Valeur préliminaire de la hexahydro-1,3,5-trinitro-1,3,5-triazine (RDX) : Résumé technique

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Organisation : Santé Canada

Une valeur préliminaire de 0,1 mg/L (100 µg/L) a été établie pour le RDX dans l'eau potable.

Valeurs préliminaires

Les valeurs préliminaires de Santé Canada représentent des valeurs seuil pour les contaminants présents dans l'eau qui pourrait servir comme source d'eau potable. Une exposition à vie à ces contaminants pouvant aller jusqu'à la valeur préliminaire, à la fois par la consommation d'eau potable et son utilisation durant la douche ou le bain, ne devrait pas augmenter les risques pour la santé des Canadiens, y compris des enfants.

Une valeur préliminaire est établie pour les contaminants qui ne sont pas fréquemment présents dans l'eau potable (qu'elle provienne d'une source ou qu'elle ait été traitée au préalable) au Canada, et donc des recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada ne sont pas instaurées. Santé Canada établit des valeurs préliminaires pour les contaminants à la demande des ministères fédéraux, des provinces ou des territoires. Ces autorités compétentes en font généralement la demande lorsqu'il existe des préoccupations pour la santé humaine attribuables à la présence soupçonnée d'un contaminant dans une source locale d'approvisionnement en eau ou à sa détection et qu'on n'a pas établi de valeur seuil dans l'eau potable pour cette substance. Depuis 2020, les résumés techniques pour les valeurs préliminaires sont publiés en ligne lorsque Santé Canada prévoit que ces valeurs préliminaires pourraient être nécessaires pour plus d'un partie intéressé ou d'une autorité compétente.

Les valeurs préliminaires ne remplacent pas les valeurs de la réglementation existante ou ne prévalent pas sur ces dernières. Toutefois, elles peuvent aider les autorités et la population à connaître les effets potentiels d'un contaminant sur la santé.

Les valeurs préliminaires ont été établies à la suite d'une recension des publications sur la recherche scientifique et des données réglementaires d'autres pays accessibles au moment de leur établissement. En outre, ces valeurs font l'objet d'un examen à l'externe par des pairs pour garantir l'intégrité scientifique.

Santé Canada s'engage à demeurer à l'affût des dernières connaissances scientifiques, dont celles portant sur les risques pour la santé associés aux contaminants n'étant pas habituellement présents dans l'eau potable et ne faisant pas partie des recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada. À cette fin, Santé Canada intègre les contaminants assortis d'une valeur préliminaire dans l'établissement périodique des priorités visant les contaminants dans le but d'élaborer des recommandations complètes.

Considérations liées à l'exposition

Propriétés et sources

L'hexahydro-1,3,5-trinitro-1,3,5-triazine (no CAS 121-82-4) est une nitramine hétérocyclique utilisée dans des applications militaires et industrielles. Elle est communément désignée RDX (code britannique pour Research Department Explosive ou Royal Demolition eXplosive), cyclonite, hexogène, hexolite, 1,3,5-trinitro-1,3,5-triazine, cyclotriméthylènetrinitramine, triméthylènetrinitramine ou C-4 (Etnier et coll., 1989; HSDB, 2005; ATSDR, 2012). En tant qu'explosif, le RDX est généralement utilisé dans des mélanges avec d'autres explosifs et plastifiants ou désensibilisateurs (HSDB, 2005; ATDSR, 2012).

Le RDX est un composé de synthèse qui n'est pas présent de façon naturelle dans l'environnement (ATSDR, 2012). Le RDX n'est pas produit commercialement aux États-Unis ni au Canada. La production, la manipulation et le conditionnement du RDX ne se font que dans des usines de munitions (HSDB, 2005). Aux États-Unis, les eaux usées découlant de la fabrication du RDX sont considérées comme des déchets dangereux et sont soumises à une réglementation de l'Environmental Protection Agency des États-Unis (US EPA) (ATSDR, 2012). Le RDX peut pénétrer dans l'environnement à partir d'effluents et d'émissions rejetés par des usines de munitions, en raison de son utilisation par des installations militaires et à la suite d'un déversement ou de fuites attribuables à une mauvaise élimination à l'usine ou à des sites de déchets dangereux (ATSDR, 2012).

