Discours pour l'honorable Jane Philpott, ministre des Services aux Autochtones - Le Conseil canadien pour les partenariats public-privé

Discours

à la Conférence annuelle
sur les partenariats public-privé

Le 6 novembre 2017
Hôtel Sheraton Centre Toronto
Toronto, Ontario

Bonjour.
Je suis heureuse d’être ici avec vous aujourd’hui.

J’aimerais souligner que nous sommes réunis sur le territoire traditionnel des Haudenosaunee, des Métis, et plus récemment, de la Première Nation des Mississaugas de New Credit. Aujourd’hui, bon nombre d’Autochtones vivent toujours à Toronto, et je suis reconnaissante de la possibilité qui nous est donnée de nous rencontrer ici.

Maintenant, je sais que plusieurs d’entre vous se posent la même question. Pourquoi Jane Philpott, ministre des Services aux Autochtones, prononce-t-elle un discours à une conférence sur les partenariats public-privé?

Au premier abord, cette association peut sembler étrange. J’espère cependant que vous verrez très rapidement le lien, et que vous commencerez aussi à voir le rôle que vous pouvez jouer dans la réalisation des objectifs critiques qui nous permettront d’offrir de meilleurs services aux Autochtones partout au pays.

Je vais d’abord vous parler d’un cas vécu – une jeune fille est décédée à Ottawa en janvier dernier. Elle avait 15 ans et provenait de la petite collectivité de Qikiqtarjuaq, au Nunavut. Elle était malade depuis au moins deux ans. Ce n’est pourtant que quelques heures avant sa mort qu’elle a reçu un diagnostic de tuberculose. En 2017, nous avons des jeunes Canadiens qui meurent de la tuberculose – une maladie infectieuse traitable. Les bactéries ne sont qu’une partie du problème. La propagation de la tuberculose au Canada est attribuable au surpeuplement des logements, au manque de personnel infirmier, aux barrières linguistiques, et aux retards de diagnostic. C’est une épidémie qui persiste chez les Inuit du Canada depuis plus d’un siècle.

Mais il ne s’agit pas seulement de cas propres au Nunavut et au Nord.

Imaginez 17 personnes vivant dans une maison conçue pour en accueillir 4. Imaginez maintenant une autre collectivité où les routes sont en si mauvais état que les camions d’incendie n’ont pas pu s’y rendre à temps et empêcher le décès de neuf personnes, dont un bébé. Imaginez votre maison au Canada sans salle de bains intérieure ou sans eau courante. Imaginez un pacte de suicide entre des enfants de moins de 10 ans dans une communauté où les jeunes ne croient pas qu’il puisse y avoir un avenir meilleur.

Ces situations existent aujourd’hui au Canada.
Elles sont inacceptables.

Les infrastructures de base que la plupart des Canadiens tiennent pour acquises sont inexistantes dans un trop grand nombre de collectivités autochtones. Je pense à un accès fiable à de l’eau potable, à des soins médicaux de base, à des routes toutes saisons, à des logements et des écoles de qualité, à des refuges, à la connectivité à large bande, à des espaces culturels et récréatifs... Ce que la plupart d’entre nous considèrent comme essentiel à notre qualité de vie est simplement absent de la réalité quotidienne de milliers de Canadiens.

Le statu quo n’est pas une option. Pas plus qu’attendre qu’il y ait un moment plus propice pour s’attaquer à ces lacunes.

Je suis ici aujourd’hui pour parler du rôle que j’ai à jouer dans cela... et pour vous mettre au défi de trouver le vôtre.

Je suis la première ministre des Services aux Autochtones au Canada. Permettez-moi de vous parler un peu de ce que cela signifie.

Le 28 août, le premier ministre a annoncé la dissolution du ministère des Affaires autochtones et du Nord Canada et son remplacement par deux nouveaux ministères : celui des Services aux Autochtones et celui des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord.

