Combattre dans la jungle de béton : comprendre les défis de la guerre urbaine

par Sous-lieutenant Benjamin Phocas

Un obus d’un canon sans recul traverse à la vitesse de l’éclair une rue en ruine, s’enfonce dans le blindage latéral d’un BTR-80, puis explose dans une boule de feu.Note de bas de page 1  Un BTR-4 prend un virage à toute allure, balayant de ses projectiles une escouade d’infanterie prise à découvert, le carnage étant rapidement masqué par la fumée et la poussière soulevées par les décombres.Note de bas de page 2  Les soldats descendent une à une les marches d’une cage d’escalier alors que des projectiles frappent le mur juste au-dessus de leur tête.Note de bas de page 3  Il ne s’agit pas de scènes d’un film. Il s’agit de séquences de combats urbains en Ukraine. La guerre en cours en Ukraine et le conflit à Gaza, ainsi que les récents combats dans des villes du monde entier telles que Mossoul, Marawi et Shusha, soulignent la nécessité pour les forces militaires de comprendre davantage les défis de la guerre urbaine. 

Il est de plus en plus important de comprendre la guerre urbaine, car les villes sont des centres de pouvoir politique, économique, logistique, environnemental, militaire et social.Note de bas de page 4  En outre, des tendances qui s’entrecroisent démontrent l’importance grandissante de la guerre urbaine. Tout d’abord, l’urbanisation s’accroît à l’échelle mondiale, ce qui met en évidence le rôle central des villes qui ne cessent de grandir. La majorité de la population mondiale vivant désormais dans des centres urbains et des millions de personnes y affluant chaque année, les conflits continueront eux aussi à graviter autour du milieu urbain.Note de bas de page 5  Par exemple, en 2022, environ 80 % de la population de Taïwan vivaient dans des centres urbains.Note de bas de page 6  Ce nombre n’a fait qu’augmenter depuis. Alors que les tensions s’exacerbent autour des revendications territoriales, un simple coup d’œil sur une image satellite permet de voir les zones urbaines densément peuplées de Taïwan. Tout conflit majeur se déroulera vraisemblablement dans les rues, les différents acteurs se disputant le contrôle politique, basé au cœur de Taipei.Note de bas de page 7  Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres dans un monde où les zones et les régions menacées par des conflits s’urbanisent rapidement. Deuxièmement, comme l’affirme Anthony King, la prévalence de la guerre urbaine augmente en raison de la taille considérablement réduite des forces terrestres contemporaines par rapport aux forces armées du passé.Note de bas de page 8  Avec l’expansion des villes, les forces armées sont devenues plus petites, la létalité a augmenté et les tirs de précision sont devenus plus efficaces, de sorte que le combat se déplace, des vastes étendues de terres rurales, vers les rues des villes.Note de bas de page 9  Troisièmement, les progrès technologiques permettent à l’ennemi le plus faible d’opérer en milieu urbain en raison de l’avantage défensif qu’il en retire.Note de bas de page 10

La perspective de devoir s’engager dans un conflit de haute intensité dans un tel milieu est sinistre. Cependant, si l’on veut remporter la victoire sur l’ennemi, il n’y a pas d’autre voie possible. La guerre urbaine reste une forme de guerre exigeante qui ne peut être évitée ou subordonnée et qui nécessite une approche directe et résolue. Les forces armées occidentales sont relativement inexpérimentées dans les opérations urbaines en ce qui concerne la planification opérationnelle supérieure, les tactiques et le maintien en puissance, et tout adversaire potentiel futur pourrait exploiter cet écart et ce manque de connaissances. 

Dans le contexte actuel, il est difficile de prédire le succès des forces de l’OTAN sur un champ de bataille urbain, même si elles sont capables de dominer sur le plan du caractère professionnel des soldats, de la technologie et de la logistique. Les forces armées manquent de connaissances tactiques, opérationnelles et stratégiques si l’on compare leurs tactiques actuelles aux tactiques, techniques et procédures requises pour opérer efficacement dans le milieu urbain. Les grands centres d’entraînement ne reflètent pas le milieu urbain actuel; ils sont toujours le reflet des campagnes de l’Europe occidentale et du Moyen-Orient dans lesquelles les forces de l’OTAN ont opéré au cours des dernières décennies. 

La force interalliée doit saisir les nuances de la guerre urbaine afin de combler le manque de connaissances et de formation entre les opérations de combat à grande échelle et le champ de bataille urbain. En comprenant les particularités de la guerre urbaine, les forces peuvent être mieux préparées à affronter l’ennemi pendant les opérations urbaines. Dans le paysage complexe de la guerre contemporaine, la guerre urbaine reste relativement moins bien comprise, et parfois même sujette à des malentendus. Le présent article se penche sur les défis particuliers et exigeants posés par la guerre urbaine, non seulement en soulignant les facteurs qui la distinguent des autres formes de conflit, mais aussi en présentant une compréhension des défis auxquels sont confrontées les forces militaires modernes.  

