Sensibilité de Neisseria gonorrhoeae aux antimicrobiens au Canada, 2021

RMTC

Volume 49-9, septembre 2023 : Maladies infectieuses courantes causées par des bactéries

Surveillance

Sensibilité de Neisseria gonorrhoeae aux antimicrobiens au Canada, 2021

Pamela Sawatzky1, Brigitte Lefebvre2, Mathew Diggle3, Linda Hoang4, Jason Wong4, Samir Patel5, Paul Van Caessele6, Jessica Minion7, Richard Garceau8, Sarah Jeffrey9, David Haldane10, Lillian Lourenco11, Geneviève Gravel11, Michael Mulvey1, Irene Martin1

Affiliations

1 Laboratoire national de microbiologie, Agence de la santé publique du Canada, Winnipeg, MB

2 Laboratoire de santé publique du Québec, Ste-Anne-de-Bellevue, QC

3 Laboratoire provincial de santé publique, Edmonton, AB

4 Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique, Vancouver, BC

5 Laboratoire de Santé Publique Ontario, Toronto, ON

6 Laboratoire provincial Cadham, Winnipeg, MB

7 Laboratoire provincial Roy Romanow, Regina, SK

8 Centre hospitalier universitaire Dr Georges-L.-Dumont, Moncton, NB

9 Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Yellowknife, NT

10 Centre des sciences de la santé Queen Elizabeth II, Halifax, NS

11 Direction générale du Centre de la lutte contre les maladies transmissibles et les infections, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa, ON

Correspondance

irene.martin@phac-aspc.gc.ca

Citation proposée

Sawatzky P, Lefebvre B, Diggle M, Hoang L, Wong J, Patel S, Van Caessele P, Minion J, Garceau R, Jeffrey S, Haldane D, Lourenco L, Gravel G, Mulvey M, Martin I. Sensibilité de Neisseria gonorrhoeae aux antimicrobiens au Canada, 2021. Relevé des maladies transmissibles au Canada 2023;49(9):427–37. https://doi.org/10.14745/ccdr.v49i09a05f

Mots-clés : gonorrhée, Neisseria gonorrhoeae, résistance aux antimicrobiens, sensibilité aux antimicrobiens, système de surveillance national, surveillance passive

Résumé

Contexte : Au Canada, la gonorrhée est la deuxième infection bactérienne sexuellement transmissible la plus répandue. Le Programme de surveillance de la résistance des gonocoques aux antimicrobiens (GASP – Canada), un système de surveillance passive qui surveille la résistance aux antimicrobiens chez Neisseria gonorrhoeae au Canada depuis 1985, est la source de ce résumé des données démographiques, de la résistance aux antimicrobiens et du typage des séquences multiantigènes de N. gonorrhoeae (NG-MAST) des isolats gonococciques collectés au Canada en 2021.

Méthodes : Les laboratoires de santé publique provinciaux et territoriaux ont soumis des cultures de N. gonorrhoeae et des données au Laboratoire national de microbiologie de Winnipeg dans le cadre du système de surveillance. La résistance aux antimicrobiens et le type moléculaire de chaque isolat reçu ont été déterminés.

Résultats : Au total, 3 439 cultures de N. gonorrhoeae ont été reçues des laboratoires du pays en 2021, soit une augmentation de 9,9 % depuis 2020 (n = 3 130). La diminution de la sensibilité au céfixime a augmenté de manière significative (p < 0,001) en 2021 (1,5 %) par rapport à 2017 (0,6 %). Aucun changement significatif dans la diminution de la sensibilité à la ceftriaxone n’a été détecté entre 2017 et 2021 (0,6 %) (p > 0,001); cependant, un isolat résistant à la ceftriaxone a été identifié. La résistance à l’azithromycine a diminué de manière significative (p < 0,001) en 2021 (7,6 %) par rapport à 2017 (11,7 %); toutefois, on a observé une augmentation significative (p < 0,001) de la proportion de cultures présentant une concentration minimale inhibitrice d’azithromycine d’au moins 1 mg/L (2017 = 22,2 % à 2021 = 28,1 %). En 2021, NG-MAST-19875 (15,3 %) était le type de séquence le plus répandu au Canada; 20,3 % des isolats présentant ce type de séquence étaient résistants à l’azithromycine.

Conclusion : La propagation de la gonorrhée résistante aux antimicrobiens est un problème de santé publique important. La poursuite de la surveillance régionale et nationale de la résistance aux antimicrobiens chez N. gonorrhoeae est essentielle pour garantir que des traitements efficaces sont recommandés.

Introduction

La gonorrhée, causée par Neisseria gonorrhoeae, est la deuxième infection bactérienne transmissible sexuellement (ITS) la plus signalée au Canada. Elle provoque une urétrite chez les hommes et, alors qu’elle est souvent asymptomatique chez les femmes, elle peut se présenter sous la forme d’une cervicite et entraîner des complications graves telles que la stérilité et les maladies inflammatoires pelviennesNote de bas de page 1. En l’absence de traitement, des infections gonococciques disséminées peuvent survenir si la bactérie pénètre dans le sang et d’autres sites stériles. Les infections gonococciques disséminées ne sont pas considérées comme fréquentes au Canada, mais elles ont augmenté entre 2017 et 2021Note de bas de page 2. Elles peuvent causer de l’arthrite, de la dermatite, de la polyarthralgie migratoire, de la ténosynovite et, dans de rares cas, de l’endocarditeNote de bas de page 3Note de bas de page 4.

Le Canada a déclaré 30 883 cas de gonorrhée en 2020Note de bas de page 2Note de bas de page 5. Ce nombre est légèrement inférieur à celui rapporté en 2019 (n = 35 443), probablement en raison des effets de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) sur les soins de santé publiqueNote de bas de page 2Note de bas de page 5Note de bas de page 6. Malgré la diminution du nombre de cas de gonorrhée signalés, le taux de gonorrhée pour 2020 (80,1 pour 100 000 habitants) est deux fois plus élevé que le taux signalé en 2013 (40,56 pour 100 000 habitants)Note de bas de page 1.

