Le conflit d'intérêts apparent

Table des matières

Introduction

Les fonctionnaires du gouvernement du Canada doivent se préoccuper d'éviter aussi bien les conflits d'intérêts apparentsNote de bas de page 1 que les conflits d'intérêts réels et potentiels. Le présent document vise à favoriser une meilleure compréhension de la signification et de l'importance du conflit d'intérêts apparent, compte tenu de ses répercussions sur l'intégrité du gouvernement, de la fonction publique et de chacun des fonctionnaires. Il est destiné à constituer un outil utile aux fonctionnaires et aux gestionnaires de la fonction publique, mais il sera également utile pour le public, en particulier les personnes qui travaillent avec la fonction publique, à comprendre les obligations spéciales que les fonctionnaires se doivent de respecter.

La première partie du document examine certains concepts fondamentaux relatifs au conflit d'intérêts apparent dans le contexte gouvernemental global. La norme différente qui a cours dans le secteur privé y est décrite, et on y présente les normes qui s'appliquent au sein d'autres gouvernements nationaux. Les règles qui régissent le conflit d'intérêts apparent dans la fonction publique fédérale sont résumées; puis, des définitions permettent de différencier le conflit d'intérêts apparent des conflits d'intérêts réel et potentiel. S'ensuit une analyse approfondie des éléments constitutifs du conflit d'intérêts apparent, analyse fondée en grande partie sur des décisions de tribunaux judiciaires et administratifs qui ont conclu à l'existence d'un conflit d'intérêts apparent.

Concepts fondamentaux

Le rôle que joue l'intégrité de la fonction publique dans le soutien d'un gouvernement démocratique et la nécessité qui en découle de respecter certaines valeurs liées à l'éthique forment le concept fondamental qui sous-tend la préoccupation relative aux conflits d'intérêts apparents. Tel que le cite le rapport, en 1996, du Groupe de travail sur les valeurs et l'éthique dans la fonction publiqueNote de bas de page 2 :

Tous les jours, dans une multiplicité de contextes, les fonctionnaires sont appelés à prendre des décisions et des mesures qui touchent la vie et les intérêts des Canadiens : ils manipulent des renseignements personnels et confidentiels, ils offrent de l'aide et des services, ils s'occupent des deniers publics, ils répondent à des appels provenant de personnes qui connaissent des situations difficiles. Étant donné le degré de confiance que le public leur témoigne, les fonctionnaires doivent nécessairement avoir un sens plus aigu des valeurs morales qui doivent guider leurs actions.

[...]

En tant que dépositaires de la confiance du public, les fonctionnaires sont garants des intérêts des citoyens du Canada, tels que représentés par le gouvernement démocratiquement élu et exprimé dans la loi et la constitution.

[...]

Au nombre des valeurs importantes que la fonction publique doit préserver et renforcer, il y a une conscience aiguë que [...] les responsables publics doivent agir dans le cadre de la loi et des procédures qui servent à [...] préserver l'intégrité, la réputation et la légitimité de la fonction publique en tant qu'institution canadienne importante au service d'un gouvernement démocratique.

La Cour suprême du Canada a consolidé ces concepts dans différentes décisions. Dans un jugement soulignant la nécessité du comportement éthique des fonctionnaires pour le bon fonctionnement du gouvernement, la Cour a aussi clarifié le concept de conflit d'intérêts apparent. La Cour a rendu un arrêt de principe fondé sur le fait « qu'il est important et nécessaire d'avoir une fonction publique impartiale et efficace » et dans lequel elle a maintenu le renvoi d'un fonctionnaire au motif qu'il avait manqué à son obligation de loyauté (FraserNote de bas de page 3). La Cour a ajouté que la responsabilité fondamentale de la fonction publique est d'administrer et d'appliquer les politiques. « Pour bien accomplir sa tâche, la fonction publique doit employer des personnes qui présentent certaines caractéristiques importantes parmi lesquelles les connaissances, l'équité et l'intégritéNote de bas de page 4. » Elle décrit ensuite la tradition de la fonction publique canadienne, tradition qui met l'accent sur les caractéristiques « d'impartialité, de neutralité, d'équité et d'intégritéNote de bas de page 5 ».

L'apparence ou perception, est une caractéristique primordiale des concepts d'impartialité, de neutralité, d'équité et d'intégrité. Dans l'arrêt Fraser, la Cour a déclaré : « Un emploi dans la fonction publique comporte deux dimensions, l'une se rapportant aux tâches de l'employé et à la manière dont il les accomplit, l'autre se rapportant à la manière dont le public perçoit l'emploiNote de bas de page 6. » Elle a rappelé plus loin « l'intérêt du public vis-à-vis de l'impartialité réelle et apparente de la fonction publique »Note de bas de page 7.

Dans un arrêt ultérieur, la Cour suprême a apporté d'autres précisions quant au concept d'apparence. La Cour a rappelé dans l'arrêt HincheyNote de bas de page 8 qu'elle avait déjà interprété à plusieurs reprises la disposition du Code criminel établissant que le fait d'accepter une commission, une récompense, un avantage ou un bénéfice d'une personne qui a des relations d'affaires avec le gouvernement constitue une infraction. Des jugements antérieurs avaient posé que « l'objectif crucial de cet alinéa n'est pas simplement de préserver l'intégrité du gouvernement mais aussi de préserver l'apparence d'intégrité »Note de bas de page 9.

Dans un passage de première importance pour bien comprendre le concept de conflit d'intérêts apparent, la Cour a conclu en ces termes son analyse des jugements antérieurs :

[P]réserver l'apparence d'intégrité et l'apparence que le gouvernement rend équitablement la justice est, dans ce contexte, aussi important que le fait que le gouvernement soit véritablement intègre et rende une véritable justiceNote de bas de page 10. (Non souligné dans l'original.)

Faisant ensuite ressortir la différence entre ces concepts, la Cour a une fois de plus lié l'« apparence » au bon fonctionnement du gouvernement et au processus démocratique :

Ces deux concepts sont cependant distincts au plan analytique. Pour un gouvernement, il y a intégrité véritable lorsque ses employés ne donnent prise à aucune forme de corruption. Par contre, il n'est pas nécessaire qu'il y ait corruption pour qu'il soit porté atteinte à l'apparence d'intégrité. La protection de ces apparences n'est pas une préoccupation triviale. Cet alinéa reconnaît que la simple apparence d'absence d'intégrité peut être tout aussi dommageable pour le processus démocratique qu'une absence d'intégrité véritableNote de bas de page 11.

