Savoir polaire : Rapport Aqhaliat - volume 5

Aqhaliat – Volume 5

© Sa Majesté le Roi du Canada, représenté par la présidente et directrice générale de Savoir polaire Canada, 2025
ISSN 2562-6078

Savoir polaire Canada (POLAIRE) est un organisme fédéral. Sa mission est de mener des recherches de pointe de calibre mondial dans l’Arctique. POLAIRE est responsable de l’avancement des connaissances du Canada sur l’Arctique et du renforcement du leadership canadien en sciences et technologies polaires.

Cette année, Savoir polaire Canada célèbre une décennie d’avancement des connaissances polaires et de soutien à la recherche dans l’Arctique et l’Antarctique. L’illustration officielle de notre dixième anniversaire, dont notre étoile POLAIRE est le point central, représente à la fois notre histoire et notre avenir, soulignant une décennie de progrès, de collaboration et de résultats dans le domaine de la recherche polaire. 

Symbole graphique du 10e anniversaire : Un cercle au centre duquel se trouve l’étoile POLAIRE. Un ruban attaché au côté gauche du cercle porte la mention 2015. Le ruban du côté droit porte la mention 2025.

L’étoile POLAIRE 

Le flocon de neige est légèrement incliné vers la droite, de sorte que les pointes des pyramides sont décentrées.

Un logo a été créé en 2016 pour identifier la marque de l’organisme.

Le dessin graphique de l’étoile POLAIRE a été réalisé à partir de l’image décomposée d’une feuille d’érable stylisée en forme de flocon de neige. Le logo a été conçu par le concepteur graphique primé Wei Yew.

À la base, il y avait la feuille d’érable.

Elle a été stylisée.317

Le dessin a été réfléchi pour créer un flocon de neige.

De la couleur a été ajoutée.

Les pôles terrestres ont été intégrés.

Le flocon a été tourné selon l’inclinaison axiale de la Terre, soit 23,5°.

Table des matières d’Aqhaliat

Chercheurs et chercheuses scientifiques de POLAIRE

CHRONIQUES

ARTICLES VEDETTES

  • Radiographier la neige
    Des chercheurs du service météorologique de France ont passé huit mois à Cambridge Bay pour analyser la structure de la neige arctique.
  • Antarctique : Notre travail au pôle Sud
  • Rongés par un nouveau problème
    Les chercheurs à la station de recherche Laurier Trail Valley Creek ont constaté que des changements sont survenus dans l'écosystème de la toundra au cours des 34 dernières années, et l’un des principaux changements est l’arrivée de castors.
  • Nanuk Narratives (récits du nanuk)
    Une série de 20 courts métrages recueillant le savoir traditionnel inuit sur la population d’ours polaires du détroit de Davis sensibilise le public et fait partie intégrante de la gestion de cet animal.
  • En couverture
    Aili Pedersen et Shannon Evetalegak, techniciennes de terrain de POLAIRE, prennent des mesures dans le cadre d'une étude sur la neige à la SCREA. Photo : Elise Imbeau

Message du scientifique en chef

Portrait d’un homme à lunettes qui sourit.

Je suis ravi de vous présenter cette edition spéciale d’Aqhaliat, qui met en évidence les travaux de recherche et le savoir autochtone soutenus par Savoir polaire Canada (POLAIRE).

En inuinnaqtun, le mot aqhaliat désigne les aurores boréales. Ce phénomène lumineux se produit au pôle Nord ainsi qu’au pôle Sud. Le titre résume bien la diversité des sujets abordés dans ce numéro spécial, qui présente les travaux de recherche et d’innovation menés dans l’Arctique et l’Antarctique.

Sur la page couverture, deux techniciennes de terrain de POLAIRE accompagnent des chercheurs de Météo-France dans leur étude de la neige. Comme vous le découvrirez en lisant l’article, l’équipe a également analysé la neige en la faisant passer aux rayons X. Météo-France est un exemple d’organisation internationale qui a recours à la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique (SCREA) pour mieux comprendre l’influence de la neige arctique sur le climat de la planète. Cette collaboration exemplaire illustre bien les partenariats que Savoir polaire Canada a établis avec des chercheurs et des organizations de recherche dans tout le Canada et à l’étranger.

Nous vous proposons des articles sur les projets menés par les chercheurs de POLAIRE, notamment des études sur le pergélisol, les mousses, les insectes et l’atmosphère. Vous découvrirez également des personnes, des universités, des musées et autres organismes de recherche avec lesquels nous collaborons pour mener des études novatrices visant à approfondir notre compréhension des régions polaires. Leurs recherches portent sur les microbes dans les glaciers, le varech, les oiseaux migrateurs, le bœuf musqué, les congélateurs communautaires, les baies, entre autres.

Nous sommes ravis de vous présenter l’histoire de POLAIRE au cours des dix dernières années ainsi que l’évolution de la SCREA. Nous sommes particulièrement fiers des avancées accomplies à ce jour et de notre rôle dans la promotion de la recherche diversifiée dans l’Arctique canadien et au-delà.

Je vous invite à lire ce numéro d’Aqhaliat pour découvrir le travail de recherche exceptionnel mené par POLAIRE au cours de ses dix premières années.

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David Hik

Scientifique en chef et vice-président, Recherche

Grande œuvre d’art posée dans la neige, qui est composée de tuyaux verticaux formant une feuille d’érable stylisée en trois dimensions, laquelle a été utilisée dans la conception de l’étoile POLAIRE.

L’installation artistique L’Aurore polaire à l’extérieur de la SCREA (voir à la page XX)

Message de la présidente et directrice générale par intérim

Portrait d’une femme aux cheveux longs qui sourit.

Savoir polaire Canada célèbre son 10e anniversaire en juin. Nous sommes heureux de marquer cette étape importante en publiant une édition spéciale d’Aqhaliat.

Traditionnellement, notre rapport Aqhaliat porte principalement sur la recherche à POLAIRE, mais il est rédigé dans un style plutôt académique. Nous souhaitions, pour ce nouveau numéro, attirer un plus grand nombre de lecteurs. C’est pourquoi nous avons choisi de présenter le numéro du 10e anniversaire sous la forme d’un magazine, avec de belles photos et de beaux récits. Quelle meilleure façon de mettre en valeur la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique et de raconter l’histoire de POLAIRE à toute la population canadienne?

Au cours de la dernière décennie, POLAIRE a soutenu un large éventail de projets de recherche menés par des scientifiques et des porteurs du savoir au Canada et dans le monde entier. Les travaux de ces chercheurs ont enrichi les connaissances sur les régions polaires. Nous sommes fiers que le soutien financier et en nature de POLAIRE ait pu contribuer à la réalisation de ces travaux.

Nous présentons ici quelques-uns de ces projets. Bien que les exemples de réussite en matière de recherche ne manquent pas, nous avons choisi des articles qui illustrent l’éventail des recherches menées dans le Nord canadien. Nous savons qu’il y a encore beaucoup de travail à faire, et POLAIRE est heureux de jouer un rôle dans la recherche polaire, actuelle et future.

Dans les pages qui suivent, vous découvrirez certaines des recherches fascinantes – innovations, technologies, sciences et connaissances polaires – menées dans l’Arctique canadien et en Antarctique.

Je vous souhaite une lecture des plus agréables.

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Suzanne (Sue) Kerr, CPA, CGA
Présidente et directrice générale par intérim

Conseil d’administration

Le conseil d’administration de Savoir polaire Canada supervise la direction de l'organisation. Ses membres sont choisis au terme d’un concours et nommés par décret en fonction de leur expérience, de leurs connaissances et de leur capacité à contribuer à la réalisation du mandat de POLAIRE.

Janet King – Portrait d’une femme à lunettes qui sourit.

Présidente – Janet King, Ph. D.

David Moore – Portrait d’un homme qui sourit.

Vice-président – David R. Moore, ing.

Karen Barnes – Portrait d’une femme qui sourit.

Membre – Karen Barnes, Ph. D.

Maribeth Murray – Portrait d’une femme qui sourit.

Membre – Maribeth S. Murray, Ph. D.

David Turpin – Portrait d’un homme qui sourit.

Membre – David H. Turpin, CM, Ph. D., LL. D., D. Sc., MSRC

Clive Tesar – Portrait d’un homme qui sourit.

Membre – Clive Tesar

Michelle Gillis – Portrait d’une femme qui sourit.

Membre – Michelle Gillis

Savoir polaire : un mélange de science et de savoir autochtone 

Une vieille femme allume un petit feu dans un plat de pierre peu profond à l’aide d’un bâton long et mince.

Une Aînée s’occupe d’un qulliq traditionnel.

« Nous [les Canadiens] considérons que le Canada est un pays nordique et arctique et nous sommes donc attentifs à ce qui se passe dans le Nord, ce qui arrive aux habitants et à l’environnement », affirme Whit Fraser, président de la Commission canadienne des affaires polaires de 1991 à 1999. « La nécessité d’aborder les questions scientifiques est de loin plus grande aujourd’hui qu’elle ne l’était à l’époque où le gouvernement du Canada a créé la Commission polaire. »  

Le climat de la Terre a sensiblement changé depuis 1991, l’année où la Commission des affaires polaires a été établie pour conseiller le gouvernement fédéral sur les questions polaires. Depuis le début des années 2000, l’Arctique se réchauffe à un rythme plus rapide que la moyenne mondiale. Cette situation continue d’avoir des répercussions importantes sur les habitants du Nord. 

Whit raconte que la Commission des affaires polaires cherchait à combler le fossé entre les connaissances scientifiques universitaires et les connaissances traditionnelles des habitants du Nord. La compréhension des changements dans l’Arctique a donné l’occasion de renforcer la collaboration entre les scientifiques et les personnes qui vivent directement ces changements.  

De plus, il fait remarquer que lorsque Savoir polaire Canada a été créé en 2015, l’une des priorités était de combler le fossé entre la recherche scientifique et le savoir autochtone, en soutenant la recherche et les programmes dans l’Arctique.  

POLAIRE a été créé par la Loi sur la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique, qui est entrée en vigueur le 1er juin 2015. POLAIRE combine les ressources et les connaissances de la Commission canadienne des affaires polaires et de l’ancien programme Science et Technologie du ministère des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien (aujourd’hui Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada) en un seul organisme.  

 POLAIRE a été créé pour servir de centre de recherche scientifique polaire, pour jouer un rôle de premier plan dans les questions relatives à l’Arctique et pour gérer la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique. Son mandat est de promouvoir le développement et la diffusion des connaissances sur les régions polaires, tant l’Arctique que l’Antarctique. L’organisme accorde une grande importance à l’avancement des connaissances afin d’améliorer l’intendance de l’environnement, les perspectives économiques et la qualité de vie des habitants dans le Nord du Canada.  

Andrew Applejohn, directeur exécutif des programmes de POLAIRE, est d’accord avec Whit pour dire que la recherche dans l’Arctique doit intégrer à la fois la science occidentale et le savoir autochtone. 

« À bien des égards, le Nord du Canada était une frontière pour la science en raison de son isolement. Les Canadiens du Nord, en particulier dans les communautés isolées, ont fait l’objet d’études approfondies, mais ils n’ont pas nécessairement bénéficié des résultats de ces études et, parfois, les résultats ne leur ont même pas été communiqués », indique Andrew. « En sa qualité d’organisme, je crois que POLAIRE a la possibilité de changer cette dynamique ou de contribuer à la changer. L’organisme peut, à tout le moins, aider à faire comprendre aux chercheurs, en particulier ceux qui ne viennent pas du Nord, qu’il leur incombe de cultiver des relations significatives, durables et à long terme avec les personnes avec qui ils traitent. » 

Richard Boudreault, Ph. D., a été nommé président du conseil d’administration de Savoir polaire Canada en juillet 2015. Richard évoque les premiers défis auxquels POLAIRE a dû faire face, en soulignant que les épreuves sont inévitables dans la croissance de toute nouvelle organisation. Un changement de gouvernement quelques mois après la création de POLAIRE a ralenti certains progrès, mais le conseil d’administration a continué à élaborer des politiques, des procédures et un plan d’affaires tout en portant son attention sur la construction d’une station de recherche de pointe dans l’Arctique.  

« De plus, nous devions nous assurer que le savoir autochtone était pris en compte dans tout ce que nous faisions, raconte Richard. Nous avons signé un accord qui convenait à la haute direction et à l’ITK [Inuit Tapiriit Kanatami]. Cette entente montrait que nous allions de l’avant et que nous répondions aux demandes des communautés nordiques quant à la manière dont la recherche peut être menée dans l’Arctique. Et pour moi, ajoute-t-il, c’était vraiment important parce que c’est quelque chose à laquelle je voulais y parvenir dès le premier jour. » 

Jason Tologanak, directeur de Gestion des connaissances et mobilisation de POLAIRE, reconnaît que la meilleure façon d’enrichir les connaissances sur l’Arctique est de collaborer avec toutes les parties prenantes.  

 « Nous voulons nous assurer non seulement que les résultats de la recherche sont communiqués avec la communauté, mais aussi que la recherche elle-même correspond à ce que la communauté et les habitants du Nord considèrent comme important et significatif », explique Jason. Il ajoute que POLAIRE cherche à atteindre cet objectif en établissant un réseau de relations pour collaborer et travailler à la réalisation d’objectifs communs. 

« Nous rassemblons le monde universitaire. Nous rassemblons des chercheurs et des experts. Nous faisons également appel aux leaders communautaires et aux détenteurs de connaissances au sein des communautés, qui ont pu constater directement ces changements dans leur propre mode de vie, à des organisations de chasseurs et de trappeurs, ainsi qu’à des personnes qui peuvent nous donner une perspective locale. Nous essayons vraiment de trouver des moyens de faire en sorte qu’on accorde la même importance et crédibilité aux connaissances traditionnelles qu’à la science. » 

La plupart des projets financés par POLAIRE sont étroitement liés aux communautés dans lesquelles la recherche est menée. L’initiative CINUK – le Programme de recherche Canada-Inuit Nunangat-Royaume-Uni (2021–2025) – en est un exemple. Cette initiative comprend une forte participation inuite et réunit des chercheurs britanniques, canadiens et inuit qui travaillent ensemble dans le cadre d’une recherche importante pour les communautés de l’Inuit Nunangat.  

POLAIRE est persuadé que le fait de mener des recherches en partenariat avec toutes les parties prenantes et les détenteurs de droits se traduit par des recherches et des données à la fois plus significatives et plus complètes, qui présentent davantage d’intérêt pour les habitants du Nord et pour l’ensemble des Canadiens. 

Chronologie de POLAIRE

17 octobre 2007 – Le premier ministre Stephen Harper annonce qu’une station de recherche de calibre mondial sera établie dans l’Arctique.

Photo – Un petit village, avec de l’eau en arrière-plan.

Février 2009 – Les localités de Cambridge Bay, de Resolute Bay et de Pond Inlet sont des endroits présélectionnés où pourrait être construite la nouvelle installation de recherche.