Neisseria gonorrhoeae a constamment évolué pour résister aux antimicrobiens utilisés pour le traitement de la gonorrhée. Le Plan d’action mondial de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a été publié dans le but de contrôler la propagation et de minimiser l’impact de la N. gonorrhoeae résistante aux antimicrobiensNote de bas de page 3Note de bas de page 4. Le schéma thérapeutique actuellement recommandé par l’Agence de la santé publique du Canada, à savoir 250 mg de ceftriaxone par voie intramusculaire et 1 g d’azithromycine par voie oraleNote de bas de page 7, est menacé en raison de la résistance persistante à l’azithromycine (RAzi) et de la sensibilité réduite aux céphalosporines observée parmi les isolats canadiens de N. gonorrhoeae. Des cas de N. gonorrhoeae résistante aux céphalosporines ont été identifiés au Canada entre 2017 et 2021Note de bas de page 2Note de bas de page 8Note de bas de page 9 et la RAzi a augmenté au-delà du seuil de résistance de 5 % recommandé par l’OMS pour déclencher une révision des thérapies actuellement recommandéesNote de bas de page 4.

Le Programme de surveillance de la résistance des gonocoques aux antimicrobiens (GASP – Canada) est un programme national de surveillance passive qui fonctionne depuis 1985. Un antibiogramme et une caractérisation moléculaire par typage de séquences multiantigènes de N. gonorrhoeae (NG-MAST) sont effectués sur les isolats soumis au GASP – Canada. Le NG-MAST est très distinctif et peut être utilisé pour étudier les échecs de traitement et les éclosion. Les types de séquences (TS) du NG-MAST ont également montré une association étroite avec la résistance aux antimicrobiens (RAM)Note de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 12.

La gonorrhée est un problème de santé publique important en raison de sa capacité à provoquer l’infertilité, des maladies inflammatoires pelviennes et des infections gonococcique disséminées (IGD) Note de bas de page 13Note de bas de page 14. La capacité de N. gonorrhoeae à évoluer constamment pour résister aux antimicrobiens signifie qu’une surveillance continue est nécessaire pour garantir l’efficacité des traitements contre les souches actuellement en circulation et pour ralentir la propagation des souches résistantes aux antimicrobiens.

Comme en 2020, la diminution de la capacité d’analyse des laboratoires canadiens pour les cultures de N. gonorrhoeae en raison de la pandémie de coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS-CoV-2) a contribué à une diminution considérable du nombre d’isolats reçus par le GASP – Canada en 2021 et inclus dans le présent rapport par rapport aux années précédentes. Ce rapport résume les tendances de la RAM et les types moléculaires des cultures de N. gonorrhoeae au Canada de 2017 à 2021.

Méthodes

Surveillance

Dans le cadre du GASP – Canada, les partenaires provinciaux et territoriaux envoient volontairement des cultures de N. gonorrhoeae au Laboratoire national de microbiologie (LNM) principalement lorsque les laboratoires provinciaux détectent une résistance/diminution de la sensibilité à au moins un antimicrobien ou si les laboratoires provinciaux n’effectuent pas de test de sensibilité aux antimicrobiens (TSAM). À partir de 2019, les données des TSAM de certaines provinces (sous forme de concentrations minimales inhibitrices, CMI) d’isolats qui n’ont pas été envoyés au LNM pour être testés ont été utilisées dans notre analyse conjointement avec les CMI des isolats testés au LNM. L’Alberta envoie toutes ses cultures de gonorrhée résistante (n = 652 en 2021) au LNM pour analyse et soumet ses données des TSAM pour les isolats restants (n = 131 en 2021). Le Québec (n = 985 en 2021) et la Colombie-Britannique (n = 119 en 2021) envoient au LNM des isolats qui répondent aux critères suivants : 1) résistant à l’azithromycine; 2) sensibilité réduite au céfixime ou à la ceftriaxone; 3) approche de la résistance/diminution de la sensibilité à ces antimicrobiens. Ces provinces soumettent des données sur les TSAM et les patients pour les autres isolats testés : Québec (n = 576) et Colombie-Britannique (n = 210 en 2021). L’Ontario envoie au LNM tous les isolats résistants (n = 250 en 2021) et informe le LNM du nombre total d’isolats testés dans sa province (n = 636 en 2021). Le Manitoba (n = 44 en 2021), le Nouveau-Brunswick (n = 32 en 2021) et la Saskatchewan (n = 41 en 2021) envoient tous les isolats en culture si possible. La Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador et les Territoires du Nord-Ouest envoient également toutes leurs cultures de gonorrhée au LNM (n = 13 en 2021). Au total, 3 439 isolats de N. gonorrhoeae ont été cultivés au Canada en 2021 : 2 006 cultures uniques et viables ont été soumises au LNM pour un TSAM et le typage moléculaire. Les résultats de TSAM déterminés par les laboratoires provinciaux et territoriaux et les données démographiques des patients pour 903 autres cultures ont été soumis au LNM. Les 530 cultures restantes ont été testées par des laboratoires provinciaux et territoriaux et ont été enregistrées comme sensibles par le LNM, car aucune donnée de TSAM ou démographique n’a été soumise. Le tableau S1 indique le nombre de cultures soumises par chaque province ou territoire et le nombre de cultures présentant une résistance à au moins un antimicrobien. Le nombre total d’isolats de N. gonorrhoeae testés au Canada était de 3 439 et a été utilisé comme dénominateur dans les calculs de résistance, sauf indication contraire.