LE MILIEU URBAIN

On peut affirmer que la guerre urbaine est très différente de toute autre forme de guerre parce que le milieu urbain a été construit et développé pendant des décennies, voire des siècles, pour accueillir la vie humaine et même les conflits. Il en résulte un niveau de complexité inégalé dans d’autres environnements opérationnels.Note de bas de page 11  Les particularités d’un milieu urbain créent des conditions extrêmement complexes pour les soldats et les planificateurs, soit un environnement qui soutient et habilite à la fois passivement et activement le défenseur et l’attaquant, tout en altérant simultanément chaque élément interarmes. 

Le mot « urbain » est un mot fourre-tout qui s’applique à une multitude de zones différentes. À première vue, il y a peu de similitudes entre les bidonvilles de Mumbai et les majestueux boulevards de l’ouest de Londres. Les villes couvrent un large spectre. Certaines, telles que Londres et Tokyo, sont très développées et contiennent des systèmes perfectionnés et hautement interconnectés qui assurent le fonctionnement de ce que David Kilcullen appelle « l’organisme ».Note de bas de page 12  Ces villes extrêmement « saines » sont dotées d’infrastructures et de systèmes de flux hautement fonctionnels. À l’autre extrémité du spectre, on trouve les « villes férales ».Note de bas de page 13  Ces villes dépourvues de toute forme de contrôle gouvernemental sont dans un état d’anarchie où des acteurs non étatiques détiennent une autorité informelle sur l’ensemble de la population ou sur une partie de celle-ci. Les paragraphes suivants expliquent certains des éléments à prendre en compte pour comprendre le milieu urbain :

Niveaux – Un milieu urbain comporte quatre niveaux physiques : l’espace aérien, la surface, la supersurface et la subsurface (la partie souterraine).Note de bas de page 14  Le niveau appelé surface est le plus facile à reconnaître, car il englobe les zones de la ville situées au niveau de la rue. Le terme « supersurface » désigne les structures qui s’étendent au-dessus du niveau de la surface, depuis les bâtiments jusqu’aux routes surélevées, en passant par les transports en commun, les lignes électriques, les châteaux d’eau et les structures de télécommunication. Dans les villes modernes, les bâtiments comprennent à la fois des structures résidentielles et des gratte-ciel imposants qui contribuent aux silhouettes emblématiques que nous associons aux paysages urbains modernes. Sous la structure de la supersurface se trouve la subsurface, qui comprend des tunnels pour les véhicules et les piétons, des réseaux de métro, des tunnels d’entretien, des caves, des zones de stockage, des clubs souterrains et des égouts. Les vastes réseaux souterrains sont souvent mal cartographiés au-delà des métros et des égouts, en particulier dans les villes historiques dont les tunnels remontent à plusieurs siècles.Note de bas de page 15  Il est intéressant de noter qu’en dépit de quelques différences majeures, des villes très différentes partagent certaines similitudes, notamment en ce qui concerne les niveaux de terrain urbain.

Flux – Au sein des quatre niveaux susmentionnés, il existe des flux.Note de bas de page 16  L’argent et le commerce entrent et sortent de la ville, la nourriture y entre, les déchets en sortent, et les humains se déplacent entre leur domicile, leur lieu de travail, leur épicerie et leurs activités de loisirs. Ces flux se produisent le long d’un réseau de lignes de communication majeures et mineures. Souvent, quelques lieux majeurs soutiennent l’essentiel de cette circulation. Certains ponts ou intersections peuvent devenir des lieux d’une importance cruciale en raison de leur emplacement par rapport aux flux. 

Régions urbaines – Les villes peuvent être subdivisées en secteurs, quartiers, arrondissements, voisinages et districts. Ces diverses zones peuvent être caractérisées par des bâtiments physiques, des infrastructures, une démographie et même des économies et des gouvernements considérablement différents. Les zones résidentielles sont généralement constituées de structures diverses, notamment des appartements ou des maisons individuelles, abritant une population importante, en particulier la nuit. En revanche, les zones commerciales connaissent des niveaux élevés d’activité humaine et de circulation pendant les jours ouvrables, et une occupation minimale la nuit. Les zones industrielles sont généralement dépourvues de vie résidentielle, mais contiennent des infrastructures essentielles à la survie de la ville. 