Photo – Les poutres d’acier d’un bâtiment en construction.

24 août 2010 – La localité de Cambridge Bay est choisie comme emplacement de la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique (SCREA).

13 août 2012 – Le gouvernement annonce l’affectation de 188 millions de dollars sur six ans à la SCREA, soit 142,4 millions destinés à la construction, à l’équipement et aux coûts de mise en exploitation, et 46,2 millions de dollars au programme de recherche en sciences et en technologie.

Septembre 2012 – Alain Fournier, architecte du projet EVOQ, rencontre les Aînés de Cambridge Bay, le comité de la SCREA, des groupes locaux, la Commission d’aménagement du Nunavut et des membres du public pour discuter des plans du bâtiment.

Photo – Trois hommes marchent à l’extérieur. L’ancien premier ministre Stephen Harper se trouve au milieu.

23 août 2014 – Le premier ministre Stephen Harper participe à la cérémonie de première pelletée de terre pour marquer le début des travaux de construction de la SCREA.

23 octobre 2014 – La Loi sur la Station canadienne de recherche dans l’Extrême‑Arctique est présentée à la Chambre des communes afin de constituer un nouvel organisme de recherche fédéral, en fusionnant en une seule entité la Commission canadienne des affaires polaires et la Direction des sciences et de la technologie sur l’Arctique qui relève d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (aujourd’hui Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada [RCAANC]).

Photo – Vue latérale du bâtiment principal de la SCREA.

1er juin 2015 –La Loi sur la Station de recherche dans l’Extrême-Arctique entre en vigueur et crée par le fait même Savoir polaire Canada, organisme responsable de l’exploitation de la station de recherche et la coordination de la recherche polaire.

Automne 2015 – POLAIRE tient des réunions préliminaires avec divers intervenants, ministères fédéraux, peuples autochtones et organismes de recherche du Canada et de l’étranger pour discuter de la coopération scientifique dans l’Arctique et l’Antarctique.

21 août 2019 – La cérémonie d’inauguration marque l’ouverture officielle de la SCREA.

7 juin 2023 – La garde des biens immobiliers de la SCREA est officiellement transférée à POLAIRE à la suite d’un décret officiel.

17 juillet 2023 – La SCREA devient l’installation canadienne la plus au nord à obtenir la certification Argent du programme LEED (Leadership in Energy and Environmental Design).

Photo – Vue latérale d’une partie de la façade du bâtiment de recherche principal de la SCREA.

Octobre 2023 – L’Institut des biens immobiliers du Canada décerne le prix Excellence dans l’engagement et les partenariats avec les populations autochtones à RCAANC, à POLAIRE et à Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) pour le projet de conception collaborative du bâtiment de la SCREA.

Photo – Intérieur d’un immeuble de bureaux.

9 janvier 2025 – POLAIRE ouvre un bureau à Whitehorse.

Photo – Trois mains tiennent des cierges magiques allumés.

1er juin 2025 – Savoir polaire Canada célèbre ses 10 ans.

Soutenir la recherche dans le Nord du Canada

Vue extérieure de l’entrée du bâtiment de recherche principal de la SCREA. La photo a été prise au crépuscule et une couche de neige recouvre le sol et le bâtiment.

Des rangées de rectangles de cuivre qui recouvrent le bâtiment principal se superposent en spirale ascendante, comme les blocs de neige d’un igloo.

À l’intérieur de l’entrée, une sculpture inuite représentant un homme muni d’un bâton est suivie subtilement par un ours polaire en albâtre blanc. Au-delà des sculptures, une paroi de verre gravée d’oiseaux, de corbeaux, d’un énorme hibou et d’un Inuk tenant une plume s’incurve de manière invitante vers le hall. Les murs, soutenus par des poutres en bois clair, s’élèvent sur deux étages.

Le sol en linoléum blanc cassé est incrusté d’images de caribous, de phoques, de baleines, de chiens tirant un qamutik, de chasseurs avec leurs harpons et de danseurs au tambour. Ce plancher incomparable évoque des éléments du mode de vie traditionnel des Inuit.

Rien de tout cela ne correspond à ce à quoi on s’attendrait d’une station de recherche. On y trouve plutôt un lieu où la recherche allie la science occidentale et le savoir traditionnel inuit. Bienvenue à la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique.

Photos : Alex Fradkin

Une vaste salle ronde munie de grandes fenêtres, au centre de laquelle se trouvent des bancs courbes. Le plancher porte une incrustation qui représente un grand Inuk en train de danser.

Centre d’échange de connaissances 

Un long couloir, dont le côté gauche est muni de fenêtres. De petits canapés se trouvent face aux fenêtres. Le côté droit du couloir s’élève sur deux niveaux et permet de voir les fenêtres des laboratoires de recherche situés au deuxième étage. Sur la droite, un long comptoir mène à un escalier en colimaçon. Des images de baleines et de bancs de poissons sont incrustées dans le plancher du hall.

Le hall principal de la SCREA menant aux bureaux et au laboratoire d’enseignement

« Notre gouvernement construira une station de recherche de calibre mondial qui se maintiendra à la fine pointe des questions arctiques, comme les sciences de l’environnement et le développement des ressources naturelles. Cette station, bâtie par des Canadiens dans l’Arctique canadien, servira le monde entier. » —La gouverneure générale, son Excellence la très honorable Michaëlle Jean, discours du Trône de 2007

Située juste à l’extérieur du hameau de Cambridge Bay, dans l’Ouest du Nunavut, la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique (SCREA) porte bien son nom. Ikaluktuuttiak, le mot innuinaqtun pour Cambridge Bay, signifie « bon endroit pour la pêche ». L’acronyme anglais de la station, CHARS, y fait écho. En effet, l’omble (char en anglais) est un poisson d’eau froide très prisé par les pêcheurs qui se trouve dans les eaux du secteur, ainsi que dans les lacs et les rivières des régions arctiques et subarctiques. Il est au cœur des régions où les chercheurs de la SCREA mènent leurs recherches.

En outre, la SCREA accueille des chercheurs résidents dont les travaux sont axés sur l’un des trois programmes de recherche de POLAIRE : Science des écosystèmes, Une seule santé, et Énergie et technologies propres. Vous en saurez plus sur les chercheurs de POLAIRE dans les pages qui suivent.

Vue aérienne de deux grands bâtiments. Deux plus petits bâtiments se trouvent derrière celui de gauche. Le terrain avoisinant est plat. Il y a un petit lac derrière les bâtiments et une communauté est établie au-delà du lac.

Vue aérienne de la SCREA pendant sa construction en 2017. Le campus comprend le bâtiment de recherche principal, à l’avant-plan, le bâtiment de recherche sur le terrain et d’entretien, à droite, et les triplex, à l’arrière-plan à gauche, à côté de l’antenne parabolique.

Le bâtiment de recherche principal de deux étages propose 4 855 mètres carrés d’espace dédié à la recherche scientifique et à l’échange de connaissances. On y trouve des laboratoires, des bureaux, des salles de formation, un centre d’échange de connaissances et un espace polyvalent pour l’apprentissage collaboratif et les activités de mobilisation de la communauté.

Une femme souriante porte un parka et un bonnet.

« Faire des travaux scientifiques dans l’Arctique présente de nombreux défis. Mais la SCREA fournit aux chercheurs un endroit où se loger, des laboratoires et l’équipement connexe, du matériel de terrain comme des VTT et des motoneiges, ainsi que des salles de réunion, ce qui facilite grandement la tâche des scientifiques. Le fait d’avoir une station de recherche nous donne également un lieu où réunir les chercheurs, les organisations et les habitants du Nord. » —Emily Koide, gestionnaire des programmes de recherche de POLAIRE

Un homme vêtu d’un sarrau de laboratoire observe une femme aussi vêtue d’un sarrau de laboratoire qui montre de l’équipement de laboratoire.

La SCREA compte plusieurs laboratoires pour l’analyse d’échantillons. Jason Maas et Arina Nikolaeva, membres du personnel de POLAIRE, travaillent sur un projet dans le laboratoire d’analyse.

Une main dans un gant de latex tient une boîte de Petri.

Le laboratoire de microscopie, où se trouve un microscope électronique, est utilisé par les chercheurs et constitue par ailleurs un endroit parfait où enseigner les sciences et initier les étudiants aux techniques de laboratoire.

Un homme barbu vêtu d’un sarrau de laboratoire qui sourit.

« L’un des nombreux objectifs que nous avions en aménageant les laboratoires était de donner aux chercheurs qui viennent ici la possibilité d’en faire le plus possible et de repartir vers le sud avec le moins d’échantillons possible. De plus, il y a des choses, comme les plantes et les échantillons d’eau, qui voyagent mal. Ce qui complique leur analyse. » —Nicolas Nantel-Fortier, Ph. D., gestionnaire des laboratoires de POLAIRE

« Un des principaux domaines de recherche à la SCREA est l’évaluation de la diversité biologique dans l’Arctique à l’aide d’approches fondées sur l’ADN, en vue de constituer une bibliothèque génétique des formes de vie actuelles. Cette bibliothèque détaillée servira à surveiller les changements biologiques qui se produisent à Cambridge Bay et dans l’ensemble de l’Arctique. » — Ian Hogg, Ph. D., chercheur scientifique principal de POLAIRE

Un homme vêtu d’un sarrau de laboratoire qui injecte une substance dans de petites éprouvettes.

C’est dans le laboratoire de génomique que des chercheurs, comme Spencer Monkton, Ph. D., de l’Université de Guelph, peuvent extraire l’ADN et l’ARN d’échantillons organiques.

Deux séries de portes hautes s’ouvrent vers un laboratoire.

Photo : Alex Fradkin

Les biologistes peuvent faire l’autopsie de grands animaux, comme le bœuf musqué, dans le laboratoire de nécropsie. De grandes portes mènent au laboratoire et une grue permet de soulever une baleine et de la transporter dans la salle pour l’examiner.

Trois petites filles observent un garçon plus grand qui porte une casquette de baseball à l’envers. Les enfants se tiennent devant un bassin d’eau dans lequel se trouvent des étoiles de mer et des anémones de mer.

Photo : Pierre Poirier, Musée canadien de la nature

La SCREA dispose de deux grandes salles spacieuses conçues comme des espaces accueillants pour les rassemblements, les réunions communautaires et l’échange de connaissances. Dans le cadre de notre série de conférences, les chercheurs y présentent leurs travaux, ce qui permet aux membres de la communauté de poser des questions et de faire des commentaires.

En septembre 2022, des enfants ont pu observer des créatures marines des eaux de Cambridge Bay lors d’une présentation dans le cadre de la série de conférences du Musée canadien de la nature.

Un grand entrepôt en hiver. Le mot « Canada » est inscrit sur la façade

Le bâtiment de recherche sur le terrain et d’entretien, d’une superficie de 1 655 mètres carrés, propose des locaux, des installations et de l’équipement afin d’aider les chercheurs dans leur travail sur le terrain. Il comprend un atelier de menuiserie, une salle de mécanique, un casier pour les armes à feu, un atelier pour l’équipement de plongée, une salle d’assemblage, un entrepôt frigorifique, un espace d’entreposage chauffé, des bureaux et une salle de formation. Les chercheurs ont également accès à des véhicules tout-terrain (VTT), à des motoneiges, à du matériel de camping, à des trousses de premiers soins et à du matériel de plongée sous-marine.

« La chance d’avoir cette plateforme dans l’Extrême-Arctique canadien qui s’efforce de soutenir les scientifiques et les communautés, qui contribuent continuellement à consolider la recherche sur les connaissances nordiques d’importance pour les Canadiens – que ce soit à l’échelle communautaire, circumpolaire ou internationale – c’est justement le mandat de l’organisme. » —Janet King, Ph. D., présidente, Conseil d’administration de Savoir polaire Canada

Deux personnes souriantes sont assises dans un qamutik.

Shannon Evetalegak et Layla Arnaquq, techniciennes de terrain POLAIRE

« Nous aidons les chercheurs à se rendre sur le terrain et leur prêtons main-forte dans leur travail s’ils le souhaitent. En hiver, on les emmène avec des motoneiges et on attache un traîneau à l’arrière pour transporter leur équipement. En été, on prend des VTT ou des véhicules côte à côte pour les emmener sur le terrain. » —Layla Arnaquq, technicienne de terrain POLAIRE

Vue du campus de la SCREA en hiver. Une éolienne se trouve entre le grand bâtiment de recherche sur le terrain et d’entretien et les deux bâtiments bas.

es chercheurs en visite peuvent séjourner sur place dans les logements de la SCREA, situés dans des triplex. Chacun des bâtiments de deux étages (à droite de l’éolienne) est composé de trois appartements de quatre chambres.

Un homme barbu portant un bonnet se tient derrière une table et ses mains sont posées sur celle-ci.

« Quiconque souhaite venir faire des recherches ici, qu’il s’agisse d’employés de Savoir polaire Canada, de nos propres scientifiques, de scientifiques canadiens, de chercheurs des ONG, des universités ou des organisations internationales, nous les aidons dans leur collecte de données. Ainsi, s’ils ont besoin d’aller sur le terrain et de prélever des échantillons, peu importe ce qu’ils souhaitent faire, nous avons de l’équipement et des techniciens de terrain pour les aider à le faire. »—Scott Johnson, gestionnaire des opérations sur le terrain de POLAIRE

Plan d’étage de la SCREA

Vue de nuit du bâtiment de recherche sur le terrain et d’entretien et du bâtiment de recherche principal de la SCREA en hiver. La lune brille dans le ciel entre les bâtiments.

Bienvenue à la Station canadienne de recherche de l’Extrême-Arctique, la SCREA, une installation de recherche de calibre mondial dans l’Arctique canadien. Cet espace accueille des scientifiques et des porteurs du savoir du Canada et du monde entier venus mener des recherches. 

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La majorité des laboratoires de recherche se trouvent au deuxième étage du bâtiment de recherche principal.

Bâtiment de recherche principal : Centre d’échange de connaissances, cuisine, accueil, collection de référence, laboratoire d’enseignement, laboratoire froid, laboratoire propre, espaces et bureaux de travail, chambres froides, aire de dépôt, quai de chargement, laboratoire de nécropsie, chambre de culture

Bâtiment de recherche sur le terrain et d’entretien : Garage d’entretien, atelier de menuiserie, entreposage de matériel, local à compost, installation de plongée, laboratoire, aire de rassemblement

Grande œuvre d’art posée dans la neige, qui est composée de tuyaux verticaux formant une feuille d’érable stylisée en trois dimensions, laquelle a été utilisée dans la conception de l’étoile POLAIRE.