La Cour suprême a clairement énoncé que l'intégrité et le bon fonctionnement du gouvernement sont inextricablement liés. Elle a déclaré dans Hinchey : « La protection de l'intégrité du gouvernement est, en effet, essentielle au bon fonctionnement d'un régime démocratiqueNote de bas de page 12. »

Le conflit d'intérêts apparent au sein du gouvernement et dans le secteur privé

Les tribunaux imposent une norme élevée tant pour l'apparence d'intégrité que pour l'intégrité véritable au sein du gouvernement et distinguent ainsi la norme applicable au gouvernement de celle qui s'applique à l'extérieur du gouvernement. « [C]ompte tenu de la confiance et des lourdes responsabilités qui se rattachent aux charges publiques, il est normal que les fonctionnaires du gouvernement soient en conséquence tenus de se conformer à des codes d'éthique qui, pour un simple citoyen, apparaîtraient très sévèresNote de bas de page 13. » Dans l'arrêt Fraser, la Cour suprême a formulé l'attente de la reconnaissance et de l'acceptation de ces normes par les fonctionnaires comme suit : « Une personne qui entre dans la fonction publique ou une qui y est déjà employée doit savoir, ou du moins est présumée savoir, que l'emploi dans la fonction publique comporte l'acceptation de certaines restrictionsNote de bas de page 14. »

La Cour d'appel fédérale s'est penchée sur la distinction qui existe entre un emploi dans la fonction publique et un emploi dans le secteur privé (arrêt Threader)Note de bas de page 15. Dans cette affaire, un fonctionnaire qui avait fait l'objet de mesures disciplinaires en raison d'un conflit d'intérêts apparent a plaidé que la simple apparence d'un conflit d'intérêts ne peut justifier en droit la prise de mesures disciplinaires. Son argument était fondé sur le droit applicable dans le secteur privé, en vertu duquel « seul un conflit d'intérêts effectif peut justifier un congédiement ». La Cour a catégoriquement rejeté cet argument, insistant sur les normes plus sévères qui régissent la fonction publique :

La Couronne a parfaitement le droit d'établir pour ses employés des normes différentes de celles ayant cours dans le secteur privé. Non seulement est-elle légalement autorisée à interdire à ses employés de se placer dans des situations entraînant une apparence de conflit d'intérêts; ses motifs pour ce faire ressortent à l'évidence. [La Cour cite ensuite l'arrêt Fraser, notamment le passage qui traite de la nécessité « que la fonction publique soit perçue comme impartiale et efficace dans l'accomplissement de ses fonctions ».] [...] Manifestement, la fonction publique ne sera pas considérée comme impartiale et efficace dans l'exécution de ses fonctions si l'on tolère l'existence de conflits apparents entre l'intérêt personnel des fonctionnaires et leurs obligations à l'endroit du publicNote de bas de page 16.

Les normes différentes qui régissent les secteurs public et privé et l'obligation imposée aux fonctionnaires d'éviter tout conflit d'intérêts apparent représentent un défi particulier pour les travailleurs qui passent du secteur privé à la fonction publique ou qui envisagent cette transition.

Une préoccupation internationale

Le lien entre l'intégrité et le bon fonctionnement du gouvernement et la nécessité correspondante de gérer adéquatement les conflits d'intérêts, y compris les conflits d'intérêts apparents, ne sont pas des préoccupations exclusivement canadiennes. D'autres démocraties développées les partagent aussi. Dans les Lignes directrices de l'OCDE pour la gestion des conflits d'intérêts dans le service public publiées en 2003, l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) insiste sur le lien qui existe entre l'intégrité et le bon fonctionnement du gouvernement et sur l'importance d'une gestion adéquate des conflits d'intérêts.

Servir l'intérêt général est la mission fondamentale des gouvernements et des institutions publiques. Les citoyens attendent de chaque agent de la fonction publique qu'il exerce ses fonctions avec intégrité, équité et impartialité. De plus en plus, les gouvernements sont censés veiller à ce que leurs agents publics ne laissent pas leurs intérêts privés et leurs liens personnels compromettre les décisions publiques et la gestion publique. Dans une société de plus en plus exigeante, une mauvaise gestion des conflits d'intérêts des agents publics risque de porter atteinte à la confiance des citoyens dans les institutions publiquesNote de bas de page 17.

Les Lignes directrices de l'OCDE précisent qu'à défaut d'être gérés ou résolus correctement, les conflits d'intérêts sont susceptibles de porter atteinte au bon fonctionnement des gouvernements démocratiques :

  • en affaiblissant l'attachement des agents publics à l'idéal de légitimité, d'impartialité et d'équité dans les décisions publiques;
  • en pervertissant l'État de droit, l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques publiques, le fonctionnement des marchés et l'affectation des ressources publiquesNote de bas de page 18.

Le Code de valeurs et d'éthique de la fonction publique

Les idées présentées jusqu'ici et leur applicabilité au conflit d'intérêts apparent sont exprimées et reconnues formellement à l'intention de la fonction publique canadienne dans le « Code de valeurs et d'éthique de la fonction publique » (« le Code ») adopté en 2003 par le gouvernement du Canada.

Le Code débute par ces mots : « La fonction publique du Canada, importante institution nationale, fait partie intégrante du cadre essentiel de la démocratie canadienne et du gouvernement parlementaireNote de bas de page 19. » L'importance d'éviter les conflits d'intérêts, y compris les conflits d'intérêts apparents, est exposée de la façon suivante dans le chapitre du Code portant sur les Mesures relatives aux conflits d'intérêts :

Le fait d'éviter et d'empêcher les situations pouvant donner lieu à un conflit d'intérêts ou à l'apparence d'un conflit, est l'un des principaux moyens grâce auxquels un fonctionnaire conserve la confiance du public à l'égard de l'impartialité et de l'objectivité de la fonction publiqueNote de bas de page 20.

Les Mesures relatives aux conflits d'intérêts « sont complémentaires aux valeurs de la fonction publique » énoncées dans le CodeNote de bas de page 21. Les « valeurs liées à l'éthique » énumérées dans le Code revêtent une importance particulière à l'égard des dispositions relatives aux conflits d'intérêts. Elles sont résumées comme suit : « Agir en tout temps de manière à conserver la confiance du publicNote de bas de page 22. »

Valeurs et responsabilités

La première valeur liée à l'éthique est formulée en termes généraux traduisant l'objectif de favoriser le bon fonctionnement du gouvernement. « Les fonctionnaires doivent exercer leurs fonctions officielles et organiser leurs affaires personnelles de façon à préserver et à accroître la confiance du public à l'égard de l'intégrité, de l'objectivité et de l'impartialité du gouvernementNote de bas de page 23. » La deuxième valeur liée à l'éthique établit une norme de conduite élevée imposée aux fonctionnaires; elle revêt une importance particulière au regard de la prévention des conflits d'intérêts apparents. « La conduite des fonctionnaires doit pouvoir résister à l'examen public le plus minutieux; cette obligation ne se limite pas à la simple observation de la loiNote de bas de page 24. »

La première « responsabilité de tous les fonctionnaires » énoncée dans les Mesures relatives aux conflits d'intérêts stipule que les fonctionnaires doivent : « Dans l'exercice de leurs fonctions officielles, organiser leurs affaires personnelles de façon à éviter toute forme de conflit d'intérêts réel, apparent ou potentielNote de bas de page 25 ». La seconde est la suivante : « S'il y a d'éventuels conflits entre l'intérêt personnel du fonctionnaire et ses fonctions et responsabilités officielles, l'intérêt public doit primer dans le règlement desdits conflitsNote de bas de page 26. » Plus généralement : « Il incombe à tous les fonctionnaires de s[e] conformer [au Code]Note de bas de page 27 ».

Le Code encourage les fonctionnaires, « [f]ace à un dilemme éthique, [...] à utiliser les mécanismes et l'aide mise en place, par leur administrateur général, pour soulever, discuter et régler des questions relevant de ce Code »Note de bas de page 28. Reconnaissant l'impossibilité de « prescrire une solution pour chaque situation pouvant donner lieu à un conflit réel, apparent ou potentiel », le Code prévoit : « En cas de doute, les fonctionnaires doivent demander conseil à leur gestionnaire, au cadre supérieur désigné par l'administrateur général, ou à l'administrateur général, et se reporter aux valeurs de la fonction publique [...]Note de bas de page 29 ».