Au sein de ces secteurs, des caractéristiques plus complexes apparaissent et sont façonnées par les profils démographiques des résidents. Dans différents quartiers, en particulier là où le travail par quarts est courant, un appartement d’une chambre peut accueillir jusqu’à douze personnes, et la plupart d’entre elles dorment en milieu de journée. Dans des endroits comme le quartier chinois de New York, où le travail par quarts est courant et où de nombreux bâtiments inflammables datent des années 1890, un seul incendie peut faire un nombre disproportionné de victimes.Note de bas de page 17  Parallèlement, les quartiers financiers peuvent être construits avec des matériaux plus modernes et résistants aux flammes, et s’élever à des centaines de mètres dans le ciel. La grande diversité des paysages de la ville ajoute une couche de complexité supplémentaire au réseau déjà complexe de services civils, d’infrastructures et de fonctions vitales. 

La région urbaine peut également être influencée par des facteurs tels que la qualité de la gouvernance et de la sécurité, ainsi que l’ordre social. Par exemple, dans certaines villes, les structures de pouvoir informelles s’étendent souvent au-delà des canaux officiels du gouvernement.Note de bas de page 18  Ces structures de pouvoir informelles peuvent agir comme des gouvernements fantômes et entrer en conflit direct avec les autorités judiciaires. Les membres de gangs locaux et du crime organisé peuvent contrôler certaines zones et même attaquer toute personne qui pénètre sur « leur territoire » sans autorisation. Inversement, ces mêmes acteurs informels peuvent assurer la stabilité dans certains quartiers sans présence gouvernementale officielle, que ce soit pour des raisons d’intérêt personnel ou pour soutenir une force combattante. Les structures de pouvoir informelles peuvent avoir un effet considérable, positif ou négatif, sur le sentiment des résidents à l’égard des forces d’occupation. Ces facteurs influencent naturellement les sentiments du public et la dynamique générale d’une zone ou d’une région, façonnant ainsi l’environnement opérationnel. 

Emplacement des villes – Les villes se développent dans des zones facilement accessibles pour le commerce, principalement le long des grandes lignes de communication.Note de bas de page 19  Les grandes voies d’eau, en particulier, ont toujours été le lieu de développement des villes.Note de bas de page 20  Avec l’intensification du commerce mondial et les ports qui sont devenus des sources de richesse économique de plus en plus importantes, de plus en plus de villes se sont développées dans ce que l’on appelle la zone littorale, c’est-à-dire les zones côtières situées le long des lacs, des fleuves et des océans.Note de bas de page 21  Ce point est important pour deux raisons. Tout d’abord, l’économie de nombreuses villes repose essentiellement sur les plans d’eau.Note de bas de page 22  Deuxièmement, certaines villes sont situées dans des endroits extrêmement précaires du point de vue de l’environnement.Note de bas de page 23  Les plaines inondables, les basses terres, les marécages et les péninsules sont tous exposés au risque d’inondation lors d’ouragans, des moussons ou de tempêtes tropicales. Dans la région indo-pacifique en particulier, de nombreuses villes se trouvent au bord de la destruction sur des terrains dangereusement bas, comme l’île Maurice et les îles Salomon. Les planificateurs militaires doivent tenir compte non seulement du risque de conflits de haute intensité dans les villes, mais aussi de la probabilité croissante de participer à des missions humanitaires dans des zones urbaines densément peuplées touchées par des inondations. Bien que cet article se concentre sur les conflits de haute intensité, il est important que les planificateurs se souviennent que les villes et le milieu urbain peuvent nécessiter un engagement militaire dans divers types d’opérations. 

TERRAIN PHYSIQUE

Le terrain urbain ne se résume pas à des collines, des crêtes et des vallées. Il englobe de vastes paysages urbains composés de bâtiments, de tunnels, de rues et de ponts construits avec des millions de tonnes de béton, de bois et d’acier. De la plus petite masure du bidonville le plus sinistre au gratte-ciel le plus brillant sur la colline, ces structures limitent les manœuvres, créent des zones en angle mort et permettent une couverture et une dissimulation. Les fenêtres offrent des positions de tir infinies pour les tireurs d’élite, les mitrailleurs et les équipes antichars. Même si ces positions de combat peuvent être identifiées, les matériaux de construction modernes réduisent considérablement les effets des systèmes de tir direct, protégeant ainsi l’ennemi. Les bâtiments peuvent être modifiés pour permettre aux défenseurs d’agir. Par exemple, à Mossoul, les combattants de l’État islamique en Iraq et en Syrie (EIIS) ont intentionnellement détruit des bâtiments pour transformer les sous-sols en bunkers impénétrables et pour bloquer des routes.Note de bas de page 24  En revanche, les bâtiments peuvent également fixer l’orientation des défenseurs et restreindre leur champ de vision. Le contexte est important dans de telles situations.