L’Aurore polaire

On doit au concepteur Wei Yew l’œuvre d’art tridimensionnelle qui se trouve devant la SCREA pour accueillir les visiteurs. Intitulée L’Aurore polaire, l’installation artistique est faite de tuyaux en aluminium recouverts de cuivre en hommage aux ancêtres inuit de la région du Kitikmeot qui fabriquaient des outils en cuivre, comme les ulus et les harpons. Elle représente une feuille d’érable stylisée, symbole national du Canada, pour marquer la souveraineté du Canada dans le Nord. L’espacement des tuyaux, tous équipés de lumières DEL, évoque la danse des aurores boréales.

Un glissement du pergélisol révèle de la glace préhistorique

Stéphanie Coulombe, Ph. D.

Chercheuse scientifique de POLAIRE – Équipe du programme Science et Technologie

Domaine de recherche : pergélisol et géomorphologie

Portrait d’une femme aux cheveux bouclés aux épaules qui sourit.

En 2009, lorsqu’ils étudiaient une forêt fossile sur l’île Bylot, au Nunavut, des chercheurs ont découvert un énorme mur de glace exposé dans un glissement de terrain. Stéphanie Coulombe, spécialiste du pergélisol, faisait partie de l’équipe de recherche qui s’est rendue sur place pour l’examiner.

La pluie et les températures chaudes de l’été peuvent faire fondre l’épaisse couche supérieure du sol normalement gelé, appelée pergélisol. Les pentes deviennent alors instables et la couche supérieure dégelée s’affaisse, comme un glissement de terrain, créant ce qu’on appelle un glissement dû au dégel.

« Les couches supérieures du pergélisol vont glisser et exposer le pergélisol gelé en dessous, explique Stéphanie. Ce glissement a mis à nu de la glace de glacier préservée dans le pergélisol. »

« Il y a environ 20 000 ans, tout l’hémisphère Nord était recouvert d’une masse de glace terrestre. Cette masse a formé une calotte glaciaire continental, semblables à ceux que l’on trouve au Groenland et en Antarctique, explique Stéphanie. Les glaciers se sont retirés et ont laissé des morceaux de glaciers qui ont ensuite été recouverts par des sédiments et préservés dans le pergélisol. »

« Habituellement, on trouve de la glace de glacier enfouie qui date de la dernière glaciation, c’est-à-dire il y a entre 23 000 et 28 000 ans. Mais celle que nous avons trouvée sur l’île Bylot est plus ancienne que les autres glaces de glacier trouvées dans le pergélisol de l’hémisphère Nord. »

Pour déterminer l’âge des sédiments déposés sur le glacier, l’équipe de recherche a eu recours à la datation radiocarbone par paléomagnétisme. Lorsque des sédiments se déposent dans une rivière ou un lac, les propriétés magnétiques de leurs minéraux s’alignent sur le champ géomagnétique de la Terre à ce moment-là. À mesure que les sédiments sont enfouis, l’orientation de ces minéraux est « verrouillée », ce qui garde une trace du champ magnétique de la Terre à cette époque. L’étude de carottes profondes prélevées au fond des océans a montré que le signal magnétique de la Terre s’est inversé 183 fois au cours des 83 derniers millions d’années. Ces inversions se produisent de manière irrégulière, à un intervalle de 100 000 à un million d’années environ.

En comparant le signal magnétique des sédiments trouvés sur le glacier exposé sur l’île Bylot avec l’échelle de temps de la polarité géomagnétique (basée sur les sédiments marins prélevés), les chercheurs ont pu estimer l’âge du glacier.

Selon Stéphanie, les sédiments situés au-dessus du glacier conservent des traces d’une inversion géomagnétique ayant eu lieu il y a 700 000 ans. C’est donc dire que la glace était présente avant cet événement et qu’elle a au moins 700 000 ans.

« Il s’agit de la glace de glacier la plus ancienne trouvée dans les paysages de pergélisol de l’hémisphère Nord. »

Bien que Stéphanie ne soit pas retournée sur le site de l’île Bylot depuis 2014, elle continue d’analyser les données issues de ses recherches. En collaboration avec Daniel Fortier de l’Université de Montréal, Stéphanie a publié ces résultats dans la revue Geology de la Geological Society of America en septembre 2024.

Vue panoramique de collines accidentées et dépourvues d’arbres. Au premier plan, une personne creuse dans la glace sur une partie de la colline qui s’est effondrée.

Glissement du pergélisol sur l’île Bylot qui a mis au jour de la glace de glacier ancienne.

Vue panoramique avec des montagnes en arrière-plan. Une épaisse étendue de glace remplit la moitié de la photo, et une couche de glace épaisse recouverte de terre occupe le premier plan.

Glacier C-93 sur l’île Bylot qui montre l’accumulation de sable sur la glace du glacier. Cette accumulation peut ensevelir de grandes parties d’un glacier, ce qui peut préserver le glacier dans le pergélisol au fil du temps.

Établir des liens entre la haute altitude et l’Extrême-Arctique

Scott Williamson, Ph. D.

Chercheur scientifique de POLAIRE – Équipe du programme Science et Technologie

Domaine de recherche : interaction entre l’atmosphère et la cryosphère

Portrait d’un homme portant des lunettes et une barbe qui sourit.

Les sommets des monts St. Elias, au Yukon, sont proches de la limite supérieure de la troposphère, la couche la plus basse de l’atmosphère terrestre; ils en sont même plus proches que les sommets de montagnes plus hautes situées près de l’équateur.

En effet, l’atmosphère commence à s’amincir lorsqu’on s’approche des pôles, de sorte que la troposphère y est également plus basse. En conséquence, la chaîne des monts St. Elias, haute de 6 000 mètres et située au-delà de 60° de latitude nord, s’élève dans la troposphère. En fait, ces montagnes sont plus proches de la limite supérieure de la troposphère que le mont Everest, qui culmine à 8 849 mètres et se trouve à 28° de latitude nord.

Scott Williamson, chercheur scientifique de POLAIRE, considère cette chaîne de montagnes comme « l’un des endroits les plus intéressants, peut-être même le plus intéressant, de la planète sur le plan climatologique ».

« Tout le monde parle de la rapidité avec laquelle l’Arctique se réchauffe. Et bien, ce n’est rien comparé à l’atmosphère de l’Arctique », dit Scott. Il souligne que le climat des monts St. Elias se réchauffe plus rapidement que la moyenne mondiale. « Cette grande chaîne des monts St. Elias est très importante pour nous permettre de comprendre l’évolution du reste de l’atmosphère arctique. »

Pour surveiller ce phénomène, Savoir polaire Canada exploite quatre stations météorologiques éloignées dans la chaîne de montagnes. Scott dirige une équipe qui analyse les tendances et les modèles de température des stations, les mesures prises par radiosonde (ballon-sonde météorologique), la luminance mesurée par satellite, des carottes de glace extraites en haute altitude dans le champ de glace St. Elias, ainsi que d’autres indicateurs et données historiques sur le climat. Ces renseignements aideront l’équipe à comprendre l’évolution rapide du système climatique de la Terre.

Les données recueillies montrent que les températures annuelles de l’air en surface dans les monts St. Elias augmentent depuis 1979 à toutes les altitudes, de 2 000 à 6 000 mètres. Les taux de réchauffement les plus élevés sont observés au-dessus de 5 500 mètres.

Le taux de réchauffement dans les monts St. Elias est 1,6 fois plus rapide que celui de la température de surface du reste de la planète.

Pourquoi l’air se réchauffe-t-il plus rapidement en haute altitude?

« Il s’agit d’un effet de serre, mais pas du gaz à effet de serre dont tout le monde parle. C’est le gaz à effet de serre important dont personne ne parle, c’est-à-dire la vapeur d’eau », dit Scott.

Scott explique que l’air plus chaud contient plus de vapeur d’eau, qui absorbe alors la chaleur de la Terre. Ce processus réchauffe davantage l’atmosphère, créant un effet de serre. Plus l’Arctique se réchauffe, plus l’humidité est absorbée dans l’atmosphère, ce qui la réchauffe encore davantage.

Selon Scott, le réchauffement de l’atmosphère aux monts St. Elias est un « banc d’essai » pour l’ensemble de l’Arctique.

« Il existe des liens entre l’Extrême-Arctique et la haute altitude. Et si nous parvenons à les comprendre, nous pourrons commenter les mécanismes qui expliquent le réchauffement rapide de la planète. »

Vue panoramique avec des montagnes en arrière-plan. Au premier plan, deux personnes se tiennent sur une vaste étendue de glace et regardent vers les montagnes.

Glaciers dans les monts St. Elias dans le parc national et réserve de parc national Kluane, au Yukon.

Un tas de roches sert à soutenir un trépied sur lequel sont fixés un panneau solaire carré et une boîte métallique. En arrière-plan, le paysage est rocheux et montagneux.

En août 2024, en collaboration avec l’unité de terrain du parc national Kluane, POLAIRE a installé une station météorologique à 2 643 mètres sur la crête du mont Badham II dans le parc national Kluane. La station vise à appuyer un effort international pour extraire en 2026 une carotte de glace de 700 mètres du champ de glace Eclipse, situé à proximité.

Attribution de codes à barres à des invertébrés

Bryan Vandenbrink, M. Sc.

Chercheur scientifique de POLAIRE – Équipe du programme Science et Technologie

Domaine de recherche : invertébrés

Portrait d’un homme vêtu d’un sarrau de laboratoire qui sourit.

Les gens connaissent bien les codes à barres sur les produits de consommation, mais le concept d’attribuer des codes à barres aux insectes n’est pas très connu.

Depuis les années 1700, les organismes vivants sont classés selon le système du biologiste Carl Linnaeus : les organismes se voient attribuer un nom latin pour leur genre et leur espèce en fonction de leurs caractéristiques physiques. Cette méthode est connue sous le nom de taxonomie classique.

« Le plus intéressant, c’est que nous avons maintenant la possibilité d’attribuer des codes à barres aux espèces pour les identifier individuellement. Nos travaux complètent tout ce que Carl Linnaeus et d’autres ont fait, explique le chercheur Bryan Vandenbrink. Grâce à la génomique, nous pouvons différencier les espèces d’après leurs données génétiques, plutôt que de nous fier uniquement à leur apparence physique ou à des hypothèses éclairées sur les liens entre les espèces. »

Bryan capture divers insectes dans la région de Cambridge Bay, sur l’île Victoria, à l’aide de pièges conçus pour attraper toutes sortes d’insectes, qu’ils soient rampants ou volants. Ces spécimens sont ensuite envoyés au Centre de génomique de la biodiversité de l’Université de Guelph, où ils sont identifiés par séquençage génétique.

Bryan explique que les codes à barres des insectes ne sont pas constitués de lignes et de chiffres comme ceux qui figurent sur les produits en magasin; il s’agit plutôt de l’ADN même de l’organisme. Le code à barres de chaque insecte est associé à un numéro unique appelé numéro d’index, qui lui est lié aux données génétiques.

L’ADN est d’abord analysé, puis comparé à une bibliothèque de référence en ligne pour trouver la correspondance la plus proche.

Le résultat est une liste d’insectes codés par ADN, qui fournit une base de référence au sujet des insectes actuellement présents dans la région de Cambridge Bay. La surveillance est ainsi facilitée lorsque des espèces non indigènes apparaissent dans la région. De nouveaux insectes peuvent arriver par inadvertance par l’intermédiaire de personnes ou de cargaisons entrantes. Cependant, les chercheurs comme Bryan s’attendent également à ce que les changements climatiques favorisent la migration d’insectes du sud vers le nord, élargissant ainsi l’aire de répartition de ces insectes.

« Les insectes et l’environnement interagissent de manière très importante », explique Bryan.

L’arrivée de nouvelles espèces dans l’Arctique soulève des inquiétudes quant à la probabilité d’interaction avec d’autres espèces, ou même de déplacement de certaines espèces. Les nouvelles espèces peuvent entraîner une diminution des sources de nourriture pour les espèces indigènes, et elles n’ont peut-être pas de prédateurs.

Et il y a une autre préoccupation qui est digne de mention.

Ce serait une mauvaise chose pour le Sud du Canada s’il y a un échange inverse de gènes entre des espèces étroitement apparentées, c’est-à-dire si une espèce migre vers l’Arctique, acquiert des gènes pour survivre dans des environnements froids, puis migre à nouveau vers le Sud du Canada. 

L’incidence des changements climatiques sur les écosystèmes, tant dans l’Arctique que dans le Sud du Canada, reste incertaine. Comme le dit Bryan, « les changements climatiques auront d’énormes répercussions sur tout ce qui vit dans l’environnement, c’est-à-dire vous et moi, mais aussi les insectes. »

Photo prise au microscope d’un insecte muni d’antennes.

Ce minuscule spécimen nouvellement éclos est une guêpe parasitoïde à qui un code à barres n’a pas encore été attribué. La guêpe parasitoïde pond des œufs à l’intérieur d’autres insectes, et les larves se nourrissent de l’hôte pour se développer. Une fois à maturité, elles émergent de l’insecte hôte.

Deux personnes assises au sol à l’extérieur, au milieu de plantes très basses. La femme, qui porte un chapeau moustiquaire, tient un petit récipient, et l’homme l’observe.

Bryan Vandenbrink et Crystal Soble vérifient les pièges à insectes près de Cambridge Bay en 2017.

Des mousses incroyables

Erin Cox, M. Sc.

Chercheuse scientifique de POLAIRE – Équipe du programme Science et Technologie

Domaine de recherche : bryophytes

Portrait d’une femme en plein air dans la toundra qui sourit.

« Les mousses sont essentielles, même si elles ont l’air très banales et se ressemblent toutes. Elles maintiennent l’écosystème en bonne santé », explique la chercheuse Erin Cox.

Erin mentionne que les mousses arctiques n’ont pas été autant étudiées que les plantes vasculaires attrayantes, qui sont plus grosses et ont des fleurs. Cependant, elles jouent un rôle important dans les environnements subarctiques et arctiques.

« Elles servent d’isolant au pergélisol, explique Erin. Cette couche de mousse est très importante pour l’isolation. De plus, les mousses sont l’un des premiers organismes à coloniser les sols stériles ou la toundra arctique. Elles retiennent l’humidité et contribuent au développement du sol, ce qui permet aux autres plantes de commencer à pousser. »


Elle fait remarquer que la recherche porte actuellement sur l’importance des mousses pour la fixation de l’azote et leur lien avec la santé de l’écosystème en tant qu’hôtes d’un vaste monde microbien.

Si les mousses ont été étudiées sur l’île d’Ellesmere, les recherches dans le reste de l’archipel canadien demeure limitée. Seules deux publications scientifiques mentionnent les mousses et les plantes de l’île Victoria, et les données reposent sur deux expéditions : l’une de 1913 à 1918 et l’autre en 1959. Ensemble, ces publications répertorient un total de 57 bryophytes. Grâce à ses recherches sur l’île Victoria, Erin a identifié 71 espèces qui n’ont pas encore été répertoriées dans des collections ou des publications scientifiques. Selon Erin, il y aurait de nombreuses autres espèces n’ont pas encore été recensées.