Analyse d’isolement

Des tests de sensibilité aux antimicrobiens par dilution en milieu géloséNote de bas de page 15 ou par séquençage du génome entier (SGE)Note de bas de page 11 ont été réalisés sur toutes les cultures de N. gonorrhoeae reçues par le LNM (n = 2 006). Les concentrations minimales inhibitrices de dix antimicrobiens ont été déterminées et l’interprétation des résultats a été basée sur le Clinical and Laboratory Standards Institute pour cinq d’entre eux (pénicilline, tétracycline et azithromycine toutes résistantes [R] lorsque la CMI est d’au moins 2 mg/L; résistance à la ciprofloxacine lorsque la CMI est d’au moins 1 mg/L; résistance à la spectinomycine lorsque la CMI est d’au moins 128 mg/L)Note de bas de page 14. Les directives de l’OMS ont été utilisées pour la ceftriaxone (SR lorsque la CMI est d’au moins 0,125 mg/L) et le céfixime (SR lorsque la CMI est d’au moins 0,25 mg/L)Note de bas de page 4. Les interprétations relatives à l’érythromycine (R lorsque la CMI est d’au moins 2 mg/L), à l’ertapénème (non sensible lorsque la CMI est d’au moins 0,063 mg/L) et à la gentamicine (R lorsque la CMI est d’au moins 32 mg/L) sont basées sur des publicationsNote de bas de page 16Note de bas de page 17Note de bas de page 18Note de bas de page 19 (tableau S2). Toutes les cultures ont fait l’objet d’une recherche de ß-lactamase. Les cultures présentant des CMI de tétracycline d’au moins 16 mg/L ont été testées pour le plasmide TétM par réaction en chaîne de la polyméraseNote de bas de page 20. Les isolats ont été classés comme sensibles, résistants, gonocoques multirésistants (GC-MR, soit SR ou R à une thérapie recommandée pour la gonorrhée au moment de l’analyse, plus une résistance à au moins deux autres antimicrobiens) ou gonocoques ultrarésistants (GC-UR, soit SR ou R à deux thérapies recommandées pour la gonorrhée au moment de l’analyse, plus une résistance à au moins deux autres antimicrobiens).

Le génotype des cultures a été déterminé par NG-MAST à l’aide d’une réaction en chaîne par polyméraseNote de bas de page 12 ou SGENote de bas de page 11. SeqMan Pro 15 (DNAStar, Madison [Wisconsin]) a été utilisé pour assembler les brins d’ADN séquencés par Sanger et le TS a été déterminé lorsque les séquences ont été soumises à la base de données PubMLST des spp. de Neisseria. L’ancien site web NG-MAST (http://www.ng-mast.net) a été mis hors service et plusieurs milliers de TS précédemment identifiés ont été supprimés. Par conséquent, certains profils alléliques des années précédentes ont été mis à jour avec de nouveaux TS dans le présent rapport.

Séquençage du génome entier

L’ADN des isolats sur lesquels le SGE a été réalisé avec succès (n = 1 231) a été préparé à l’aide de la trousse complète d’extraction d’ADN et d’ARN Epicentre Masterpure (Mandel Scientific, Guelph [Ontario]). En bref, la méthode de séquençage utilisée consistait à créer des bibliothèques (à l’aide des trousses de préparation d’échantillons Nextera [Illumina, San Diego [Californie]]) avec des lectures d’index paires de 300 pb générées sur la plateforme Illumina NextSeq (Illumina). Galaxy Version 1.0.4+galaxy a été utilisé pour évaluer la qualité des lectures, les assembler et analyser les variants de nucléotides simples avec NCCP1145 (numéro d’accès GenBank NC_011035) comme référence de cartographie. Les données de séquençage du génome entier ont été utilisées pour détecter les marqueurs moléculaires de la RAM et pour déterminer le type de séquence multilocus (MLST), le typage des séquences de Neisseria gonorrhoeae pour la résistance aux antimicrobiens (NG-STAR) et les TS NG-MASTNote de bas de page 11.

Analyse des données

L’âge, le sexe, le site d’isolement, la province et la date de collecte ont été fournis avec les isolats de N. gonorrhoeae. Les isolats en double ont été identifiés et retirés du dénominateur si plusieurs isolats provenant du même patient présentaient le même TS et avaient été prélevés à moins de quatre semaines d’intervalle. Une hiérarchie des sites d’isolement a été utilisée pour déterminer quels isolats étaient considérés comme des doublons, dans l’ordre suivant : 1) site stérile (IGD), 2) gorge, 3) rectal et 4) urogénital. Chaque chiffre comprend le dénominateur utilisé dans sa description. Les tendances de la RAM et des TS ont été déterminées au niveau national. La résistance à l’azithromycine et la SR du céfixime et de la ceftriaxone (SRCé et SRCx, respectivement) ont également été analysées au niveau provincial ou territorial. Une corrélation entre les TS les plus courants et la RAM a également été mise en évidence. Les comparaisons des proportions de RAM ont été effectuées à l’aide de la méthode exacte de Fisher avec un intervalle de confiance de 99 % en utilisant EpiCalc 2000 (version 1.02; Brixton Health).

Résultats

Isolats testés, données démographiques et sites d’isolement

En 2021, 3 439 isolats de N. gonorrhoeae ont été testés au Canada. Plus de 70 % (72,7 %, n = 2 501/3 349) étaient résistants à au moins un antibiotique (tableau S1). Cette proportion n’inclut pas les cas de gonorrhée diagnostiqués à l’aide de tests d’amplification de l’acide nucléique (TAAN). Les cas diagnostiqués par les TAAN ne sont pas systématiquement testés pour la RAM et représentaient 90 % des cas de gonorrhée diagnostiqués et déclarés au Canada en 2020 (figure 1).

Figure 1 : Cas de Neisseria gonorrhoeae signalés au Canada, 2011 à 2020Note de bas de page aNote de bas de page b
Figure 1
Figure 1 - Équivalent textuel

Cette figure est un diagramme à barres empilées affichant le nombre de cas de gonorrhée diagnostiqués à l’aide de techniques de culture (subdivisées en cultures résistantes et sensibles) et de tests d’amplification de l’acide nucléique, pour chaque année, de 2011 à 2020.

