C-047 - Décision d'un comité de déontologie

Mme X a subi de la violence exercée par son petit ami, et la GRC est intervenue. Son petit ami a été arrêté, mais a été libéré le lendemain sous conditions et sous promesse de comparaître. L'une des conditions était qu'il ne communique pas avec Mme X. Le lendemain de sa libération, il a envoyé un message texte à Mme X. Celle-ci a appelé la GRC, et l'appelant a été dépêché chez elle pour un [traduction] « dossier de violation ». Mme X a montré des photos de ses blessures à l'appelant ainsi qu'une photo inappropriée, par inadvertance. L'appelant lui a ensuite montré une photo [traduction] « explicite » de lui-même. Au cours des jours qui ont suivi, Mme X et l'appelant se sont échangés des messages textes. Ces messages étaient de nature sexuelle. Après deux jours, l'appelant a envoyé un message texte à Mme X pour lui dire qu'ils ne devraient pas s'envoyer de messages et que ces échanges pourraient compromettre sa carrière. Plus tard, Mme X a envoyé un message texte à l'appelant pour lui dire que son petit ami avait encore enfreint les conditions lui ayant été imposées, qu'elle avait peur de lui et qu'elle voulait que l'appelant se rende à son appartement. L'appelant, qui n'était pas en service, lui a dit de se rendre en lieu sûr et d'appeler la police.

Mme X a dû comparaître au tribunal relativement à l'accusation de violence portée contre son ex-petit ami. Elle a rencontré le procureur de la Couronne et lui a dit qu'un agent de la GRC lui avait montré des photos inappropriées de lui et qu'il lui envoyait des messages textes de nature sexuelle. Le procureur de la Couronne a appris le nom de l'appelant et s'est plaint à l'officier hiérarchique de ce dernier. Les accusations portées contre le petit ami de Mme X ont dû être abandonnées en raison des gestes de l'appelant. Une enquête déontologique a été ordonnée sur l'appelant concernant trois allégations :

  1. Avoir eu une conduite déshonorante en montrant une photo explicite de lui à Mme X et en échangeant avec elle des messages textes inappropriés de nature sexuelle et personnelle, en contravention de l'article 7.1;
  2. Avoir créé des conflits d'intérêts réels, apparents ou potentiels entre ses responsabilités professionnelles et ses intérêts personnels en raison de communications inappropriées de nature sexuelle et personnelle avec Mme X, en contravention de l'article 6.1;
  3. Ne pas avoir exercé ses fonctions avec diligence et ne pas avoir pris les mesures appropriées afin de prêter assistance à Mme X, en contravention de l'article 4.2.

Il n'y a pas eu d'audience, et le comité de déontologie a refusé d'entendre des témoins. L'appelant a présenté une réponse aux allégations dans laquelle il a confirmé certains des détails de l'allégation no 1, tout en niant les allégations nos 2 et 3. Le comité de déontologie a tenu trois conférences préparatoires pour traiter des questions préliminaires. Toutefois, il a rendu une décision sur le fond des allégations alors que les parties attendaient une décision sur la question de savoir si Mme X témoignerait et si elle était une [traduction] « personne vulnérable ». Aucune des parties n'avait présenté d'observations sur le fond des allégations. À l'étape des mesures disciplinaires, les deux parties ont présenté des observations. Le comité de déontologie a conclu qu'il n'avait pas besoin d'entendre de témoins parce qu'il n'y avait pas de preuves contradictoires. Comme l'appelant avait admis avoir montré une photo explicite à Mme X, le comité de déontologie a conclu que l'allégation no 1 avait été établie. Il a déclaré que l'allégation no 2 reprenait l'allégation no 1 et a donc conclu qu'elle n'avait pas été établie. Enfin, il a conclu que l'allégation no 3 avait été établie. Il a ordonné à l'appelant de démissionner, sans quoi il serait congédié; il a aussi ordonné une confiscation de 15 jours de solde.

Conclusions du CEE

Le CEE a conclu que le comité de déontologie avait porté atteinte au droit à l'équité procédurale de l'appelant en ne tenant pas d'audience en l'espèce. Bien qu'il ait déclaré qu'une audience n'était pas nécessaire dans tous les cas, l'équité procédurale exigeait qu'il y en ait une en l'espèce. Plus particulièrement, une audience était nécessaire en l'espèce parce que l'appelant avait nié certaines allégations et que la représentante des autorités disciplinaires avait soulevé la question de la crédibilité de l'appelant. Le CEE a aussi conclu que le comité de déontologie avait porté atteinte au droit à l'équité procédurale des deux parties en rendant une décision sur le fond sans d'abord les inviter à présenter leurs observations.

Recommandations du CEE

Le CEE a recommandé que l'appel soit accueilli et qu'une nouvelle audience soit ordonnée dans l'affaire.

Décision de la commissaire de la GRC datée le 8 septembre 2021

La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :

[Traduction]

Le comité de déontologie a ordonné le congédiement de l'appelant pour sa conduite déshonorante et a ajouté une confiscation de 15 jours de solde parce qu'il n'avait pas exercé ses fonctions. L'appelant soutient que les mesures disciplinaires imposées étaient déraisonnables et excessivement punitives, que le comité de déontologie a fait preuve de partialité dans son processus décisionnel et que celui-ci n'a pas permis de débattre du fond des allégations. Le comité de déontologie aurait aussi dû donner à l'appelant la possibilité de vérifier des affirmations par contre-interrogatoire et de présenter des observations complètes sur le fond des allégations. À l'instar du CEE, je conclus que le comité de déontologie a contrevenu aux principes d'équité procédurale en n'informant pas les parties de son intention de rendre une décision sur le fond sans tenir d'audience ou sans obtenir d'autres observations écrites; en ne permettant pas aux parties de vérifier la crédibilité de Mme X par témoignage direct et contre-interrogatoire; et en ne donnant pas à l'appelant la possibilité de présenter des observations détaillées sur les allégations et la preuve. En vertu de l'alinéa 45.16(1)b) de la Loi sur la GRC, j'accueille l'appel et j'ordonne la tenue d'une nouvelle audience devant un comité de déontologie constitué différemment.

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