Les différentes espèces de mousses poussent dans des environnements variés, allant des environnements secs aux milieux humides. Erin tente de trouver tous les différents habitats où elles poussent pour montrer leur diversité.

Comme l’île Victoria est vaste et que l’exploration sur de grandes distances pendant l’été présente quelques défis, Erin se rend sur les sites avec d’autres chercheurs par hélicoptère. Elle cherche des habitats particuliers sur les sites et recueille autant d’échantillons de mousses différentes que possible. Elle place chaque échantillon dans un petit sac en papier brun qu’elle ramène au laboratoire pour l’étudier au microscope et en déterminer les caractéristiques.

Si la plupart des plantes ne peuvent pas être ressuscitées une fois qu’elles se sont desséchées, les mousses, elles, peuvent être.

« Il suffit d’ajouter de l’eau à la mousse sèche pour qu’elle reprenne vie. C’est l’une des caractéristiques que je préfère chez les mousses », affirme Erin.

Elle a examiné des mousses datant des années 1800 et les a ravivées avec de l’eau. Elles ne contiennent plus de chlorophylle et ne sont donc plus vertes ni aussi colorées. « Mais, dit Erin, les cellules se remplissent d’eau et c’est comme si la mousse était à nouveau vivante. »

Erin ajoute les espèces de mousses qu’elle recueille à la collection de plantes de référence qu’elle est en train de constituer à la SCREA. Ces échantillons sont séchés et conservés dans des sachets à titre de référence pour le public et les autres chercheurs. La collection comprend déjà des plantes à fleurs, des lichens, des champignons et des algues marines.

Une main gantée tient une petite plante qui ressemble à un arbre.

La mousse arctique Ptychostomum wrightiiest une espèce que l’on trouve dans les environnements nordiques.

Une main gantée tient une petite plante qui ressemble à un arbre.

Hylocomium splendens communément surnommée la mousse des marches d’escalier, que l’on trouve dans le sous-étage des forêts de la région boréale.

Dans la collection de POLAIRE

Des insectes, des plantes à fleurs, des mousses, des lichens, des champignons et des algues marines de la région sont quelques-uns des spécimens conservés dans les collections de référence de la SCREA. Ces collections sont créées par les employés de POLAIRE et le Musée de la nature.

Des fleurs pressées sur papier.

Erysimum pallasli est une fleur répandue dans l’archipel arctique canadien, appelée vélar de Pallas en français et Nunaraapiit en inuktitut.

Un tiroir contenant quatre rangées de papillons épinglés.

Le boloria de Freya, ou Boloria freija, habite les tourbières et la toundra dans le monde entier; on le trouve dans l’Arctique canadien, en Europe du Nord, en Mongolie et en Sibérie.

Un homme et deux femmes regardent un plateau contenant des insectes épinglés.

Les visiteurs à la SCREA examinent la collection d’insectes.

À la recherche de varechs dans l’ouest de l’océan Arctique

« Les varechs, ce sont ces larges algues brunes, particulières et fascinantes, qui forment des forêts sous-marines. Ces algues sont importantes sur le plan écologique, car elles représentent un haut lieu de la biodiversité », affirme la chercheuse scientifique Amanda Savoie Ph. D. « L’Arctique canadien abrite d’importantes forêts de varechs. »

Amanda, qui est une spécialiste des algues, est la responsable du département de botanique au Musée canadien de la nature à Ottawa. Le musée possède une collection d’algues arctiques qui datent des années 1960 et 1970, mais qui comprend certains spécimens remontant aux années 1910! Amanda était curieuse d’étudier les changements qui se sont produits au cours des 50 dernières années en raison des changements climatiques.

Elle s’intéresse particulièrement aux varechs et au rôle important que jouent celles-ci dans l’écosystème sous-marin. Les varechs constituent un riche habitat pour des centaines d’espèces marines, en plus de capturer le dioxyde de carbone et de produire de l’oxygène. Néanmoins, Amanda n’était pas certaine de trouver des varechs dans l’ouest de l’océan Arctique.

Il y a davantage de recherches qui ont été menées dans l’est de l’océan Arctique, notamment dans les zones comme la baie Frobisher, près d’Iqaluit, où il est fréquent de trouver des denses forêts de varech pouvant atteindre jusqu'à 4.5m de hauteur (15 pi). La baie Frobisher connaît de forts courants et de fortes marées, contrairement aux eaux autour de l’île Victoria, où le mouvement des marées est faible.

« L’ouest de l’océan Arctique est aussi très différent, puisqu’on y trouve peu de roches. Il s’agit surtout de sédiments meubles. Ce milieu n’est pas favorable aux algues, puisqu’il n’y a rien sur quoi elles peuvent s’accrocher, indique Amanda. S’il y a des blocs rocheux ou des roches, il y aura des algues et de la vie benthique. »

Amanda est entrée en contact avec les habitants du coin qui connaissent bien la faune et la flore de la région. Toutefois, en raison des faibles marées dans le secteur, ils connaissaient peu la vie végétale sous-marine.

Un guide local a conduit Amanda et son équipe de recherche dans des zones situées au-delà de la baie qui sont connues pour leurs courants. L’équipe a mis à l’eau une caméra diffusant des images en direct et a ainsi pu observer le fond de l’océan en temps réel. Amanda a été ravie de découvrir des varechs et d’autres algues. L’équipe a consigné les données GPS des endroits où elles se trouvaient, créant ainsi une carte des fonds marins.

L’équipe est par la suite allée faire de la plongée dans ces zones pour examiner les varechs de plus près. Même si les varechs atteignaient une longueur de 3 m (10 pi), les membres de l’équipe ont remarqué qu’elles ne se tenaient pas debout comme dans les forêts de varechs habituelles. Au lieu de cela, elles se tenaient à plat dans le fond de l’océan.

Amanda croit que ce phénomène est causé par l’absence de courants forts dans la région. Elle et ses coéquipiers analysent actuellement les données recueillies pendant leurs plongées dans la baie Cambridge dans le but de mieux comprendre ce qui permet aux varechs et aux algues de prospérer dans l’ouest de l’océan Arctique.

Sous l’eau, un plongeur observe des laminaires.

Amanda Savoie regarde de près les varechs qui poussent au fond de l’océan dans la baie Cambridge.

Photo : Musée canadien de la nature

Radiographier la neige

Étudier la neige pour aider à prédire les changements climatiques

Une personne vêtue d’un manteau d’hiver dont le capuchon est muni d’une grosse bordure en fourrure est allongée dans la neige. Une lampe frontale est posée sur la neige et éclaire ce que la personne regarde.

A researcher uses a magnifier to study the shape of the snow crystals using during the winter solstice.

photo: Kévin Fourteau

« La neige est très importante pour notre climat. La couleur blanche de la neige renvoie les rayons du soleil dans l’atmosphère et limite le réchauffement de la Terre », explique Marie Dumont, Ph. D., nivologue et chercheuse pour Météo-France.

Marie travaille dans une station de recherche située dans les Alpes françaises, à 1 300 mètres d’altitude. Depuis 1961, les chercheurs de la station étudient la neige afin de recueillir des données qui aideront les spécialistes à prévoir les avalanches et les conditions météorologiques. Cependant, ils se sont rendus compte que la neige aux pôles a des répercussions bien plus importantes à l’échelle mondiale que la neige en montagne.

« Je dirais que le manteau neigeux de l’Arctique est bien plus important pour le climat de la Terre que la neige des milieux alpins », affirme Marie.

Marie a vraiment pris conscience de cette importance en 2022, lors de son premier vol jusqu’à la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique. La nivologue a contemplé avec émerveillement la vaste étendue de neige qu’elle voyait sous elle. Elle a été stupéfaite et émue par l’immensité blanche du paysage arctique.

« La neige est importante parce qu’elle est blanche. Elle réfléchit la lumière du soleil et, lorsqu’il y a de la neige sur une très grande surface, c’est très important et ça équilibre le climat. »

Marie fait remarquer que la neige arctique a été moins étudiée que la neige alpine, et ses caractéristiques sont donc moins bien comprises.

La structure de la neige

Pour étudier la neige, les chercheurs analysent la structure de celle qui est tombée au sol. Une équipe de recherche française y est parvenue grâce à la tomographie par ordinateur, ou tomographie. La tomographie est utilisée dans les hôpitaux pour créer des images tridimensionnelles détaillées du corps humain. La même technique est employée pour analyser la neige. Le tomographe génère des images 3D à haute résolution des cristaux de neige. Cette technique permet de révéler les propriétés physiques des cristaux et aide les chercheurs à comprendre comment la neige se forme au sol.

Aux yeux de l’équipe, il était essentiel d’amener cette technologie dans l’Arctique pour étudier la neige polaire.

« Notre objectif était de suivre l’évolution, à très haute résolution, du manteau neigeux de l’Arctique pendant toute une saison. C’est-à-dire de l’apparition de la neige jusqu’à la fonte complète du manteau neigeux », explique Marie.

La saison complète s’étend d’octobre à mai, ce qui a posé quelques difficultés. L’équipe avait besoin d’un endroit où vivre pendant huit mois, et l’énorme tomographe d’une tonne devait être gardé dans une chambre froide à une température entre -10 et -20 degrés Celsius. Marie a appris que la SCREA, à Cambridge Bay, dans l’Ouest du Nunavut, pouvait répondre à tous les besoins du projet.

« Il n’y a pas beaucoup d’endroits où l’on peut envoyer un tomographe, installer une station météorologique et avoir accès à toutes les commodités à proximité. Cela, combiné au fait que la SCREA est doté de personnel à l’année, représentait de grands avantages pour eux. », indique Nicolas Nantel-Fortier, gestionnaire de laboratoire à la SCREA.

Le tomographe, qui a besoin d’une source de rayons X, devait satisfaire à des exigences légales et de sécurité avant d’être envoyé de la France au Canada. Une fois les formalités administratives accomplies, il a été expédié par avion dans l’Arctique canadien en juillet 2023.

Le tomographe a été installé dans la chambre froide de la SCREA. Comme l’équipe de Marie ne pouvait pas être sur place, ses membres ont organisé une vidéoconférence pour guider leurs collègues de l’Université de Sherbrooke dans l’installation de l’appareil. Lorsque l’équipe de recherche est arrivée, en octobre 2024, tout était prêt.

Au cours des huit mois suivants, des membres de l’équipe de recherche se sont rendus à la SCREA par paires (15 personnes au total) pour une période de travail de six semaines, dont deux chevauchant la période de travail de la paire précédente. De cette façon, chaque paire pouvait se former auprès de l’équipe déjà en place à Cambridge Bay. L’un des doctorants, Kévin Fourteau, y a mené des travaux de recherche du 15 décembre 2023 à la fin de janvier 2024.

Kévin explique que ses collègues et lui consacraient une journée à prendre des mesures de la neige, puis la suivante à réaliser un tomographie de celle-ci. Ils ont enregistré la température du manteau neigeux, qu’ils ont également pesé pour en calculer la densité et en déterminer sa teneur en glace.

La microstructure de la neige consiste en un agencement tridimensionnel d’air et de glace. Cette structure a une incidence sur les propriétés de la neige, comme sa stabilité, sa capacité à isoler le sol en dessous et la quantité d’eau produite lors de la fonte.

« Une chose qui est très importante pour nous en ce qui concerne les propriétés de la neige est la taille des cristaux, explique Kévin. La méthode classique consiste simplement à vérifier leur taille à la loupe. »

Cette méthode n’étant pas très précise, les chercheurs sur le terrain ont utilisé un petit appareil portatif qui projette une lumière dans la neige. L’équipe a alors pu déterminer la taille des cristaux d’après leurs propriétés réfléchissantes.

Les couches de neige

Tous les deux jours, l’équipe prélevait une carotte en insérant verticalement dans la neige des tubes en plexiglas de 20 cm de long. Ces carottes étaient ensuite analysées à l’aide du tomographe.

« Les chercheurs prenaient le type de mesures que dans les Alpes. Mais ils devaient déplacer les carottes un peu plus loin pour faire leurs analyses. Plus la distance est grande pour déplacer les carottes, plus on risque de détruire la structure de la neige, indique Nicolas. Quand ils travaillaient dehors ici, ils devaient marcher environ une minute entre le site d’échantillonnage et l’intérieur de notre congélateur. »

Marie explique que le manteau neigeux de l’Arctique se compose de deux couches de neige.

« La couche du haut est très compacte : les grains sont petits et la couche est très dense. La neige est aussi compactée par le vent, explique-t-elle. La couche inférieure, quant à elle, est plus fragile, moins dense. Les grains des couches supérieures sont un peu arrondis, mais, dans la partie inférieure, c’est très aéré, et les cristaux sont plutôt carrés et beaucoup plus gros. »

Kévin fait remarquer la fragilité de la couche inférieure, qui se désagrège au toucher.

« C’est le genre de neige d’avalanche qu’on peut trouver en montagne, dit-il. À la SCREA, ce n’est pas un problème, vu qu’on est sur un terrain plat. »

Pendant son séjour à Cambridge Bay, Marie a pu constater à quel point la neige joue un rôle déterminant pour la communauté, puisqu’elle influe sur de nombreux aspects de la vie de ses membres, dont la chasse, le transport, l’eau et les infrastructures.

« Ce constat a un peu changé le regard que je porte sur ce que je fais, parce qu’il y a des gens qui sont touchés, dit Marie. Leur relation à la neige et au paysage est également très différente de celle qu’on voit ici [dans les Alpes]. C’est très enrichissant et extrêmement émouvant. »

Au fil de l’hiver, l’équipe a suivi l’évolution complète de la neige, de la première chute jusqu’à la fonte, et a réalisé 2 000 tomographies, ce qui représentait un total de 37 mètres (ou environ 121 pieds) de neige.

Ces travaux de recherche contribueront à la conception d’un modèle plus précis pour simuler l’évolution du manteau neigeux en réponse aux changements climatiques. Marie indique que ce modèle pourrait fournir des renseignements précieux aux communautés nordiques pour les aider à s’adapter à l’évolution du climat.

Parties microscopiques de cristaux de glace, avec du quadrillage en arrière-plan.

Cette image est une photographie prise à la binoculaire par aux rayons X de cristaux de neige.

Photo : Pascal Hagenmuller

Une couche de neige à côté de laquelle on a placé une règle pour en mesurer l’épaisseur.

L’équipe mesurait quotidiennement le manteau neigeux arctique.

Photo : Kévin Fourteau

Éprouvette dans une machine.

Un échantillon de neige dans l’appareil à rayons X à Cambridge Bay.

Photo : Pascal Hagenmuller

L’importance de la neige

Une femme portant un châle en tricot autour des épaules qui sourit.

« Les gens portaient vraiment attention à la qualité de la neige avant de se rendre sur le territoire », explique Emily Angulalik, directrice générale de la Société du patrimoine du Kitikmeot, à Cambridge Bay. Cette enseignante à la retraite s’entretient avec des Aînés pour recueillir leurs connaissances sur la neige.