Méthodes d'observation

Les Mesures relatives aux conflits d'intérêts comprennent des méthodes d'observation parmi lesquelles la présentation par le fonctionnaire à son administrateur général d'un rapport confidentiel faisant état des biens qu'il possède, des bénéfices qu'il a reçus ou « des emplois ou activités qu'il exerce à l'extérieur, qui pourraient donner lieu à une situation de conflit d'intérêtsNote de bas de page 30 ». Dans certains cas, d'autres mesures sont nécessaires, notamment :

  1. Éviter ou abandonner les activités ou situations qui placeraient le fonctionnaire dans une situation de conflit réel, apparent ou potentiel, compte tenu de ses fonctions officielles.
  2. Le dessaisissement, qui est la vente d'un bien à un tiers « sans lien de dépendance » ou le placement du bien en fiducie sans droit de regard, si le fait de continuer de posséder le bien risque de placer le fonctionnaire dans une situation de conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel, compte tenu des fonctions officielles du fonctionnaireNote de bas de page 31.

Lorsque tel est le cas, l'administrateur général s'entretient avec le fonctionnaire pour déterminer la mesure appropriée pour atténuer ou régler le conflit. (En cas de désaccord entre le fonctionnaire et l'administrateur général, le Code prévoit que, conformément au principe « obéir d'abord, se plaindre ensuite », « le désaccord doit être résolu par l'entremise des procédures de grief établies »Note de bas de page 32). Le Code prescrit que les fonctionnaires doivent, dans les 60 jours suivant leur première nomination ou une nomination, un transfert ou une mutation subséquente, « signaler toutes leurs activités extérieures, tous les biens leur appartenant et tous les passifs directs et éventuels pouvant les placer dans une situation de conflit d'intérêts dans l'exercice de leurs fonctions officiellesNote de bas de page 33 ». Ce rapport doit être présenté sous la forme du rapport confidentiel évoqué ci-dessus.

Le Code énonce clairement que l'obligation de rendre compte ne se limite pas au moment de la nomination initiale ou des nominations subséquentes; elle peut se manifester à l'occasion de changements ultérieurs dans la situation des fonctionnaires :

Ils doivent, chaque fois que des changements importants surviennent dans leurs affaires personnelles ou dans leurs fonctions officielles, revoir leurs obligations en regard du présent Code. S'il existe un conflit d'intérêt réel, apparent ou potentiel, les fonctionnaires doivent, le cas échéant, produire un nouveau rapport confidentiel à l'intention de leur administrateur généralNote de bas de page 34.

En résumé, les fonctionnaires ont l'obligation d'évaluer leur situation de façon continue, à la lumière des changements qui surviennent soit dans leurs affaires personnelles, soit dans leurs fonctions officielles, et d'être toujours vigilants afin d'éviter tout conflit d'intérêts apparent.

Conséquences

L'inobservation de ces exigences et des autres obligations décrites ci-dessus peut entraîner des conséquences bien réelles, parfois graves. Sous la rubrique « Inobservation », le Code édicte :

Un fonctionnaire qui ne se conforme pas aux dispositions du Code, s'expose à des mesures disciplinaires, y compris, le cas échéant, le congédiementNote de bas de page 35.

Le Code fait partie intégrante des conditions d'emploi dans la fonction publique du Canada. Au moment de signer leur lettre d'offre d'emploi, les fonctionnaires reconnaissent que le Code est une condition d'emploi. Quant aux fonctionnaires qui étaient déjà en poste à la date d'entrée en vigueur du Code, le , le Code est devenu dès lors une condition d'emploi à leur égard.

Ne se limite pas aux intérêts financiers

Le Code précise qu'un conflit d'intérêt apparent ou autre type de conflit d'intérêt «ne touche pas exclusivement les questions d'opérations et de transfert d'avantage économique. Bien que l'activité financière en soit un volet important, elle n'est pas la seule source éventuelles de situations de conflits d'intérêts.»Note de bas de page 36 Le Code fournit des exemples sous la rubrique « Traitement de faveur »Note de bas de page 37, telles des activités de dotation qui donneraient lieu à une aide ou à des faveurs à des membres de la famille ou à des amis ou encore donner de l'information à la famille ou aux amis. Les directives précitées de l'OCDE font état de cette préoccupation : «Un conflit d'intérêt peut en d'autres circonstances, impliquer des activités à caractère privé tout à fait légitimes, des affiliations ou associations personnelles et des intérêts familiaux, si ces mêmes activités sont vraisemblablement perçus comme pouvant influer sur l'exercice des fonctions du fonctionnaires. »Note de bas de page 38

Les directives stipulent que « la négociation d'un emploi futur par un agent public avant la cessation de ses fonctions est souvent considérée comme une situation de conflit d'intérêts. . » Note de bas de page 39 Le chapitre 3 du Code est consacré aux mesures d'observation concernant l'après-mandat mises de l'avant afin de minimiser les possibilités de conflits d'intérêts apparents ou autres entre les fonctionnaires qui quittent la fonction publique pour un nouvel emploi et leurs plus récentes fonctions au sein de la fonction publique.

Distinguer les conflits d'intérêts apparents des conflits d'intérêts réels et potentiels

Une fois établie l'importance d'éviter les conflits d'intérêts apparents, il convient de reconnaître toutefois qu'il n'est pas toujours facile d'évaluer le risque d'un conflit d'intérêts apparent ou d'en déceler la présence. Deux ensembles de définitions sont exposés ci-dessous afin d'aider à comprendre la distinction entre conflits d'intérêts apparents et conflits d'intérêts réels et potentiels :

Un conflit d'intérêts réel est une situation dans laquelle [un fonctionnaire] a connaissance d'un intérêt pécuniaire privé suffisant pour influer sur l'exercice de ses fonctions et responsabilités officielles.

Le caractère du conflit potentiel tient à la notion de prévisibilité. Il y a possibilité de conflit dès que le titulaire d'une charge publique se rend compte qu'il a un intérêt pécuniaire éventuellement suffisant pour influer sur l'exercice éventuel d'une fonction ou d'une responsabilité publique.

Il y a apparence de conflit lorsqu'il y a de la part d'une personne raisonnable bien informée, une crainte raisonnable de conflits d'intérêts.

Une commission d'enquête (ParkerNote de bas de page 40) a accepté ces définitions comme étant conformes à la Common Law.

Le deuxième ensemble définit comme suit les trois types de conflit d'intérêts :

[Traduction libre]

Un conflit d'intérêt réel consiste en un conflit opposant directement les fonctions et responsabilités officielles actuelles d'un fonctionnaire et ses intérêts personnels existants.

Un conflit d'intérêts potentiel survient lorsqu'un fonctionnaire a des intérêts personnels susceptibles d'entrer éventuellement en conflit avec ses responsabilités officielles.

Un conflit d'intérêts apparent ou perçu peut exister dans les cas où l'on pourrait penser, ou dans les cas où il semble, que les intérêts personnels d'un fonctionnaire pourraient influer de manière inappropriée sur l'exercice de ses fonctions officielles – que ce soit ou non le cas en réalité.

Il s'agit dans ce cas des définitions adoptées dans le récent rapport d'une commission d'enquête australienneNote de bas de page 41 et fondées sur les principes énoncés dans les Lignes directrices de l'OCDE, dont il a été question plus tôt.

