C-006 - Décision d’une autorité disciplinaire
L'appelant, qui n'était pas de service et avait consommé de l'alcool, a demandé à entrer dans une boîte de nuit en montrant son insigne de la GRC et en prétextant qu'il effectuait une filature. Il a aussi déclaré qu'il portait une arme à feu, ce qui était faux. Un gérant de la boîte de nuit l'a laissé entrer; toutefois, préoccupé par la situation, le gérant a composé le 911. Peu après, alors que l'appelant quittait l'établissement, le gérant lui a demandé de parler à un répartiteur du service de police avec qui il était en ligne sur son téléphone cellulaire. L'appelant a dit au répartiteur qu'il effectuait une filature et qu'il quittait la boîte de nuit. Alors qu'il revenait à son hôtel à pied, l'appelant a été abordé par deux agents du service de police local qui répondaient à l'appel. Il a adopté une attitude provocante et peu coopérative à leur égard. Après un certain temps, les deux policiers et leur superviseur l'ont accompagné à sa chambre d'hôtel, où ils se sont assurés que son arme à feu était placée en lieu sûr.
Deux allégations ont été formulées contre l'appelant à la suite de ces faits. Lors d'une rencontre disciplinaire avec l'intimé, l'appelant a reconnu la véracité de l'allégation no 1 selon laquelle il avait contrevenu à l'article 3.2 du code de déontologie en usant de son autorité en tant que policier pour entrer dans la boîte de nuit. L'appelant a contesté l'allégation no 2 voulant qu'il ait été agressif et belliqueux envers les agents du service de police local et qu'il ait donc adopté une conduite déshonorante en contravention de l'article 7.1 du code de déontologie. L'appelant a présenté une argumentation écrite à l'intimé dans laquelle il soutenait qu'il n'avait pas adopté un comportement belliqueux ou agressif, contrairement à ce qui était énoncé dans l'allégation no 2. À la suite de la rencontre disciplinaire, l'intimé a présenté un rapport de décision dans lequel il a imposé une pénalité financière équivalente à trois jours de solde relativement à l'allégation no 1. L'intimé a déclaré que l'appelant s'était mal comporté envers les agents du service de police local et il a conclu que l'allégation no 2 avait été établie. Outre certaines autres mesures, il a imposé une pénalité financière équivalente à sept jours de solde. L'appelant a interjeté appel de la conclusion et de la pénalité financière ayant été imposée relativement à l'allégation no 2.
Conclusions du CEE
L'intimé n'a pas traité de la question de savoir si la preuve permettait de conclure que l'appelant avait adopté un comportement belliqueux et agressif comme il était indiqué dans l'allégation no 2. Par ailleurs, l'intimé n'a rendu aucune conclusion précise dans ses motifs l'ayant amené à conclure qu'il y avait eu conduite déshonorante au sens de l'article 7.1 du code de déontologie. Les motifs de l'intimé n'avaient pas à être très détaillés, mais ils devaient comprendre des indications générales sur la façon dont l'allégation de comportement belliqueux et agressif, qui allait à l'encontre de l'article 7.1, avait été formulée à la lumière des éléments de preuve. L'argumentation de l'appelant soulevait plusieurs motifs pour lesquels le comportement de l'appelant ne pouvait être considéré comme belliqueux ou agressif. L'intimé a commis des omissions déterminantes en ne rendant pas de conclusion à l'égard de ces éléments précis dans les motifs de sa décision et en ne présentant aucune analyse sur le comportement de l'appelant par rapport à l'article 7.1 du code de déontologie ou à un critère de conduite déshonorante, omissions ayant eu pour effet de rendre sa décision manifestement déraisonnable.
Le CEE s'est penché sur la question de savoir si le dossier permettait de conclure que l'appelant s'était montré soit belliqueux, soit agressif, puisqu'il n'était pas nécessaire d'établir chacun des éléments pour prouver l'allégation. Les éléments de preuve ne permettaient pas de conclure que l'appelant s'était montré belliqueux, mais ils permettaient d'établir qu'il avait été agressif. Les définitions du verbe « agresser » désignent un comportement provocant et récalcitrant, et le dossier contient des éléments de preuve montrant que l'appelant a adopté une attitude provocante envers les agents du service de police local. Au début, il a refusé de fournir des renseignements personnels et ce n'est qu'après plusieurs demandes en ce sens qu'il a obtempéré; il a refusé de parler aux agents du service de police local de grade inférieur; il a demandé la présence d'un superviseur; et il s'est montré récalcitrant. Le CEE a également conclu que le comportement agressif de l'appelant constituait une conduite déshonorante au sens de l'article 7.1 du code de déontologie. Le CEE considérait qu'un citoyen raisonnable, qui serait au fait du manque de collaboration et du type de comportement de l'appelant, conclurait vraisemblablement que l'appelant n'avait pas adopté une attitude digne d'un membre de la GRC lors de ses échanges avec les agents du service de police local.
La mesure disciplinaire imposée relativement à l'allégation no 2, soit une pénalité financière équivalente à sept jours de solde, tenait compte des facteurs aggravants appropriés, parmi lesquels figuraient un manque d'intégrité et un manque de respect envers des agents d'un autre service de police ainsi qu'une mesure disciplinaire simple imposée auparavant pour un comportement semblable. La mesure disciplinaire imposée à l'appelant, même si elle comptait parmi les sanctions les plus sévères à appliquer dans des cas d'inconduites semblables, n'était pas manifestement disproportionnée par rapport aux mesures disciplinaires imposées dans d'autres cas.
Recommandations du CEE datées le 26 janvier 2016
Le CEE a recommandé que le commissaire de la GRC, en vertu de l'alinéa 45.16(2)b) de la Loi sur la GRC, accueille l'appel en ce qui concerne la conclusion de l'intimé selon laquelle l'allégation no 2 avait été établie, vu les omissions importantes et déterminantes ayant été commises dans le rapport de décision, et qu'il rende la conclusion que l'intimé aurait dû rendre. En outre, le CEE a recommandé au commissaire de conclure que l'appelant, dans ses échanges avec les agents du service de police local, avait adopté un comportement agressif susceptible de jeter le discrédit sur la Gendarmerie, contrevenant ainsi à l'article 7.1 du code de déontologie.
Le CEE a aussi recommandé que le commissaire, en vertu de l'alinéa 45.16(3)a) de la Loi sur la GRC, rejette l'appel en ce qui concerne la mesure disciplinaire imposée à l'appelant et qu'il confirme la mesure disciplinaire consistant en une pénalité financière équivalente à sept jours de la solde de l'appelant.
Décision du commissaire de la GRC datée le 30 mars 2016
Le commissaire, ou un délégué, a rendu sa décision dans cette affaire, telle que résumée par son personnel :
[TRADUCTION]
L'appelant interjette appel de la conclusion de l'intimé selon laquelle une allégation de conduite déshonorante, en contravention de l'article 7.1 du code de déontologie de la GRC, a été établie. Il en appelle aussi de la pénalité financière équivalente à sept jours de solde qui a été imposée relativement à cette allégation en vertu du paragraphe 3(1). L'appel est accueilli dans les deux cas en raison d'erreurs importantes et déterminantes. Toutefois, l'arbitre de l'appel en matière de déontologie a conclu que l'allégation de conduite déshonorante avait été établie pour ce qui est du comportement agressif décrit dans l'allégation. Il n'était pas nécessaire d'établir tous les détails de l'allégation, mais il fallait rendre des conclusions à leur égard et déterminer s'ils constituaient une conduite déshonorante. L'arbitre de l'appel en matière de déontologie a réduit la pénalité financière à trois jours de solde.
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