Services aux Autochtones améliorera la prestation de programmes et de services destinés aux Autochtones et contribuera à combler les écarts socioéconomiques. Au fil du temps, de plus en plus de programmes et services seront fournis par les Autochtones eux-mêmes, dans le cadre de leur progression vers une véritable autonomie gouvernementale.
Ce changement transformateur représente un pas important vers la réconciliation nationale. Il nous fournira les outils nécessaires pour travailler de façon plus efficace et intelligente à servir les Autochtones.

Le ministère des Services aux Autochtones est probablement le premier ministère gouvernemental jamais créé dont l’objectif ultime est de devenir obsolète. C’est parce que notre vision première consiste à appuyer l’autodétermination des peuples autochtones – qui ont un désir et un besoin légitimes de contrôler la prestation des services destinés aux Autochtones.

Jusqu’à ce que cela se réalise, le premier ministre s’attend à ce que mon ministère assure les services qui ont une incidence sur les réalités quotidiennes des peuples autochtones. Cela comprend la mise à exécution des importants montants investis dans les services aux Autochtones dans le cadre du Budget de 2016 et du Budget de 2017.

Dans le Budget de 2016, nous nous sommes engagés à verser 8,4 milliards de dollars sur cinq ans pour bâtir un avenir meilleur pour les peuples autochtones. Le Budget de 2017 prévoit un investissement additionnel de 3,4 milliards de dollars.

Laissez-moi vous parler de certains progrès réalisés en regard du déficit en matière d’infrastructures dans les collectivités autochtones :

1.    Pour les infrastructures d’alimentation en eau, nous avons financé 348 projets dans 275 collectivités. Nous avons levé 26 avis concernant l’eau potable. Il nous en reste encore 70, mais nous avons un plan d’action pour chacun d’eux et sommes en bonne voie de lever tous les avis concernant l’eau potable à long terme d’ici 2021.

2.    Au chapitre du logement, nous avons construit et rénové plus de 8 800 unités depuis novembre 2015 dans 362 collectivités. Nous préparons d’autres programmes de logement à long terme avec nos partenaires autochtones.

3.    Plus de 143 projets d’infrastructure d’enseignement sont en cours ou achevés dans 120 collectivités, et

4.    121 projets d’infrastructure liée à la santé sont en cours ou achevés dans 109 collectivités.

J’ai personnellement vu plusieurs de ces projets.

J’ai visité les Premières Nations de Dakota Plains et de Long Plain dans le Sud du Manitoba, près de Winnipeg, au début d’octobre. D’excellents bons projets de construction de logements étaient en cours dans ces deux collectivités.

Dans la Première Nation de Dakota Plains, la communauté a récemment terminé la construction de duplex, et les locataires sont en train d’emménager dans leur nouveau domicile. Ces nouvelles habitations permettent la réunification des familles. Elles sont porteuses de fierté, de stabilité et d’espoir pour la communauté.

Dans la Première Nation de Long Plain, le centre sportif communautaire a été converti en atelier de construction dans lequel une douzaine de mini-maisons sont bâties, puis envoyées à leur destination finale. Durant ma visite, j’ai rencontré une femme qui participait fièrement à la construction de sa propre maison.

Il y a donc des progrès véritables. La construction des infrastructures essentielles va bon train.

Cependant, il y a encore fort à faire.

-    Bien que 26 avis concernant la qualité de l’eau potable aient été levés, 19 nouveaux avis ont été ajoutés. Un trop grand nombre de collectivités ne disposent pas des ressources ni des compétences pour bâtir, entretenir et exploiter des réseaux d’aqueduc.

-    Sur le plan personnel, nous sommes confrontés à une crise dans le système de protection de l’enfance, où les enfants autochtones pris en charge sont surreprésentés. Il n’est pas rare qu’ils soient retirés de leur foyer à cause d’un manque de logements adéquats ou d’accès à des services de santé.

-    Comme je le disais précédemment, le surpeuplement des logements est l’une des raisons pour lesquelles la prévalence de la tuberculose est 270 fois plus élevée chez les Inuits du Canada que chez les non-Autochtones nés au Canada.