Il ressort clairement de ces définitions que l'apparence d'un conflit d'intérêts aux yeux du public constitue la caractéristique qui différencie le conflit d'intérêts apparent des autres types de conflit d'intérêts.

Les éléments du conflit d'intérêts apparent

Le reste du présent document permet d'approfondir, au-delà de ces définitions succinctes, la compréhension du concept de conflit d'intérêts apparent et des éléments qui le composent. La compréhension étendue de ce concept est issue en grande partie de décisions de tribunaux judiciaires ou administratifs ayant conclu à l'existence d'un conflit d'intérêts apparent, et de l'examen des conséquences néfastes pour la fonction publique – et pour les fonctionnaires touchés – qu'entraîne l'inobservation des règles relatives aux conflits d'intérêts apparents.

Le plus souvent, une question de conflit d'intérêts apparent est soumise aux organismes judiciaires lorsque le gouvernement, à titre d'employeur, a pris une mesure disciplinaire contre un fonctionnaire au motif que la conduite de ce dernier a donné lieu à un conflit d'intérêts apparent. Le fonctionnaire a refusé de régler la situation de manière satisfaisante pour l'employeur, ou bien l'a fait mais conteste néanmoins les conclusions initiales et les instructions de son employeur à cet égard. La mesure disciplinaire imposée à la suite du conflit d'intérêts apparent peut consister en une suspension ou en un congédiement; lorsque le fonctionnaire décide de contester la mesure disciplinaire dont il a fait l'objet, il dépose un grief ou une plainte dans laquelle il expose que sa conduite n'a pas donné lieu à un conflit d'intérêts apparent.

Un organisme comme la Commission des relations de travail dans la fonction publique (CRTFP) se prononce sur le grief ou la plainte. En cas de contrôle judiciaire de la décision de ce tribunal administratif, un tribunal supérieur, nommément la Cour fédérale, statue sur la question. Des cas peuvent être contestés, en dernier ressort, par voie d'appel à la Cour suprême du Canada.

L'analyse de décisions judiciaires et quasi-judiciaires aide à circonscrire les concepts fondamentaux des règles du gouvernement en matière de conflits d'intérêts et l'interprétation qui en est donnée en pratique. Comme les décisions portent sur de « vrais » cas, elles fournissent des informations fort utiles sur différents aspects du conflit d'intérêts apparent.

1. L'élément primordial est l'apparence aux yeux du public, et non l'intégrité ou la bonne foi du fonctionnaire

Un fonctionnaire qui occupait un poste de directeur au ministère de l'Expansion économique et régionale a été congédié après qu'on eût conclu qu'il avait tiré avantage de son poste de direction en achetant des actions d'une société qui avait reçu une subvention du ministère. Le fonctionnaire a déposé un grief à l'encontre de son congédiement, mais le congédiement a été maintenu par la Commission des relations de travail dans la Fonction publique (la Commission) dans la décision McKendryNote de bas de page 42.

L'employeur soutenait que le fonctionnaire avait acheté des actions auprès d'une société qui sollicitait une subvention et qu'il avait fait l'acquisition de ses actions après que le ministère eût offert des subventions et dans le cours de la période d'admissibilité des demandes de subvention et avant que le grand public en ait été informé. Le fonctionnaire a fait valoir pour sa défense qu'au moment où il a acheté les actions, l'information relative aux subventions avait été portée à la connaissance du public et qu'il avait obtenu l'autorisation verbale de son supérieur immédiat d'acheter ces actions. Il a affirmé n'avoir eu aucune intention malhonnête en achetant ces actions et a déclaré qu'il croyait sincèrement avoir le droit d'effectuer ces transactions à la suite de ses entretiens avec son superviseur.

Dans ses motifs, la Commission s'est dite d'avis que le fonctionnaire [Traduction libre] « possédait suffisamment d'expérience et de qualifications pour reconnaître un conflit d'intérêts lorsqu'il s'est présenté et prévoir les conséquences probables qui en découleraient pour son Ministère si on apprenait qu'un ou plusieurs de ses fonctionnaires spéculaient en vue de réaliser un profit personnel en tirant parti des renseignements non publiés obtenus dans l'exercice de leurs fonctions officielles »Note de bas de page 43.

Dans son jugement, la Commission fait référence à l'expérience américaine depuis les tentatives du Congrès, dès 1853, de légiférer en matière de conflit d'intérêts. Elle cite l'ouvrage du doyen Manning de la Yale Law School (« Federal Conflict of Interest Law »), qui fait état de deux genres d'intérêts :

[Traduction libre] [L]e premier est l'intérêt du représentant du gouvernement (et de la population) dans le bon exercice de ses fonctions; le second est l'intérêt de ce même représentant dans ses affaires financières privées. Un conflit d'intérêts existe toutes les fois que ces deux intérêts s'opposent ou semblent s'opposer.

Un conflit d'intérêts ne présuppose pas nécessairement qu'une mesure prise par le représentant et favorisant l'un de ces intérêts sera préjudiciable à l'autre, ni que le représentant résoudra en fait le conflit à son avantage personnel plutôt qu'à celui du gouvernement. Si quelqu'un est dans une situation où il y a conflit d'intérêts, il sera soumis à la tentation de quelque manière qu'il résolve la question. Les règlements sur les conflits d'intérêts tentent de prévenir des situations où pourraient surgir des tentationsNote de bas de page 44.

La Commission fait remarquer qu'elle a souligné les mots « ou semblent s'opposer » parce qu'ils « constituent le coeur même du problème »Note de bas de page 45. Tout en décrivant le conflit d'intérêts comme « un concept abstrait et subtil »Note de bas de page 46, la Commission expose :

[Traduction libre] [U]n conflit d'intérêts ou l'apparence d'un tel conflit peut facilement être reconnu, par un citoyen sensé, comme étant contraire à la politique publique. Le doyen Manning a cité l'exemple extrême d'un vérificateur d'impôt gouvernemental qui vérifierait son propre rapport d'impôt, acte que tout être raisonnable reconnaîtrait spontanément comme étant inapproprié, peu importe combien grande est l'intégrité du vérificateur. Un nombre infini d'autres exemples, moins évidents mais non moins réels, pourrait être donné ici. Dans bon nombre de ceux-ci, le problème découlerait du fait qu'il y a apparence [...] plutôt que du fait qu'on a réellement nui aux intérêts de l'ÉtatNote de bas de page 47.

En concluant que le congédiement du fonctionnaire dans le cas McKendry devait être maintenu, la Commission offre des précisions sur la signification du concept de conflit d'intérêts apparent. (L'extrait qui suit a été cité avec approbation dans des décisions postérieures.)

[Traduction libre] [C]e n'est pas une bonne défense que de démontrer que l'achat d'actions a été fait de bonne foi et sans aucune intention de nuire à l'intérêt public. Ce n'est pas une bonne défense non plus que d'établir que le jugement n'a pas été influencé ou qu'il n'y a pas eu réellement de parti-pris. Il ne s'agit pas non plus, dans cette affaire, de céder devant les soupçons de la population ou une critique malicieuse. Les exigences essentielles sont que le fonctionnaire ne devrait servir qu'un maître et ne jamais se mettre dans une situation où il pourrait être même tenté de préférer ses propres intérêts ou ceux d'une autre personne à ceux de la population qu'il a pour fonction de servir. Ces exigences constituent l'essence même des doctrines selon lesquelles il devrait éviter une situation de partialité apparente aussi bien qu'une partialité réelle et qu'il ne devrait jamais se mettre dans une situation où, comme l'a dit le doyen Manning, « deux intérêts s'opposent ou semblent s'opposer »Note de bas de page 48.