Nombre de cas de gonorrhée 2011
(N = 11 394)
2012
(N = 12 561)
2013
(N = 13 786)
2014
(N = 16 285)
2015
(N = 19 845)
2016
(N = 23 708)
2017
(N = 29 034)
2018
(N = 30 874)
2019
(N = 35 443)
2020
(N = 30 833)
Nombre de cas de gonorrhée diagnostiqués par culture et jugés résistants 1 076 987 1 153 1 995 2 532 2 933 3 370 4 061 3 690 2 195
Nombre de cas de gonorrhée diagnostiqués par culture et jugés sensibles 2 284 2 049 2 042 1 814 1 658 1 605 1 920 1 546 1 169 935
Nombre de cas de gonorrhée diagnostiqués par le test d’amplification de l’acide nucléique (TAAN) 8 034 9 525 10 591 12 476 15 655 19 170 23 744 25 267 30 584 27 703

Les informations relatives à l’âge, au sexe et au site d’isolement ont été transmises au LNM pour 2 909 cultures en 2021. Plus de 70 % (71,2 %, n = 2 072/2 909) des cultures de N. gonorrhoeae provenaient de personnes âgées de 21 à 40 ans; 21,3 % (n = 620/2 909) de personnes âgées de 41 ans et plus; 7,4 % (n = 214/2 909) de personnes âgées de moins de 21 ans. Les isolats provenaient principalement d’hommes 84,1 % (n = 2 446/2 909), de femmes 15,0 % (n = 436/2 909) et de patients 0,9 % (n = 27/2 909) de sexe différent ou dont le sexe n’a pas été indiqué. Le site d’isolement prévalent chez les hommes était le pénis/l’urètre (57,0 %, n = 1 395/2 446) et chez les femmes la gorge (33,9 %, n = 148/436). Voir le tableau S3 pour plus de détails.

Tendances antimicrobiennes des céphalosporines au Canada, 2017 à 2021

On observe une augmentation significative de la SRCé (CMI d’au moins 0,25 mg/L), qui passe de 0,6 % en 2017 à 1,5 % en 2021 (p < 0,001), et une diminution significative par rapport aux 2,8 % rapportés en 2020 (p < 0,001) (figure 2).

Figure 2 : Pourcentage de cultures de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite au céfixime, par province, 2017 à 2021Note de bas de page aNote de bas de page b
Figure 2
Figure 2 - Équivalent textuel

Cette figure est une combinaison d’un diagramme à barres et d’un graphique linéaire pour les années 2017 à 2021. Le diagramme à barres montre le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite au céfixime, collectés dans chaque province, en fonction du nombre de cultures testées dans chaque province, par année. La ligne indique le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite au céfixime, collectés au niveau national, sur la base du nombre de cultures testées au niveau national chaque année.

Province 2017 2018 2019 2020 2021
Alberta 0,22 % 0,22 % 0,22 % 1,16 % 2,84 %
Colombie-Britannique 1,88 % 2,86 % 0,80 % 2,45 % 6,08 %
Manitoba 0,00 % 0,00 % 0,54 % 0,00 % 0,00 %
Ontario 0,28 % 0,40 % 3,23 % 4,20 % 0,94 %
Québec 0,87 % 0,16 % 1,20 % 3,50 % 0,26 %
Saskatchewan 0,75 % 0,00 % 0,00 % 0,00 % 0,00 %
National 0,60 % 0,48 % 1,46 % 2,77 % 1,51 %

La diminution de la sensibilité à la ceftriaxone (SRCx, CMI d’au moins 0,125 mg/L) n’a pas connu d’évolution significative depuis 2017, allant de 0,55 % en 2017 et 2018 à 0,93 % en 2020 et diminuant à 0,61 % (n = 21/3 349) en 2021 (figure 3). Il convient de noter qu’un isolat était résistant à la ceftriaxone (RCx) avec une CMI de 1 mg/L, tandis que les 20 autres isolats classés comme SRCx avaient des CMI de 0,125 mg/L. L’isolat RCx a été isolé en Colombie-Britannique en octobre 2021 chez une femme de 25 ans. Le traitement initial par 800 mg de céfixime par voie orale a échoué, mais il a été résolu par une injection intramusculaire de 250 mg de ceftriaxone. L’isolat a été identifié comme NG-MAST-19937, MLST-7365 et NG-STAR-3903 avec l’allèle penA 60,001 (tableau 1).

Figure 3 : Pourcentage de cultures de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite à la ceftriaxone, par province, 2017 à 2021Note de bas de page aNote de bas de page b
Figure 3
Figure 3 - Équivalent textuel

Cette figure est une combinaison d’un diagramme à barres et d’un graphique linéaire pour les années 2017 à 2021. Le graphique à barres montre le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite à la ceftriaxone, collectés dans chaque province, en fonction du nombre de cultures testées dans chaque province, par année. La ligne indique le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae présentant une sensibilité réduite à la ceftriaxone, collectés au niveau national, sur la base du nombre de cultures testées au niveau national chaque année.

Province 2017 2018 2019 2020 2021
Alberta 0,33 % 0,22 % 0,22 % 0,15 % 0,13 %
Colombie-Britannique 1,46 % 2,45 % 0,80 % 0,98 % 0,91 %
Manitoba 5,22 % 3,83 % 0,54 % 0,76 % 0,00 %
Ontario 0,19 % 0,30 % 1,13 % 1,12 % 0,00 %
Québec 0,54 % 0,21 % 1,02 % 1,28 % 1,09 %
National 0,55 % 0,55 % 0,82 % 0,93 % 0,61 %

Tableau 1 : Isolat de Neisseria gonorrhoeae résistant à la ceftriaxone, 2021

No LNM

Province

Date de la collecte

Genre

Âge (années)

Site d’isolement

NG-MAST

Profil de résistance

CMI (mg/L)

MLST

penA

CX

CE

61829

Colombie-Britannique

2021-10-20

Femme

25

Vagin

ST-19937

SRCé; SRCx; RCip; RÉry; RPen; RTet

1

2

7365

60,001


Résistance à l’azithromycine au Canada, 2017 à 2021

La résistance à l’azithromycine a diminué de manière significative (p < 0,001), passant de 11,7 % en 2017 à 7,6 % en 2021 (figure 4); cependant, si l’on compare la proportion d’isolats ayant une CMI d’au moins 1 mg/L entre 2017 et 2021, on constate une augmentation significative (p < 0,001), passant de 22,2 % (n = 1 172/5 290) à 28,1 % (n = 968/3 439) (figure 5).