« Les Aînés racontent souvent à quel point la neige était importante pour eux, que ce soit pour les déplacements, la fabrication des blocs de neige pour les igloos ou la chasse. Le type de neige est très important », mentionne Emily.

Par exemple, la neige utilisée pour construire les igloos provient de l’apittaaq, ou bancs de neige bien tassés, une neige qui est plus dense et plus épaisse que n’importe quelle autre. La neige de la fin du printemps, ou mahaqtiqtuq, est quant à elle plus mouillée et peu propice aux déplacements.

Les Aînés ont remarqué des changements dans la neige.

« Ils constatent qu’à cause du changement climatique, la neige est beaucoup plus humide, mouillée, ce qui complique les déplacements, indique Emily. Cela a des effets réels sur les gens, notamment les chasseurs. »

Elle aussi a remarqué des changements dans la neige. Au fil des ans, Emily et ses élèves ont observé la neige au microscope.

« Je trouve que les flocons de neige d’aujourd’hui sont beaucoup plus duveteux qu’ils ne l’étaient avant. La neige d’aujourd’hui est très différente. »

Comme la neige est au cœur de la vie des populations du Nord, il existe des mots précis pour en décrire le type, la qualité et la densité à différentes périodes de l’année, que ce soit à l’automne, à l’hiver ou au printemps. Récemment, une application proposant un dictionnaire innuinaqtun a été lancée pour faire connaître des mots innuinaqtun, dont de nombreux termes différents pour désigner la neige, comme aqilluqqaq – neige fraîche et douce – et auviq – bloc de neige. Il s’agit d’un moyen de consigner le vocabulaire lié à la neige dans un format accessible, en particulier pour les jeunes qui possèdent un téléphone cellulaire.

Emily souligne à quel point il est important de transmettre à la jeune génération l’expérience et le savoir des Aînés en ce qui concerne vivre sur la terre. « Pour qu’ils comprennent et connaissent les dangers que posent les différents types de neige. »

Antarctique 

Notre travail au pôle Sud

Un pingouin se tient debout, face vers la droite.

Un manchot papou, animal emblématique de l’Antarctique, se promène.

Le nom de Savoir polaire Canada témoigne de l’engagement de l’Agence à promouvoir la recherche scientifique dans l’Arctique et l’Antarctique. Le terme « polaire » capture l’essence de la science polaire, soulignant l’importance mondiale des deux pôles pour comprendre les changements climatiques, les écosystèmes et les systèmes naturels de la Terre. Ce nom met en lumière l’importance du Canada dans la recherche polaire, qui favorise la collaboration scientifique et aborde les défis particuliers des milieux arctiques et antarctiques.

L’Antarctique est crucial pour la régulation du climat mondial et des systèmes océaniques, ce qui le rend indispensable pour le Canada et le reste du monde. Les travaux de recherche en Antarctique contribuent à enrichir nos connaissances dans divers domaines scientifiques, notamment les systèmes terrestres et biologiques, les conditions météorologiques ainsi que l’espace et l’univers. Les conditions de l’Antarctique sont idéales pour étudier comment les plantes, les animaux et les humains s’adaptent aux milieux extrêmes.

Nos recherches et notre expertise, en tant que nation arctique, fournissent des données essentielles sur la logistique, le transport, la préparation et la réglementation pour un tourisme durable et respectueux de l’environnement dans les deux régions polaires. 

POLAIRE représente le Canada au sein du Comité scientifique pour les recherches antarctiques, l’organisme international qui conseille les pays signataires du Traité sur l’Antarctique dans le domaine scientifique. De plus, le Comité scientifique pour les recherches antarctiques du Canada, établi par Savoir polaire Canada, fournit des recommandations sur la science canadienne en Antarctique. POLAIRE est par ailleurs l’organisme canadien membre du Conseil des directeurs des programmes nationaux relatifs à l’Antarctique.

Expédition en Antarctique en 2025

POLAIRE s’est associé à l’expédition canadienne de recherche sur l’Antarctique, une expédition multidisciplinaire qui s’est déroulée en Antarctique du 23 février au 23 mars 2025.

Quinze scientifiques de Ressources naturelles Canada, d’Environnement et Changement climatique Canada, de Pêches et Océans Canada, du Réseau d’observation, de prévision et d’intervention en milieu marin et de cinq universités sont montés à bord du NCSM Margaret Brooke, un navire de la Marine royale canadienne, à Punta Arenas, au Chili. L’expédition s’est rendue aux îles Shetland du Sud, une région méridionale équivalente à l’archipel arctique canadien connue pour ses conditions polaires extrêmes et des caractéristiques géologiques similaires.

Une vaste gamme d’activités scientifiques était prévue pendant la mission. Celle-ci comprenait deux volets principaux : un volet maritime, portant sur l’océanographie et les contaminants, et un volet côtier, axé sur trois grandes baies des îles Shetlands du Sud, où les chercheurs ont mené des études sur la géologie marine et terrestre, l’océanographie côtière et les contaminants.

Le Réseau d’observation, de prévision et d’intervention en milieu marin a contribué à la mission en fournissant des laboratoires océanographiques mobiles spécialement conçus pour être utilisés à bord de navires, comme le NCSM Margaret Brooke

Un grand bateau ouvert sur lequel se trouvent des personnes vêtues de manteaux d’hiver navigue parallèlement aux glaces épaisses d’un glacier.

Des membres de l’expédition dans l’Antarctique 2025 naviguent en longeant un glacier en Antarctique.

Photo : Connor Bennett

Étrave en acier d’un navire se trouvant le long d’un quai.

Le NCSM Margaret Brooke pointant vers le sud à destination de Punta Arenas où les chercheurs sont montés à bord.

Photo : Connor Bennett


Des pôles loin d’être opposés

Les similitudes et les différences de la recherche en Arctique et en Antarctique

Ian Hogg, Ph. D.

Biologiste

Chercheur scientifique de POLAIRE

Domaine de recherche : écologie terrestre et biologie marine

Un homme vêtu d’un gros manteau d’hiver et d’une casquette est accroupi sur des rochers. Des montagnes enneigées se trouvent derrière lui.

Ian Hogg, Ph. D., près du glacier Shackleton, en Antarctique, situé à 85° de latitude sud.

Photo : Byron Adams

Ian Hogg s’est joint à Savoir polaire Canada (POLAIRE) en 2017 à titre de chercheur scientifique principal et chef d’équipe de l’Unité de recherche sur la cryosphère et les écosystèmes arctiques de POLAIRE. Une grande partie de ses recherches porte sur l’Antarctique. En fait, l’Antarctique et l’Arctique présentent des similitudes qu’il importe de comprendre pour la recherche dans ces deux régions polaires.

« L’Arctique et l’Antarctique sont unis par l’atmosphère, et il se passe des choses en Arctique qui influencent l’Antarctique, et vice versa », explique Ian, notant que les deux régions connaissent des conditions ambiantes similaires. « Il se produit aussi des processus biologiques similaires dans les deux régions. Les conditions de vie dans ces environnements sont plutôt extrêmes. »

Il n’en demeure pas moins que les deux régions présentent des différences notables. L’Arctique est un océan entouré de terres, tandis que l’Antarctique est une étendue de terre entourée d’un océan. De plus, 99 % de la masse terrestre de l’Antarctique est recouverte d’immenses nappes glaciaires et aucune population humaine permanente n’y a vécu de façon permanente. À l’inverse, l’Arctique voit la neige fondre chaque année et est habité depuis des milliers d’années.

« Les formes de vie sur le continent antarctique sont assez simples : les plus grands animaux terrestres présents à l’année sont les collemboles (puces des neiges), de tout petits organismes qui ressemblent aux insectes, et les acariens, qui mesurent tous moins d’un millimètre. Les phoques et les manchots, ces animaux marins bien connus, visitent la terre ferme seulement l’été, explique Ian. Cela contraste avec l’Arctique, où le milieu terrestre est assez complexe et abrite des superprédateurs toute l’année, comme les loups et les ours polaires. »

Ian fait remarquer que ce sont tant leurs similitudes que leurs différences qui rendent ces deux régions polaires intéressantes sur le plan de la biologie, et leur étude nous permettra de mieux comprendre les processus écologiques mondiaux.

« Le grand problème est le changement qui s’opère dans ces régions, affirme-t-il. Les températures et le régime des précipitations dans les régions polaires changent rapidement, particulièrement dans l’Arctique. Il est capital de comprendre comment les écosystèmes de la Terre réagissent à ces changements. »

Gros plan d’un insecte ayant un long corps et trois petites pattes près de la tête.

Individu de l’espèce invertébrée Collembola, sur laquelle Ian et ses collègues effectuent des analyses génétiques pour reconstituer les paysages et les climats passés en Antarctique.

Photo : Gemma Collins

Ils sont en vie! — Des microbes dans la glace glaciaire

Brady O’Connor, Ph. D.

Université McGill

Microbiologie

Bénéficiaire de la Bourse POLAIRE pour la recherche sur l’Antarctique

« De manière générale, lorsqu’on voit un glacier, on pense : “Il n’y a rien de vivant là-dedans. Il ne s’y passe rien” », explique Brady O’Connor, ancien doctorant à l’Université McGill.

Brady affirme qu’à l’œil nu, c’est bien l’impression que ça donne. En effet, la découverte que son équipe et lui ont faite dans les glaciers polaires est si petite qu’il faut l’observer au microscope : des microbes.

« Ce qui m’intéresse vraiment, c’est de savoir s’ils sont vivants, dit-il. Si je descends d’un mètre sous la calotte glaciaire, vais-je y trouver des microbes vivants? »

Brady a prélevé des carottes de glace d’un mètre de long dans le glacier White, sur l’île Axel Heiberg, dans le Nord-Est du Nunavut, et dans le glacier Johnsons, sur l’île Livingston, en Antarctique. Il a découvert que les deux glaciers abritaient des microbes vivants, mais qu’ils étaient différents. Cependant, malgré leurs différences, les microbes présentent un fonctionnement similaire à de nombreux égards. Cette découverte suggère qu’ils pourraient avoir des stratégies de survie communes pour vivre dans la glace.

Il importe de comprendre ces microbes, car, avec le réchauffement de la planète et les changements climatiques, les glaciers et les calottes glaciaires fondent graduellement. Les microbes qu’ils contiennent seront donc libérés dans d’autres environnements. En les étudiant, les scientifiques seront donc mieux à même de comprendre les répercussions qu’ils auront sur leurs nouveaux habitats.

« Nous continuons de découvrir que les limites de la vie microbienne sont bien plus vastes que ce que nous avions imaginé, affirme Brady. Presque partout où nous sommes allés, peu importe la rigueur des conditions environnementales, nous avons trouvé des microbes vivants. Et c’est maintenant aussi le cas dans le milieu d’un glacier de glace pure en Antarctique ».

Un homme portant un casque, des lunettes de soleil et des vêtements d’hiver se tient au-dessus d’un gros tube, qu’il retire de la glace.

Brady O’Connor prélève une carotte de glace dans le glacier Johnsons, en Antarctique, pour étudier les microbes présents dans la glace.

Deux personnes et de l’équipement sur la glace. Elles sont observées par un groupe de pingouins qui se trouve à proximité. Un grand brise-glace se trouve à l’arrière-plan.

Les Canadiens et Canadiennes (et les manchots) participent à la recherche en Antarctique depuis plus d’un siècle.

Dans les bois : Étude de l’évolution des habitudes du bœuf musqué

Christine Dunbar, étudiante à la maîtrise (M. Sc.)

Université Wilfrid-Laurier

Bénéficiaire de la bourse pour résidents du nord

Ces dernières années, le bœuf musqué s’est installé dans les forêts de l’aire protégée autochtone Thaidene Nëné, dans les Territoires du Nord-Ouest. Fait intéressant, il ne s’était pas aventuré dans ces forêts depuis une centaine d’années.

Christine Dunbar, étudiante à la maîtrise en biologie intégrative à l’Université Wilfrid-Laurier, se penche sur les raisons expliquant le retour du bœuf musqué dans cet habitat.

« C’est à la fin du XIXe siècle qu’on l’a vu à cet endroit pour la dernière fois », explique Christine. Elle précise que la chasse excessive a bien failli faire disparaître le bœuf musqué au Canada. « Quand la population a recommencé à croître, on la trouvait davantage dans la toundra. »

En 2021, 307 pièges photographiques ont été installés un peu partout dans l’aire protégée de 26 000 kilomètres carrés afin de prendre en photo la faune qui s’y trouve. En un an, des millions de photographies ont immortalisé des caribous, des loups, des ours, des oiseaux – et des bœufs musqués. Christine étudie les photos des bœufs musqués pour déterminer s’ils se déplacent dans les forêts à la recherche de nourriture ou dans l’espoir d’éviter les prédateurs comme les loups gris et les grizzlis.

Quoi qu’il en soit, Christine, originaire de Yellowknife, émet une autre hypothèse. Elle pense que les bœufs musqués cherchent à se « thermoréguler », c’est-à-dire à stabiliser leur température corporelle.

« Il fait de plus en plus chaud dans le Nord », observe Christine. Elle explique que, récemment, les températures estivales dans la toundra ont atteint les 30 degrés Celsius. Or, la laine de bœuf musqué, ou qiviut en inuktitut, est très épaisse et huit fois plus chaude que la laine de mouton.

Christine suggère que les forêts, fraîches et ombragées, offrent un répit à l’abri de la chaleur de la toundra. Elle fait remarquer que des orignaux du Minnesota ont été observés en train de chercher des environnements forestiers plus frais pour échapper à la chaleur et suppose que les bœufs musqués de Thaidene Nëne pourraient faire de même.

Un grand bœuf musqué dans la forêt se déplace vers l’appareil photo.

Un bœuf musqué capté par un appareil photo de sentier dans une forêt de l’aire protégée autochtone Thaidene Nëné.

Photo : Première Nation dénée de Łutsel K'e, Parcs Canada, gouvernement des Territoires du Nord-Ouest

Alimentation traditionelle = sécurité alimentaire

Amy Caughey, Ph. D.

Diététiste agréée

Associée de recherche à l’Institut de recherche du Nunavut

Associée de recherche et professeure auxiliaire à l’École de santé publique de l’Université de l’Alberta

Bénéficiaire de la Bourse de recherche POLAIRE

« L’approche ‘Une seule santé’ renvoie en général aux relations qui existent entre les animaux, les humains et l’environnement, ainsi qu’à la santé de ces différents éléments », explique Amy Caughey, dont les recherches portent sur l’aspect humain. « Au Nunavut, ces liens sont primordiaux étant donné que les aliments issus de la flore et de la faune locale sont au cœur de la sécurité alimentaire. »

Amy est basée à Iqaluit où elle s’intéresse à la sécurité alimentaire et à la santé publique au Nunavut. Ses recherches portent sur les aliments traditionnels et leur rôle dans le soutien à la sécurité alimentaire. Les aliments traditionnels proviennent de la terre, de la mer et du ciel, et comprennent notamment les oiseaux, les poissons, les mammifères marins et terrestres, les baies ainsi que les plantes. Ces aliments sont essentiels à la nutrition, à la santé, au bien-être, à la vie communautaire et à la culture des Inuit. 