Le RDX est un solide cristallin blanc dont le point de fusion est de 205,5 °C. Il est faiblement volatil et, par conséquent, n'existe que sous forme particulaire dans l'air ambiant, comme l'indique la valeur estimée de sa pression de vapeur qui est de 4,10 × 10-9 mm Hg à 25 °C (HSDB, 2005; Oxley et coll., 2007; Reifenrath et coll., 2008). S'il est libéré dans le sol, le composé devrait avoir une mobilité modérée à élevée, selon la fourchette de la constante Koc, qui varie entre 42 et 167. On ne s'attend pas à ce que la volatilisation à partir de l'eau soit un important devenir compte tenu de la valeur estimée de la constante de la loi de Henry qui est de 2,0 × 10-11 atm-cu m/mole (HSDB, 2005; Oxley et coll., 2007; Reifenrath et coll., 2008). Le RDX présente une solubilité modérée (59,7 mg/L à 25 °C) dans l'eau. Il ne se lie pas considérablement aux particules du sol et peut être lessivé dans les eaux souterraines (ATSDR, 2012). Il est peu probable que cette substance subisse une biodégradation aérobie dans le milieu aquatique, mais elle subit une biodégradation dans l'eau et le sol dans des conditions anaérobies pour former plusieurs produits de biodégradation (ATSDR, 2012). Le RDX ne devrait pas subir de bioaccumulation (Bannon et coll., 2009; ATSDR, 2012).

Exposition

Il y a tout lieu de croire que des eaux de surface et les eaux souterraines à proximité d'installations militaires canadiennes et américaines soient contaminées au RDX (Lapointe et coll., 2006; Parker et coll., 2006). Par ailleurs, on a décelé du RDX dans des eaux de surface, des eaux souterraines, des sédiments ou du sol dans 34 sites faisant partie de la liste prioritaire nationale (NPL) de l'US EPA (US EPA, 2018). Pour la population générale, y compris les enfants, l'exposition au RDX se limite aux zones situées aux alentours d'usines et d'installations militaires où la substance est fabriquée, utilisée ou éliminée. Les données de surveillance indiquent que la voie d'exposition la plus probable est l'ingestion d'eau potable contaminée ou de cultures agricoles irriguées avec de l'eau contaminée (Gadagbui et coll., 2012). L'exposition peut aussi survenir par inhalation de matières particulaires contaminées produites au cours de l'incinération de déchets contenant du RDX. Les enfants jouant avec de l'eau ou du sol contaminés peuvent aussi y être exposés par ingestion (ATDSR, 2012).

Considérations liées à la santé

Cinétique

Il existe peu de données empiriques sur la toxicocinétique du RDX chez l'humain (par voie orale), mais des rapports d'effets nocifs à la suite d'une ingestion accidentelle ou intentionnelle de RDX ainsi que des résultats d'études menées chez des animaux indiquent que le RDX est lentement absorbé dans le tractus gastrointestinal après ingestion (Etnier et coll., 1989; ATDSR, 2012). L'absorption cutanée de RDX est très peu probable puisqu'il n'est pas particulièrement liposoluble (Etnier et coll., 1989), comme l'indique son faible coefficient de distribution octanol-eau (log Kow = 0,87) (HSDB, 2005; Krishnan et coll., 2009).

Chez les animaux de laboratoire, le RDX est métabolisé principalement dans le foie pour donner plusieurs types de fragments à un carbone : dioxyde de carbone, ion bicarbonate et acide formique. On n'a trouvé aucun intermédiaire de plus grande taille (Etnier et coll., 1989). Rien n'indique que le RDX s'accumule de façon appréciable dans un tissu. Le RDX et ses métabolites sont éliminés dans l'urine et dans l'air à l'expiration, sous forme de dioxyde de carbone après quelques jours (Etnier et coll., 1989; ATSDR 2012).