Mouvement et manœuvre – Les forces militaires sur un champ de bataille urbain sont confrontées à un défi déterminant, puisque la liberté de mouvement et de manœuvre devient restreinte. Dans les centres urbains, il y a une multitude de routes, certaines en rangées ordonnées, d’autres organisées à l’image d’un gribouillis chaotique sur une carte. Ces routes sont délimitées de part et d’autre par des bâtiments, des rivières ou d’autres obstacles et canalisent et dirigent naturellement le flux de la circulation humaine. Cette configuration crée des zones d’abattage naturelles pour toute infanterie embarquée ou débarquée et pour tout élément de blindé tentant de manœuvrer dans la zone. Ces routes étroites servent également à compartimenter les forces, en créant des barrières physiques entre des unités adjacentes, les empêchant de se soutenir ou parfois même de communiquer entre elles. Les unités individuelles peuvent facilement être isolées, ce qui crée un dangereux potentiel de défaite dans les détails, lorsque des éléments individuels sont anéantis par un ennemi bien camouflé, tapi dans l’ombre des bâtiments. Cette compartimentation se produit à de multiples échelons, du bataillon jusqu’au niveau de l’équipe, ce qui rend le besoin d’un caporal stratégique encore plus pressant.Note de bas de page 25  Les chefs de section et de peloton doivent être en mesure d’exécuter des missions complexes conformément à l’objectif du commandant et à la mission stratégique globale, sans pouvoir communiquer avec les commandements supérieurs.Note de bas de page 26  

Les blindés et l’infanterie entretiennent une relation symbiotique dans le milieu urbain pour la protection mutuelle et la surveillance, mais les centres urbains deviennent de plus en plus complexes pour les opérations des forces blindées. Par exemple, sans un soutien adéquat de l’infanterie, de l’artillerie et du génie, les forces blindées sont extrêmement vulnérables dans ce milieu, car les bâtiments constituent des positions aériennes parfaites pour les équipes antichars, qui peuvent ainsi cibler le mince blindage supérieur des véhicules. Les véhicules tels que le VBL 6.0 (la version canadienne du Stryker de l’armée américaine) n’ont pas la puissance de feu nécessaire pour supprimer et détruire efficacement les cibles renforcées et n’ont pas le blindage nécessaire pour arrêter les missiles guidés antichars, les roquettes et même les balles d’un calibre supérieur à 14,5 mm,Note de bas de page 27  ce qui signifie que les manœuvres interarmes devront s’appuyer principalement sur les chars, qui nécessitent un train logistique plus lourd et ne disposent pas d’une capacité de débarquement organique pour les soutenir. 

Sur un champ de bataille urbain, les véhicules et l’infanterie débarquée comptent sur le génie pour mener des opérations de mobilité et de contre-mobilité afin de permettre leurs manœuvres. Il s’agit notamment de remplacer les ponts détruits par des ponts provisoires, d’ouvrir et de nettoyer les champs de mines, d’éliminer les dispositifs explosifs de circonstance (IED), et d’utiliser des bouteurs pour dégager ou déblayer les décombres, afin d’ouvrir les lignes de communication. Les sapeurs de combat se retrouvent ainsi en première ligne, ce qui accroît considérablement les risques pour ces unités précieuses et limitées. Derrière les lignes de front, les unités du génie construction sont chargées d’aider à reconstruire les infrastructures détruites, en particulier les lignes de communication, y compris les routes et les ponts qui ont été endommagés, en ruines ou entièrement détruits. 

Incendies – Les défis posés par les villes modernes, qui ne cessent de s’étendre verticalement, posent des problèmes aux composantes de soutien d’une force interarmes. Les villes où les bâtiments sont hauts et disposés en quadrillé créent de longs canyons urbains. Souvent, ces canyons sont trop abrupts pour permettre aux canons et à l’artillerie de roquettes à trajectoire peu profonde de viser avec précision des entités dans la rue sans risquer de causer des dommages collatéraux aux bâtiments situés le long de la trajectoire du projectile.Note de bas de page 28  Cette contrainte oblige les éléments de manœuvre à s’appuyer principalement sur des systèmes de tir indirect à angle élevé, tels que les mortiers, ou sur des munitions à guidage de précision coûteuses, telles que l’obus « Excalibur », qui peut être tiré au-dessus des bâtiments dans des rues étroites sans toucher une structure.Note de bas de page 29  Le terrain urbain nuit aussi considérablement aux capacités d’appui aérien rapproché. Entre les bâtiments élevés, les couloirs aériens pour les aéronefs d’appui rapproché sont étroits, ce qui crée des zones d’abattage aérien pour les armes antiaériennes tirées à l’épaule et bien positionnées. Les appareils à voilure tournante se déplaçant à basse altitude doivent naviguer dans des canyons urbains parsemés de câbles, de fils et d’autres détritus civils qui peuvent faciliter l’écrasement d’un hélicoptère. Les distances d’engagement dans une guerre urbaine sont historiquement inférieures à 50 mètres, ce qui laisse peu de place à un hélicoptère de combat Apache ou à un obus de mortier de 81 mm.Note de bas de page 30  Même la visibilité des forces terrestres est considérablement limitée par les bâtiments, ce qui crée un risque extrême de fratricide et de dommages collatéraux. 