Figure 4 : Pourcentage de cultures de Neisseria gonorrhoeae résistantes à l’azithromycine par province, 2017 à 2021Note de bas de page aNote de bas de page b
Figure 4
Figure 4 - Équivalent textuel

Cette figure est une combinaison d’un diagramme à barres et d’un graphique linéaire pour les années 2017 à 2021. Le graphique à barres montre le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae résistants à l’azithromycine collectés dans chaque province en fonction du nombre de cultures testées dans chaque province par année. La ligne indique le pourcentage d’isolats de Neisseria gonorrhoeae résistants à l’azithromycine collectés au niveau national sur la base du nombre de cultures testées au niveau national chaque année.

Province 2017 2018 2019 2020 2021
Alberta 1,45 % 1,67 % 8,25 % 1,16 % 1,42 %
Colombie-Britannique 2,51 % 6,34 % 8,85 % 2,45 % 1,82 %
Manitoba 0,75 % 1,09 % 3,80 % 0,00 % 4,17 %
Nouveau-Brunswick 10,00 % 18,20 % 11,11 % 0,00 % 12,50 %
Nouvelle-Écosse 0,00 % 6,45 % 16,67 % 0,00 % 0,00 %
Ontario 15,04 % 7,67 % 7,95 % 3,60 % 3,30 %
Québec 18,32 % 11,85 % 18,47 % 12,75 % 13,76 %
Saskatchewan 1,50 % 0,76 % 2,50 % 0,00 % 4,65 %
National 11,70 % 7,62 % 11,67 % 6,10 % 7,59 %

Figure 5 : Tendances du pourcentage des concentrations minimales inhibitrices d’azithromycine pour Neisseria gonorrhoeae aux points de rupture de la sensibilitéNote de bas de page a
Figure 5
Figure 5 - Équivalent textuel

Cette figure est un graphique linéaire affichant le pourcentage de tous les isolats de Neisseria gonorrhoeae identifiés avec des concentrations minimales inhibitrices (CMI) d’azithromycine ≥ 2 mg/L et ≥ 1 mg/L, sur la base du nombre total de cultures testées au niveau national chaque année, de 2017 à 2021.

CMI de l’azithromycine 2017
(N = 5 290)
2018
(N = 5 607)
2019
(N = 4 859)
2020
(N = 3 130)
2021
(N = 3 439)
CMI de l’azithromycine ≥ 2 mg/L 11,6 % 7,6 % 11,67 % 6,10 % 7,59 %
CMI de l’azithromycine ≥ 1 mg/L 22,2 % 26,5 % 18,17 % 15,27 % 28,14 %

Tendances de la résistance aux autres antimicrobiens, 2017 à 2021

La proportion d’isolats de N. gonorrhoeae résistants à la ciprofloxacine est restée élevée, mais stable (entre 49 % et 57 %) de 2017 à 2021. En 2021, la résistance à la tétracycline atteignait un niveau record de 65,9 %, la résistance à l’érythromycine était de 51,5 % et la résistance à la pénicilline était inférieure à 7 % (figure 6). La non-susceptibilité à l’ertapénème a diminué de manière significative (p < 0,001), mais est restée élevée, passant de 87,2 % en 2017 à 62,0 % en 2021. La résistance à la gentamicine est restée à 0 %.

Figure 6 : Pourcentage de résistance aux antimicrobiens des isolats de Neisseria gonorrhoeae testés au Canada, 2017 à 2021Note de bas de page aNote de bas de page b
Figure 6
Figure 6 - Équivalent textuel

Cette figure est un graphique linéaire affichant le pourcentage de tous les isolats de Neisseria gonorrhoeae jugés résistants à la pénicilline, à la tétracycline, à l’érythromycine, à la ciprofloxacine, à l’azithromycine, sensibles à la céfixime et sensibles à la ceftriaxone, sur la base du nombre d’isolats testés au niveau national chaque année, de 2017 à 2021.

Antibiotique 2017 2018 2019 2020 2021
Résistance à la pénicilline 19,0 % 9,2 % 7,14 % 6,97 % 6,56 %
Résistance aux tétracyclines 45,9 % 47,1 % 44,21 % 42,99 % 64,64 %
Résistance à l’érythromycine 57,0 % 56,0 % 37,70 % 32,50 % 51,45 %
Résistance à la ciprofloxacine 50,1 % 57,3 % 56,95 % 56,45 % 49,37 %
Résistance à l’azithromycine 11,6 % 7,6 % 11,67 % 6,10 % 7,59 %
Diminution de la sensibilité au céfixime 0,6 % 0,5 % 1,46 % 2,77 % 1,51 %
Sensibilité réduite à la ceftriaxone 0,6 % 0,6 % 0,82 % 0,93 % 0,61 %

Gonocoques multirésistants et ultrarésistants au Canada, 2017 à 2021

Le nombre de cultures MR a diminué de manière significative (p < 0,001) entre 2017 (12,2 %) et 2021 (7,8 %) (figure S1). Aucune culture UR n’a été identifiée au Canada en 2021; cependant, 29 isolats GC-UR ont été identifiés entre 2012 et 2020 (figure S2, tableau S5).