Un modèle pharmacocinétique à base physiologique (PBPK) a été mis au point pour simuler la pharmacocinétique du RDX chez le rat (Krishnan et coll., 2009). Par la suite, ce modèle a été modifié et étendu jusqu'à obtenir des simulations de l'exposition chez l'humain. On a estimé les taux d'absorption par voie orale et le taux de métabolisation hépatique en optimisant l'ajustement du modèle avec des données de cinétique du RDX dans le sérum à la suite d'une exposition accidentelle (Sweeney et coll., 2012a). Pour permettre les extrapolations interespèces réalisées à partir d'études de toxicité chez la souris, Sweeney et coll. (2012b) ont modifié de nouveau le modèle de PBPK. Le modèle comprend cinq compartiments (foie, cerveau, tissus adipeux, tissus lentement perfusés et richement perfusés par voie sanguine) et a été conçu pour simuler une exposition au RDX par les voies orale et intraveineuse. Le modèle représente une absorption par voie orale de premier ordre dans le tractus gastrointestinal avec acheminement vers le foie une absorption de 100 % de la dose. Dans le modèle, on émet aussi l'hypothèse d'une clairance par une métabolisation de premier ordre dans le foie. La cinétique des métabolites du RDX n'est pas représentée dans le modèle. L'US EPA a modifié ultérieurement les modèles de la relation dose-effet pour améliorer l'extrapolation aux humains des résultats obtenus sur des animaux dans le cadre de l'évaluation du RDX de 2018 (US EPA, 2018).

Effets sur la santé

Les études menées chez l'humain se limitent à des études effectuées chez des populations de travailleurs exposés à des concentrations de RDX plus élevées que celles auxquelles la population générale s'expose. Le RDX exerce principalement ses effets toxiques sur le système nerveux central, mais a aussi des effets sur les testicules, le foie, le sang, les reins et le système gastrointestinal chez l'humain (Etnier et coll., 1989; Parker et coll., 2006; Gong et coll., 2009; ATSDR, 2012) et chez les animaux (tableau 1). Le principal effet neurotoxique suivant l'ingestion de RDX chez l'humain (et chez les animaux) est l'induction d'une hyperactivité manifestée sous forme de convulsions ou de crises d'épilepsie.

Il n'existe aucune donnée sur la toxicité sur la reproduction ou le développement chez l'humain à la suite d'une ingestion. Les résultats des études réalisées chez les animaux sont ambigus : on a constaté des effets sur la prostate et une dégénérescence des testicules dans certaines études menées chez des rongeurs mais on n'a pas observé ces résultats dans d'autres études (Levine et coll. 1983; Lish et coll. 1984). Une étude sur deux générations menée chez le rat a révélé une diminution non significative de la fertilité, mais seulement aux doses qui ont entraîné une diminution du poids corporel (p.c.) et une augmentation de la mortalité (Cholakis et coll. 1980). Des études sur le développement effectuées chez le rat ou chez le lapin n'ont démontré aucune relation dose-effet ou ont démontré des effets sur la descendance seulement à des doses considérées toxiques chez la mère (Cholakis et coll. 1980, Angerhofer et coll. 1986).

Le Centre international de recherche sur le cancer n'a pas classé le RDX quant à sa cancérogénicité. On n'a trouvé aucune étude indiquant que l'exposition au RDX cause un cancer chez l'humain. Les résultats des bio-essais réalisés chez les rongeurs fournissent un faible niveau de preuve quant à la cancérogénicité (Tableau 1). D'après les résultats de l'étude effectuée par Lish et coll. (1984), l'US EPA a déterminé qu'il existe des données laissant croire à un potentiel carcinogène du RDX et a calculé un coefficient de cancérogénicité par voie orale de 0,08 (mg/kg p.c. par jour)-1 (2018). Diverses études menées à court et à long terme avec des systèmes in vitro ou in vivo ne font mention d'aucun signe de génotoxicité du RDX (Parker et coll., 2006; Krishnan et coll., 2009).

Tableau 1: Résumé d'études de toxicité pertinentes menées avec des animaux de laboratoire exposés au RDX par voie orale.
Étude Souche, espèce (nombre
de mâles ou femelles),
type d'exposition, durée
Dosimétrie (mg/kg p.c. par jour) Effet(s) critique(s) Point de départ
(mg/kg p.c. par jour)

Crouse et coll., 2006

F344, rat (10/sexe/ groupe), gavage, 90 jours

0, 4, 8, 10, 12, 15

Mortalité, tremblements/convulsions, augmentation du volume moyen des érythrocytes et diminution du cholestérol sérique chez les mâles.

NOAEL = 4 LOAEL = 8

Lish et coll., 1984

B6C3F1, souris (85/sexe), par voie alimentaire, 2 ans

0, 1.5, 7, 35, 175

(Dans le groupe recevant la dose la plus élevée, la dose a été réduite à 100 mg/kg p.c. par jour au cours de la 11e semaine en raison d'une mortalité élevée)

Poids élevé du foie et du cœur à certaines doses, ainsi que concentration élevée des triglycérides et du cholestérol sérique (femelles) à certaines doses. Changements comportementaux possibles. Augmentation de la dégénérescence testiculaire.

