C-029 - Décision d'une autorité disciplinaire

L’appelante et son mari étaient tous deux membres de la GRC travaillant à des lieux différents dans la Division « X ». L’appelante a eu des relations sexuelles avec un sergent d’état-major qui était son supérieur et avec qui elle avait travaillé sur un dossier délicat . La liaison a duré plusieurs mois avant qu’elle soit découverte et signalée à un inspecteur. La GRC a intenté des procédures déontologiques contre l’appelante et le sergent d’état-major avec qui elle avait eu une liaison. Le dossier soumis au CEE ne contenait pas d’information sur l’issue de la procédure déontologique intentée contre le sergent d’état-major.

L’appelante était visée par trois allégations. Premièrement, elle avait eu une relation [Traduction] « amoureuse » avec un supérieur, en contravention de l’article 7.1 du code de déontologie. Deuxièmement, elle avait enfreint la politique sur les conflits d’intérêts de la GRC en ne signalant pas rapidement cette relation de nature sexuelle, en contravention de l’article 8.1 du code de déontologie. Troisièmement, elle avait consommé de l’alcool dans un immeuble de la Gendarmerie, en contravention de l’article 7.1 du code de déontologie. Après que l’appelante a présenté ses observations et participé à une rencontre disciplinaire au cours de laquelle elle a confirmé les allégations, l’intimée a conclu que les allégations avaient été établies. Elle a imposé les mesures disciplinaires suivantes à l’appelante : une réduction de 160 heures de la banque de congés annuels pour l’allégation no 1, une pénalité financière équivalente à 40 heures de solde pour l’allégation no 2 et une réprimande pour l’allégation no 3. Elle lui a aussi imposé d’autres mesures disciplinaires, à savoir une période d’inadmissibilité à toute promotion et l’obligation de suivre une formation et d’assister à des séances de consultation et de traitement. L’intimée s’est dite particulièrement préoccupée par la nature répétitive de l’inconduite de l’appelante ainsi que par le fait qu’elle allait à l’encontre de directives clairement établies et qu’elle avait mis une enquête en péril.

Conclusions du CEE

Le CEE a examiné tous les arguments de l’appelante en appel et a conclu que l’intimée n’avait ni contrevenu à un principe d’équité procédurale, ni commis une erreur de droit, ni commis une erreur de fait manifeste et dominante. Premièrement, aucune des objections de l’appelante quant aux prétendus manquements à l’équité procédurale n’a été soulevée à la première occasion, soit avant et parfois bien avant que l’intimée rende sa décision. En outre, il était difficile d’établir si certains des prétendus gestes pouvaient tout simplement être considérés comme inéquitables sur le plan procédural. Deuxièmement, l’intimée n’a pas commis d’erreur en fondant les allégations no 1 et 2 sur les articles 7.1 et 8.1 du code de déontologie, respectivement. Il ressortait clairement du code de déontologie et du Guide des mesures disciplinaires de la GRC que les articles 7.1 et 8.1 s’appliquaient dans les circonstances. De plus, l’intimée n’a pas enfreint la règle interdisant les [Traduction] « allégations multiples » en traitant la relation inappropriée de l’appelante en milieu de travail en formulant deux allégations au lieu d’une seule, car celles-ci portaient sur différents types d’inconduite et devaient être examinées différemment. Troisièmement, la décision de l’intimée ne contenait pas d’erreur de fait manifeste et dominante. Les points de vue de l’appelante selon lesquels les membres de la GRC ne devraient pas avoir à signaler leurs liaisons extraconjugales en milieu de travail ni à connaître les textes officiels applicables de la GRC ne constituaient pas des motifs acceptables pour modifier la décision. En outre, les périodes énoncées dans les allégations ne posaient pas problème. Enfin, l’intimée a appliqué le bon critère pour ordonner l’imposition des mesures disciplinaires, et les pénalités financières qu’elle a décidé d’imposer étaient parmi les moins sévères, sinon les moins sévères, dans les éventails applicables prévus par le Guide des mesures disciplinaires de la GRC.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé que l’appel soit rejeté.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 10 janvier 2020

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

Je n’ai aucun doute que l’intimée a dénaturé la preuve, mal interprété la Politique sur les relations interpersonnelles en milieu de travail et mal appliqué les commentaires figurant dans la section « Inconduite sexuelle » de la partie « Conduite déshonorante » du Guide des mesures disciplinaires (GMD). D’abord, l’article 1 confirme effectivement que le code de déontologie énonce les responsabilités et la norme de conduite de tous les membres, qu’ils soient ou non en service. De plus, l’intimée n’a pas expliqué comment la relation consensuelle [Traduction] « risquait considérablement d’engager la responsabilité civile de la GRC ». L’appelante n’était ni une supérieure ni une personne en situation d’autorité dans le contexte de sa relation avec le sergent d’état-major. Elle a [Traduction] « manqué à » son obligation de signaler la relation, mais c’est précisément ce sur quoi porte l’allégation no 2. Enfin, l’intimée, en invoquant les commentaires de la partie « Conduite déshonorante » du GMD (pages 65-67), notamment le résumé de la décision du comité d’arbitrage dans le dossier Officier compétent de la Division « X » et s.é.-m. « X », 11 D.A. (4e) 327 et les remarques incidentes formulées par le comité d’arbitrage, fait complètement abstraction du fait que le sous-titre de la partie du GMD s’intitule « Abus de pouvoir (relation intime) » et que l’analyse et les dossiers portent tous sur des supérieurs abusant de leur situation d’autorité pour établir une relation avec un subordonné qui donne lieu à une « relation inappropriée », qu’elle soit consensuelle ou non. Le GMD n’impose aux membres aucune autre interdiction que celles prévues par la Loi sur la GRC, le code de déontologie et la Politique sur les relations interpersonnelles en milieu de travail, et le critère de conduite déshonorante exige certainement plus qu’un sens moral subjectif si le milieu de travail n’a pas été perturbé ou qu’aucune loi ou politique n’a été violée. L’appel est accueilli en partie. L’allégation no 1 est jugée non établie et l’intimée doit restituer sans délai 160 heures de congés annuels.

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2022-09-13