Amy souligne que ses recherches sont guidées par des femmes inuites et des porteurs du savoir, notamment Igah Sanguya de Clyde River qui travaille comme associée de recherche pour le projet.

« Les aliments traditionnels sont nos remèdes. Ce sont des sources de réconfort qui nourrissent notre âme », affirme Igah.

Igah et Amy collaborent étroitement avec les communautés de la région de Qikiqtani (Baffin) afin de transmettre leurs connaissances sur la préparation, la conservation et la salubrité des aliments traditionnels. Igah et Amy offrent entre autres de l’information sur les techniques de maturation, de séchage et de cuisson des aliments, ainsi que sur la façon dont ceux-ci aident à la guérison et au bien-être en général.

Les aliments traditionnels sont très nutritifs et contiennent des vitamines A, D et C, du fer, des protéines, du calcium et de bons gras – et ils sont essentiels à la bonne santé des gens.

« Les représentants en santé communautaire et les porteurs du savoir inuit ont indiqué clairement que la sécurité et la souveraineté alimentaires passent par les aliments traditionnels, dit Amy. Ils sont indispensables pour renforcer le système immunitaire, prévenir les maladies chroniques et favoriser la santé. »

Des personnes sont agenouillées dans la neige à côté d’un réchaud de camping, avec des montagnes en arrière-plan.

Amy Caughey et Igah Sanguya sont en territoire au nord de Clyde River, au Nunavut, et cuisinent de la viande de phoque.

Photo : Shondra Stadnyk, Niqivut Silalu Asijjipalliajuq Research Program

Rongés par un nouveau problème 

Des castors s’installent dans la toundra au nord d’Inuvik

Image pleine page d’un ruisseau qui s’écoule à travers de petits arbustes et qui est obstrué par de la boue et de petites branches.

Une digue de castor dans le ruisseau Trail Valley.

Photo : Dilshan Kariyawasam, projet BARIN, CINUK.

La station de recherche Trail Valley Creek (Université Wilfrid-Laurier), située à 50 km au nord d’Inuvik dans les Territoires du Nord-Ouest, se trouve dans l’un des bassins hydrographiques les plus longuement étudiés de l’Arctique canadien.

« On n’avait jamais prévu d’utiliser la station de recherche pendant plus de 30 ans, mais c’est ce qui est arrivé », explique l’hydrologue Philip Marsh, Ph. D., professeur à l’Université Wilfrid-Laurier et titulaire de la chaire de recherche du Canada en science des eaux des régions froides.

Un bassin hydrographique, ou bassin versant, est une zone où toutes les précipitations et les eaux de fonte nivale s’écoulent vers un lac ou vers une rivière (et ses affluents) qui se déverse ensuite dans un plan d’eau en aval, comme un lac, une mer ou un océan. Pour ce qui est du bassin hydrographique du ruisseau Trail Valley, l’eau s’y écoule vers l’est, traverse la route entre Inuvik et Tuktoyaktuk et se jette dans les lacs Husky.

En 1991, il a été déterminé que ce bassin de 60 km2 était l’endroit idéal où étudier l’hydrologie (le mouvement des eaux) de l’écosystème de la toundra au nord de la limite forestière. Dans les 30 dernières années, la recherche s’est étendue au-delà du domaine de l’hydrologie et comprend maintenant tout l’écosystème du bassin de l’Arctique, y compris les changements relatifs au climat, à la neige, au débit des cours d’eau, à la végétation, au dégel du pergélisol, aux gaz à effet de serre et à… une invasion de castors!

En général, le plus gros rongeur du Canada vit dans des régions boisées. Avant 2007, les chercheurs n’avaient jamais vu de castor près de la station de recherche qui est à 68° de latitude Nord.

« Il n’y a aucun arbre à proximité », dit Alex Fogal, chercheur associé responsable de la coordination des recherches sur le terrain. « Et comme il n’y a pas d’arbres, les castors construisent leurs digues avec des arbustes et des arbrisseaux. »

Le fait qu’il n’y a pas d’arbres n’a pas empêché les castors de venir s’installer. Alex explique que comme ces mammifères sont ingénieux, ils se sont mis à construire leurs digues et leurs huttes avec des aulnes et des bouleaux glanduleux qui sont abondants dans la région et faisaient déjà partie du paysage dans les années 1990, bien avant l’arrivée des castors.

« La présence des castors ne peut pas être ignorée, affirme Phil. On est très préoccupés par l’effet que ces bêtes auront sur le paysage, les lacs, l’habitat des poissons, etc. »

Les castors sont le sujet d’un grand projet mené dans le cadre du Programme de recherche Canada – Inuit Nunangat – Royaume-Uni (CINUK) dans l’Arctique, en partenariat avec le Secrétariat mixte des Inuvialuit et le Comité mixte de gestion de la pêche. Le projet vise à déterminer le nombre de castors qu’il y a dans la région ainsi que les conséquences de leur présence sur les lacs, l’écologie, l’hydrologie et le pergélisol.

« Le manteau neigeux qui recouvre les lacs en hiver change, ce qui a une incidence sur l’épaisseur de la glace lacustre. Il est possible que l’augmentation du volume d’eau sous la glace lacustre améliore l’habitat du castor, mais on n’en sait vraiment rien », déclare Phil.

Alex suggère que ce pourraient être les prédateurs qui ont poussé le castor vers des habitats plus au nord. « Le réchauffement est assez important pour que les castors puissent survivre là où ils ne le pouvaient pas auparavant. »

« On ne sait vraiment rien pour l’instant », ajoute Phil.

Trois décennies de données recueillies à la station de recherche Trail Valley Creek permettent aux chercheurs de modéliser et de prévoir les effets des changements climatiques sur la région. D’après Phil, les données aident à comprendre « ce qui s’est passé dans les 30 dernières années et ce qui se passera dans les 50 ou 100 prochaines années ».

Quoi qu’il en soit, personne n’avait anticipé l’arrivée du castor.

Sa présence n’est qu’un des nombreux changements vus dans la toundra arctique et étudiés par les chercheurs. Phil souligne qu’étant donné que la station de recherche Trail Valley Creek existe depuis 34 ans, elle fournit des données inégalées aux chercheurs du Canada et du monde entier.

Vue aérienne d’une colline enneigée. Deux petites tentes et une grande tente se trouvent au premier plan.

Le premier camp de recherche installé dans le bassin hydrographique en 1991.

Photo : Philip Marsh

Vue aérienne de la toundra en automne. Un ensemble de six grands bâtiments se trouvent derrière de petits bâtiments et il y a un lac à l’arrière-plan, à l’extrême droite.

Vue aérienne du camp de la station de recherche Trail Valley Creek de l’Université Wilfrid-Laurier. Photo prise par un drone à l’été 2024. Les lacs Husky sont en arrière-plan.

Photo : Alex Fogal

Deux personnes vêtues de parkas d’hiver observent de grands instruments métalliques dans la toundra enneigée.

Les chercheurs Elizabeth Priebe et Hadleigh Thompson discutent de l’installation météorologique de l’Université du Québec à Montréal à la station de recherche Trail Valley Creek.

Étudier le rôle des congélateurs communautairesdans la sécurité alimentaire

Aimee Yurris, étudiante à la maîtrise (M. Sc.)

Université de Waterloo, École des sciences de la santé publique

Bénéficiaire de la Bourse POLAIRE pour résidents du Nord

La nourriture traditionnelle est au cœur du bien-être et de l’identité des Inuvialuit, et le partage de la nourriture a toujours été une tradition importante de la culture inuvialuite.

Partout dans le Nord, les membres des communautés qui chassent, pêchent ou cueillent des baies peuvent déposer leurs aliments traditionnels en toute sécurité dans un congélateur appartenant à leur hameau, à leur ville ou à une organisation communautaire et les partager avec le reste de la population. Les congélateurs communautaires de la région désignée des Inuvialuit sont très variés, allant de la glacière traditionnelle au congélateur moderne muni de panneaux solaires. Chaque communauté organise, gère et utilise son congélateur à sa façon.

« Les congélateurs communautaires sont essentiels pour la culture, le mode de vie et l’accès aux aliments traditionnels dans les communautés nordiques, et cette recherche peut aider les communautés à démontrer cette importance aux bailleurs de fonds et aux décideurs politiques », explique Aimee.

Le projet de recherche d’Aimee Yurris, résidente de Yellowknife, porte sur l’utilisation des congélateurs par les membres des communautés de Tuktoyaktuk, de Paulatuk et d’Inuvik.

Une femme est debout à l’extérieur, à côté de la porte ouverte d’une grande boîte métallique.

Aimee Yurris se tenant devant un congélateur communautaire à Inuvik.

Les chercheurs de la relève

De jeunes adolescents sont assis à une rangée de bureaux. Chacun d’entre eux tient un petit panneau solaire relié à un petit ventilateur.

Des élèves de 6e année tiennent de petits panneaux solaires et apprennent comment le soleil fait fonctionner les petits ventilateurs qui sont rattachés aux panneaux.

Chaque année, POLAIRE parraine des programmes jeunesse de sciences et de connaissances. Ces programmes sont appelés des camps STIM (science, technologie, ingénierie et mathématiques) et visent à susciter chez les jeunes le désir d’en savoir plus sur le monde, ainsi qu’à éveiller leur curiosité à l’égard de la recherche scientifique et du savoir autochtone.

La troisième édition annuelle du camp STIAMMakigiaqta a eu lieu en avril 2024 à la Station canadienne de recherche dans l’Extrême-Arctique (SCREA). Il s’agissait du premier camp de l’année. (L’acronyme contient un A, pour arts, puisque les jeunes ont également réalisé des projets artistiques.) Pendant cinq jours, 14 jeunes du Nunavut ont eu l’occasion d’être des scientifiques et des chercheurs.

« Accueillir des jeunes à la SCREA et leur donner accès aux laboratoires pour leurs expériences nous permet de leur faire vivre une expérience vraiment géniale », déclare Crystal Qaumariaq, analyste des politiques à Savoir polaire Canada. « Les jeunes ont pu faire incursion dans l’univers des chercheurs et ils ont adoré cette expérience. »

Crystal a dirigé le camp STIAM pour Savoir polaire Canada. Ce camp était une collaboration entre Savoir polaire Canada, Nunavut Tunngavik Incorporated, l’Agence spatiale canadienne, SHAD Canada, Actua, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut et Pinnguaq.

Les élèves ont participé à de vraies activités scientifiques, notamment à la surveillance communautaire de la faune et à l’enregistrement d’information sur la faune à l’aide d’un logiciel de mise en correspondance des données. De plus, ils ont conçu des véhicules tout-terrain adaptés aux conditions de l’Arctique.

Les jeunes ont appris plusieurs choses sur la culture inuite, un élément clé du camp, et ont aussi pu s’occuper d’un qulliq (lampe traditionnelle en pierre), ce qui a été un moment bien spécial. Des Aînés leur ont parlé de l’histoire d’Iqaluktuuttiaq (Cambridge Bay) et des camps éloignés de la région, et on leur a aussi expliqué le système de numération inuit qui a été créé par des élèves inupiaq d’une école intermédiaire dans les années 1990.

À la fin du camp, les jeunes, leurs accompagnateurs et les partenaires du programme ont organisé pour la communauté un festin auquel beaucoup de gens ont participé.

Une rangée d’adolescents en sarraus de laboratoire sont assis à une table de laboratoire et travaillent avec des éprouvettes.

Des participants au camp STIAM Makigiaqta de 2024 dans un laboratoire de la SCREA.

Photo : Makigiaqta Inuit Training Corporation

En plus d’accueillir des jeunes du secondaire pendant les camps STIM, la SCREA a ouvert ses portes aux élèves de 2e, de 3e et de 6e années de l’école élémentaire Kullik Ilihakvik de Cambridge Bay. Les enfants ont visité les laboratoires de la SCREA et examiné au microscope différents objets familiers, comme des roches, des plantes séchées et des insectes.

Les élèves ont également participé à un atelier sur l’énergie propre au cours duquel ils ont appris comment fonctionnent l’énergie éolienne et l’énergie solaire. Ils ont ensuite créé une carte de Cambridge Bay et discuté des meilleurs endroits où installer de l’équipement de production d’énergie solaire et éolienne pour alimenter la communauté.

Le camp Élèves en STIAM s’est déroulé pendant une semaine entière en juin. Shoshanah Jacobs, Ph. D., professeure à l’Université de Guelph, a dirigé le camp et initié les jeunes au concept de classe en plein air. Pendant le camp, les jeunes avaient les yeux rivés non pas sur des écrans, mais plutôt sur les chercheurs invités, organisateurs, enseignants et membres de la communauté venus transmettre leur savoir sur un éventail de sujets. Ils ont appris différentes choses sur les végétaux et les oiseaux de la région, la photographie, la chasse, la pêche, le canot, le tir à l’arc, la recherche scientifique sur le terrain, les insectes et la biologie des eaux douces. Grâce à la participation d’enseignants et d’Aînés de la région, le camp combinait les connaissances scientifiques et le savoir traditionnel.  

En août 2024, la SCREA a présenté le camp Robotique FIRST, un camp d’été de plusieurs jours consacré à la construction de robots auquel ont participé des enfants de Cambridge Bay. Le camp a offert aux jeunes une expérience amusante et éducative, tout en les encourageant à travailler en équipe et à être créatifs.

Un garçon est agenouillé sur le sol et travaille sur des instruments électroniques.

Un des participants du camp de robotique absorbé par sa tâche.

Chaque été, 15 élèves d’écoles secondaires des Territoires du Nord-Ouest participent au Camp scientifique et culturel sur la toundra. Depuis 1995, le Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest offre ce programme d’éducation en plein air, d’une durée de dix jours, qui donne un crédit d’études secondaire. Le camp se déroule à la Station de recherche sur l’écosystème de la toundra, au lac Daring, à 300 km au nord-est de Yellowknife, dans l’écozone du Bas-Arctique.

« La station de recherche est située sur un site d’une grande importance culturelle. C’est un endroit où les caribous traversent l’eau et un lieu de chasse bien connu depuis des siècles. C’est aussi un endroit qui offre de nombreuses occasions d’apprentissage pour les élèves », indique Kumari Karunaratne, directrice de la Commission géologique des Territoires du Nord-Ouest et une des organisatrices du camp.

Au camp, les élèves travaillent en étroite collaboration avec des chercheurs et des éducateurs en environnement du Nord ainsi qu’avec des porteurs du savoir des Tłı̨chǫ, et se familiarisent ainsi avec les paysages, les animaux, les plantes et l’histoire de la toundra. À l’origine, le camp était axé sur un sujet en particulier. Au fil des ans, il s’est transformé et est maintenant plutôt axé sur un apprentissage pratique en territoire. Pendant les randonnées, les élèves sont accompagnés de botanistes, de géologues et de membres de l’équipe culturelle qui leur présentent différentes perspectives et idées.

