Articles d'intérêt - Mise a jour: Decision cour federale affaire Smart

par Josh Brull, avocat
septembre 2008

Le 11 août 2008, la Cour fédérale du Canada (Cour) a rendu publique sa décision dans l'affaire Smart c. Procureur général du Canada (2008 FC 936). Cette affaire constitue la décision la plus récente en matière de discipline rendue par la Cour en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (Loi).

En mai 2002, la Gendarmerie a reçu une plainte selon laquelle le gendarme Smart avait commis des actes répréhensibles. On reprochait notamment au gendarme d'avoir utilisé les systèmes d'information de la police de façon inappropriée, et d'avoir divulgué de l'information confidentielle à l'automne 2000. La Gendarmerie a tenu une audience en juillet 2003. L'officière compétente (OC) a indiqué qu'elle n'avait pris connaissance de l'identité et des infractions alléguées du gendarme Smart qu'en avril 2003. Elle a présenté, à cet égard, un certificat mentionné au paragraphe 43(9) de la Loi.

Le gendarme Smart a demandé à faire annuler l'avis d'audience. Il a affirmé que l'OC n'avait pas respecté le délai prescrit pour convoquer l'audience en vertu du paragraphe 43(8) de la Loi. Ce paragraphe prévoit qu'une audience ne peut être convoquée « un an après que l'infraction et l'identité du membre ont été portées à la connaissance de l'officier compétent ». Le gendarme Smart a également demandé un sursis en raison d'un abus de procédure causé par le retard.

Le comité d'arbitrage a annulé les allégations. Selon lui, l'OC « aurait dû être au courant » des actes répréhensibles du gendarme Smart en mai 2002. Il a donc maintenu que le délai d'un an stipulé au paragraphe 43(8) avait expiré en juillet 2003.Le comité d'arbitrage a également accordé un sursis en raison de « l'abus des délais de prescription ». L'OC a interjeté appel.

Le Comité externe s'est dit en désaccord avec le comité d'arbitrage. Il a conclu qu'en l'absence d'une preuve contraire, le certificat de l'OC démontrait qu'elle avait pris connaissance de l'identité et des infractions alléguées du gendarme Smart en avril 2003. Le Comité externe a expliqué que la procédure disciplinaire n'ayant débuté que trois mois plus tard, le délai d'un an prévu au paragraphe 43(8) de la Loi avait été respecté. Il a également conclu qu'il n'y avait pas eu de retard abusif. À cet égard, il a appliqué les critères établis par la Cour suprême du Canada et a conclu que le droit du gendarme Smart à une audience équitable n'avait pas été compromise car il n'avait pas prouvé que le retard était inacceptable au point d'être oppressif et de vicier les procédures en cause.

Le Comité externe a recommandé au commissaire de la GRC d'accueillir l'appel de l'OC. Il a également recommandé le renvoi de l'affaire à un arbitre.

Cependant la commissaire intérimaire avait été impliquée dans le dossier. Elle s'est donc récusée des procédures et l'affaire a été renvoyée à un commissaire adjoint.

Le commissaire adjoint s'est dit d'accord avec le Comité externe. Il a accueilli l'appel de l'OC. Il a conclu que l'audience disciplinaire avait été convoquée à l'intérieur du délai d'un an et qu'il n'y avait pas eu d'abus de procédures. Il a demandé la tenue d'une autre audience.

Le gendarme Smart a demandé la révision judiciaire de la décision. Il a soutenu que le commissaire adjoint avait mal interprété la question du délai aux termes du paragraphe 43(8) et avait eu tort de conclure qu'il n'y avait pas eu d'abus de procédures.

La Cour a rejeté la demande du gendarme Smart et a maintenu la décision du commissaire adjoint.

La Cour a maintenu que le commissaire adjoint avait correctement interprété la question du délai aux termes du paragraphe 43(8) de la Loi. Selon la Cour, le délai expirait un an après que l'identité et les infractions d'un membre « étaient portées à la connaissance » de l'officier compétent, et non un an après qu'elles « auraient dû » être connues. Elle a expliqué que le degré de connaissance nécessaire pour enclencher la période de prescription vise uniquement l'officier compétent, puisque seul l'officier compétent peut entamer des procédures disciplinaires officielles. La Cour a conclu que l'officière compétente avait respecté le délai prescrit, car elle a convoqué une audience moins d'un an après avoir été informée de l'identité et des actes répréhensibles allégués du gendarme Smart.

La Cour a également estimé que la conclusion du commissaire adjoint relativement au retard était raisonnable. Elle a conclu que le retard n'était « pas excessif » étant donné que la période écoulée entre la réception de la plainte et le début des procédures n'a été que d'environ 14 mois. Selon elle, la Gendarmerie n'a pas agi de mauvaise foi. Elle a également souligné que la capacité du gendarme Smart de se défendre n'a pas été compromise.

Enfin, la Cour a souligné que le comité d'arbitrage ne disposait pas encore de l'analyse récente effectuée par la Cour d'appel fédérale (CAF) dans l'affaire Thériault c. Canada, [2006] CAF 61. Dans cette décision, la CAF a exprimé le même principe clé que la Cour a appliqué dans le cas du gendarme Smart, c'est-à-dire qu'un officier compétent acquiert la connaissance dont il est question au paragraphe 43(8) lorsqu'il possède des renseignements crédibles et convaincants quand à l'identité et aux actes répréhensibles allégués d'un membre.

La Cour a renvoyé l'affaire au comité d'arbitrage afin qu'il rende une décision sur le fond.

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