J’espère que vous voyez le lien avec les PPP.
Certains d’entre vous verront le rôle des PPP dans l’élimination des lacunes en matière d’infrastructure pour les Autochtones comme une question de responsabilité sociale des entreprises. D’autres pourraient voir dans ce rôle un intérêt personnel constructif. Quoi qu’il en soit, vous avez compris qu’il est judicieux d’investir dans les infrastructures autochtones, les collectivités autochtones et les peuples autochtones.

Les Premières Nations, les Inuits et les Métis représentent les segments de la population canadienne les plus jeunes et ceux dont la croissance est la plus rapide. Leurs réalisations économiques et sociales peuvent être un facteur de l’avenir prospère du Canada.

L’année dernière, le Conseil national de développement économique des Autochtones a analysé les pertes qu’engendrent les écarts en matière d’emploi et de résultats économiques entre les Autochtones et les non-Autochtones pour le Canada. Il a déterminé que le resserrement de cet écart de productivité entraînerait une hausse estimative du PIB de 28 milliards de dollars par année, soit un coup de pouce d’environ 1,5 % à l’économie canadienne.

Pour vous donner une autre idée de de l’ampleur des occasions, on estime que le déficit d’infrastructure des Premières Nations à lui seul pourrait atteindre 30 à 40 milliards de dollars, sans parler des besoins en infrastructure des Inuits du Canada dans le Grand Nord.

J’espère que vous voyez les possibilités que représentent les PPP dans les collectivités autochtones.

Je n’ai pas à vous convaincre de la pertinence du modèle des PPP. Le Canada est un chef de file mondial, principalement grâce aux efforts déployés par le Conseil et la direction offerte par des entités comme Infrastructure Ontario et Partnerships BC et les leaders ici présents.

Le modèle des PPP peut être un excellent outil pour la construction d’écoles, d’installations d’approvisionnement en eau potable et de traitement des eaux usées, de routes toutes saisons, d’infrastructures énergétiques, de même que pour la connectivité à large bande.

J’estime que les PPP présentent d’immenses possibilités pour les collectivités autochtones en raison de leur capacité à innover en matière de conception, à transférer les risques et à faire l’examen complet des coûts des biens, notamment des coûts de fonctionnement et d’entretien.

Nous avons pu observer quelques premières réussites des PPP :

-    Dans les Territoires du Nord-Ouest, les Tlichos font partie d’un projet de PPP pour la construction d’une route toutes saisons vers Wha Ti – une collectivité autochtone située à 160 km au nord-ouest de Yellowknife. Cette route reliera la collectivité, favorisera le développement économique et réduira les coûts de transport des biens et services à destination et en provenance de Wha Ti.

-    Vous avez probablement entendu parler du PPP qui a donné lieu à la construction du magnifique nouvel aéroport d’Iqaluit, lequel a ouvert ses portes cet été. Le projet comportait un ensemble d’avantages pour les Inuits; il fournissait un certain nombre d’emplois liés à la construction du bâtiment et des avantages permanents pour la collectivité. Selon l’entente, 60 % des employés doivent être des Inuits d’ici la fin du contrat.

-    Le Congrès des chefs des Premières Nations de l’Atlantique entend créer une seule autorité compétente en matière d’eau pour surveiller les installations d’approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées et les services destinés aux Premières Nations de l’Atlantique. Le Congrès souhaite obtenir l’infrastructure dans le cadre d’une approche groupée de PPP.

Ces exemples représentent des occasions à ne pas manquer pour le secteur des entreprises. Alors, nous reconnaissons que cet esprit d’innovation doit animer la mise en place des projets d’infrastructure dans les communautés autochtones. Et, plus significativement, nos partenaires autochtones voient le potentiel dans les projets spécifiques, ainsi que dans le besoin de créer la capacité pour les communautés elles-mêmes de participer activement dans ces projets.

