D-053 - Décision d'un comité d'arbitrage

À deux reprises au cours d'une période de 13 mois, un membre s'était rendu chez un autre membre, une collègue à laquelle il avait été affecté afin de l'aider parce qu'elle avait des problèmes de rendement. Les deux fois, le membre était entré dans la résidence et la chambre à coucher de sa collègue, sans y être invité, et l'avait trouvée au lit. La première fois, la collègue avait été mal à l'aise, mais elle n'avait rien dit au membre; ils avaient discuté de questions professionnelles, puis le membre était parti. La deuxième fois, après qu'ils eurent quitté la chambre à coucher et comme ils étaient dans la cuisine, le membre avait touché sa collègue au cou, pendant quelques secondes. Alors qu'ils partageaient le même poste de travail plus tard dans la soirée, le membre avait parlé à sa collègue, il avait découvert qu'elle avait été quelque peu offensée par ses actes, il s'était excusé et lui avait certifié que cela ne se reproduirait plus.

La collègue a mentionné à un chef de veille les deux incidents où le membre était entré chez elle et dans sa chambre sans y être invité, mais elle lui a dit qu'elle ne voulait pas une enquête officielle, car elle avait décidé de régler les choses elle-même. L'affaire a été signalée plus tard. Une enquête a donné lieu à quatre allégations de comportement scandaleux, et une audition a été tenue.

Le comité d'arbitrage a conclu que deux allégations de comportement scandaleux avaient été établies. Il a jugé que le membre avait abusé d'une situation à son profit. Il a déterminé que la collègue avait été victime de harcèlement sexuel, mais il a refusé de conclure à un manquement à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Il a ordonné au membre de démissionner. Le membre a interjeté appel de la décision du comité d'arbitrage selon laquelle son comportement équivalait à un comportement scandaleux, ainsi que de la peine infligée.

Le 23 décembre 1997, le CEE a émis ses conclusions et recommandations. En premier lieu, le Comité a examiné deux questions préliminaires. Dans ses arguments exposés en appel, le membre a noté que le comité d'arbitrage avait fait des commentaires, dans sa décision, sur sa plainte relative à l'influence indue exercée sur des témoins par des membres haut placés du détachement; le comité d'arbitrage avait demandé que le commandant divisionnaire soit informé de la plainte. Le membre a indiqué que le comité d'arbitrage avait ordonné la production d'un rapport relativement à la plainte, et demandé au Comité de n'examiner l'appel qu'après réception de ce rapport. Le Comité a constaté qu'aucun rapport n'avait été ordonné, puisque le comité d'arbitrage avait été convaincu que les témoins avaient rendu un témoignage sincère. Par conséquent, il a refusé d'attendre un tel rapport. En second lieu, il a jugé qu'un croquis de la maison de la collègue n'était pas admissible dans l'appel, et il a recommandé au commissaire de ne pas en tenir compte.

Quant au bien-fondé de la conclusion de comportement scandaleux à laquelle le comité d'arbitrage était arrivé, le Comité a conclu que la décision de ce dernier selon laquelle le membre avait abusé de son pouvoir sur sa collègue pour un motif [TRADUCTION] « loin d'être pur » était au coeur de sa conclusion de comportement scandaleux. Le Comité a examiné la politique de la GRC sur le harcèlement et conclu que, pour constituer du harcèlement sexuel, le comportement doit viser des fins sexuelles et donner lieu à l'une ou l'autre des perceptions suivantes : a) il est raisonnable de penser qu'il puisse choquer ou humilier un employé, ou b) il peut raisonnablement être interprété comme assujettissant un emploi à des conditions d'ordre sexuel.

Le Comité a déterminé qu'aucune preuve n'étayait la conclusion selon laquelle le membre avait abusé de son pouvoir à des fins sexuelles. Il a jugé que le comité d'arbitrage avait commis une erreur en décidant que l'appelant avait abusé de son poste et des relations de travail. Néanmoins, il a conclu que le comportement du membre pouvait appartenir à la première catégorie de comportement équivalant à du harcèlement sexuel, parce qu'on pouvait en déduire une fin sexuelle et que le contact non désiré de la collègue avait clairement offensé celle-ci. Il a décidé que le comportement du membre pouvait équivaloir à du harcèlement sexuel, mais qu'il n'était pas d'une nature ou d'une gravité telle qu'il justifiait l'application du Code de déontologie. De toute évidence, les actes du membre étaient inappropriés, mais ils ne constituaient pas un abus de son poste; le membre s'était excusé de son propre gré après avoir réalisé son erreur, et rien ne portait à croire qu'il répéterait son acte. La décision du comité d'arbitrage selon laquelle le comportement était scandaleux ne pouvait être étayée par la preuve, et le Comité a recommandé d'accueillir l'appel pour cette raison.

Le Comité a examiné l'appel de la peine, au cas où le commissaire ne serait pas d'accord quant à la question à savoir si l'allégation de comportement scandaleux pouvait être établie. Il a jugé que la peine infligée, l'obligation de démissionner, était clairement déraisonnable et disproportionnée par rapport au comportement en cause. Le comité d'arbitrage avait estimé, à tort, que le comportement du membre lors d'un incident antérieur pour lequel il avait été discipliné était le même que celui en l'espèce. De plus, le membre avait éprouvé du remords lorsqu'il s'était rendu compte de son erreur il s'était excusé et avait mis fin à son comportement dès qu'il en avait constaté la nature offensante, et la peine avait été infligée abstraction faite de ses excuses, de son remords ou d'autres décisions arbitrales sur la peine dans le contexte du harcèlement sexuel. La décision du comité d'arbitrage selon laquelle le membre était [TRADUCTION] « irrécupérable » n'était pas fondée sur la preuve. Le Comité a recommandé que, si le commissaire rejetait l'appel au motif que l'allégation de comportement scandaleux n'a pas été établi, il devrait l'accueillir pour ce qui est de la peine, et infliger un avertissement et une confiscation de la solde pour cinq jours de travail.

Le 23 juillet 1998, le commissaire a rendu sa décision. Il n'a pas souscrit à la conclusion du Comité externe selon laquelle le comportement n'était pas contraire au Code de déontologie. Toutefois, il a accueilli l'appel à l'égard de la peine et modifié l'ordre de démissionner par une confiscation de la solde pour une période de 10 jours.

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2023-02-27