Structures physiques – Les structures physiques des milieux urbains, et en particulier les bâtiments, présentent une grande diversité. Certains sont construits dans un esprit de luxe et de style caractérisés par des fenêtres en verre qui se transforment en une pluie d’éclats à la première explosion dans un rayon de cinq îlots. D’autres bâtiments comprennent des centres municipaux et financiers robustes, construits avec du béton et de l’acier. Notamment, même une maçonnerie et des planches de mauvaise qualité peuvent dévier, faire éclater ou arrêter complètement les systèmes d’armement de tir direct. Les bâtiments les plus récents et les plus modernes sont équipés de mesures de sécurité avancées conçues pour les protéger contre les criminels, et peuvent devenir des obstacles dangereux ou des mesures utiles dans un combat urbain. Ces dispositifs peuvent comprendre des portes et des murs métalliques renforcés, des systèmes de caméras perfectionnés, des écrans et des barrières dans de nombreux bâtiments. Pour un défenseur compétent, ils peuvent facilement être incorporés dans la défense d’un bâtiment. Compte tenu de leur sécurité interne, ces bâtiments peuvent devenir des points forts pour une défense en profondeur coordonnée. Plusieurs cibles renforcées choisies stratégiquement, équipées d’une grande puissance de feu et parsemées d’obstacles, peuvent arrêter un attaquant dans son élan. Par exemple, lors de la bataille de Stalingrad (du 23 août 1942 au 2 février 1943), des soldats soviétiques ont résisté pendant plus de 60 jours à l’intérieur d’un seul bâtiment fortifié.Note de bas de page 31    Des trous de manœuvre internes peuvent être creusés dans les murs, facilitant les déplacements d’une pièce à l’autre, et des tunnels souterrains permettent le stockage d’armes et de caches de munitions, un réapprovisionnement efficace et la rotation des soldats épuisés. L’État islamique a largement utilisé ces deux tactiques lors de la bataille de Mossoul en Iraq (du 16 octobre 2016 au 20 juillet 2017), s’appuyant sur des tunnels creusés entre les sous-sols pour manœuvrer sous des îlots entiers sans être repéré par les systèmes de surveillance aéroportés de la coalition.Note de bas de page 32  Dans la bande de Gaza, le Hamas a utilisé le réseau de tunnels souterrains à des fins similaires.  

Subsurface (partie souterraine) – L’aspect souterrain de la guerre urbaine est une tête de l’hydre entièrement indépendante qui mérite ses propres livres et articles. En fait, l’armée américaine a consacré une publication doctrinale distincte à ce sujet.Note de bas de page 33  Les opérations souterraines sont extrêmement complexes et dangereuses. La coordination des communications par radiofréquence devient pratiquement impossible. Les combats sont condensés dans le temps et dans l’espace, dans des couloirs sombres qui peuvent rapidement se remplir de gaz toxiques et de surpression contre lesquels les masques à gaz modernes n’offrent aucune protection.Note de bas de page 34  Les réseaux souterrains constituent de vastes lignes de communication protégées qui s’étendent bien au-delà des limites des villes et relient différents bâtiments entre eux. Les tunnels sont depuis longtemps utilisés pour déjouer les regards indiscrets. Les histoires des rats des tunnels américains pendant la guerre du Viêt Nam (1959-1975) soulignent les horreurs de la guerre souterraine, mais à une échelle bien moindre que celle de la violence qui se déroule dans les profondeurs des réseaux souterrains modernes, bien plus complexes. Avec les systèmes aériens modernes sans équipage et les plateformes de renseignement, de surveillance et de reconnaissance, l’importance des tunnels s’accroît à mesure que les ennemis tentent d’échapper à l’appareil du renseignement de l’OTAN. Avec une bonne connaissance des tunnels, un défenseur peut apparaître à l’endroit exact où un attaquant espérait qu’il n’apparaisse pas. Il s’agit simplement d’une question de temps et de préparation, ce qui rend de plus en plus impératif pour les forces occidentales de penser comme l’ennemi et de relever les défis en conséquence. 

Communication – À tous les niveaux (surface, subsurface et supersurface), les communications par radiofréquences sont dégradées en milieu urbain. Les tonnes de béton et d’acier agissent comme des barrières physiques pour la ligne de visibilité et les communications par satellite. Les villes sont remplies d’émetteurs, de récepteurs et de divers types de dispositifs électroniques basés sur les émissions. Les ondes seront ainsi encombrées, ce qui créera des signaux parasites, des brouillages et d’autres types de problèmes. Les bâtiments en béton armé agissent comme des cages de Faraday, empêchant les communications radio à l’intérieur. Avec l’ajout de systèmes de guerre électronique modernes, les communications radio sont encore plus brouillées, suivies et dégradées.Note de bas de page 35  Les canyons urbains peuvent empêcher les unités d’utiliser leurs systèmes de communication tactique pour communiquer avec leurs camarades situés à quelques rues.Note de bas de page 36  L’encombrement électromagnétique complique davantage la situation.Note de bas de page 37  La confluence de ces défis souligne la nécessité d’un commandement de mission qui permet aux chefs subalternes de prendre l’initiative dans le cadre de l’objectif du commandant et réduit le besoin d’être en communication constante avec la chaîne de commandement et d’obtenir des conseils réguliers. 

