C-012 - Décision d’une autorité disciplinaire
En juillet 2014, l'appelant et d'autres membres ont arrêté deux personnes (GS et JO) pour trafic de drogue. Une perquisition a également été menée dans leur résidence. GS et JO se sont vu chacun saisir une somme d'argent. Les deux sommes d'argent ont été remises à l'appelant, qui agissait à titre de responsable des pièces à conviction de l'enquête. En mai 2015, GS s'est présentée au détachement et a demandé à récupérer son argent, mais la Gendarmerie n'a pas été en mesure de le trouver. Lorsque l'appelant a été interrogé, il n'a pu donner plus de précisions sur les pièces à conviction manquantes, même si ses notes indiquaient que les sommes d'argent lui avaient été confiées. L'appelant a fait l'objet d'une enquête relative au code de déontologie pour avoir omis de s'occuper et de rendre compte dûment de l'argent qui lui avait été confié. L'autorité disciplinaire a conclu que l'allégation était établie et a imposé une réprimande ainsi que la confiscation de sept (7) jours de solde. L'appelant a seulement interjeté appel des mesures disciplinaires imposées.
L'appelant soutenait que la décision de l'autorité disciplinaire contrevenait aux principes d'équité procédurale, puisqu'elle ne comprenait pas de motifs justifiant le choix des mesures disciplinaires imposées. Il a aussi fait valoir que les mesures disciplinaires imposées contrevenaient aux principes de la parité des peines et ne respectaient pas ceux énoncés dans le Guide des mesures disciplinaires.
Conclusions du CEE
Le CEE a conclu que l'obligation de fournir des motifs écrits s'appliquait aux cas en matière de déontologie de la Gendarmerie et s'étendait non seulement aux motifs invoqués pour conclure qu'une ou plusieurs allégations ont été établies, mais aussi aux motifs justifiant l'imposition d'une mesure disciplinaire donnée. Puisque l'intimé n'avait fourni aucun motif justifiant les mesures disciplinaires imposées, le CEE a conclu qu'il s'agissait d'un manquement à l'équité procédurale. Par ailleurs, contrairement à ce qu'avançait l'appelant, le CEE a déclaré que les mesures disciplinaires à son égard n'avaient pas été imposées trop tardivement, puisque le point de départ pour se pencher sur la question du retard est le moment où l'employeur prend connaissance de la conduite de l'employé et non celui où la violation a été commise.
Le CEE a conclu que l'intimé, au moment d'imposer les mesures disciplinaires à l'appelant, n'avait pas appliqué le critère à trois volets prévu par la Politique sur la déontologie et le Guide des mesures disciplinaires de la Gendarmerie. Puisque l'intimé n'a fourni aucun motif, le commissaire n'a pas à faire preuve de retenue à l'égard des mesures disciplinaires imposées par l'intimé et peut faire sa propre évaluation quant aux mesures disciplinaires à imposer.
Recommandations du CEE datées 2 août 2016
Le CEE a recommandé au commissaire de la GRC d'accueillir l'appel en ce qui concerne les mesures disciplinaires imposées à l'appelant par l'intimé. En outre, le CEE a recommandé au commissaire d'imposer une réprimande écrite à l'appelant relativement à l'allégation ainsi qu'à la conduite de celui-ci, soit d'avoir omis de s'occuper et de rendre compte dûment de l'argent qui lui avait été confié dans l'exercice de ses fonctions, contrairement à l'article 4.4 du code de déontologie.
Décision du commissaire de la GRC datée le 21 février 2017
Le commissaire, ou un délégué, a rendu sa décision dans cette affaire, telle que résumée par son personnel :
[TRADUCTION]
L'appelant était chargé de traiter les pièces à conviction lors d'une enquête sur la drogue, notamment deux sacs de pièces à conviction contenant, en tout, 660 $ saisis sur deux suspects. Après la procédure pénale, l'une des suspects a tenté de récupérer l'argent ayant été saisi sur elle. Les deux pièces à conviction avaient été confiées à l'appelant, mais elles n'ont pu être retrouvées, l'appelant ne se souvenait pas de s'en être occupé et aucun document n'indiquait comment elles avaient été traitées. Une enquête relative au code de déontologie n'a pas établi que l'appelant avait agi de façon malhonnête, mais elle a démontré qu'il n'avait pas traité les pièces à conviction conformément aux politiques. L'intimé a conclu que l'appelant avait omis de s'occuper et de rendre compte dûment de l'argent qui lui avait été confié dans l'exercice de ses fonctions, ce qui contrevenait à l'article 4.4 du code de déontologie. L'intimé lui a imposé des mesures disciplinaires, à savoir une réprimande et la confiscation de sept jours de solde.
L'appelant a assumé la responsabilité de ses actes et accepté la décision de l'intimé selon laquelle une contravention au code de déontologie avait été établie. Il a interjeté appel des mesures disciplinaires au motif que la confiscation de la solde était une mesure nettement excessive et que le libellé de la réprimande était inapproprié.
L'arbitre de l'appel en matière de déontologie a conclu que l'intimé n'avait pas motivé les mesures disciplinaires imposées. L'appel a été accueilli parce que la décision quant aux mesures disciplinaires était manifestement déraisonnable et qu'il y avait eu manquement à l'équité procédurale. L'arbitre a déclaré que les mesures disciplinaires devaient être déterminées au moyen d'un processus en quatre étapes :
- Établir l'éventail des mesures disciplinaires recommandées qui figurent dans le Guide ou le Guide abrégé en fonction de la gravité de l'inconduite;
- Déterminer les circonstances aggravantes ou atténuantes;
- Tenir compte de mesures éducatives et correctives plutôt que punitives, le cas échéant;
- Imposer des mesures disciplinaires en fonction de la gravité de l'inconduite dans le contexte du milieu policier.
L'arbitre a imposé les mesures disciplinaires suivantes : la confiscation de deux jours de solde; l'obligation de suivre une formation (sur le traitement des pièces à conviction); l'obligation de suivre un programme ou d'exercer une activité (l'appelant étudiera la politique sur le traitement des pièces à conviction); et une réprimande. L'arbitre a reconnu que le libellé de la réprimande n'était pas suffisamment détaillé pour mettre la réprimande en contexte et a ordonné que l'ensemble du rapport de décision de l'intimé soit considéré comme le libellé de la réprimande.