Cas d’infections gonococciques disséminées au Canada, 2017 à 2021

Entre 2016 et 2020, le nombre et la proportion de cas de IGD ont augmenté de manière significative (p < 0,001), passant de 0,03 % (n = 6/23 708) à 0,20 % (n = 71/30 833) au Canada. En 2021, cette proportion a légèrement diminué (p = 0,001) par rapport à 2020, pour atteindre 0,13 % (n = 40/30 833). Les sources d’IGD en 2021 comprenaient le liquide synovial (50,0 %, n = 20/40), le sang (45,0 %, n = 18/40) et les yeux, spécifiquement désignés comme IGD (5,0 %, n = 2/40). Neuf des IGD (22,5 %) étaient sensibles à tous les antimicrobiens testés, deux étaient résistants à l’azithromycine et les 29 autres étaient résistants à d’autres antimicrobiens, dont l’érythromycine, la tétracycline et la ciprofloxacine. Aucun n’avait de SR aux céphalosporines. À noter que le nombre de cas déclarés au Canada en 2020 a été utilisé comme dénominateur (n = 30 833) pour estimer la proportion de IGD parmi les cas en 2021.

Tendances du typage des séquences multiantigènes de Neisseria gonorrhoeae au Canada, 2017 à 2021

En 2021, 1 973 des 2 006 cultures soumises ont été typées avec succès pour NG-MAST. Le type de séquence NG-MAST le plus fréquemment détecté au Canada était ST-19875 (n = 306), suivi de ST-11477 (n = 137) et ST-17972 (n = 127). Environ 20 % des isolats ST-19875 ont été identifiés avec RAzi, tandis que les isolats ST-11477 et ST-17972 étaient principalement résistants à la ciprofloxacine et à la tétracycline, ou à la ciprofloxacine et à l’érythromycine, respectivement (figure 7). La figure S3 montre l’évolution des TS prévalents au cours des cinq dernières années. De 2017 à 2020, ST-12302 et ST-14994 étaient les plus répandus, tandis qu’en 2021, ils étaient respectivement les huitième et neuvième TS les plus répandus. Alors que le nombre d’isolats avec ST-12302 (n = 47) a diminué, en 2021, 15 autres TS (ST-8890, n = 24; ST-19853, n = 14; ST-19772, n = 11; ST-17629, n = 10; ST-19935, n = 9; ST-19854, n = 9; ST-19866, n = 8; ST-20691, n = 3; ST-19852, n = 3; et ST-14076, ST-20388, ST-19900, ST-19924, ST-8241, ST-20379 (n = 1 chacun) ont été identifiés avec deux paires de bases ou moins de différences par rapport à ST-12302. Le nombre d’isolats trouvés dans ce groupe de TS, y compris le ST-12302, était de 144; 61,8 % (n = 89/144) étaient des RAzi représentant 34,1 % (n = 89/261) des RAzi isolés en 2021. Le ST-19875 a été identifié pour la première fois en 2020, en faible nombre (n = 22) et uniquement au Québec. En 2021, ce type de TS s’est étendu à cinq autres provinces (figure S4).

Figure 7 : Distribution des caractérisations de la résistance au sein des types de séquences de typage de séquences multiantigènes de Neisseria gonorrhoeae, 2021, n = 2 006Note de bas de page a
Figure 7
Figure 7 - Équivalent textuel

Cette figure est un graphique à barres empilées affichant le nombre d’isolats de Neisseria gonorrhoeae identifiés avec des profils de résistance aux antimicrobiens (RAM) assortis par type de séquence multiantigène de Neisseria gonorrhoeae (NG-MAST), 2021.

NG-MAST RÉry ou RTet ou RPen NGRT avec ou sans résistance à d’autres antimicrobiens RCip avec ou sans résistance à d’autres antibiotiques non inclus dans les catégories ci-dessus SRCé ou SRCx avec résistance à d’autres antimicrobiens RAzi/RÉry et RAzi/RCip/RÉry avec résistance à d’autres antimicrobiens Sensible Total
ST-19875 238 0 4 0 62 2 306
ST-11477 0 0 136 1 0 0 137
ST-17972 4 0 120 0 3 0 127
ST-11461 35 1 72 1 1 1 111
ST-19887 116 0 4 1 1 2 124
ST-17261 0 0 43 14 0 0 57
ST-19876 3 0 0 0 0 46 49
ST-12302 0 0 10 0 37 0 47
ST-14994 0 0 45 0 1 0 46
ST-338 0 0 42 0 1 0 43
ST-17375 0 0 30 0 0 1 31
ST-18293 23 0 0 0 5 3 31
ST-19757 1 0 23 6 0 0 30
ST-19873 25 0 0 0 3 0 28
ST-19872 0 0 27 0 0 0 27
ST-16639 0 0 13 13 0 0 26
ST-8890 22 1 0 0 0 1 24
ST-16065 4 0 15 0 0 1 20
ST-15589 0 17 0 0 0 0 17
ST-20336 0 0 14 0 0 1 15
ST-13062 0 0 14 0 0 0 14
ST-19853 0 0 3 0 11 0 14
ST-19836 0 0 10 4 0 0 14

Discussion

La pandémie mondiale de SRAS-CoV-2, déclarée en 2020Note de bas de page 6Note de bas de page 21, affectait encore les soins de santé publique en 2021Note de bas de page 22. Les cas déclarés de gonorrhée pour 2021 n’avaient pas été publiés à la date de publication de cette étude, mais ce nombre a chuté de 35 475 cas en 2019 à 30 833 cas en 2020. La réduction des tests en raison de la pénurie de trousses de TAANNote de bas de page 23, les mandats de maintien à domicile par les autorités de santé publique et l’hésitation des personnes infectées à se faire soigner ont contribué à cette diminutionNote de bas de page 24. Bien que le nombre de gonorrhées cultivées dans l’ensemble du Canada ait légèrement augmenté entre 2020 (n = 3 130) et 2021 (n = 3 439), il reste inférieur de 30 % à ce qui a été observé en 2019 (n = 4 859) (tableau S1). Il est peu probable que cela soit dû à une diminution des infections et plus probable que cela soit dû à une diminution des testsNote de bas de page 6Note de bas de page 22. Les interruptions continues des tests peuvent entraîner des augmentations importantes de l’incidence des IST, notamment de N. gonorrhoeae, qui peuvent mettre des années à revenir aux niveaux observés avant la pandémie de COVID-19Note de bas de page 25. Au Canada, un rapport résumant l’impact de la pandémie sur les soins de santé indique que, depuis le début, les gens hésitent davantage à se faire soignerNote de bas de page 23. Il faudra des années pour corriger les effets négatifs de la pandémie sur le système de santéNote de bas de page 22. Il peut en résulter des conséquences négatives à long terme, telles qu’une augmentation des maladies inflammatoires pelviennes, de la IGD et de la stérilité.