Appliquant ensuite ces principes au cas du fonctionnaire en cause, la Commission a conclu : [Traduction libre] « Quels que soient ses motifs, et quelle que soit l'autorisation ou l'assentiment [...] qu'il peut y avoir eu, je conclus que dans les circonstances son achat d'actions faisait tellement preuve de manque de jugement et de responsabilité que par ses propres actes il s'est malheureusement lui-même rendu inhabile à exercer la charge de fonctionnaire supérieur dans la fonction publiqueNote de bas de page 49. »

2. Le conflit d'intérêts apparent doit être réglé en fonction de l'intérêt public, même si le fonctionnaire est persuadé du caractère inoffensif de ses activités

Dans une affaire ultérieure, le tribunal a appliqué ces principes relatifs au conflit d'intérêts apparent en mettant l'accent sur l'obligation qui incombe aux fonctionnaires d'éviter toute activité qui pourrait sembler porter atteinte, même de manière minimale, à leur efficacité en tant que fonctionnaires, ce même si les fonctionnaires sont convaincus de leur bonne foi et de leur intégrité. Un conseiller en placement de la Commission de l'emploi et de l'immigration du Canada (CEIC) à Toronto, qui était responsable de trouver, parmi les clients à la recherche d'un emploi, des candidats pour les postes à pourvoir dans différents domaines, a été suspendu de ses fonctions en raison d'un comportement répréhensible mettant en cause un client. La Commission a été saisie du grief qu'il avait formulé (Ennis)Note de bas de page 50.

Les faits étaient les suivants. Après avoir tenté en vain de trouver un emploi pour un client particulier, le fonctionnaire a invité le client à s'informer au sujet d'une occasion d'affaires dans le domaine de la vente. Il lui a remis une carte professionnelle sur laquelle figuraient le nom de la société du fonctionnaire (« Bruce Ennis & Associates ») et son numéro de téléphone, qui était celui de son poste de travail à la CEIC. On pouvait lire, au verso de la carte, le lieu et l'heure d'une rencontre pendant laquelle, vraisemblablement, seraient exposés les détails de l'occasion d'affaires que le fonctionnaire proposait au client. Ce dernier a appris lors de cette rencontre qu'on lui proposait de devenir distributeur dans une opération de vente pyramidale.

Le client a déposé une plainte officielle auprès du superviseur du fonctionnaire, dans laquelle il a indiqué être[Traduction libre] « vraiment préoccupé, en tant que contribuable, par le fait qu'un employé (de la CEIC) se servait de son titre officiel et des installations de l'État pour servir ses intérêts personnels pendant les heures de travail »Note de bas de page 51. Il y a aussi précisé qu'il estimait [Traduction libre] « que M. Bruce Ennis nuit à l'intégrité de la Commission de l'emploi en sollicitant les gens qui s'y présentent et qui, au lieu de trouver l'aide dont ils ont besoin, risquent de se laisser prendre dans un tel traquenard »Note de bas de page 52.

Le fonctionnaire a soutenu n'avoir rien fait de répréhensible, particulièrement après avoir tout mis en oeuvre pour aider un client à trouver un emploi dans les dossiers des postes à pourvoir de la Commission. L'employeur avait connaissance dans une certaine mesure des activités du fonctionnaire en rapport avec l'opération de vente pyramidale, même si celles-ci n'avaient pas été dévoilées comme l'exigeaient les Lignes directrices concernant les conflits d'intérêts. Le fonctionnaire a déclaré qu'on ne lui avait jamais remis copie des Lignes directrices; par contre, il n'a pas laissé entendre dans son grief que [Traduction libre] « du fait de ne pas avoir pris connaissance des principes directeurs en question, [il] se trouvait en quelque sorte moins lié par l'obligation d'éviter les actes de nature à compromettre ses fonctions officielles et à nuire du même coup à son efficacité en tant que fonctionnaire »Note de bas de page 53.

La Commission a jugé que le fonctionnaire avait, [Traduction libre] « dans l'exercice de ses fonctions, utilisé d'une manière abusive des renseignements confidentiels obtenus d'un client pour promouvoir ses propres intérêts financiers »Note de bas de page 54.

La plainte citée ci-dessus, qui a été rédigée par un client de CEIC, est digne de mention en raison de l'importance qu'elle accorde au sentiment que la conduite du fonctionnaire « nuit à l'intégrité » du ministère dont il relève; cette réflexion, en effet, est la manifestation « dans la vraie vie » du concept formulé dans les Mesures relatives aux conflits d'intérêts, à savoir que la prévention, par les fonctionnaires, des conflits d'intérêts apparents revêt une importance de premier plan pour préserver la confiance du public dans l'impartialité et l'objectivité de la fonction publique. Cette plainte fait aussi écho à la déclaration contenue dans les Lignes directrices de l'OCDE : « Les citoyens attendent de chaque agent de la fonction publique qu'il exerce ses fonctions avec intégrité [...]. » Elle illustre en outre les principes énoncés par la Cour suprême du Canada, évoqués ci-dessus, notamment le fait « qu'il est important et nécessaire d'avoir une fonction publique impartiale et efficace » (arrêt Fraser).

Dans la décision Ennis, la Commission a fait référence à une autre décision de la CRTFP (la décision AtkinsNote de bas de page 55), qui portait sur le grief d'un directeur de la Direction de la sécurité maritime du ministère des Transports. Celui-ci avait été suspendu de ses fonctions parce qu'il avait des intérêts considérables dans une entreprise qui vendait des cartes, compas et autres instruments qui pouvaient permettre de se conformer de façon maximale à la réglementation qu'il était responsable de faire appliquer dans le cadre de ses fonctions officielles. La Commission, dans cette décision, a insisté sur le fait que l'opinion personnelle de l'employé quant à l'intégrité de sa conduite ne changeait rien au fait qu'il était en conflit d'intérêts :

Il n'est pas suffisant pour le fonctionnaire ou ses associés d'être convaincus de leur innocence et de leur intégrité. Il n'est pas nécessaire non plus de prouver qu'ils ont été déloyaux envers leur employeur. Même en l'absence de preuve d'écart de conduite délibéré, un conflit d'intérêts ou l'apparence d'un tel conflit peut facilement être reconnu par un citoyen censé comme étant contraire à la politique publiqueNote de bas de page 56.

Il appert clairement de ces décisions et d'autres décisions que le fait que le fonctionnaire ait conscience ou, au contraire, ignore que sa conduite est susceptible de donner lieu à l'apparence d'un conflit d'intérêt est non pertinent.

3. Le fonctionnaire doit toutefois prendre part sciemment à l'activité en cause

La personne en cause doit cependant avoir sciemment pris part à l'activité qui a donné naissance au conflit d'intérêts apparent (comme c'était le cas dans les affaires McKendry, Ennis et Atkins). Cet élément a été précisé dans un jugement de la Cour d'appel fédérale (Canada (Conseil du trésor) c. Spinks (1987), 79 N.R. 375Note de bas de page 57). Les motifs posent d'abord que « [l]'état d'esprit de l'individu en cause n'est pas pertinent dans [l]e processus »Note de bas de page 58 visant à déterminer l'existence d'un conflit d'intérêts apparent, puis précisent que :

[Traduction libre] Une personne ne pourrait, par exemple, être pénalisée si la démarche, l'activité ou l'engagement donnant lieu à une apparence de conflit d'intérêts n'est pas entreprise ou contracté sciemment; ce serait le cas, par exemple, si le nom de cette personne était inscrit sur une pétition sans que cette personne y consente ou en ait connaissance. D'autre part, la personne sciemment responsable d'une démarche qui s'avère donner lieu à une apparence de conflit d'intérêts pourrait être pénalisée même si elle ne sait pas, au moment où la démarche visée est entreprise, que celle-ci créera une telle apparenceNote de bas de page 59.

