Incidents transfusionnels (IT)
Risques liés aux transfusions
La transfusion sanguine permet de sauver des vies et réduit la morbidité pour un grand nombre de maladies et d'affections cliniques, mais elle n'est pas sans danger. Un incident néfaste lié à une transfusion, également appelé réaction transfusionnelle, est un incident défavorable survenant chez un patient pendant ou après une transfusion sanguineNote de bas de page 1. Environ 0,5 % à 3 % de toutes les transfusions donnent lieu à une réaction indésirable, mais dans la majorité des cas, il s'agit de réactions mineures, sans conséquences graves. En général, les incidents néfastes liés à des transfusions se classent en deux catégories : les incidents de nature infectieuse et ceux de nature non infectieuse. Toutefois, on trouve dans la littérature d'autres classifications en fonction du moment de survenue de l'incident (c.-à-d. réaction aiguë ou retardée) ou en fonction du mécanisme physiologique (c.-à-d. réactions d'origine immune ou non immune) (tableau 1)Note de bas de page 2,Note de bas de page 3. Une grande partie des incidents néfastes peuvent résulter d'erreurs dans la préparation, la commande ou l'administration du sang ou des produits sanguins.
Risques de nature infectieuse
À l'heure actuelle, au Canada, le risque de transmission de maladies infectieuses par des transfusions est minime, grâce aux stratégies de prévention efficaces qui ont été mises en oeuvre, notamment les nouveaux tests de dépistage en laboratoire. Malheureusement, il existe un grand nombre d'agents infectieux - virus, bactéries et parasites - qui peuvent être transmis par transfusion. Parmi les virus bien connus, mentionnons le virus de l'hépatite A (VHA), le virus de l'hépatite B (VHB), le virus de l'hépatite C (VHC), le virus de l'hépatite D (VHD), le virus de l'hépatite G/virus GB-C (VHG/GBV-C), les virus de l'immunodéficience humaine 1 et 2 (VIH-1/2), les virus lymphotropes T humains I et II (HTLV-I/II), le cytomégalovirus (CMV), le virus Epstein-Barr (VEB), le virus TT (TTV), l'herpèsvirus humain de type 6 (HHV-6), le virus SEN (SEN-V) et le parvovirus humain (HPV-B19). Il est reconnu que des bactéries telles que Treponema pallidum (agent de la syphilis), Yersinia enterocolitica et les espèces de Staphylococcus et de Streptococcus (agents de contamination bactérienne répandus), ainsi que des parasites comme les espèces de Plasmodium (agent du paludisme), Trypanosoma cruzi (agent de la maladie de Chagas) et Babesia microti (agent de la babésiose) peuvent être transmis par transfusion. En outre, des pathogènes émergents pouvant être transmis par le sang, comme le virus de l'hépatite E (VHE), l'herpèsvirus humain de type 8, Borrelia burgdorferi (agent de la maladie de Lyme) et les agents encore inconnus de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) et de la variante de la MCJ (vMCJ), représentent une menace pour la sûreté du sang.
Les agents infectieux peuvent être classés en cinq catégories selon leur transmissibilité par transfusion, la pathogénicité de l'agent, l'existence de tests sérologiques à administrer aux donneurs et l'efficacité de l'inactivation du pathogène (tableau 2)Note de bas de page 4,Note de bas de page 5,Note de bas de page 6,Note de bas de page 7,Note de bas de page 8. Dans le premier groupe, on classe les agents pour lesquels le risque de transmission est très faible en raison des mesures de sélection et des tests auxquels les donneurs sont soumis; les risques sont habituellement liés à des dons prélevés pendant la période de latence sérologique. Ainsi, le risque de transmission du VIH et du VHC par transfusion sanguine au Canada est évalué, respectivement, à 1 sur 752 000 dons et à 1 sur 225 000 donsNote de bas de page 9. Dans le deuxième et le troisième groupe, l'infection causée par l'agent se traduit généralement par une maladie clinique chez des receveurs à risque élevé, par exemple les sujets immunodéprimés; cependant, le risque de transmission par transfusion est également très faible à cause des stratégies de prévention adoptées, notamment la déleucocytation universelle et le traitement par solvant-détergent. L'infection résultant d'une contamination bactérienne des composants sanguins transfusés est l'incident infectieux le plus fréquent. Environ 1 sur 2 000 à 3 300 unités de plaquettes et 1 sur 38 500 unités de globules rouges sont contaminées par des bactéries; cependant, ce ne sont pas tous les composants contaminés qui provoqueront une réaction. L'incidence des infections bactériennes liées à des transfusions est estimée à environ 1 sur 500 000 unités de globules rouges et à 1 sur 50 000 unités de plaquettesNote de bas de page 10.
Dans le quatrième et le cinquième groupe, on classe les agents infectieux qui représentent une menace potentielle. Bien que la transmissibilité par transfusion des agents du quatrième groupe ait été établie, leur pathogénicité n'est pas encore prouvée. Inversement, même si les agents du dernier groupe causent habituellement une maladie, leur transmissibilité par transfusion n'a pas été démontrée.