Logistique – Un conflit de haute intensité dans une ville entraîne inévitablement la destruction d’infrastructures essentielles, ce qui a des incidences sur la logistique. Les incidences sont particulièrement importantes dans les centres urbains très développés, où des millions de personnes dépendent d’un nombre limité d’usines centrales de traitement de l’eau pour s’hydrater, et de voies d’approvisionnement extérieures pour se nourrir, étant donné l’absence de production alimentaire dans la ville. Lors d’un conflit, l’artillerie, les missiles et même les munitions à tir direct peuvent endommager et détruire très rapidement les infrastructures essentielles. Les munitions modernes peuvent détruire les principales voies d’approvisionnement et sectionner les conduites d’eau souterraines, privant ainsi les populations d’un accès à la nourriture et à l’eau potable. Le milieu urbain est également éprouvant pour les soldats. Les convois logistiques sont contraints d’essayer de traverser des villes dont les routes sont endommagées ou bloquées. Le ravitaillement devra souvent être transporté manuellement jusqu’à la ligne de front des troupes en utilisant uniquement du personnel, qui devra transporter de lourdes caisses de munitions, de nourriture et d’eau, potentiellement sur des kilomètres, dans de hauts bâtiments ou dans des espaces souterrains. Il va sans dire que ces activités mettent à rude épreuve l’endurance physique des soldats. Les combats urbains devraient consommer quatre fois plus de munitions et deux fois et demie plus de rations et d’eau que les combats ruraux.Note de bas de page 38

De même, les victimes, dont le nombre attendu dans les combats urbains devrait être de trois à six fois plus élevé, ne peuvent pas être évacuées par ambulance. Elles doivent être transportées sur des brancards, ce qui fait peser le fardeau sur des muscles épuisés et oblige l’équipe de soutien médical au combat à prolonger ses soins bien au-delà de l’heure critique traditionnelle.Note de bas de page 39  Compte tenu des dangers liés aux systèmes de défense aérienne faciles à transporter, des couloirs de vol étroits et de l’espace minimal pour atterrir, se réapprovisionner et procéder à des évacuations médicales, il est également impossible de se fier entièrement aux hélicoptères. Les pertes qui surviennent dans les profondeurs souterraines ou dans les étages élevés d’un bâtiment doivent d’abord être transportées au niveau de la rue, alors que le temps précieux nécessaire pour leur sauver la vie est en train de s’écouler. Le terrain urbain augmente considérablement le risque que les victimes succombent à leurs blessures avant même d’atteindre une ambulance, et encore moins une unité chirurgicale avancée. 

En outre, les lignes de communication entre les lignes avancées et les échelons de soutien et de commandement des divisions, des brigades et des bataillons devront être maintenues et sécurisées par des unités de la police militaire (PM). Des camps pour les prisonniers de guerre ennemis et les personnes déplacées à l’intérieur du pays devront être établis, et le traitement d’un nombre massif de civils peut potentiellement submerger les unités individuelles de la PM attachées aux brigades de manœuvre. 

Chimique, biologique, radiologique et nucléaire (CBRN) – Les opérations urbaines peuvent être confrontées à des menaces CBRN subtiles mais périlleuses, aux conséquences mortelles. Les villes très développées disposent généralement de systèmes stables d’élimination des déchets afin d’éviter l’accumulation de déchets humains. Les villes sous-développées et férales en sont souvent totalement dépourvues. En cas de conflit de haute intensité, les systèmes d’élimination des déchets existants sont perturbés. Par conséquent, les déchets humains commencent à s’accumuler en plus grande quantité au fur et à mesure que les combats se poursuivent.Note de bas de page 40  Les déchets, les fluides corporels et les cadavres en décomposition abritent des agents pathogènes dangereux qui peuvent avoir des répercussions considérables sur la puissance de combat. Les unités des affaires mortuaires chargées des services funéraires devraient être submergées par le volume, y compris de nombreux corps piégés ou enterrés sous des décombres ou dans des positions de combat profondes. Aucune disposition n’est prévue pour le nettoyage en masse des déchets humains, si ce n’est des sacs à déchets individuels qui seront jetés et abandonnés dans la ville. À un niveau supérieur, les villes dotées de zones industrielles et commerciales ont tendance à abriter des produits chimiques industriels dangereux. Toute fuite de ces produits chimiques, qu’il s’agisse d’un feu errant ou d’une action délibérée, peut tuer ou mutiler quiconque y est confrontée. De même, toute usine radiologique ou centrale nucléaire, telle que la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine, est une cible de très grande valeur qui présente des risques inimaginables.Note de bas de page 41  

