C-053 - Décision d'un comité de déontologie
Au cours d’un programme dirigé par la GRC, l’appelant a répondu à un appel de service d’une femme âgée qui souhaitait remettre une arme à feu. L’appelant a conservé l’arme à feu remise par la femme âgée et a présenté un rapport de police faux et trompeur sur ce qu’il avait fait. Une enquête a été ordonnée, au cours de laquelle l’enquêteur s’est rendu au domicile de l’appelant et lui a remis une [traduction] « ordonnance de restitution d’articles ». L’appelant lui a donc montré l’arme à feu. Il a plaidé coupable et a été déclaré coupable de possession d’une arme à feu prohibée sans certificat d’enregistrement valide, infraction prévue au Code criminel. En examinant les dossiers de l’appelant, son supérieur a pris connaissance d’une situation semblable qui s’était produite un an auparavant. Dans cette autre affaire, l’appelant avait encore une fois conservé l’article et rédigé un rapport de police faux et trompeur. Neuf allégations ont été portées contre lui, dont : s’être comporté de manière à jeter le discrédit sur la Gendarmerie, en contravention de l’article 7.1 du code de déontologie; ne pas avoir agi avec intégrité et avoir abusé de son autorité, de son pouvoir et de sa position, en contravention de l’article 3.2; ne pas avoir présenté de comptes rendus en temps opportun, de manière exacte et détaillée, en contravention de l’article 8.1; ne pas avoir dûment rendu compte des biens qui lui avaient été confiés, en contravention de l’article 4.4.
Avant le début de l’audience disciplinaire, l’appelant a déposé une requête en exclusion de preuve en application du paragraphe 24(2) de la Charte des droits et libertés (la Charte). Il soutenait que l’enquêteur avait violé ses droits garantis par l’article 8 (fouilles, perquisitions et saisies illégales) de la Charte lorsqu’il lui avait signifié l’ordonnance de restitution d’articles (l’ordonnance). Le comité de déontologie a accueilli la requête et exclu tous les éléments de preuve obtenus en vertu de l’ordonnance. L’audience devant le comité de déontologie a duré trois jours. L’appelant ne contestait pas certains des faits, mais contestait leur interprétation. Le comité de déontologie a conclu que cinq allégations avaient été établies, puis en a retiré une avec le consentement des parties. Au terme d’une audience sur les mesures disciplinaires, le comité de déontologie a ordonné à l’appelant de démissionner, sans quoi il serait congédié.
En appel, l’appelant a fait valoir que le comité de déontologie avait présenté des motifs contradictoires en concluant que des éléments de preuve devaient être exclus de l’audience disciplinaire vu leur obtention en violation de ses droits garantis par la Charte, tout en se penchant simultanément sur la procédure criminelle se rapportant à ces mêmes éléments de preuve. De plus, le comité de déontologie s’était fondé sur des éléments de preuve exclus pour rendre ses conclusions. L’appelant affirmait aussi que le comité de déontologie avait commis une erreur de droit en déclarant qu’il était lié par les conclusions du juge de la Cour provinciale. Il a également fait valoir que le comité de déontologie avait violé son droit à l’équité procédurale en ne citant pas la femme âgée comme témoin. Enfin, l’appelant soutenait que le comité de déontologie ne pouvait pas conclure que l’allégation no 8 (rédiger un faux rapport) avait été établie tout en concluant que l’allégation no 7 (vol d’une arme de poing) ne l’avait pas été.
Conclusions du CEE
Le CEE a conclu que le comité de déontologie n’avait pas présenté de motifs contradictoires en invoquant les conclusions de la cour criminelle. Il a conclu que le plaidoyer de culpabilité de l’appelant ne constituait pas une preuve dérivée de la violation de la Charte. Le CEE, en application du principe de la chose jugée ou de la remise en cause, a conclu que le comité de déontologie n’avait commis aucune erreur de droit en indiquant qu’il était lié par les conclusions du juge de la Cour provinciale. Il a aussi conclu que le comité de déontologie jouissait d’une grande latitude dans la façon de tenir l’audience et qu’il n’avait pas violé le droit de l’appelant à l’équité procédurale en refusant de citer la femme âgée comme témoin, car il n’y avait pas de conflit à résoudre dans la preuve présentée par le témoin. Enfin, le CEE a conclu que le comité de déontologie n’avait pas été manifestement déraisonnable en concluant que l’allégation no 8 avait été établie, puisqu’elle portait essentiellement sur la rédaction d’un faux rapport tandis que l’allégation no 7 portait essentiellement sur un vol.
Recommandation du CEE
Le CEE a recommandé que l’appel soit rejeté.
Décision de la commissaire de la GRC datée le 8 avril 2022
La commissaire a rendu la décision suivante, telle que résumée par son personnel :
[Traduction]
L’appelant était visé par neuf allégations fondées sur divers articles du code de déontologie de la GRC pour avoir abusé du programme d’amnistie sur les armes à feu afin de prendre possession d’une arme à feu prohibée.
Après que son supérieur a pris connaissance de l’affaire, une autre enquête a dévoilé un deuxième incident où il avait abusé du programme d’amnistie sur les armes à feu et un troisième incident où il n’avait pas dûment rendu compte d’éléments de preuve.
L’appelant a contesté les neuf allégations. Un comité de déontologie a conclu que six des neuf allégations avaient été établies, puis en a exclu une en vertu du principe de l’arrêt Kienapple et a ordonné à l’appelant de démissionner dans les 14 jours, sans quoi il serait congédié de la Gendarmerie. L’appelant a fait appel de cette décision.
En appel, l’appelant a fait valoir que le comité de déontologie s’était fondé à tort sur une preuve dérivée ayant été exclue en raison d’une violation de la Charte, qu’il avait commis une erreur de droit en concluant qu’il était lié par une condamnation au criminel pour possession d’une arme à feu prohibée, qu’il avait contrevenu aux principes d’équité procédurale en refusant d’autoriser le contre-interrogatoire d’un témoin important et qu’il avait imposé une mesure disciplinaire manifestement déraisonnable qui contrevenait au principe de la parité.
L’appel a été renvoyé pour examen devant le Comité externe d’examen de la GRC (CEE). Le CEE a conclu que le comité de déontologie n’avait pas commis d’erreur en admettant la preuve, ni contrevenu aux principes applicables d’équité procédurale, ni commis d’erreur de droit, ni rendu une décision manifestement déraisonnable.
L’arbitre a conclu que la décision du comité de déontologie était étayée par le dossier et a conclu, tout compte fait, que le congédiement était une mesure disciplinaire proportionnée en l’espèce. L’appel a été rejeté.