Risques de nature non infectieuse
Bien que les incidents de nature infectieuse liés à des transfusions aient reçu plus d'attention, les incidents de nature non infectieuse demeurent les plus fréquents. La majorité d'entre eux sont d'origine immune. Parmi les réactions immunes aiguës, on trouve les réactions transfusionnelles hémolytiques aiguës, le syndrome respiratoire aigu post-transfusionnel (TRALI), les réactions transfusionnelles fébriles non hémolytiques, les réactions urticariennes et l'anaphylaxie. Parmi les réactions immunes retardées, mentionnons la réaction transfusionnelle hémolytique retardée, la réaction du greffon contre l'hôte associée à une transfusion et le purpura post-transfusionnelNote de bas de page 3,Note de bas de page 11.
Les réactions fébriles non hémolytiques et les réactions urticariennes sont les réactions post-transfusionnelles aiguës non fatales les plus fréquentes. La réaction hémolytique aiguë est la réaction sévère la plus fréquente et la principale cause de décès dû à une transfusionNote de bas de page 12. Par ailleurs, les TRALI et la réaction du greffon contre l'hôte sont rares, mais constituent les réactions transfusionnelles les plus dangereuses pour le pronostic vital. Le taux de létalité est de 5 % à 14 % pour les TRALI et de plus de 90 % pour la réaction du greffon contre l'hôteNote de bas de page 13,Note de bas de page 14. Les TRALI sont reconnues comme la troisième cause en importance de décès dû à une transfusionNote de bas de page 12.
Environ 80 % des décès liés à une réaction transfusionnelle hémolytique aiguë sont dus à une incompatibilité ABO, laquelle survient à la suite d'une erreur. Parmi les erreurs bien connues qui peuvent se produire, mentionnons les suivantes : mauvaise identification du patient, erreur d'échantillon, erreur sur le sang administré, erreur de transcription, erreur administrative, erreur technique et erreur lors de l'entreposage. L'identification et la prévention de ces erreurs sont des éléments qui ont pris beaucoup d'importance dans le dossier de la sûreté des transfusionsNote de bas de page 3.
De façon générale, les réactions transfusionnelles non immunes n'entraînent que des manifestations cliniques mineures, dont l'hémoglobinurie, l'hyperkaliémie, l'hypocalcémie, l'hypothermie et la surcharge ferrique. Toutefois, l'embolie gazeuse et la surcharge circulatoire peuvent également mettre la vie en danger. Ces réactions peuvent elles aussi être mises sur le compte d'erreurs; elles peuvent habituellement être prévenues par une bonne préparation et un entreposage adéquat des composants, et par de meilleures pratiques transfusionnellesNote de bas de page 11.
Malgré les risques associés à la transfusion, le système canadien du sang est l'un des plus sûrs au monde. On travaille actuellement à la mise en place de stratégies et de tests de laboratoire qui permettront une prévention et une réduction encore plus efficaces des incidents néfastes liés à des transfusions.
Moment de survenue | Mécanisme | Réaction infectieuse | Réaction non infectieuse |
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Réaction aiguëFootnote a | D'origine immune | -- | Réaction transfusionnelle hémolytique aiguë Syndrome respiratoire aigu post-transfusionnel (TRALI) Réaction transfusionnelle fébrile non hémolytique Réaction urticarienne Anaphylaxie |
D'origine non immune | Contamination bactérienne | Hémolyse non immune (p. ex., hémoglobinurie) Surcharge circulatoire Métabolique (p. ex., hyperkaliémie) Embolie |
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Réaction retardéeFootnote b | D'origine immune | -- | Réaction transfusionnelle hémolytique retardée Réaction du greffon contre l'hôte associée à une transfusion Purpura post-transfusionnel |
D'origine non immune | Infections transmises par transfusion (virales, bactériennes et parasitaires) | Hémochromatose (surcharge ferrique) | |
Premier groupe | Deuxième groupe | Troisième groupe | Quatrième groupe | Cinquième groupe | |
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Agents | VHB, VHC, VIH-1/2, HTLV-I/II, Treponema pallidum |
CMV, VEB, Yersinia enterocolitica, espèces de Staphylococcus et de Streptococcus, Trypanosoma cruzi |
VHA, HPV-B19, HHV-6, espèces de Plasmodium, Babesia microti, Rickettsia rickettsii, Leishmania donovani, Toxoplasma gondii |
VHG/GBV-C, TTV, SEN-V |
VHE, HHV-8, Borrelia burgdorferi, Ehrlichia phagocytophila, prions |
Transmissibilité par transfusion | Établie | Établie | Établie | Établie | Non établie |
Pathogénicité | Causent des maladies | Causent des maladies surtout chez les sujets à risque élevé | Causent des maladies surtout chez les sujets à risque élevé | Non établie | Causent des maladies |
Tests sérologiques chez les donneurs | Disponibles | Non disponibles | Non disponibles | Non disponibles | Non disponibles |
Inactivation des pathogènes | Efficace dans la plupart des cas | Efficace dans la plupart des cas | Non efficace dans la plupart des cas | Inconnue | Inconnue |
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