TERRAIN HUMAIN

Le terrain humain d’une ville rend la guerre urbaine de plus en plus intimidante et exigeante. Les villes sont peuplées de citoyens, un terme dont la racine latine est « civitas », qui signifie « ville ».Note de bas de page 42  Une ville existe fondamentalement pour les personnes qui l’occupent, les milliers, voire les millions de personnes qui composent la zone urbaine grouillante où elles vivent et travaillent quotidiennement. En cas de conflit de haute intensité dans une ville, les habitants ne disparaissent pas par magie comme dans le jeu vidéo Call of Duty.Note de bas de page 43

Avant d’entamer les opérations, les forces militaires doivent déployer des efforts considérables pour évacuer les populations civiles. Traditionnellement, de nombreuses personnes choisissent de fuir, inondant les lignes de communication et créant des embouteillages à travers la ville, et environ 10 %, voire plus, refusent de partir et restent chez eux ou dans des abris antiatomiques désignés ou improvisés.Note de bas de page 44  Par conséquent, toute opération offensive doit prendre en compte le risque accru de lourdes pertes civiles. Les plans de tir, l’appui aérien rapproché et même les manœuvres maison par maison doivent toujours tenir compte des pertes civiles, et les tactiques doivent être adaptées pour protéger les non-combattants au milieu de la tempête meurtrière. En cas de combat urbain de haute intensité, les civils seront malheureusement des victimes, quels que soient les efforts déployés par les forces pour atténuer les dommages collatéraux. Les stratèges et les planificateurs doivent élaborer des plans proactifs sur la manière de traiter les civils avant, pendant et après le combat urbain.

De même, et comme on l’a vu en Ukraine, les défenseurs doivent eux aussi consacrer des ressources précieuses à la protection, à l’évacuation et au contrôle de la population civile.Note de bas de page 45  La guerre russo-ukrainienne, la guerre civile syrienne et le conflit à Gaza ont montré les répercussions internationales majeures que peuvent vivre les réfugiés. Un afflux de réfugiés traversant les frontières internationales pour échapper à des zones de conflit ou à une crise humanitaire exerce une pression sur de multiples nations et gouvernements, créant plus de chaos, plus d’instabilité et une crise supplémentaire pour la communauté internationale.Note de bas de page 46  Pour des raisons valables, une crise de réfugiés ou une crise humanitaire attire l’attention de la communauté internationale et suscite des appels à l’action, en particulier dans les pays voisins qui ne sont pas déjà directement impliqués dans le conflit.Note de bas de page 47  Cette crise a pour effet d’accroître l’intensité du conflit, car davantage de ressources externes sont impliquées, ce qui augmente son ampleur. 

Cependant, les défenseurs qui combattent dans leur ville natale bénéficient souvent d’une occasion unique : la mobilisation de la population civile. Par exemple, en Ukraine, la mobilisation des civils n’a peut-être pas permis de constituer une réserve importante de troupes de combat, mais elle a libéré des soldats expérimentés des tâches de l’échelon arrière. Ils ont ainsi pu s’engager activement dans le combat, tandis que des volontaires civils nouvellement recrutés ont assumé des tâches banales qui avaient auparavant détourné les troupes prêtes au combat.Note de bas de page 48  Le soutien populaire est un facteur majeur du terrain humain. L’effort pour « gagner les cœurs et les esprits » ne se limite pas à la contre-insurrection, car la population civile peut encore jouer un rôle crucial dans les conflits de haute intensité.Note de bas de page 49  Les civils peuvent choisir leur camp en fonction de celui qu’ils considèrent comme la force amie, de celui qui représente le mieux leurs intérêts ou de celui qui s’aligne sur leurs tendances politiques ou idéologiques. Ce soutien ne se manifeste pas toujours sous la forme de grands groupes de volontaires civils descendant dans la rue pour mener des actions de guérilla, comme le montrent les films. Leur rôle peut être aussi simple que d’avertir un convoi de la présence d’un IED sur une route ou de partager une vidéo montrant des troupes ennemies dans la région. De tels actes de soutien peuvent faire des ravages au sein d’une force ennemie. En d’autres mots, quel que soit le camp qui remporte le soutien populaire, il dispose d’un avantage certain dans l’immense mer du renseignement humain potentiel.Note de bas de page 50   Dans les cas extrêmes, lorsque la population civile prend les armes dans le cadre d’une force de résistance populaire, ces forces irrégulières peuvent servir d’auxiliaires, d’éclaireurs ou de forces partenaires pour le camp choisi, ajoutant une couche hybride aux combats plus conventionnels entre forces conventionnelles.