« Je pense que le camp scientifique et culturel est un aspect enrichissant de mon travail », déclare Karin Clark, co-organisatrice du camp et et gestionnaire au sein de la Division de la recherche et de la gestion de la faune sauvage, Environment et Changement climatique, du gouvernement de Territoires du Nord-Ouest. « Je peux parler de sujets qui me passionnent, comme l’environnement et le caribou, à des élèves qui sont à un moment de leur vie où ils ont le monde devant eux et prennent des décisions sur le chemin de la vie qu’ils prendront. »

Cinq jeunes sont assis au sommet d’un énorme rocher.

Les participants font une pause lors de la randonnée d’une journée qui a lieu pendant le camp.

Photo : Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest

Nanuk Narratives (récits de nanuk)

Consigner le savoir inuit essentiel à la gestion de l’ours polaire dans l’Arctique de l’Est

Photo qui s’étend sur deux pages. Un ours polaire étendu sur la glace, au bord d’une eau parsemée de glace, regarde vers la droite.

Un ours polaire de la sous-population du détroit de Davis couché sur un floe (radeau glaciel) près de l’île Bathurst, au Nunavut.

Symbole représentant le Nord, l’ours polaire est intimement lié à la culture inuite. Depuis des siècles, les Inuit entretiennent une relation étroite avec les ours polaires, qui font partie intégrante de leur alimentation, de leur habillement, de leur spiritualité et de leur art.

Les politiques inuit de gestion de la faune, spécifiquement pour l'ours polaire sont antérieures aux quotas et aux politiques de surveillance des animaux sauvages adoptées dans le Nord du Canada il y a plus de 50 ans. De nos jours, les efforts de conservation sont axés sur la biologie, le comportement et l’habitat de l’ours. Toutefois, les Inuit estiment que leurs voix n’ont pas été prises en compte dans le processus décisionnel, malgré leurs connaissances de première main sur les populations d’ours et leur santé.

« En tant que chasseur, je pense qu’il est très important d’adopter de bonnes pratiques de conservation », affirme Derek Pottle, un Aîné du Nunatsiavut. « Je ne suis pas d’accord avec l’idée de tuer tout ce qui bouge, juste parce que c’est là. Mon rôle dans la protection des ressources est probablement plus important que celui que pourrait avoir toute mesure externe. »

Intégrer les connaissances scientifiques et le savoir autochtone

Derek est l’une des nombreuses voix qui réclament l’adoption d’un nouveau modèle de conservation, un modèle qui tiendrait compte des connaissances scientifiques et du savoir autochtone. La reconnaissance de la valeur des connaissances que possèdent les Inuit au sujet des populations d’ours polaires pourrait permettre d’établir des stratégies de conservation durables.

L’ours polaire occupe un vaste territoire, la sous-population du détroit de Davis se déplaçant dans le Nunatsiavut, le Nunavik, l’Est du Nunavut et l’Ouest du Groenland. Son aire de répartition s’étend donc sur plusieurs territoires politiques et culturels, ce qui complique les efforts de gestion de la faune.

Selon les régions, les Inuit ont des approches différentes à l’égard de la conservation de l’ours polaire, lesquelles comprennent diverses stratégies de récolte et des quotas différents. Cependant, ils s’entendent sur le fait qu’il est essentiel de mettre en commun les données de recherche et les pratiques exemplaires pour soutenir à la fois les communautés et les populations d’ours polaires du détroit de Davis.

En 2022, le Secrétariat de la faune, de la végétation et des pêches dans les monts Torngat du Nunatsiavut, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut et le Conseil de gestion des ressources fauniques de la région marine du Nunavik ont mis sur pied un groupe de travail interdisciplinaire. Ce groupe comprenait des porteurs du savoir inuit, des responsables de la cogestion, des biologistes de la faune, des spécialistes des sciences sociales, des experts en santé publique et des avocats. Leur objectif était de recueillir divers points de vue concernant la façon de relever les défis liés à la gestion de l’ours polaire.

« Nous en sommes arrivés à nous concentrer sur une seule question, soit l’idée de rendre le savoir inuit plus accessible », indique David Borish, Ph.D., chercheur en sciences sociales et documentariste qui faisait partie du groupe de travail. « Cette idée venait du fait que nous avions cerné une lacune importante dans la prise en compte des points de vue des Inuit, c’est-à-dire qu’on ne les écoutait pas assez au sujet de l’ours polaire. »

Cette rencontre a mené à la création de Nanuk Narratives, une série de 20 courts documentaires qui présentent les points de vue des Inuit sur l’ours polaire et qui portent notamment sur l’importance culturelle de l’ours polaire et la relation qu’entretiennent les Inuit avec cet animal.

Enregistrer le savoir au moyen de films

« Le documentaire est un moyen de recueillir le savoir inuit, de l’examiner, de l’analyser et, surtout, de le faire connaître à des publics particuliers », affirme David. Il explique que l’équipe du projet comprenait cinq cinéastes inuit provenant de huit communautés de l’Est du Nunavut, du Nunavik, du Nunatsiavut et du Groenland.

La série Nanuk vise à sensibiliser un large éventail de publics, y compris les responsables des politiques du gouvernement, participant à la gestion de l’ours polaire.

« Nous tentons de leur faire comprendre l’importance de l’intégration du savoir inuit dans les efforts de conservation de l’ours polaire », mentionne David.

Les documentaires, offerts en anglais et en inuktitut seulement, sont accessibles sur YouTube et sur le site Web de Nanuk Narratives (nanuknarratives.com). Les vidéos portent sur différents aspects du savoir inuit et de l’expérience des Inuit se rapportant à l’ours polaire, comme l’observation des ours, les divers usages de l’ours, la sécurité en présence d’ours, l’intendance des Inuit et la cogestion. Plusieurs des films abordent également la question de l’évolution du comportement de l’ours polaire en raison des changements de l’état des glaces liés au climat.

Selon David Poisey, un cinéaste de Pangnirtung, au Nunavut, « le fait de dire qu’au Nunavut, et partout dans le Nord, les ours polaires sont en voie de disparition est un point de vue des gens du Sud. D’après ce qu’on voit, nous, les gens du Nord, il semble y avoir plus d’ours polaires qui s’approchent des communautés. C’est quelque chose qui n’arrivait pas auparavant. »

Pour favoriser encore davantage la compréhension de la question, un cours en ligne gratuit est accessible sur le site Web de Nanuk Narratives. Le cours comprend des vidéos accompagnées de guides de discussion et de questions permettant de découvrir le rôle essentiel que joue le savoir inuit dans la gestion efficace de l’ours polaire. De plus, les documentaires seront diffusés sur Uvagut TV, la chaîne de télévision en inuktitut, qui est offerte dans plus de 600 000 foyers au Canada.

« En fait, l’objectif de Nanuk Narratives est de montrer que nous avons depuis longtemps une relation très forte avec l’ours », affirme la cinéaste groenlandaise Ikimalik Pikilak, qui a créé trois documentaires de la série. « Cette relation, elle nous a appris à chasser, à élever nos enfants et à survivre dans l’Arctique. Notre relation avec l’ours nous en apprend beaucoup sur nous-mêmes. »

Contrairement aux autres cinéastes participant au projet, Ikimalik n’a pas interrogé les Aînés au sujet de leur relation avec l’ours polaire. Elle explique que trois siècles de colonialisme danois ont fait perdre ce savoir aux Aînés du Groenland. Ikimalik s’efforce de revitaliser ce savoir traditionnel en revisitant les pratiques et les récits consignés par les colonisateurs, les missionnaires et les chasseurs de baleines. Les documentaires aideront à transmettre ces renseignements aux Groenlandais.

Au Canada, les chasseurs inuit réclament un rôle de plus grande importance dans la gestion de l’ours polaire, et ils ont de bonnes raisons de le faire.

« Dans les documentaires, nous tentons de promouvoir l’utilisation de l’animal dans son entièreté et de mettre en évidence qu’il est traité avec respect », mentionne Derek. Selon lui, s’appuyer sur des expériences personnelles et des connaissances de première main contribue grandement au processus de gestion collaborative de l’ours polaire.

Trois qamutiks et des motoneiges sur la neige orientés vers l’arrière. L’homme au premier plan fait fonctionner un drone qui vole au-dessus de la tête des personnes présentes sur la photo.

Une équipe filme les glaces près d’Inukjuak.

Photo : Tommy Palliser

Deux hommes marchent sur un terrain rocailleux. L’un d’eux porte un trépied et un appareil photo muni d’un téléobjectif.

David Borish (portant l’appareil photo) et Karl Michelin filment des caribous au Labrador.

Photo : Eldred Allen

Deux bâtiments, celui au premier plan est doté d’un balcon situé en hauteur. Une peau d’ours polaire est tendue sur un cadre, qui est fixé à la balustrade du balcon.

Une peau d’ours polaire à Iqaluit.

Photo : David Borish

Portrait d’un homme portant un bonnet en tricot. Son capuchon est muni d’une grande bordure de fourrure, qui encadre son visage.

L’Aîné Derek Pottle.

Photo : David Borish

Suivre le déplacement des oiseaux pour découvrir leur origine

Imaginez apercevoir une petite sterne arctique à Cambridge Bay, puis découvrir qu’elle arrive de l’Antarctique, qui se trouve à plus de 40 000 km. En août 2024, une antenne a été érigée à l’extérieur de la SCREA justement pour obtenir ce type de renseignements, et ainsi suivre le déplacement des oiseaux migrateurs.

Cambridge Bay est un lieu important pour la migration des oiseaux. Elle se trouve au nord du refuge d’oiseaux migrateurs d’Ahiak, le seul sanctuaire d’oiseaux protégé de la région du Kitikmeot. Cette région abrite la plus grande variété d’oies de toutes les aires de nidification de l’Amérique du Nord ainsi que de nombreuses autres espèces d’oiseaux migrateurs. Compte tenu de la proximité du refuge et de l’importante population d’oiseaux dans la région, Cambridge Bay était un emplacement stratégique pour déployer la station.

D’une hauteur de 10 m, la tour fait partie du Système de surveillance faunique Motus (un programme d'Oiseaux Canada), qui dispose de l’antenne un peu partout dans le monde. Contrairement aux systèmes de localisation GPS par satellite, ce système utilise la radiotélémétrie pour recevoir des données provenant de minuscules émetteurs installés sur les oiseaux. Les émetteurs transmettent des signaux toutes les quelques secondes, signaux qui sont captés par la tour lorsqu’un oiseau passe dans le périmètre de détection. La station Motus est munie de trois antennes unidirectionnelles qui peuvent détecter un oiseau volant dans un rayon de 20 km.

Cléa Frapin, biologiste de la faune arctique qui s’est récemment jointe à Oiseaux Canada en tant que planificatrice de la conservation des habitats nordiques, a dirigé et coordonné l’installation de l’antenne à la SCREA. Ce projet est le fruit d’une collaboration entre le Service canadien de la faune, région de l’Atlantique, l’Université de Windsor et Savoir polaire Canada.

Bien que l’équipe chargée de l’installation n’ait pas elle-même placé d’émetteurs sur des oiseaux, Cléa affirme que « l’objectif de cette station Motus est de pouvoir créer des occasions de mettre des émetteurs et aussi de détecter des oiseaux dont l’émetteur a été installé ailleurs ».

À la station Motus de Cambridge Bay, des données seront recueillies du début du printemps à la fin de l’automne. Cléa mentionne le fait que tout le monde peut avoir accès aux données recueillies à l’antenne sur le site Web de Motus. Les renseignements sur les oiseaux migrateurs à Cambridge Bay sont mis à la disposition des enseignants, des organisations de chasseurs et de trappeurs, des chercheurs, des gouvernements et des membres de la collectivité intéressés.

Une femme souriante est accroupie à côté de pièces d’équipement.

Cléa Frapin met en place l’antenne de la tour Motus en août 2024.

Photo pleine page d’un paysage enneigé dans lequel se trouvent deux bâtiments à toit plat dont les fenêtres sont éclairées par le soleil. Une grande tour se dresse devant ceux-ci.

La tour à laquelle sont fixées les antennes Motus a été érigée près des triplex de la SCREA, prête pour la surveillance des oiseaux.

Le système BEAST de traitement des eaux usées

Cambridge Bay, comme d’autres communautés de l’Arctique, dispose d’un étang d’épuration. Contrairement à ce qui se passe dans le Sud du Canada, où les eaux usées sont transportées par des canalisations jusqu’à une station d’épuration ou jetées dans une fosse septique, les eaux usées du hameau sont collectées à chaque maison par des camions-pompes, puis déversées dans un étang d’épuration. 

Bien que les étangs d’épuration soient rentables et ne nécessitent qu’un entretien minimal, ils posent des problèmes dans le Nord. Comme les étangs de l’Arctique sont gelés pendant une grande partie de l’année, les bactéries ne peuvent pas décomposer efficacement la matière organique. Pour y remédier, le Conseil national de recherches du Canada, Elkan Engineering et POLAIRE ont collaboré à la mise au point d’une technologie de traitement des eaux usées adaptée aux défis particuliers que pose le traitement des eaux usées dans les collectivités éloignées de l’Arctique.

Cette innovation, connue sous le nom de BEAST (l’abréviation de Bio-Electrochemical Anaerobic Sewage Treatment, soit traitement bioélectrochimique des eaux usées en milieu anaérobie), a été créée afin d’améliorer la gestion des eaux usées.

La méthode traditionnelle de traitement des eaux usées consiste à injecter de l’oxygène, un processus appelé aération, afin d’accélérer la croissance des bactéries qui aident à décomposer les matières organiques. En revanche, le système BEAST peut fonctionner sans aération, ou très peu. Il utilise plutôt une tension électrique constante pour améliorer la digestion des matières organiques. Cette technologie, lorsqu’elle fonctionne sans aération, a par ailleurs le potentiel de produire du biogaz qui pourrait être utilisé comme source d’énergie, mais cette possibilité n’a pas été testée au cours de cet essai.

En 2020, un réacteur BEAST pilote de 30 litres a été mis à l’essai avec succès à la SCREA. En décembre 2023, l’équipe de POLAIRE chargée des technologies adaptées aux climats froids a commencé à mettre à l’essai un réacteur BEAST plus grand, d’une capacité de 300 litres. Ce réacteur a été installé dans la salle mécanique de l’un des bâtiments d’hébergement en triplex de la SCREA jusqu’en juin 2024.

Au cours de cette période, le personnel de POLAIRE a assuré l’entretien et le fonctionnement du réacteur, prélevant des échantillons hebdomadaires pour analyser la manière dont le système décompose la matière organique. Après six mois de fonctionnement, le projet a pris fin et le système BEAST a été mis hors service.