En des termes qui rejoignent les passages cités précédemment, le jugement conclut qu'en l'espèce, [Traduction libre] « [l']ignorance [des fonctionnaires] du fait qu'ils étaient ou pouvaient se trouver dans une situation d'apparence de conflit d'intérêts ne saurait cependant changer la perception que pourrait avoir une personne bien renseignée »Note de bas de page 60.

Ces cas font ressortir la vigilance intellectuelle à laquelle doivent s'astreindre les fonctionnaires pour éviter les conflits d'intérêts apparents. L'on attend des fonctionnaires – et de leurs superviseurs – qu'ils envisagent, au-delà de leurs propres perceptions et motivations, la façon dont le public pourrait percevoir leurs actes.

4. Aux yeux de qui le conflit d'intérêts doit-il être apparent?

Les cas cités ci-dessus démontrent nettement que la principale différence entre les conflits d'intérêts « apparents » et les autres types de conflits d'intérêts réside en comment le conflit est saisi ou perçu par des personnes de l'extérieur. Comme l'a dit la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Threader : « Il est certain que l'apparence de quoi que ce soit, y compris celle d'un conflit d'intérêts, réside dans l'esprit de celui qui la perçoit plutôt que dans le comportement incriminéNote de bas de page 61. » Le défi pour les fonctionnaires consiste à s'efforcer de penser comme les personnes qui perçoivent le conflit d'intérêts.

La décision Ennis décrit le critère applicable comme étant la perception « d'un citoyen sensé »Note de bas de page 62 et « d'un client pour le moins objectif »Note de bas de page 63. (Le soulignement a été ajouté dans cette citation pour mettre l'accent sur l'élément en question et dans les citations qui suivent.)

Dans Lalla, une autre décision de la Commission, le tribunal a utilisé le critère de la perception d'une « personne raisonnable »Note de bas de page 64.

Le rapport de la commission d'enquête australienne propose pour sa part le critère suivant pour déterminer l'existence d'un conflit d'intérêts apparent : [Traduction libre ] « Comment une personne objective du public percevrait-elle la situationNote de bas de page 65? »

La Cour suprême du Canada, statuant sur une instance où était soulevée une crainte de partialité judiciaire (l'arrêt Office national de l'énergie), a énoncé le critère suivant :

[...] donner naissance, chez des personnes assez bien renseignées, à une crainte raisonnable de partialité dans l'appréciation des questions à trancher [...]Note de bas de page 66

Le « caractère raisonnable » est l'élément commun à chacun des cas cités, particulièrement dans la description de la personne hypothétique dont la perception détermine l'existence d'un conflit d'intérêts apparent.

Dans l'arrêt Threader, la Cour d'appel fédérale a proposé le critère suivant :

Est-ce qu'une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, croirait que, selon toute vraisemblance, le fonctionnaire, consciemment ou non, sera influencé par des considérations d'intérêt personnel dans l'exercice de ses fonctions officielles?Note de bas de page 67

À la différence des cas précédemment cités, le critère énoncé dans l'arrêt Threader n'est pas formulé en fonction du « caractère raisonnable ». Il est fondé sur le critère formulé par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Office national de l'énergie, infirmé par la Cour suprême du Canada. La perception de la « personne raisonnable » semble plus appropriée et mieux étayée par la doctrine et la jurisprudence.

5. Quelle est l'étendue des renseignements que doit détenir une personne pour « être renseignée »?

La Cour suprême a adopté le critère du caractère raisonnable pour définir l'étendue des renseignements que doit détenir l'observateur. L'arrêt Office national de l'énergie traite de situations donnant lieu « chez des personnes assez bien renseignées, à une crainte raisonnable de partialité ». (La commission Parker a utilisé la même formulation.)

Le critère de la « personne assez bien renseignée » est en harmonie avec l'importance qu'attache le Code à la nécessité de préserver et d'accroître la confiance du public dans l'intégrité du gouvernement. Établir un critère trop exigeant quant à l'étendue des renseignements que doit posséder un observateur de l'extérieur relativement à un conflit d'intérêts apparent – s'attendre par exemple à ce que cet observateur procède à une recherche approfondie sur la situation, prenne connaissance de toutes les circonstances qui s'y rattachent et réfléchisse sérieusement à la question – limiterait exagérément la portée des conflits d'intérêts apparents et minerait déraisonnablement les objectifs du Code, tout en imposant des conditions que la Cour suprême n'a pas approuvées.

6. Quelle doit être la nature de la perception?

La question de la nature de la perception du conflit d'intérêts est en étroite corrélation avec celle de l'étendue des renseignements que doit détenir la personne qui observe de l'extérieur. Il convient d'appliquer un critère objectif, de manière à écarter les idées purement irrationnelles et à protéger les personnes chargées de statuer sur une situation contre les allégations de conflits d'intérêts fantaisistes. Comme l'a fait remarquer la Commission dans McKendry au sujet des conflits d'intérêts apparents : [Traduction libre] « Il ne s'agit pas [...] de céder aux soupçons de la population et à une critique malicieuse. » Le critère approprié semble être celui de la « perception raisonnable » ou, pour reprendre les termes de la Cour suprême dans l'arrêt Office national de l'énergie, et adoptés par la commission Parker, de la « crainte raisonnable ».

7. L'étendue du conflit d'intérêts a-t-elle une importance?

L'étendue du conflit d'intérêts qui fait l'objet d'une « perception raisonnable » n'est pas un facteur pris en compte pour déterminer s'il existe un conflit d'intérêts apparent. La Commission a souligné, dans la décision Ennis :

[Traduction libre] D'après les principes directeurs sur les conflits d'intérêts dans la fonction publique, il est on ne peut plus clair qu'un employé doit non seulement faire attention aux genres d'activités extérieures dans lesquelles il s'engage, en particulier lorsqu'il s'agit d'une affaire à but lucratif, mais qu'il doit aussi prendre bien soin d'éviter celles qui semblent compromettre son efficacité en tant que fonctionnaire. S'il existe le moindre doute à ce sujet, l'employé a le devoir de révéler la nature de telles activités à ses supérieurs [...] Il ne fait aucun doute qu'on peut raisonnablement conclure à l'existence d'un conflit d'intérêts lorsque les activités personnelles d'un fonctionnaire semblent ternir le moindrement ses fonctions et ses responsabilités d'employé. Il incombe alors au fonctionnaire de prendre toutes les mesures nécessaires pour résorber ce conflitNote de bas de page 68.

En d'autres termes, il n'est pas nécessaire qu'un conflit d'intérêts apparent soit un conflit d'envergure : si une personne raisonnable et assez bien renseignée perçoit raisonnablement un conflit d'intérêts, la situation – en clair – échoue à « l'épreuve olfactive » et enfreint dès lors les règles.