Augmentation de l'incidence des néoplasmes hépatocellulaires et des adénomes ou des carcinomes alvéolaires ou bronchiolaires chez les souris femelles à des doses ≥ 7 mg/kg p.c. par jour.

Remarque : Après réexamen des coupes histologiques, seul un groupe de femelles (35 mg/kg p.c. par jour) présentait une augmentation significative des tumeurs par rapport aux témoins. En outre, comparativement à la base de données des témoins historiques, l'incidence des néoplasmes hépatocellulaires pour tous les groupes se situait dans l'intervalle des néoplasmes spontanés (Parker et coll., 2006).

NOAEL = 1,5 LOAEL = 7

NOAEL = 1,5 LOAEL = 7 (conclusions des auteurs)

NOAEL = 100 LOAEL = n.d. (réévaluation de Parker et coll., 2006)

Levine et coll., 1983

Fischer 344, rat (85/sexe), par voie alimentaire, 2 ans

0, 0,3, 1,5, 8,0, 40

Tremblements, convulsions et hyperréactivité; baisse de l'hématocrite, de l'hémoglobine et de la concentration d'érythrocytes; hépatomégalie et baisse des triglycérides et du cholestérol sérique; nécrose papillaire rénale (mâles uniquement) et augmentation de la concentration d'azote uréique du sang; dégénérescence testiculaire; et cataractes (femelles uniquement); taux de mortalité de 88 %. Incidence accrue d'une inflammation suppurée de la prostate des rats exposés à ≥ 1,5 mg/kg p.c. par jour.

Remarque : L'inflammation de la prostate est une affection commune chez les vieux rongeurs (Parker et coll. 2006) et pourrait être consécutive à une infection bactérienne chez les vieux rats mourant de façon précoce (ATSDR, 2012).

Aucune incidence de cancer.

NOAEL = 0,3
LOAEL =1,5
(conclusions des auteurs)

NOAEL = 8 LOAEL = 40 (réévaluation de l'ATSDR)

NOAEL = 40 LOAEL = n.d.

Hart, 1976

Sprague-Dawley, rat (100/sexe), par voie alimentaire, 2 ans

0, 1, 3,1, 10

Diminution du poids corporel (jugée non significative sur le plan toxicologique par les auteurs).

Aucun effet histologique nocif (aucun examen de la prostate).

Aucune incidence de cancer.

NOAEL = 10 LOAEL = n.d.

Sweeney et coll. (2012a) ont réévalué les effets sur la santé du RDX à l'aide d'analyses des modélisations PBPK et de doses repères (benchmark dose ou BMD) tirées de données publiées antérieurement. Plusieurs doses de référence (DdR) possibles ont été obtenues pour divers effets dont des effets neurotoxiques (convulsions observées par Crouse et coll., 2006 et Levine et coll., 1983) et des effets pour lesquels le mode d'action n'a pas été entièrement élucidé. Après l'application d'un facteur d'incertitude de 30, les doses de référence basées sur les convulsions variaient de 0,05 à 0,14 mg/kg p.c. par jour. Pour finir, on a recommandé une dose de référence par voie orale à long terme de 0,07 mg/kg p.c. par jour jugée protectrice de divers effets, dont la neurotoxicité.

Mode d'action

Il a été rapporté que l'action du RDX en tant qu'antagoniste du récepteur de l'acide gamma-amino butyrique (GABA) entraîne des effets sur le système nerveux central. Le RDX traverse la barrière hématoencéphalique pour inhiber les récepteurs du GABA, ce qui ralentit le transport du chlorure à travers les canaux ioniques; la diminution du transport du chlorure entraîne une dépolarisation de la membrane des neurones ce qui diminue les courants postsynaptiques inhibiteurs spontanés. Cette réduction des courants postsynaptiques inhibiteurs spontanés aboutit à une réduction globale des effets inhibiteurs sur le système nerveux (US EPA, 2018). Il n'existe aucune étude qui explique de façon mécaniste comment le RDX pourrait avoir d'autres effets sur la santé.