En 2021, la proportion d’isolats présentant une SRCé a diminué par rapport à 2020, bien qu’elle soit plus élevée qu’en 2017 et 2018. La proportion plus élevée d’isolats présentant une SRCé en 2020 était principalement due à des isolats identifiés comme ST-16639 en Ontario et au Québec. La proportion de cette catégorie a diminué, passant de 3,3 % (n = 53/1 590) en 2020 à 1,3 % (n = 26/2 006) en 2021.

L’augmentation du nombre de SRCé depuis 2018 pourrait résulter d’une augmentation potentielle du traitement oral par céfixime (traitement combiné de 800 mg de céfixime plus 1 g d’azithromycine) par rapport à l’injection intramusculaire de ceftriaxone (250 mg de ceftriaxone par voie intramusculaire plus 1 g d’azithromycine par voie orale). La thérapie orale ne nécessite pas de visite chez un médecin ou dans une clinique pendant les périodes où les services de santé sont limités et où les rendez-vous sont pris par télésanté. En 2021, moins de restrictions ont été mises en place au Canada, permettant la reprise des visites en clinique, ce qui peut avoir induit la diminution du nombre de SRCé en 2021.

L’isolat RCx (isolat ID 61829) dont la CMI à la ceftriaxone est de 1 mg/L et la CMI à la céfixime de 2 mg/L est préoccupant. Il était également résistant à la pénicilline, à la tétracycline, à l’érythromycine et à la ciprofloxacine. Le traitement initial de 800 mg par voie orale a échoué et a été suivi d’une injection intramusculaire de 250 mg de ceftriaxone. Le test de guérison a confirmé le succès du traitement.

Des isolats gonococciques résistants à la ceftriaxone ont déjà été signalés au CanadaNote de bas de page 8Note de bas de page 9 et dans le monde entier, notamment au JaponNote de bas de page 26, en AustralieNote de bas de page 27, en ChineNote de bas de page 28Note de bas de page 29Note de bas de page 30Note de bas de page 31, au DanemarkNote de bas de page 32 et en IrlandeNote de bas de page 33. Trois des cinq isolats canadiens du RCx signalés depuis 2017, dont 61829, présentent l’allèle penA 60,001 ainsi que les mêmes mutations associées à la RAM (tableau S6) observées au Japon et en Australie (clone FC428)Note de bas de page 28. L’isolat 61829 présente une MLST (7365) qui a été observée dans un isolat RCx/RAzi en ChineNote de bas de page 31, mais les types NG-MAST et NG-STAR sont uniques. Le Royaume-Uni a signalé un isolat présentant à la fois une RCx et une RAzi de haut niveau, dont le traitement a échoué en 2018. Cet isolat présentait également les mêmes mutations associées à la RAM, avec quatre copies supplémentaires de la mutation A2059G sur l’ARNr 23SNote de bas de page 34.

Les niveaux nationaux de RAzi au Canada ont été irréguliers entre 2017 et 2021, oscillant entre 12 % et 6 % d’une année à l’autre (figure 4). En réponse à des niveaux élevés de RAzi, certaines régions/administrations ont mis à jour leur traitement recommandé avec 250 mg ou 500 mg de ceftriaxone intramusculaire sans azithromycineNote de bas de page 35Note de bas de page 36. Une surveillance continue permettra de déterminer les effets de la modification des recommandations de traitement sur les taux de RAzi dans ces régions. Les niveaux élevés de RAzi observés entre 2013 et 2018 ont été menés par le ST-12302. En 2021, alors que le nombre d’isolats avec le ST-12302 a diminué, un groupe de TS étroitement lié au ST-12302 et comprenant ce dernier est responsable de 34,1 % (n = 89/261) des isolats RAzi. ST-19875, le TS le plus répandu en 2021, représentait 23,8 % (n = 62/261) des isolats RAzi, mais 75,8 % (n = 232/306) des isolats avec ce TS avaient des CMI d’azithromycine de 1 mg/L, juste une dilution en dessous du point de rupture de la résistance CMI de 2 mg/LNote de bas de page 15. Les isolats RAzi restants sont dispersés dans divers TS principalement non apparentés, avec un à huit isolats dans chacun d’entre eux.

Comme en 2020, le pourcentage de cultures présentant des CMI d’azithromycine égales ou supérieures au seuil de 2 mg/l en 2021 était plus faible qu’en 2019. Toutefois, la proportion de cultures de N. gonorrhoeae présentant une CMI d’au moins 1 mg/L a augmenté de manière significative (p < 0,001) en 2021 (figure 5). Les ST-19875 et ST-17972, deux des TS les plus répandus en 2021, présentent des proportions élevées d’isolats avec une CMI d’azithromycine de 1 mg/L (75,8 % et 58,3 %, respectivement). Bien que le seuil recommandé par le Clinical and Laboratory Standards Institute pour l’azithromycine soit de 2 mg/LNote de bas de page 15, certains pays, dont l’Australie, ont fixé leur seuil à 1 mg/L, qui est également la valeur limite épidémiologique du Comité européen pour les tests de sensibilité aux antimicrobiensNote de bas de page 37Note de bas de page 38. Le passage à une CMI d’azithromycine d’au moins 1 mg/L au Canada doit être surveillé, car l’azithromycine fait partie de la biothérapie recommandée pour le traitement de la gonorrhée.