Cette interprétation découle des normes élevées quant aux valeurs et à l'éthique auxquelles le Code assujettit les fonctionnaires, en particulier la disposition qui prescrit : « La conduite des fonctionnaires doit pouvoir résister à l'examen public le plus minutieux. » Note de bas de page 69

8. Il incombe au fonctionnaire de déceler tout conflit d'intérêts apparent et de prendre les mesures nécessaires pour se conformer aux règles

L'obligation faite aux fonctionnaires de déceler les conflits d'intérêts apparents que peuvent engendrer leurs actions et de prendre les mesures requises pour se conformer aux Mesures relatives aux conflits d'intérêts (il s'agit en général de mesures de prévention et de divulgation) a été clarifiée dans une série de décisions qui se situent dans le prolongement des décisions citées précédemment (notamment McKendry et Ennis).

  • La responsabilité d'éviter les conflits d'intérêts se poursuit même après le dépôt d'un rapport de divulgation

Un fonctionnaire a indiqué, dans la documentation relative aux conflits d'intérêts, qu'il était propriétaire de deux sociétés inactives et qu'il poursuivait des travaux de développement en vue de l'obtention d'un brevet. Les autorités de son ministère l'ont informé que ses intérêts d'affaires ne donnaient lieu, à ce moment, à aucun conflit d'intérêts réel ou apparent, mais qu'il devrait produire un rapport confidentiel révisé si son poste au ministère ou ses intérêts changeaient.

Au cours d'un voyage d'affaires au Japon pour le compte du gouvernement, le fonctionnaire a fait la promotion de ses intérêts d'affaires personnels en discutant d'un éventuel partenariat avec une société japonaise avec laquelle il avait l'autorisation d'engager des affaires officielles. Congédié en raison de cet incident et d'autres incidents semblables, le fonctionnaire a plaidé, pour sa défense, qu'il s'était acquitté de ses responsabilités en remplissant la déclaration confidentielle contenue dans ses documents relatifs aux conflits d'intérêts et qu'il incombait ensuite à l'employeur de lui demander de fournir d'autres renseignements si l'employeur le jugeait nécessaire. La Commission a rejeté cet argument dans la décision Lalla :

Tout le Code est rédigé de manière à rendre l'employé responsable des mesures qui s'imposent « pour éviter les conflits d'intérêts réels, potentiels ou apparents ». Si j'acceptais l'argument de l'avocat du fonctionnaire, on pourrait facilement imaginer une situation où un employé, qui n'aurait fourni que des renseignements limités à l'employeur, serait libre de faire ce qu'il veut du simple fait que l'employeur ne lui aurait pas demandé d'éclaircissements par la suite. Une telle interprétation, à mon avis, va à l'encontre du Code.Note de bas de page 70

Pour arriver à cette conclusion, la Commission a fait référence à la disposition pertinente du Code régissant les conflits d'intérêts, qui impose clairement au fonctionnaire la responsabilité d'éviter les conflits d'intérêts apparents. Dans sa formulation actuelle, cette disposition (déjà citée dans le présent document) est rédigée comme suit : « Responsabilité de tous les fonctionnaires : a) Dans l'exercice de leurs fonctions officielles, organiser leurs affaires personnelles de façon à éviter toute forme de conflit d'intérêts réel, apparent ou potentiel. »

  • La responsabilité incombe au fonctionnaire même si son superviseur ne lui a demandé aucun renseignement supplémentaire à la suite du dépôt de son rapport confidentiel

La Commission dans l'affaire Lalla a déclaré, dans une autre conclusion, que les autorités du ministère avaient été négligentes en ne cherchant pas à obtenir des renseignements plus détaillés quant à la situation divulguée dans le rapport confidentiel du fonctionnaire, mais elle a cependant précisé : « Néanmoins [...] c'est à l'employé qu'il incombe de faire en sorte qu'il ne se trouve pas en situation de conflit d'intérêtsNote de bas de page 71. » En bref, même si le superviseur est négligent et omet de demander des explications détaillées quant à l'information contenue au rapport confidentiel, le fonctionnaire peut faire l'objet de mesures disciplinaires pour avoir occasionné un conflit d'intérêts apparent, parce que c'est à lui qu'incombe la responsabilité d'éviter le problème.

  • La responsabilité du fonctionnaire subsiste même dans les cas où le superviseur a encouragé le fonctionnaire à divulguer moins de renseignements

Dans une autre affaire dont la Commission a été saisie (l'affaire Cottingham), le tribunal a décidé que la responsabilité incombait au fonctionnaire même si son superviseur lui recommandait de divulguer une quantité de renseignements inférieure à celle que le fonctionnaire lui-même aurait été porté à fournir. Le chef de la politique, de la planification et du développement au ministère des Transports a été suspendu sans rémunération (pour une période de 20 jours) lorsqu'on a découvert qu'il était associé à la préparation d'un séminaire qui devait être proposé au secteur privé, séminaire intitulé « Comment maximiser les possibilités de vente au gouvernement fédéral ». Le fonctionnaire a déposé un grief à l' encontre de cette suspension.

Il est apparu que son superviseur était l'un des directeurs d'une société (Mystl Management Corporation) qui organisait le séminaire en question. À la suite d'un entretien, le fonctionnaire et son superviseur avaient convenu que le fonctionnaire devait déposer une déclaration de divulgation officielle conformément aux Lignes directrices concernant les conflits d'intérêts. Cependant, la déclaration produite était formulée en termes généraux (par exemple « L'activité dont il est question consistera à donner, sous contrat, des exposés à des clients du secteur privé, en me basant sur des renseignements qui sont du domaine public ») et ne faisait pas précisément mention du séminaire envisagé. La haute direction a eu vent de ce projet à l'occasion d'une enquête interne faisant suite à la parution d'articles dans le Toronto Star selon lesquels certains fonctionnaires, et notamment le fonctionnaire en cause, se trouvaient en situation de conflit d'intérêts du fait de leur association à la société Mystl. L'enquête a révélé que le fonctionnaire avait eu l'intention de préciser la tenue éventuelle de ce séminaire dans l'exposé de sa divulgation relative aux conflits d'intérêts (il se proposait de joindre un résumé des activités du séminaire à sa déclaration), mais que son superviseur l'en avait dissuadé (Le superviseur du fonctionnaire a plus tard été lui-même congédié en raison de ses activités dans la société Mystl.).

La Commission a conclu de la preuve que le fonctionnaire se trouvait en situation de conflit d'intérêts apparent, conflit qui avait débuté dès le moment où le fonctionnaire avait accepté de présenter le séminaire sur la façon de conclure des affaires avec le gouvernement fédéral. Le fonctionnaire aurait dû s'apercevoir lui-même du conflit d'intérêts apparent, et il avait enfreint les Lignes directrices concernant les conflits d'intérêts de deux manières : « il a omis d'organiser ses affaires privées d'une manière qui aurait empêché que survienne le conflit d'intérêts apparent », et il « a négligé d'agir d'une manière si scrupuleuse qu'elle puisse résister à l'examen public le plus minutieux »Note de bas de page 72.

Cette décision illustre l'attribution par un tribunal d'un effet juridique – le maintien de la suspension d'un fonctionnaire – à une disposition définie dans le Code comme une valeur liée à l'éthique, à savoir que la conduite des fonctionnaires « doit pouvoir résister à l'examen public le plus minutieux ».