Sweeney et coll. (2012b) ont réévalué le poids de la preuve relatif au risque de cancer et le mécanisme d'action possible du RDX et ont tiré la conclusion selon laquelle les données existantes ne semblent pas indiquer un mécanisme d'action raisonnablement plausible et qu'il est peu probable que le RDX soit mutagène ou génotoxique.

Sélection de l'étude clé

Il n'existe aucune étude menée chez l'humain permettant d'estimer un point de départ. Chez les animaux, l'effet autre que le cancer observé à la concentration la plus faible est la prostatite purulente chez les rats mâles F344 exposés au RDX par voie alimentaire durant deux ans (Levine et coll., 1983). Toutefois, cet effet n'a pas été constaté dans des études réalisées avec des rats exposés au RDX pendant 90 jours seulement (par gavage ou par voie alimentaire) ni dans une étude par voie alimentaire sur deux ans réalisée avec des souris (Lish et coll., 1984). Par ailleurs, le mode d'action par lequel le RDX pourrait induire des effets sur la prostate n'est pas connu (US EPA 2018).

Des signes d'effets sur le système nerveux (p. ex., convulsions) ont été observés dans plusieurs études, chez plusieurs espèces (dont l'humain) et à la suite de diverses durées d'exposition. En outre, des données mécanistes permettent de croire que ces effets sont biologiquement possibles. Par conséquent, la valeur basée sur la santé est calculée d'après l'incidence des convulsions chez les rats F344 exposés au RDX par gavage durant 13 semaines (Crouse et coll., 2006). L'US EPA (2018) a choisi la neurotoxicité, manifestée par des convulsions, comme effet critique de l'évaluation de la relation dose-effet.

Crouse et coll. (2006) ont administré à des rats F344 (10/sexe/groupe) du RDX pur (99,9 %) en suspension dans l'eau à raison de 0, 4, 8, 10, 12 ou 15 mg/kg p.c. par jour par gavage durant 7 jours/semaine et pendant 90 jours. On a noté des différences significatives du poids corporel et de la consommation d'aliments entre les animaux traités et les témoins. De la mortalité a été observée dans tous les groupes traités ayant reçu plus de 4 mg/kg p.c. par jour; une augmentation significative du taux de mortalité (25 %) a été observée à des doses ≥ 10 mg/kg p.c. par jour. On a observé des décès à partir du jour 8 de cette étude par gavage sur 90 jours. On a constaté des tremblements ou des convulsions dès la première semaine d'exposition dans les groupes traités avec les deux doses les plus élevées et ces effets ont persisté tout au cours de l'étude. L'incidence des convulsions chez les mâles et les femelles combinées était de 0/20, 0/20, 3/20, 6/20, 13/20 et 12/20 dans les groupes ayant reçu 0, 4, 8, 10, 12 ou 15 mg/kg p.c. par jour, respectivement. L'incidence et la gravité des signes cliniques transitoires (par exemple changements de l'état d'éveil, inflammation des follicules des cils, augmentation de la salivation, tremblements et convulsions) ont augmenté avec la dose. Les tests hématologiques ont indiqué une augmentation significative du volume moyen des érythrocytes aux doses de 8 (mâles uniquement), 10 et 12 mg/kg p.c. par jour et une diminution significative du cholestérol sérique chez les mâles exposés à ≥ 8 mg/kg p.c./jour. On n'a noté aucune augmentation significative l'incidence des altérations histopathologiques.

Étant donné la proximité des doses et du temps auxquels les effets sur la mortalité et ceux sur le système nerveux ont été observés dans plusieurs études, notamment celle de Crouse et coll. (2006), l'US EPA (2018) a effectué une analyse pour évaluer le lien entre les convulsions, les tremblements et les crises pseudo-épileptiques, et la mortalité. Selon l'analyse, bien que les décès puissent survenir sans convulsions ou crises, il se peut qu'ils soient occasionnés par la faible fréquence des observations. Toutefois, d'après les données existantes, il convient de conclure que les convulsions représentent un effet grave dans une évaluation des risques pour la santé humaine.

