectuel, rédaction (examen et révision)
  • A. M. J., B. C., M. C., D. K. W., T. M., J. W., I. B. — Expertise clinique, interprétation de données, contenu intellectuel, rédaction (examen et révision)
  • M. A. I. — Expertise en bioéthique, rédaction (examen et révision)
  • Y. R. — Contenu intellectuel, examen
  • K. Dunn — Supervision, examen

Conflit d’intérêts

Aucun.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier l’ensemble des partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, les principaux organismes intervenants et les experts pour leurs commentaires sur la Ligne directrice. Se reporter à la Ligne directrice pour obtenir la liste des organismes et des personnes invités à formuler des commentaires.

Les auteurs tiennent à remercier les membres du Comité consultatif national sur la prévention et le contrôle des infections (CCNPCI) de l’Agence de la santé publique du Canada pour leur examen et leurs commentaires sur cette Ligne directrice. Au moment de l’élaboration de la Ligne directrice, le comité était constitué des personnes suivantes : J. Embree (président), L. Johnston (ancien président), M. Blake, G. Cerkowniak, M. Cividino, N. Cleator, D. Gregoraschuk, B. Henry, J. Johnstone, M. Muller, H. Pitfield, P. Rawding, P. Savard, S. Smith et J. Stafford.

Financement

Ces travaux ont été soutenus par l’Agence de la santé publique du Canada.

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