C-037 - Décision d’un comité de déontologie

En juin 2012, [Y], un citoyen, a rencontré [X] à son institution financière pour y retirer de l'argent afin de payer ses frais juridiques liés à une accusation criminelle. En tant qu'ancien agent de la GRC, [X] a dit à [Y] qu'il pourrait peut-être l'aider et lui a demandé de lui apporter tous ses documents sur son accusation criminelle portée par la GRC. Le lendemain, [X] a donc examiné les documents fournis par [Y] et lui a dit qu'il lui en coûterait 5 000 $ pour [traduction] « faire disparaître l'affaire ». [Y] a négocié le prix à 3 500 $, qu'il paierait en trois versements.

Le 28 juin 2012 ou vers cette date, [X] a appelé l'intimé, son ami et ancien camarade de troupe qui travaillait ce jour-là, et lui a demandé s'il pouvait rencontrer [Y]. [X] a indiqué qu'un de ses amis avait été arrêté et était prêt à payer pour faire disparaître les accusations. À leur arrivée, [X] s'est assis sur le siège passager du véhicule de police de l'intimé. [X] a demandé à l'intimé de [Traduction] « faire des recherches sur le gars pour voir si on peut avoir de l'argent ». L'intimé a interrogé le Centre d'information de la police canadienne (CIPC) et le système PRIME sur son poste de travail mobile en vue d'obtenir des renseignements sur [Y]. Il a indiqué à [X] qu'il ne pouvait rien faire et a dit à [Y], qui s'était approché du véhicule de police, de retenir les services d'un avocat pour répondre aux accusations de conduite avec facultés affaiblies. Plus tard à une date non précisée, l'intimé a envoyé un message texte à [X] pour lui demander [traduction] « qu'est-ce qui se passe avec l'argent? ».

En mars 2013, [X] a rencontré [Y] et lui a dit que les policiers l'arrêteraient d'un jour à l'autre, car ils avaient des preuves montrant qu'il ne respectait pas les conditions que lui avait imposées le tribunal. [X] a demandé à [Y] de lui donner 7 000 $ pour éviter son arrestation. [Y] a fait part de la situation à la GRC, ce qui a mené le Groupe anticorruption (GAC) de la GRC à lancer une enquête criminelle sur [X]. Au cours de l'enquête, les enquêteurs ont appris que l'intimé avait joué un rôle dans le plan fomenté par [X] pour soutirer de l'argent d'[Y]. Le supérieur de l'intimé a été informé de l'implication possible de celui-ci, mais a attendu que l'enquête du GAC soit terminée avant de lancer une enquête déontologique. Le 15 novembre 2014, [X] a été arrêté pour fraude et extorsion ainsi que pour avoir prétendu faussement être un policier. Plus tard au cours de la journée, l'intimé a été arrêté pour fraude et abus de confiance. Lors de son arrestation, il a admis avoir fait les recherches sur [Y] sur son poste de travail mobile, mais il a nié avoir reçu de l'argent à cette fin et déclaré qu'il ne savait pas qu'[Y] avait déjà payé [X] lorsqu'il avait été mêlé à l'affaire.

L'intimé a fait l'objet de trois allégations relatives à l'accès aux bases de données policières et à l'utilisation abusive d'une voiture de patrouille pour des raisons sans rapport avec ses fonctions. Un processus déontologique a été engagé et l'appelante a demandé le congédiement de l'intimé. Ce dernier a reconnu la véracité des trois allégations et le comité de déontologie a conclu que chacune des allégations avait été établie. Toutefois, après une audience d'une journée sur les mesures disciplinaires, le comité de déontologie n'a pas ordonné le congédiement de l'intimé. Il a plutôt imposé une réprimande, la confiscation de cinq jours de solde et une réduction de la banque de congés annuels de cinq jours pour chaque allégation, respectivement.

L'appelante a interjeté appel des mesures disciplinaires imposées et demandé que l'intimé soit congédié. Elle a soulevé trois motifs d'appel : 1) le comité de déontologie ne s'est pas penché sur la gravité de l'inconduite; 2) il s'est contredit sur ses conclusions quant à savoir si l'intimé était au courant du plan fomenté par [X] pour soutirer de l'argent; 3) il n'a pas appliqué le critère de la personne raisonnable pour conclure que l'intimé ne devait pas être congédié.

Conclusions du CEE

Le CEE a d'abord conclu que le comité de déontologie avait manifestement tenu compte de la gravité de l'inconduite et indiqué qu'il s'agissait effectivement d'une inconduite grave. Toutefois, le comité de déontologie a souligné que ses conclusions se limitaient aux allégations décrites dans l'avis d'audience. Il a expliqué qu'aucune autre inconduite n'était reprochée et qu'aucune preuve d'une autre inconduite n'avait été présentée. Le CEE a conclu qu'une partie ne pouvait pas simplement s'opposer au poids accordé à la preuve; elle doit démontrer que le comité de déontologie a commis une erreur manifeste et déterminante dans son appréciation de la preuve.

Le CEE a ensuite conclu que le comité de déontologie ne s'était pas contredit parce qu'il avait d'abord conclu que l'intimé savait qu'[X] souhaitait soutirer de l'argent d'[Y]; toutefois, le comité de déontologie a ensuite conclu que l'intimé ne savait pas ce qu'[X] prévoyait faire exactement avec les renseignements du CIPC. Aucune preuve du contraire n'a été présentée au comité de déontologie. Selon le CEE, les deux conclusions n'étaient pas inconciliables.

Enfin, le CEE a conclu que le critère de la personne raisonnable soulevé par l'appelante sert à établir le bien-fondé d'une allégation de comportement scandaleux. Il ne sert pas à déterminer la mesure disciplinaire à imposer. Le CEE a conclu que le comité de déontologie avait appliqué le bon critère juridique et examiné la mesure disciplinaire appropriée.

Recommandation du CEE

Le CEE a recommandé à la commissaire de rejeter l'appel et de confirmer les mesures disciplinaires imposées par le comité de déontologie.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 4 septembre 2020

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

La commandante de la Division « Z » et autorité disciplinaire (l'appelante) a fait appel des mesures disciplinaires qu'un comité de déontologie de la GRC a imposées après avoir conclu que trois allégations de conduite déshonorante visant le membre en cause (l'intimé) avaient été établies. Ces allégations découlent de l'utilisation non autorisée de matériel et de renseignements par l'intimé et de la communication non autorisée de ces renseignements. Pour chaque allégation, le comité de déontologie a imposé une réprimande ainsi que la confiscation de cinq jours de solde et une réduction de la banque de congés annuels de cinq jours. L'appelante fait appel de la décision du comité de déontologie au motif qu'elle est entachée d'une erreur de droit et qu'elle est manifestement déraisonnable.

Puisqu'il n'a relevé aucune erreur manifeste ou déterminante dans la décision du comité de déontologie, le CEE a recommandé que l'appel soit rejeté.

La commissaire a accepté la recommandation du CEE. L'appelante n'a pas établi que le comité de déontologie avait commis des erreurs susceptibles de révision. La commissaire a rejeté l'appel et confirmé les mesures disciplinaires imposées par le comité de déontologie.

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