Vous aurez appris de l’expérience d’Infrastructure Ontario, de Partnerships BC et d’autres entités que la création d’institutions intermédiaires est essentielle à l’appui de la participation des collectivités dans les projets de PPP.

Heureusement, nous comptons d’excellents leaders dans les collectivités autochtones qui voient ce potentiel et incitent à l’établissement d’institutions de soutien.

J’aimerais notamment parler de Manny Jules, qui est des nôtres aujourd’hui. Manny est le PDG de la Commission de la fiscalité des premières nations, une organisation qui renforce les capacités des collectivités des Premières Nations pour qu’elles adoptent des sources de revenus durables. Il collabore avec d’autres leaders autochtones afin de trouver des moyens d’amener des PPP et d’autres innovations financières dans le secteur des infrastructures des Premières Nations. Notre gouvernement est fier de soutenir son travail.

Le travail de la Commission, ainsi que du Conseil de gestion financière des Premières Nations et de l’Administration financière des Premières nations, jettent les bases sur lesquelles nous nous appuierons pour aller de l’avant.

Pas plus tard que la semaine dernière, l’Administration financière des Premières nations a procédé à la quatrième émission réussie d’obligations sur les marchés financiers et a recueilli 126 millions de dollars de fonds nouveaux qui profiteront aux collectivités autochtones. Je tiens à ajouter que la demande des investisseurs était le double de l’offre.

Dans la mesure où nous voyons des défis partout au pays, nous voyons aussi des occasions. J’espère que vous êtes conscient que vous pouvez jouer un rôle dans l’élimination des lacunes critiques en matière d’infrastructure.

Voici quelques mesures que vous pourriez prendre dès maintenant :
•    Vous renseigner sur les projets fructueux dans les collectivités autochtones.
•    Envisager la possibilité d’établir des partenariats mutuellement avantageux avec des collectivités autochtones : la création d’occasions pour vous, et la création d’emplois et d’une croissance économique pour les collectivités.
•    Envisager la mise en place de politiques pour promouvoir l’embauche d’employés autochtones dans vos sociétés.
•    Étudier de nouveaux modèles pour le financement, la conception, l’exploitation et l’entretien des infrastructures dans les collectivités autochtones.

S’il existe d’autres mesures que notre gouvernement pourrait prendre pour libérer le potentiel des PPP dans ce secteur, veuillez nous en informer. Nous continuerons de travailler étroitement avec Mark et son équipe au CCPPP afin de tirer profit de notre expertise.

Il y a plus de dix ans, j’ai entendu un discours de Bill Clinton. Certaines phrases de ce discours sont restées gravées dans mon esprit : « Plus j’avance en âge et plus je voyage, plus je réalise que l’intelligence, les compétences, les efforts et les rêves sont répartis uniformément parmi les humains, dans chaque pays, quelles que soient leur race, leur religion et leur culture. Par contre, les mécanismes qui donnent vie à ces choses ne sont pas répartis uniformément, pas plus que les occasions, les investissements et la capacité systématique qui établissent des liens entre l’intelligence, les compétences, les efforts et les rêves d’une personne et le portrait de la vie qui en émerge. »

Il s’agit là de la perception que notre nouveau ministère a de la réussite. Nous devons veiller à ce qu’un enfant inuit, métis ou des Premières Nation né au Canada en 2017 puisse grandir dans un pays qui favorise les occasions, les investissements et la capacité systématique de donner vie à ses rêves. Il doit avoir droit aux nécessités de base auxquelles tous les enfants canadiens ont droit, à savoir de l’eau potable, des aliments nutritifs, une école bien équipée, une maison solide, une famille et une culture qui l’appuieront jusqu’à ce qu’il soit prêt à déployer ses ailes, à occuper un emploi significatif et à contribuer à améliorer encore plus notre pays.

Je crois que vous pouvez nous aider à bâtir un tel avenir. Je vous remercie de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour apporter de l’espoir et de la justice à tout un chacun.

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