Les résultats du projet pilote sont en cours de compilation, et la rédaction d’un article technique basé sur les données recueillies est en phase de planification. À l’avenir, des technologies telles que le système BEAST pourraient servir de solution de prétraitement pour réduire les eaux usées dans les étangs d’épuration de l’Arctique.

Le dos d’un homme vêtu d’une combinaison contre les matières dangereuses qui est accroupi devant une grande boîte. À sa gauche, on aperçoit les jambes d’une autre personne en combinaison contre les matières dangereuses.

Wyatt Klengenberg et Jason Maas, employés de POLAIRE, mettent le système BEAST hors service.

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Les connaissances autochtones sur les baies dans les Territoires du Nord-Ouest

Un grand récipient en métal rempli de chicoutés est posé au sol à côté d’une talle de baies.

Des chicoutés fraîchement cueillies.

Une étude menée en 2017 sur les grizzlis dans les Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.) a révélé que les grizzlis mangent beaucoup de baies, principalement des Vaccinium vitis-idaea – ou canneberges.

« Quelques communautés ont fait état d’un déclin des baies. Non seulement les rendements des cultures diminuent, mais aussi la taille des baies. On a aussi observé des changements dans l’état des baies. Elles étaient plus sèches ou plus farineuses », explique Claire Singer, ancienne biologiste de la faune pour le programme de biodiversité du gouvernement territorial.

Étant donné que la cueillette des baies se pratique depuis très longtemps, le comité sur les espèces en péril, qui a examiné le rapport sur le grizzli, a recommandé de fonder les recherches sur les baies sur les systèmes de savoir autochtone, car ces systèmes englobent de vastes zones géographiques et s’échelonnent sur une longue période.

Claire, qui a dirigé le projet axé sur les connaissances autochtones sur les baies dans les Territoires du Nord-Ouest, a aidé à organiser un groupe de recherche composé de gardiens du savoir de l’ensemble du territoire. Chaque membre s’est entretenu avec des cueilleurs de baies expérimentés, généralement des Aînés, dans leur propre communauté, afin de recueillir des connaissances traditionnelles sur les baies. Bien que la pandémie ait retardé le projet, un comité de 10 porteurs du savoir s’est réuni en juin 2022 pour élaborer un plan de recherche, peaufiner les questions d’entretien, et obtenir les autorisations éthiques ainsi que les permis de recherche. La recherche a officiellement débuté en 2023.

Bea Lepine, membre du groupe de travail sur la recherche, apporte son savoir-faire acquis au fil des années dans la cueillette de baies à Hay River. En tant que Crie, Bea transmet ses propres connaissances tout en recueillant celles des Aînés de sa communauté. Elle souligne que les canneberges ont toujours été un élément essentiel de l’alimentation de son peuple.

« C’est important pour notre santé physique, dit-elle, parce qu’elles contiennent beaucoup de minéraux et de vitamines, en particulier de la vitamine C. »

En raison des longues journées d’été dans le Nord, les baies ont une teneur en antioxydants plus élevée que celles cultivées dans le Sud du Canada.

Bea souligne l’importance de l’étude.

« C’est une question de sécurité alimentaire. Les gens doivent reconnaître l’importance des plantes et des baies pour notre survie en tant que peuple, non seulement d’un point de vue historique, mais aussi pour l’avenir. Qui sait ce qui nous attend avec les changements climatiques? Au moins, on a accès à des connaissances », indique-t-elle.

À ce jour, les cochercheurs ont réalisé des entretiens dans 14 communautés des T.N.-O. Leurs conclusions indiquent que les changements climatiques constituent une menace pour les environnements où poussent les baies, ce qui a une incidence sur leur survie. Les sécheresses extrêmes et les feux de forêt de ces dernières années ont eu des répercussions considérables sur les cultures de baies dans certaines régions.

Le groupe de recherche rédige actuellement un rapport sur l’état actuel des baies dans les T.N.-O. Un guide pratique est également en préparation pour les communautés, ainsi qu’un calendrier des périodes de fructification qui tient compte des différences entre les régions du territoire. La transcription des entretiens est remise aux communautés puisqu’il s’agit de ressources précieuses en matière de connaissances.

Claire mentionne que la gestion des ressources naturelles s’articule traditionnellement autour de la chasse, du piégeage et de la pêche.

« De plus, le fait de pouvoir regarder au-delà de la mégafaune [grands animaux] et d’examiner le contexte dans lequel elle vit et les espèces dont elle dépend est un aspect essentiel de ce projet dont nous sommes très satisfaits. »

Deux rangées de personnes, dont certaines sont assises et d’autres sont debout, devant un tipi et une grande chaise Muskoka.

Première réunion du comité en juin 2022 au camp déné B. à Dettah, dans les T.N.-O. À l’arrière, de gauche à droite : Michele Grabke, Elaine Lamalice, Madison Menacho Melnyck, Lila Fraser Erasmus, Claire Singer, Dëneze Nakehk'o

À l’avant, de gauche à droite : Anna Thrasher, Margaret Leishman, Margaret McDonald, Celine Proctor, Alestine Andre, Annie Buckle

Photo : Bobby Drygeese

Prix POLAIRE de la recherche scientifique sur le Nord

Une pièce ronde sur laquelle est gravé un voilier en bois à deux mâts, dont les voiles sont amenées, qui est ancré au large d’une côte rocheuse, avec des aurores boréales en arrière-plan.

Chaque année depuis 2015, le Prix de la recherche scientifique sur le Nord est décerné lors de la conférence ArcticNet à une personne ou à une équipe qui a apporté une contribution importante au savoir et à la compréhension du Nord canadien. Les lauréats du prix reçoivent une bourse de 10 000 $ et la Médaille du centenaire.

2024 : Aklavik Hunters & Trappers Committee

Transmission des connaissances à l’échelle communautaire et conservation de la faune

Depuis plus de 40 ans, le Comité des chasseurs et trappeurs d’Aklavik est un chef de file en matière d’intendance de l’environnement et de transmission des connaissances dans le Nord canadien. Il collabore avec des chercheurs de diverses disciplines et origines, favorisant ainsi les partenariats avec des organisations et l’élaboration conjointe de projets scientifiques qui intègrent les connaissances autochtones.

2023 : Trevor Bell, Ph. D., et SmartICE

Surveillance environnementale communautaire

Trevor Bell a fondé SmartICE, qui associe le savoir autochtone à des technologies de pointe pour fournir de l’information en temps réel sur l’état des glaces. Leurs travaux ont grandement contribué à transformer la manière dont les connaissances sont produites et diffusées. 

2022 : Lucassie Aragutainaq

Savoir écologique autochtone et intendance de l’environnement

Pendant 30 ans, Lucassie Aragutainaq, de Sanikiluaq au Nunavut, a recueilli les connaissances écologiques autochtones et participé à des études scientifiques sur l’évolution de l’environnement de la baie d’Hudson.

2021 : David Barber, Ph. D.

Environnement et géographie

Les recherches de David Barber sur les changements climatiques et ses conséquences environnementales et socioéconomiques ont influencé les politiques territoriales, provinciales, nationales et internationales. Il intègre les points de vue autochtones à ses recherches et a formé une génération de jeunes scientifiques de manière à ce qu’ils respectent et privilégient les besoins en matière de recherche et les questions des communautés autochtones.

2020 : Wayne Pollard, Ph. D.

Géographie

Tout au long de sa carrière, Wayne Pollard a fait un nombre important de découvertes liées à la géomorphologie et à l’hydrologie du pergélisol. Son travail a mené à une nouvelle compréhension des environnements antarctiques ainsi que des processus qui touchent la topographie influencée par le pergélisol sur Mars.

2019 : Julie Cruikshank, Ph. D.

Anthropologie

Julie Cruikshank a une longue et impressionnante feuille de route en matière de consignation des récits oraux et de la vie des Aînés athapascans et tlingits, et d’exploration des systèmes narratifs et des connaissances des Premières Nations au Yukon.

2018 : Centre de recherche du Nunavik

Recherche communautaire

Depuis 40 ans, le Centre de recherche du Nunavik, situé à Kuujjuaq, réalise des projets scientifiques communautaires. Le Centre a conçu des méthodes de recherche qui intègrent les connaissances scientifiques et le savoir autochtone, notamment des études environnementales qui contribuent à protéger la santé de la population du Nunavik.

2017 : John England, Ph. D.

Changements environnementaux dans l’Arctique

John England a consacré sa vie à l’étude de l’histoire de l’environnement et du climat des îles de l’Arctique canadien. Ardent défenseur de la protection de l’environnement du Nord, John England a joué un rôle crucial dans la création du parc national le plus au nord du Canada, le parc national Quttinirpaaq, sur l’île d’Ellesmere.

2016 : John Smol, Ph. D.

Limnologie

John Smol a mis au point des techniques qui ont radicalement transformé l’étude des écosystèmes de l’Arctique. Il a montré que les algues microscopiques conservées dans les sédiments des lacs et des étangs sont un outil précieux pour comprendre les changements environnementaux, qui sont au premier plan des activités de recherche sur les changements climatiques dans l’Arctique.

2015 : Louis Fortier, Ph. D.

Biologie marine

Grâce à son leadership, Louis Fortier a réuni des universitaires du monde entier, des partenaires inuit, des représentants du secteur privé et des décideurs afin de consigner et résumer les effets des changements climatiques; leurs travaux ont éclairé l’élaboration de politiques qui profitent aux Inuit au Canada.


Prix et bourses de Savoir polaire Canada, 2023–2024

BOURSE DE RECHERCHE DE SAVOIR POLAIRE CANADA – 50 000 $

Amy Caughey, Ph. D.

Santé et sciences sociales

Institut de recherche du Nunavut

BOURSE POLAIRE POUR LA RECHERCHE SUR L’ANTARCTIQUE – 10 000 $

Brady O’Connor, Ph. D.

Biologie

Université McGill

BOURSE SAVOIR POLAIRE CANADA – 10 000 $

Benoit Lauzon, Ph. D.

Géographie

Université d’Ottawa

Claudia Haas, Ph. D.

Biologie

Université Wilfrid-Laurier

BOURSE POLAIRE POUR LES RÉSIDENTS DU NORD – 10 000 $

Amanda Buffalo, Ph. D.

Géographie

Université de Toronto

Christine Dunbar, M. Sc.

Biologie intégrative

Université Wilfrid-Laurier

Lois Moorcroft, Ph. D.

Éducation en justice sociale

Université de Toronto

Jessie Olson, M. Sc. 

Médecine vétérinaire, virologie 

Université de Calgary 

Devin Wittig, M. Sc.

Sciences de l’environnement

Université de Northern British Columbia

Aimee Yurris, M. Sc.

Sciences de la santé publique

Université de Waterloo

PRIX POLAIRE POUR LES RÉSIDENTS DU NORD – 5 000 $

Christina MacNeil, B. Sc.

Sciences de l’environnement et de la conservation du Nord

Université du Yukon

Sarah Newton, B. Sc.

Biologie

Université du Yukon


Regard vers l’avenir

Deux qamutiks côte à côte sur la glace, avec un ciel nuageux en arrière-plan. Deux boîtes de bois sont empilées sur le qamutik de gauche. Des palettes sont empilées sur le qamutik de droite, et une grande antenne est dressée sur celles-ci.

Cette image représente bien la méthode de recherche de POLAIRE, qui combine technologie moderne et savoir traditionnel pour améliorer notre compréhension des régions polaires.

À l’aube de sa deuxième décennie, POLAIRE cherche à renforcer le lien entre les scientifiques des régions du Sud et les porteurs du savoir du Nord. Le qamutik et l’antenne symbolisent notre orientation future.

Janet King, présidente du conseil d’administration de Savoir polaire Canada, souligne que le savoir autochtone fait partie intégrante du mandat de l’organisme.

« Savoir polaire Canada et les installations de la SCREA forment un centre névralgique très performant au sein d’un réseau consacré à la recherche et aux connaissances sur le Nord, tant pour les infrastructures matérielles que pour l’échange de connaissances, » affirme Janet. « Je crois aussi que la science est en train de s’enrichir. On constate une croissance des sciences pluridisciplinaires, des collaborations en réseau et de l’échange des connaissances, ce qui enrichit la recherche. La science apprend à s’adapter, à réagir rapidement et à devenir multidisciplinaire. Et bien sûr, cela correspond tout à fait à la manière dont le savoir est acquis et connaissance détenue dans le Nord. »

La photo des deux qamutiik et de l’antenne, prise en mai 2018, évoque un projet de recherche sur la glace réalisé à Cambridge Bay. Les données recueillies servent à orienter les futures études sur la glace arctique. Les recherches auxquelles participe POLAIRE aujourd’hui dans l’Arctique et l’Antarctique enrichissent nos connaissances sur les régions polaires et ailleurs, tout comme les études précédentes influencent la recherche actuelle.

L’Année polaire internationale est un excellent exemple de cette évolution. La première Année polaire internationale, qui a eu lieu de 1882 à 1883, était une étude coordonnée et interdisciplinaire de l’Arctique et de l’Antarctique que des chercheurs de différents pays ont menée pendant un an. L’initiative, qui a fourni des données scientifiques inestimables, a permis de mieux comprendre les régions polaires. Se tenant tous les 25 ans, l’Année polaire internationale s’appuie sur les connaissances accumulées lors de l’édition précédente.

Dans sept ans, POLAIRE représentera le Canada lors en l’Année polaire internationale de 2032-2033. Cette cinquième édition sera axée sur les transformations inédites des écosystèmes arctiques et antarctiques causées par le réchauffement climatique. POLAIRE est fier de prendre part à cet effort international pour trouver des solutions novatrices aux défis qui pèsent sur notre planète.

Depuis la dernière Année polaire internationale en 2007-2008, l’attention internationale s’est tournée vers l’Arctique, mettant en lumière les transformations accélérées observées par les scientifiques et les résidents.

Jason Tologanak, directeur de Gestion des connaissances et mobilisation, insiste sur l’importance d’intégrer les points de vue des résidents du Nord dans la recherche pour mieux comprendre l’avenir de l’Arctique à la lumière de son passé.

« Il faut s’assurer que les voix du Nord et le savoir local, qui a été transmis de génération en génération par la tradition orale et est le fruit de centaines d’années de vie et d’observation de l’environnement, ont autant de valeur et de poids que le savoir d’une personne qui détient un doctorat », souligne-t-il.

En dehors des Années polaires internationales, POLAIRE continue de jouer un rôle de premier plan en soutenant divers projets de recherche en Arctique et Antarctique, et il contribue ainsi à enrichir considérablement nos connaissances sur les écosystèmes de ces régions. POLAIRE est fier de contribuer à ces efforts soutenus.

« Les résidents du Nord ont toujours su s’adapter », affirme Andrew Applejohn, directeur exécutif des programmes de POLAIRE. « Mais à mon avis, la chose vraiment essentielle, c’est la capacité d’anticiper et de prévoir, en regardant vers l’avenir avec une perspective du Nord, et pas seulement du Sud. »

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2025-12-11