Pendant que le combat fait rage, des civils qui se trouvent à proximité assureront une surveillance et des enregistrements constants. Les événements en Ukraine confirment que les vidéos en ligne peuvent avoir des effets considérables.Note de bas de page 51  Dans un conflit urbain de haute intensité, les soldats sur le terrain restent sous le regard du monde entier. La sécurité opérationnelle est mise à rude épreuve et peut être mise en échec par des forces de contre-ingérence agissant dans le cyberdomaine.Note de bas de page 52  En outre, tout au long de la guerre en Ukraine, des séquences vidéo tournées sur le terrain ont été utilisées pour susciter des sentiments, favoriser le recrutement et l’acheminement de l’aide, et ont même servi de preuves dans des procès pour crimes de guerre.Note de bas de page 53  La manière dont les forces militaires aux échelons les plus bas se conduisent peut avoir un impact mondial, ainsi que des implications extrêmes pour les conflits au niveau stratégique, ce qui renforce la nécessité d’un caporal ou d'une caporale stratégique. 

D’un certain point de vue, il pourrait sembler que la prise en charge des défis posés par les réfugiés civils n’est pas une responsabilité relevant directement des forces de manœuvre. Toutefois, lorsque les villes connaissent un exode massif, les branches de soutien peuvent être débordées en essayant de traiter et de fournir de l’aide à des millions de personnes. Les soldats de toutes les spécialités devront mener des missions humanitaires d’une certaine nature, qu’il s’agisse d’unités d’infanterie détournées pour sauver et évacuer des civils d’une zone de combat, de la police militaire qui traite et contrôle les personnes déplacées, d’unités médicales qui prodiguent des soins à d’innombrables blessés et malades, ou d’unités logistiques qui transportent et distribuent des tonnes de rations humanitaires pour éviter que des millions de personnes déplacées ne souffrent de la famine. 

La forte densité de civils dans les zones urbaines augmente considérablement le risque de crimes de guerre contre les civils. Bien que la plupart des forces de l’OTAN soient tenues de respecter des normes de conduite extrêmement élevées conformément au droit humanitaire international, il existe toujours un risque qu’un petit groupe de personnes profite de la situation.Note de bas de page 54  De même, l’ennemi n’a pas toujours de scrupules à faire preuve de brutalité à l’égard de la population civile. Des agressions sexuelles, des meurtres et des tortures sont susceptibles de se produire, avec un risque de génocide, de nettoyage ethnique ou de crimes contre l’humanité. La découverte continue de fosses communes dans l’Ukraine occupée témoigne d’un comportement hostile à l’égard des civils.Note de bas de page 55

CONCLUSION

La tendance mondiale à l’urbanisation, les progrès technologiques, la réduction de la taille des forces terrestres et l’efficacité de la puissance de feu de précision sont autant d’éléments qui font que les combats futurs seront probablement de nature essentiellement urbaine. Les défis et les dangers associés aux opérations de  ombat en milieu urbain sont extrêmement redoutables et constituent un formidable défi pour toute force militaire, mais plus particulièrement pour les forces armées occidentales, compte tenu de leur expérience relativement limitée du champ de bataille urbain. Ces changements dans la conduite de la guerre exigent une plus grande attention et une adaptation proactive de la part des Forces armées canadiennes et de leurs alliés de l’OTAN. Parce que la connaissance est l’outil le plus puissant pour naviguer dans la guerre urbaine, le présent article a analysé les complexités du milieu urbain, en se concentrant particulièrement sur le terrain physique et humain, et a mis en lumière les exigences uniques qu’il impose aux soldats, marins et aviateurs d’aujourd’hui et de demain. Au-delà de la violence pure et simple de l’action, la réussite des efforts militaires en milieu urbain nécessite une planification et une exécution stratégiques menées par des chefs compétents et bien informés. L’ignorance des défis ardus du champ de bataille urbain met en danger la vie de nos soldats, marins et aviateurs : un prix inacceptable pour l’incompétence. Pour que nos forces armées puissent faire face à la complexité de la situation et remporter le prochain combat urbain, il faut commencer par reconnaître le défi, relever les lacunes dans le cadre des préparatifs actuels et y remédier efficacement.  

À PROPOS DE L’AUTEUR

Le sous-lieutenant Ben Phocas est diplômé de l’United States Military Academy, où il s'est spécialisé en défense et en études stratégiques. Il a effectué un stage au National Center for Urban Operations et a obtenu sa commission en tant qu'officier des blindés, en mai 2024.

Cet article a été publié pour la première fois dans l’édition d’octobre 2024 du Journal de l’Armée Canadienne (21-1).

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