Calcul de la valeur préliminaire

Le calcul de l'apport quotidien tolérable (AQT) a été basé sur la fréquence des convulsions chez les rats mâles et femelles à la suite d'une exposition au RDX par gavage durant 13 semaines (Crouse et coll., 2006). Tel que décrit par l'US EPA (2018), les données exprimant la relation dose-effet ont servi à modéliser la dose repère (BMD). Ces données appuient le choix d'une réponse de référence (BMR) de 5 %, fournissant une marge de protection contre la gravité de l'effet. Une BMDL05 de 2,66 mg/kg p.c. par jour (BMD05 de 5,19 mg/kg p.c. par jour) a été sélectionnée comme point de départ. Un point de départ équivalent chez l'humain (BMDL05-HED) de 1,3 mg/kg p.c. par jour a été calculé à l'aide du modèle PBPK chez le rat (Krishnan et coll., 2009, modifié par l'US EPA, 2018).

À l'aide d'un point de départ équivalent chez l'humain de 1,3 mg/kg p.c. par jour, on a calculé l'AQT comme suit :

Équation 1
Equation 1
Équation 1 - Équivalent textuel

Cette équation permet de calculer la dose journalière admissible pour l'hexahydro-1,3,5-trinitro-1,3,5-triazine (RDX). La dose journalière tolérable est calculée en divisant la dose minimale avec effet nocif observé pour la RDX (1,3 microgramme par kilogramme de poids corporel par jour) par le facteur d'incertitude de 300, qui est égal à 0,004 microgramme par kilogramme de poids corporel par jour.

où :

Selon l'AQT ci-dessus, la valeur préliminaire peut être calculée comme suit :

Équation 2
Equation 2
Équation 2 - Équivalent textuel

Cette équation permet de calculer le RDX. La valeur de dépistage pour le RDX total est multipliée par l'apport quotidien tolérable de 0,004 mg/kg pc/jour par le poids corporel moyen estimé pour un adulte canadien est de 74 et par 50 % en fonction des habitudes d'utilisation, du devenir dans l'environnement et des propriétés physico-chimiques, puis divisée par 1,53 L le volume quotidien estimé d'eau du robinet consommée par un adulte. Ce qui équivaut à une valeur de dépistage de 0,1 mg/L (100 µg/L)

où :

AQT = apport quotidien tolérable de 0,004 mg/kg p.c./jour comme il a été calculé ci-haut.
P.C. = poids corporel moyen estimé pour un adulte au Canada, soit 74 kg (Santé Canada, en préparation).
FA = facteur d'attribution : proportion d'exposition au RDX attribuable à la consommation d'eau potable par opposition à celle attribuable à d'autres milieux de l'environnement (p. ex., aliments, air, sol, produits de consommation). Selon les profils d'utilisation, le devenir dans l'environnement et les propriétés physicochimiques, une valeur de 50 % est appliquée (Gadagbui et coll., 2012; Krishnan et Carrier, 2013).
CE = consommation d'eau : estimation du volume quotidien d'eau du robinet consommé par un adulte, soit 1,53 L (Santé Canada, en préparation); l'évaluation de l'exposition par plusieurs voies (Krishnan et Carrier, 2008) indique que l'exposition par voie cutanée et par inhalation durant la douche ou le bain représente des voies d'exposition négligeables au RDX.

Santé Canada recommande donc une valeur préliminaire de 0,1 mg/L (100 µg/L) pour le RDX.

Considérations internationales

Les lignes directrices, les normes et/ou les valeurs recommandées pour la qualité de l'eau potable établies par des gouvernements étrangers ou des organisations internationales peuvent varier en raison des données scientifiques disponibles au moment de l'évaluation, ainsi que du recours à différentes politiques et approches, tels que le choix de l'étude clé, et l'utilisation de taux de consommation, poids corporel ou facteurs d'attribution différents.

Les autorités internationales comme l'Organisation mondiale de la santé, l'US EPA, l'Australie et l'Union européenne n'ont pas établi de recommandations réglementaires pour le RDX dans l'eau potable. L'US EPA a établi une dose de référence à long terme de 0,004 mg/kg p.c. par jour fondée sur des effets sur le système nerveux (c.-à-d. convulsions) chez le rat (US EPA, 2018). D'après une évaluation de 1988, l'US EPA a aussi publié une recommandation non réglementaire pour la santé pour toute la durée de vie concernant le RDX de 0,002 mg/L. Cette valeur a été calculée à l'aide d'un ensemble de données plus vieux considérant une dose de référence de 0,003 mg/kg p.c. par jour sur la base d'une prostatite suppurée chez le rat (US EPA, 1988).

Coordonnées

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Références

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