  • La responsabilité s'étend à la divulgation des éléments qui suscitent un doute

Quant à l'argument du fonctionnaire portant que son superviseur l'avait incité à ne pas divulguer intégralement tous les faits importants dans son exposé de divulgation, il a été rejeté catégoriquement par la Commission dans la décision Cottingham :

Les Lignes directrices [relatives aux conflits d'intérêts] [...] indiquent clairement qu'il incombe à chaque employé de fournir des détails écrits sur toute activité qui pourrait donner à penser qu'il se trouve dans une situation de conflit d'intérêts. L'employé s'estimant lésé était donc tenu, en vertu des Lignes directrices, de divulguer toutes les activités au sujet desquelles il avait un doute et qui auraient pu, de façon concevable, donner à penser qu'elles le mettaient dans une situation de conflit d'intérêts apparent. Le devoir qu'avait M. Cottingham de divulguer ces faits n'a pas été transféré à son supérieur par le simple fait que ce dernier avait incité l'employé s'estimant lésé à donner moins de renseignements que l'employé lui-même aurait pu être porté à fournirNote de bas de page 73.

9. Les conséquences juridiques du conflit d'intérêts apparent et celles du conflit d'intérêts réel ou potentiel sont les mêmes

La Commission a aussi souligné, dans la décision Cottingham : « les Lignes directrices exigent que les employés prennent autant de précautions pour éviter l'apparence d'un conflit d'intérêts que pour éviter un conflit d'intérêts réel ou potentiel »Note de bas de page 74. Il s'agit là de l'application à une situation de conflit d'intérêts du principe énoncé par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Hinchey, précité, soit que « préserver l'apparence d'intégrité [...] est [...] aussi important que le fait que le gouvernement soit véritablement intègre [...] ».

Il convient de se rappeler, dans les cas où il peut être difficile d'établir clairement le type de conflit d'intérêts, que les conflits d'intérêts apparents sont aussi importants que les conflits réels ou potentiels. Les décisions des tribunaux reconnaissent qu'il n'est pas toujours facile de trancher cette question. Par exemple, dans Lalla, la Commission déclare qu'une personne raisonnable devrait n'avoir aucune difficulté à conclure que la situation exposée dans cette affaire constitue « un conflit d'intérêts réel, potentiel ou, tout au moins, apparent »Note de bas de page 75.

Ainsi, l'expérience a démontré que des fonctionnaires ou leurs superviseurs peuvent consacrer énormément de temps et d'énergie à tenter de déterminer si une situation particulière constitue un « conflit d'intérêts apparent » ou un « conflit d'intérêts réel ». Étant donné l'importance égale que le Code accorde à tous les types de conflits d'intérêts (y compris sur le plan des mesures de prévention, des mécanismes de conformité et des conséquences qu'entraîne le manquement aux règles), il pourrait être inutile, voire contre-productif, de tenter de classifier définitivement un conflit d'intérêts. Il serait plus profitable, le cas échéant, de consacrer les efforts à la prévention d'un conflit d'intérêts (qu'il soit apparent ou réel) ou à la solution permettant de le régler plutôt qu'à sa classification précise.

Résumé

Le conflit d'intérêts apparent a des répercussions considérables sur l'intégrité du gouvernement, de la fonction publique et des fonctionnaires eux-mêmes. Il occupe en conséquence une place privilégiée dans le régime de valeurs et d'éthique de la fonction publique. Les comportements des fonctionnaires doivent refléter tout autant de discernement à éviter les conflits d'intérêts apparents que les conflits d'intérêts réels et potentiels.

Il existe un conflit d'intérêts « réel » quand les intérêts personnels d'un fonctionnaire sont de nature à influer sur l'exercice de ses fonctions officielles. Un conflit d'intérêts « potentiel » consiste en l'existence d'une situation qui pourrait donner lieu plus tard à un conflit d'intérêts réel. Par ailleurs, un conflit d'intérêts « apparent » existe lorsqu'il appert aux yeux du public que les intérêts personnels d'un fonctionnaire pourraient influer de manière inappropriée sur l'exercice de ses fonctions officielles. « Les intérêts personnels » ne se limitent pas aux intérêts financiers.

Les principales caractéristiques du conflit d'intérêts apparent peuvent se résumer comme suit :

  • Les fonctionnaires contribuent de manière fondamentale au bon fonctionnement du gouvernement. Le bon fonctionnement du gouvernement est étroitement lié à l'intégrité. Il est tout aussi important de préserver l'apparence d'intégrité du gouvernement que son intégrité véritable. Les fonctionnaires doivent par conséquent veiller avec la même vigilance à éviter les conflits d'intérêts apparents qu'à éviter les conflits d'intérêts réels ou potentiels.
  • Les fonctionnaires sont tenus de respecter les normes régissant les conflits d'intérêts dans la fonction publique plus élevées que celles qui s'appliquent aux employés du secteur privé.
  • Les fonctionnaires doivent organiser leurs affaires personnelles de manière à prévenir les conflits d'intérêts apparents.
  • Les fonctionnaires sont tenus d'agir en toutes circonstances de façon à pouvoir résister à l'examen public le plus minutieux.
  • Les règles qui précèdent et d'autres règles relatives aux conflits d'intérêts apparents sont énoncées dans le Code de valeurs et d'éthique de la fonction publique, auquel doivent se conformer les fonctionnaires. Le Code (qui traite aussi des conflits d'intérêts réels et potentiels) explique clairement des mesures destinées à éviter les conflits d'intérêts apparents et des mesures de conformité.
  • L'élément essentiel pour déterminer l'existence d'un conflit d'intérêts apparent est la façon dont le public perçoit la conduite d'un fonctionnaire, et non l'intégrité ou la bonne foi du fonctionnaire. Il peut être jugé qu'un fonctionnaire se trouve en situation de conflit d'intérêts apparent même si le fonctionnaire ignore que sa conduite donne lieu à un conflit d'intérêts apparent. Les fonctionnaires – et leurs gestionnaires – doivent pousser la réflexion au-delà de leurs propres perceptions et motivations et s'interroger sur la façon dont le public peut percevoir leur conduite.
  • Un conflit d'intérêts apparent est évalué en fonction de la perception d'une « personne raisonnable » (une personne hypothétique du grand public) qui est « raisonnablement renseignée ».
  • Cette personne hypothétique doit avoir une « perception raisonnable » de l'existence d'un conflit d'intérêts, même s'il ne s'agit pas d'un conflit d'envergure.
  • Il incombe aux fonctionnaires de prévoir les conflits d'intérêts apparents que pourrait susciter leur conduite et de prendre les mesures nécessaires pour se conformer aux règles de conduite prescrites.
  • Cette responsabilité des fonctionnaires est continue, étant donné que des conflits d'intérêts apparents peuvent survenir à tout moment, si des changements se produisent dans leurs affaires personnelles ou dans leurs fonctions officielles. Cette responsabilité s'étend au devoir de divulguer les éléments qui soulèvent un doute et elle va au-delà de la production d'un rapport de divulgation.
  • Les conséquences d'un conflit d'intérêts apparent ou potentiel ou réel sont les mêmes. Il est impératif de résoudre le conflit. Il importe donc de s'efforcer d'identifier les mesures de conformité appropriées plutôt que de classifier précisément le type de conflit d'intérêts en cause.
  • Les fonctionnaires qui ne se conforment pas au Code, y compris l'exigence d'éviter ou de régler les conflits d'intérêts apparents, peuvent faire l'objet de mesures disciplinaires pouvant aller jusqu'au congédiement.

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