Bien que le nombre de cas d’IGD au Canada ait diminué entre 2020 et 2021, la baisse n’est pas significative, mais reste une préoccupation importante. Compte tenu de la diminution du nombre de diagnostics de gonorrhée depuis le début de la pandémie de COVID-19, potentiellement due à l’impact des mesures pandémiques sur le dépistage des IST, une nouvelle augmentation des cas d’IGD pourrait être observée à l’avenir et devrait être surveillée.

Limites

Les isolats et les données associées soumis au LNM par les provinces et les territoires le sont sur une base volontaire et ne sont donc pas uniformes dans l’ensemble du pays. Cela limite l’interprétation globale des résultats, car seul un sous-ensemble d’isolats peut avoir été soumis à des tests dans une région donnée. En outre, comme la majorité des cas de gonococcie sont diagnostiqués par des TAAN, les taux de RAM peuvent ne pas être reflétés avec exactitude dans ce rapport et les taux de résistance peuvent être sous-estimés.

Depuis le début de la pandémie de SRAS-CoV-2 en 2020, beaucoup moins de cultures de N. gonorrhoeae (p < 0,001) ont été prélevées au Canada et mises à la disposition du LNM. Les tendances en matière d’incidence, de RAM et de types moléculaires peuvent avoir été affectées, en particulier pour les provinces et territoires de petite taille dont les ressources et les capacités sont limitées.

Conclusion

La gonorrhée reste un problème de santé publique important en raison de son potentiel de stérilité, de maladie inflammatoire pelvienne et d’IGD qui peut inclure la dermatite, l’arthrite et, dans de rares cas, l’endocardite, la méningite ou l’ostéomyéliteNote de bas de page 13Note de bas de page 14. Neisseria gonorrhoeae a la capacité de s’adapter pour résister aux antimicrobiens, ce qui est bien documentéNote de bas de page 3.

Entre 2017 et 2021, nous avons observé un certain nombre de tendances dans les cas de N. gonorrhoeae identifiés au Canada : 1) des isolats RCx avec une CMI égale à 1 mg/L; 2) une augmentation significative de la proportion de cultures SRCé; 3) des taux de RAzi qui dépassent les niveaux recommandés par l’OMS nécessaires pour changer de thérapie et 4) une augmentation significative du nombre de cas d’IGD dans tout le pays.

La surveillance continue des tendances de la résistance aux antimicrobiens de N. gonorrhoeae est cruciale pour garantir que les lignes directrices nationales en matière de traitement recommandent les thérapies les plus efficaces. Les autorités de santé publique peuvent être informées des problèmes émergents liés à la résistance aux antimicrobiens susceptibles d’influer sur les interventions lorsque la surveillance continue détecte des foyers clonaux à l’aide du typage moléculaire. La représentativité et l’interprétation des données de l’actuel système de surveillance passive seraient améliorées si les données épidémiologiques et les données de laboratoire étaient reliées. La Surveillance accrue de la gonorrhée résistante aux antimicrobiens, lancée en 2014, a été élaborée pour combler ces lacunesNote de bas de page 39Note de bas de page 40.

Déclaration des auteurs

  • P. S. — Analyse formelle, validation, recherche, conservation des données, visualisation, rédaction de la version originale, révision et édition de la version définitive
  • B. L. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • M. D. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • L. H. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • S. P. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • P. V. C. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • J. M. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • R. G. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • S. J. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • D. H. — Ressources, méthodologie, rédaction, examen et révision
  • L. L. — Révision de la rédaction et édition
  • G. G. — Révision de la rédaction et édition
  • M. R. M. — Méthodologie, révision de la rédaction et édition
  • I. M. — Conceptualisation, validation, méthodologie, supervision, administration du projet, rédaction, révision et édition de la version définitive

Intérêts concurrents

Aucun.

Remerciements

Nous remercions G. Liu et N. Barairo de l’unité des streptocoques et des ITS du Laboratoire national de microbiologie pour leur assistance en laboratoire. Nous remercions le personnel des laboratoires provinciaux et de santé publique du Canada pour leur participation à ce programme national de surveillance en laboratoire, en particulier pendant la pandémie de SRAS-CoV-2.

Financement

Ce projet a bénéficié d’un financement interne de l’Agence de la santé publique du Canada.

Matériel supplémentaire

Ces documents sont accessibles dans le fichier de Matériel supplémentaire.

Tableau S1 : Résumé des données de culture et de laboratoire concernant Neisseria gonorrhoeae reçues par le Laboratoire national de microbiologie, 2017 à 2021

Tableau S2 : Critères de résistance antimicrobienne de Neisseria gonorrhoeae

Tableau S3 : Âge du patient et site d’isolement des isolats de Neisseria gonorrhoeae testés au Laboratoire national de microbiologie, 2021 (N = 2 909)

Tableau S4 : Cultures de Neisseria gonorrhoeae testées dans chaque province, 2017 à 2021

Figure S1 : Tendances de Neisseria gonorrhoeae multirésistante au Canada, 2017 à 2021

Figure S2 : Tendances de Neisseria gonorrhoeae ultrarésistante au Canada, 2017 à 2021

Tableau S5 : Toutes les Neisseria gonorrhoeae ultrarésistantes isolées au Canada

Figure S3 : Tendances des types de séquences multiantigènes prévalentes de Neisseria gonorrhoeae des isolats testés par le Laboratoire national de microbiologie, 2017 à 2021

Figure S4 : Répartition provinciale des types de séquences multiantigènes de Neisseria gonorrhoeae, 2021 (N = 2 006)

Tableau S6 : Neisseria gonorrhoeae résistante à la ceftriaxone identifiée au Canada, 2017 à 2021

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